Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2021 par lequel le directeur académique des services de l'éducation nationale des Pyrénées-Atlantiques a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de mise à la retraite d'office, ainsi que la décision du 30 août 2021 portant rejet de son recours gracieux formé contre cet arrêté.
Par un jugement n° 2102888 du 26 avril 2023, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 26 juin 2023 et 23 décembre 2024, M. A..., représenté par Me Grimaldi, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 26 avril 2023 du tribunal administratif de Pau ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2021 par lequel le directeur académique des services de l'éducation nationale des Pyrénées-Atlantiques a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire de mise à la retraite d'office, ainsi que la décision du 30 août 2021 portant rejet de son recours gracieux formé contre cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Bordeaux de le réintégrer dans ses fonctions, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, assortie des intérêts au taux légal.
Il soutient que :
- la sanction attaquée est entachée d'un défaut de motivation, en méconnaissance des dispositions du 2° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle a été adoptée à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'en méconnaissance de l'article 8 du décret du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat, le président du conseil de discipline n'a pas mis aux voix les sanctions figurant dans l'échelle des sanctions, en commençant par la plus sévère, jusqu'à ce que l'une recueille l'accord de la majorité des membres ;
- la matérialité des faits qui lui sont reprochés n'est pas établie, alors que lesdits faits ne sont pas circonstanciés, qu'aucune enquête administrative n'a été diligentée, qu'il dispose d'appréciations satisfaisantes, entretient des rapports professionnels avec l'équipe éducative et produit des attestations de soutien ;
- la sanction prononcée, qui relève du quatrième groupe, est, en tout état de cause, disproportionnée.
Par un mémoire enregistré le 6 décembre 2024, le recteur de l'académie de Bordeaux conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Béatrice Molina-Andréo,
- les conclusions de M. Michaël Kauffmann, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., recruté en qualité de professeur des écoles contractuel à compter de la rentrée scolaire 2008-2009, a été titularisé à l'issue de deux années probatoires au grade de professeur des écoles de classe normale. Affecté à l'école Prévert-Labarraque à Oloron-Sainte-Marie à compter de la rentrée scolaire 2020-2021, M. A... a fait l'objet d'une procédure disciplinaire à l'issue de laquelle, par un arrêté du 13 juillet 2021, le directeur académique des services de l'éducation nationale des Pyrénées-Atlantiques a prononcé à son encontre la sanction de mise à la retraite d'office. Ce dernier a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision le 19 août 2021, qui a été rejeté le 30 août 2021. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 26 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2021 et de la décision du 30 août 2021.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) 2° Infligent une sanction ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ". Ces dispositions imposent à l'autorité qui prononce une sanction de préciser, dans sa décision, les griefs qu'elle entend retenir à l'encontre de l'agent concerné, de telle sorte que ce dernier puisse, à la seule lecture de cette décision, connaître les motifs de la sanction qui le frappe.
3. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 13 juillet 2021 vise les textes dont il fait application et l'avis de la commission administrative paritaire départementale, réunie en conseil de discipline, le 29 juin 2021. Il indique par ailleurs les faits reprochés à M. A..., à savoir qu'il rencontre des difficultés relationnelles majeures et récurrentes avec les adultes et les élèves, de nature à générer des incidents graves et répétés susceptibles de perturber gravement le fonctionnement du service public de l'éducation et de porter atteinte à l'intégrité psychologique et physique des élèves. Alors que l'arrêté englobe ainsi l'ensemble des faits reprochés à M. A..., ce dernier a pu suffisamment, à sa seule lecture, connaître les motifs de la sanction lui ayant été infligée et critiquer utilement les griefs retenus à son encontre. Par suite, l'arrêté contesté est suffisamment motivé.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 du décret du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat : " Le conseil de discipline, au vu des observations écrites produites devant lui et compte tenu, le cas échéant, des déclarations orales de l'intéressé et des témoins ainsi que des résultats de l'enquête à laquelle il a pu être procédé, émet un avis motivé sur les suites qui lui paraissent devoir être réservées à la procédure disciplinaire engagée. / A cette fin, le président du conseil de discipline met aux voix la proposition de sanction la plus sévère parmi celles qui ont été exprimées lors du délibéré. Si cette proposition ne recueille pas l'accord de la majorité des membres présents, le président met aux voix les autres sanctions figurant dans l'échelle des sanctions disciplinaires en commençant par la plus sévère après la sanction proposée, jusqu'à ce que l'une d'elles recueille un tel accord. (...) ".
5. Il ressort du procès-verbal de la commission administrative paritaire (CAP) académique réunie en formation disciplinaire le 29 juin 2021 pour donner un avis sur le prononcé d'une éventuelle sanction à l'encontre de M. A..., que l'inspecteur d'académie, directeur académique des services de l'éducation nationale des Pyrénées-Atlantiques, siégeant en qualité de président, a mis aux voix la sanction de mise à la retraite d'office, laquelle a été adoptée à la majorité des membres. La seule circonstance que le président ait, à tort, mis aux voix la sanction de mise à la retraite d'office avant celle de la révocation, alors qu'il était tenu, en application des dispositions précitées du décret du 25 octobre 1984, de commencer par mettre aux voix la sanction la plus sévère, n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, exercé une influence sur le sens de la décision prise, ni privé M. A... d'une garantie. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat dispose que : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe :/- l'avertissement ; / - le blâme. / Deuxième groupe : / la radiation du tableau d'avancement ;/ - l'abaissement d'échelon ; / - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; / - le déplacement d'office. / Troisième groupe : / - la rétrogradation ; / - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans. / Quatrième groupe : / - la mise à la retraite d'office ; / - la révocation. ". Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
7. En quatrième lieu, il ressort notamment du rapport disciplinaire présenté à la séance de la CAP réunie en conseil de discipline le 29 juin 2021, que M. A... rencontre des difficultés relationnelles majeures et récurrentes tant avec les élèves qu'avec ses collègues et sa hiérarchie, depuis le début de sa carrière dans l'éducation nationale. Alors que l'intéressé a déjà fait l'objet, pour le même type de comportement, d'un blâme infligé le 25 mars 2015, il ressort des pièces du dossier que loin de changer son comportement, il a persisté dans le manque de communication et a maintenu un climat de tension anxiogène pour les élèves et l'ensemble de l'équipe pédagogique. Ainsi, un compte-rendu du conseil des maîtres du 6 octobre 2017 souligne que M. A... fait preuve d'une opposition systématique sur tous les sujets abordés et sur chaque intervention des personnes présentes. Ce comportement a d'ailleurs incité, d'une part, la directrice de l'école et une enseignante à rédiger une fiche " santé sécurité au travail " pour signaler le comportement méprisant et le refus de travailler en équipe de M. A... et, d'autre part, les agents territoriaux spécialisés des école maternelles (ATSEM) à solliciter l'appui du maire de la commune d'Oloron Sainte-Marie à raison du comportement récurrent de l'intéressé, symptomatique d'un manque de respect. Un courrier d'une enseignante remplaçante, adressé le 16 février 2018 à l'inspecteur de l'éducation nationale indique, par ailleurs, avoir pu observer un certain nombre de dysfonctionnements du fait de l'attitude de M. A..., lequel en particulier venait de remettre en cause une décision prise lors d'un conseil des maitres du 9 janvier 2018 sans consulter les autres enseignants et en refusant toute discussion en équipe. Par la suite, après deux années d'affectation en zone de remplacement et alors qu'il venait d'être affecté à la rentrée scolaire 2020-2021 à l'école Prévert-Labarraque, M. A... a été convoqué par le directeur de l'école pour un entretien le 13 novembre 2020 à la suite de plaintes de parents d'élèves et de mauvais rapports avec l'ATSEM de l'école. Les courriers des parents font notamment état d'un dénigrement systématique de l'enseignant vis-à-vis de leur enfant, de propos agressifs tenus sans discrétion à leur égard et d'un manque de communication. Dans ce contexte, l'inspecteur de l'éducation nationale a alerté, le 23 novembre 2020, l'inspecteur d'académie, directeur académique des services de l'éducation nationale des Pyrénées-Atlantiques (IA-DASDEN), d'une part, de ces courriers de parents d'élèves se plaignant de la posture de M. A..., d'autre part, d'un courriel du directeur général des services de la commune d'Oloron-Sainte-Marie du 27novembre 2020, faisant état des rapports conflictuels de l'enseignant avec l'ATSEM de l'école, l'informant de la décision de la commune d'affecter une autre ATSEM et joignant audit courriel un rapport d'évènement décrivant des remontrances répétées et des appréciations négatives systématiques de la part de M. A... à l'encontre du travail effectué par l'agent auprès des élèves. A la suite de l'entretien intervenu avec M. A... à la direction des services départementaux de l'éducation nationale des Pyrénées-Atlantiques le 6 janvier 2021, le compte rendu d'entretien rédigé le jour-même et le rapport d'entretien du 1er février 2021 confirment les difficultés relationnelles rencontrées par l'enseignant dans son milieu professionnel et notent le refus de l'intéressé, qui invoque un mal-être au travail, de rencontrer le médecin de prévention ou de solliciter un changement de poste. L'ensemble de ces éléments factuels, dont la matérialité est établie, manifeste un comportement inadapté de M. A... à l'égard de l'ensemble de la communauté éducative, de nature à altérer le bon fonctionnement du service de l'éducation nationale. Dans ces conditions, quand bien même M. A... produit plusieurs attestations en sa faveur, et alors qu'aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe général du droit, n'obligeait l'administration à procéder à une enquête disciplinaire, la matérialité des faits reprochés doit être regardée comme suffisamment établie.
8. Les faits ainsi rappelés sont constitutifs d'un comportement fautif de nature à justifier une sanction disciplinaire. Compte tenu des fonctions exercées par M. A... et des responsabilités dont il se trouvait investi, notamment en termes d'exemplarité et d'irréprochabilité, comme de la gravité et du caractère répété des faits qui lui sont reprochés, et alors que sa hiérarchie l'avait averti et mis en garde à plusieurs reprises au sujet de son comportement et lui avait déjà infligé la sanction disciplinaire du blâme pour des faits de même nature, la sanction de mise à la retraite d'office n'apparait pas disproportionnée.
9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation. Par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
10. Les dispositions de l'article 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, la somme que demande M. A... au titre de ses frais liés à l'instance.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. B... A... et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Copie en sera adressée à la rectrice de l'académie de Bordeaux
Délibéré après l'audience du 12 janvier 2025 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure,
Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 janvier 2025.
La rapporteure,
Béatrice Molina-Andréo
La présidente,
Evelyne Balzamo La greffière,
Stéphanie Larrue
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23BX01722