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20/02/2025 | FRANCE | N°23BX00463

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 4ème chambre, 20 février 2025, 23BX00463


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015.



Par un jugement n° 2101714 du 22 décembre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et des mémoires, respectiv

ement enregistrés les 16 février 2023, 10 août 2023 et 23 octobre 2023, ce dernier non communiqué, M. B..., représenté par M....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015.

Par un jugement n° 2101714 du 22 décembre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, respectivement enregistrés les 16 février 2023, 10 août 2023 et 23 octobre 2023, ce dernier non communiqué, M. B..., représenté par M. C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 22 décembre 2022 ;

2°) de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne fait mention ni de la réponse apportée par l'EURL Instelec 47 à la demande du service de désigner les bénéficiaires des sommes considérées comme distribuées ni des suites données par le service à cette réponse ;

- il soutient que c'est à tort que l'administration a réintégré aux bases imposables de l'EURL Instelec 47 des charges qui étaient déductibles ;

- il ne peut être considéré comme ayant été le bénéficiaire des revenus distribués dès lors qu'il n'a pas perçu ces revenus, qui ont été versés à la société Lendon Electric International SRL, et qu'il n'a jamais été le seul maître de l'affaire de la société Lendon Electric International SRL.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 31 juillet 2023 et ministre de l'économie, des finances, de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 3 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 25 octobre 2023 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lucie Cazcarra,

- et les conclusions de Mme Pauline Reynaud, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a créé en 2008 l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Instelec 47. A l'issue d'une vérification de comptabilité de l'EURL portant sur la période allant du 1er juillet 2012 au 30 juin 2015, l'administration a réhaussé le résultat imposable de l'entreprise et, par une proposition de rectification du 20 décembre 2017, mis à la charge de M. B... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, pour les années 2014 et 2015 en raison de l'intégration dans son revenu imposable de revenus distribués par l'EURL Instelec 47. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement du 22 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2014 et 2015.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ".

3. M. B... fait valoir que la proposition de rectification du 20 décembre 2017 n'est pas suffisamment motivée en ce qu'elle ne l'a pas informé des suites données à la demande adressée à l'EURL Instelec 47 sur l'identité des bénéficiaires des distributions, fondée sur les dispositions de l'article 117 du code général des impôts. Toutefois, M. B... ne peut utilement se prévaloir d'un défaut d'information relatif aux suites données à une demande présentée par le service dans le cadre de la vérification de comptabilité de l'EURL Instelec 47 au soutien de ses conclusions relatives à son imposition personnelle à l'impôt sur le revenu.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

4. Aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ". Aux termes du premier alinéa de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. ". En cas de refus des propositions de rectifications par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire de sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé. Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle.

5. Il résulte de l'instruction, et en particulier de la proposition de rectification adressée à M. B..., que lors de la vérification de comptabilité de l'EURL Instelec 47, la vérificatrice a remis en cause la réalité de charges enregistrées au profit d'une entité roumaine, la société Lendon Electric International SRL, et a considéré que les charges correspondant à la location d'un studio à usage d'habitation en France et à des dépenses de voyage n'étaient pas engagées dans l'intérêt de l'entreprise. En l'absence de production par la société de pièces de nature à justifier ces écritures, l'administration a refusé la déduction des charges comptabilisées du résultat, réhaussé en conséquence le résultat de l'EURL et a considéré que les sommes en cause devaient être regardées comme des revenus distribués au bénéfice de M. B....

En ce qui concerne l'existence des distributions :

6. Il résulte de l'article 39 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, que le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges.

7. En premier lieu, M. B... soutient que l'ensemble des charges enregistrées au profit de la société roumaine étaient déductibles dès lors qu'il justifie de l'existence et de l'activité réelles de cette société, de l'intérêt pour l'entreprise Instelec 47 de la création de la société roumaine qui lui permettait de bénéficier d'un coût de charges sociales et de fournitures à un prix moins élevé pour son activité d'électricité générale et industrielle et de l'intérêt pour les salariés de l'entreprise Instelec 47 de se rendre en Roumanie.

8. D'une part, l'administration fait valoir en défense, sans que cela ne soit contesté par M. B..., que les frais de voyage en Roumanie, réintégrés au titre de l'exercice clos le 30 juin 2013, n'ont pas donné lieu à distribution au nom du requérant. Il s'ensuit que M. B... n'est pas fondé à contester la réintégration des frais de voyage au résultat imposable de l'EURL.

9. D'autre part, si M. B... établit, par les pièces qu'il produit, l'existence juridique de la société Lendon Electric International SRL, il ne justifie pas des commandes de matériel que l'EURL Instelec 47 aurait passées auprès de la société Lendon Electric International SRL alors que la vérificatrice a constaté que la société Lendon Electric International SRL n'avait aucune activité réelle en Roumanie en l'absence de local, de stock et de salarié. Ainsi, lors des opérations de vérification, M. B... n'a pas pu présenter une grande partie des factures justifiant des charges de l'EURL Instelec 47 et cette dernière n'a pu apporter aucune réponse sur son fournisseur roumain au cours du débat oral et contradictoire. Par ailleurs, les factures établies par la société Lendon Electric International SRL pour des prestations réalisées pour l'entreprise Instelec 47 sur les exercices clos en juin 2014 et en juin 2015, produites par M. B..., présentaient de nombreuses anomalies. La vérificatrice a relevé en ce sens que le numéro intracom de l'EURL Instelec 47 et la mention faisant référence à l'exonération de TVA dans le pays de livraison étaient absents, les factures étaient rédigées en français alors que la société à l'origine de la facturation est roumaine, la trame de la facture était très similaire à celle de l'EURL Instelec 47, la numérotation des factures laissait à penser que la société Lendon Electric International SRL n'avait d'échanges commerciaux qu'avec l'EURL Instelec 47 et la date d'édition de certaines factures était très postérieure aux dates de facturation. Enfin, M. B... n'a pu apporter aucun justificatif au service vérificateur en dépit des demandes portant sur la justification de livraison de marchandises et, plus largement, sur la matérialité des flux. Dans ces conditions, les factures produites par M. B... ne suffisent pas à démontrer l'existence du flux physique des marchandises prétendument acquises auprès de la société roumaine, comptabilisées pour un montant de 43 593 euros au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014 et pour un montant de 90 484 euros au titre de l'exercice clos le 30 juin 2015.

10. En second lieu, si M. B... fait valoir l'intérêt pour l'entreprise Instelec 47 de louer un studio en France afin d'héberger à moindre coût les salariés détachés de la société roumaine, il ne produit aucune pièce à l'appui de ses conclusions permettant d'en justifier.

11. Il résulte par conséquent de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à contester la réintégration du montant des charges en litige au résultat imposable de l'EURL Instelec 47, et par suite, l'existence de revenus distribués au sens du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts.

En ce qui concerne l'appréhension des revenus distribués :

12. L'administration a entendu, en ce qui concerne ces revenus distribués, se prévaloir, pour fonder les suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux en litige, de la présomption d'appréhension attachée à la qualité de seul maître de l'affaire, après avoir estimé que cette qualité devait être attribuée à M. B... en raison de sa qualité de gérant et d'associé unique de l'EURL Instelec 47.

13. M. B... soutient qu'il n'a pas été le seul maître de l'affaire de la société Lendon Electric International SRL dès lors que trois gérants se sont succédés. Toutefois, cette circonstance est sans influence sur sa qualité de seul maître de l'affaire de l'EURL Instelec 47, qui n'est pas contestée. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a considéré qu'il devait être regardé comme le bénéficiaire des revenus réputés distribués par l'EURL Instelec 47 au regard des dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. M. B... ne peut, par suite, utilement soutenir qu'il n'aurait effectivement perçu aucune somme.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme au titre des frais liés à l'instance doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 30 janvier 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

Mme Lucie Cazcarra, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 février 2025.

La rapporteure,

Lucie CazcarraLa présidente,

Frédérique Munoz-Pauziès La greffière,

Laurence Mindine

La République mande et ordonne au ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX00463


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX00463
Date de la décision : 20/02/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur ?: Mme Lucie CAZCARRA
Rapporteur public ?: Mme REYNAUD
Avocat(s) : NASSIET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-20;23bx00463 ?
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