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11/12/2024 | FRANCE | N°24BX01932

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 6ème chambre, 11 décembre 2024, 24BX01932


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



M. F... B... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler, d'une part, l'arrêté du 18 juin 2024 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans et, d'autre part, l'arrêté du 2 juillet 2024 par lequel cette même

autorité l'a assigné à résidence sur le territoire du département de la Haute-Vienne pour une dur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler, d'une part, l'arrêté du 18 juin 2024 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans et, d'autre part, l'arrêté du 2 juillet 2024 par lequel cette même autorité l'a assigné à résidence sur le territoire du département de la Haute-Vienne pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2401177 du 11 juillet 2024, le magistrat désigné du tribunal administratif de Limoges a, d'une part, renvoyé devant une formation collégiale les conclusions dirigées contre la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour et les conclusions aux fins d'injonction afférentes à cette décision, a, d'autre part, annulé l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 18 juin 2024 en tant qu'il fait obligation à M. B... A... de quitter le territoire français sans délai, fixe le pays de renvoi et lui interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans et a, enfin, annulé l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 2 juillet 2024 assignant M. B... A... à résidence.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 1er août 2024, le préfet de la Haute-Vienne demande à la cour d'annuler ce jugement du 11 juillet 2024 en tant qu'il annule ses arrêtés du 18 juin 2024 et du 2 juillet 2024 et de rejeter la demande de première instance de M. B... A....

Il soutient que :

- le jugement qui vise dans son premier " considérant " une assignation à résidence à Guéret est irrégulier ;

- le jugement méconnaît l'étendue du litige en annulant la décision faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français à la suite d'un refus de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante de l'Union européenne au motif de l'exception d'illégalité d'une autre décision portant refus de séjour en qualité d'étranger malade ;

- le magistrat désigné n'était pas compétent pour se prononcer sur la régularité de la décision portant refus de titre de séjour du 23 décembre 2023 ;

- le magistrat désigné s'est abstenu de mettre en œuvre ses pouvoirs d'instruction pour obtenir communication des pièces dont l'absence a conduit à l'annulation d'une partie des décisions contestées ;

- le motif tiré de l'exception d'illégalité de la décision du 23 décembre 2023 lui refusant un titre de séjour en qualité d'étranger malade en raison du vice de procédure tiré de l'absence de production en première instance de l'avis du collège de médecins de l'OFII sur la base duquel cet arrêté a été adopté devra être censuré à la suite de la production de l'avis en question et des pièces permettant d'établir qu'il a été adopté de manière régulière ;

- les autres moyens ne sont pas fondés.

Par des mémoires enregistrés les 11 et 18 septembre et le 7 octobre 2024, M. F... B... A... conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- il n'est pas justifié de la compétence de son auteur ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 233-1, L. 233-2, R. 233-1, R. 233-3 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il n'est pas démontré que son comportement constitue une menace pour l'ordre public.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision du 23 décembre 2023 lui refusant un titre de séjour en qualité d'étranger malade, dont il n'est pas justifié de la compétence de l'auteur, qui est entachée de défaut d'examen réel et sérieux de sa situation et qui méconnaît les dispositions des articles R. 425-11, R. 425-12, R. 425-13 et L. 429-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision du 18 juin 2024 lui refusant un titre de séjour en qualité de conjoint de citoyen européen qui est entachée d'une incompétence de son auteur, méconnaît les articles L.233-1, L.233-2, R.233-1, R.233-3 et L.435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales .

En ce qui concerne la décision portant refus de délai de départ volontaire :

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 612-2 et L. 612-3 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il n'est pas démontré que son comportement constitue une menace pour l'ordre public.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai ;

- il n'est pas démontré que son comportement constitue une menace pour l'ordre public ;

- cette décision apparaît disproportionnée.

En ce qui concerne la décision portant fixation du pays de renvoi :

- elle est illégale en raison de l'illégalité des autres décisions contenues dans le même arrêté.

En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de l'arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Stéphane Gueguein, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. F... B... A..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 1er décembre 1985, qui déclare être entré en France en mars 2023, a déposé, le 10 mai suivant, une demande d'asile définitivement rejetée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 19 janvier 2024. Parallèlement, l'intéressé a déposé, le 12 septembre 2023, une demande d'admission au séjour pour raisons de santé, rejetée par un arrêté du 22 décembre 2023 du préfet de la Haute-Vienne. Le 19 mars 2024, il a de nouveau sollicité son admission au séjour au motif de la présence en France de son épouse de nationalité grecque. Par un arrêté du 18 juin 2024, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de faire droit à cette demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Le 2 juillet suivant, cette même autorité l'a assigné à résidence sur le territoire du département de la Haute-Vienne pour une durée de quarante-cinq jours. Sur demande de M. B... A..., le magistrat désigné du tribunal administratif de Limoges, par un jugement du 11 juillet 2024, a, après avoir renvoyé devant une formation collégiale les conclusions dirigées contre la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour et les conclusions aux fins d'injonction afférentes à cette décision, annulé l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 18 juin 2024 en tant qu'il fait obligation à M. B... A... de quitter le territoire français sans délai, fixe le pays de renvoi et prononce une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et a, enfin, annulé l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 2 juillet 2024 assignant M. B... A... à résidence. Le préfet de la Haute-Vienne relève appel de ce jugement en tant qu'il annule ces décisions.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, le magistrat désigné du tribunal, qui a renvoyé devant une formation collégiale les conclusions dirigées contre la décision du 18 juin 2024 refusant la délivrance d'un titre de séjour et les conclusions aux fins d'injonction afférentes à cette décision, n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence.

3. En deuxième lieu, si le jugement attaqué mentionne à tort, au point 1, que M. B... A... a été assigné à résidence à Guéret, cette erreur de plume n'est pas de nature à entacher ce jugement d'irrégularité.

4. En troisième lieu, en ne sollicitant pas la production de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur la base duquel l'arrêté du 22 décembre 2023 a été pris, le tribunal n'a pas entaché son jugement d'irrégularité.

5. En quatrième lieu, si le requérant soutient que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour du 22 décembre 2023 a été retenu à tort par les premiers juges, une telle erreur se rattache au bien-fondé du jugement et non à sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

6. L'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale. S'agissant d'un acte réglementaire, une telle exception peut être formée à toute époque, même après l'expiration du délai du recours contentieux contre cet acte. S'agissant d'un acte non réglementaire, l'exception n'est, en revanche, recevable que si l'acte n'est pas devenu définitif à la date à laquelle elle est invoquée, sauf dans le cas où l'acte et la décision ultérieure constituant les éléments d'une même opération complexe, l'illégalité dont l'acte serait entaché peut être invoquée en dépit du caractère définitif de cet acte.

7. Il ressort des pièces du dossier que la décision du préfet de la Haute-Vienne faisant obligation à M. B... A... de quitter le territoire français, annulée par le jugement critiqué, ne trouvait pas son fondement juridique dans la décision de refus d'admission au séjour de M. B... A... du 22 décembre 2023 mais dans la décision ayant le même objet du 18 juin 2024. C'est donc à tort que le tribunal a accueilli le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus d'admission au séjour du 22 décembre 2023 pour annuler la décision portant obligation de quitter le territoire français du 18 juin 2024 et par voie de conséquence celles lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire, fixant le pays de renvoi, prononçant une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et celle portant assignation à résidence du 2 juillet 2024.

8. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... A... devant le tribunal administratif et devant la cour.

En ce qui concerne les autres moyens :

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Quant à l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour du 18 juin 2024 :

9. En premier lieu, M. C... D..., sous-préfet, secrétaire général de la préfecture de la Haute-Vienne et signataire de la décision attaquée, bénéficie d'une délégation de signature du préfet de ce département en date du 14 février 2024, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs spécial n° 87-2024-029 du 15 février 2024, à l'effet de signer " les arrêtés, décisions et actes pris sur le fondement du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " à compter du 26 février 2024. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision du 18 juin 2024 manque en fait.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 233-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les citoyens de l'Union européenne ont le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'ils satisfont à l'une des conditions suivantes : / 1° Ils exercent une activité professionnelle en France ; / 2° Ils disposent pour eux et pour leurs membres de famille de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; / (...) ". Aux termes de son article L. 233-2 : " Les ressortissants de pays tiers, membres de famille d'un citoyen de l'Union européenne satisfaisant aux conditions énoncées aux 1° ou 2° de l'article L. 233-1, ont le droit de séjourner sur le territoire français pour une durée supérieure à trois mois. / (...) ". Aux termes de son article L. 200-4 : " Par membre de famille d'un citoyen de l'Union européenne, on entend le ressortissant étranger, quelle que soit sa nationalité, qui relève d'une des situations suivantes : / 1° Conjoint du citoyen de l'Union européenne (...) ". Aux termes de son article R. 233-3 du même code : " Les citoyens de l'Union européenne entrés en France pour y rechercher un emploi ne peuvent être éloignés pour un motif tiré de l'irrégularité de leur séjour tant qu'ils sont en mesure d'apporter la preuve qu'ils continuent à rechercher un emploi et qu'ils ont des chances réelles d'être engagés ".

11. Il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter la demande de titre de séjour de M. B... A... en sa qualité de conjoint de Mme E..., qui est de nationalité grecque, le préfet de la Haute-Vienne a retenu que cette dernière, bénéficiaire de l'aide médicale de l'Etat, qui ne justifiait ni exercer ni être activement à la recherche d'une activité professionnelle ni disposer de ressources suffisantes, ne bénéficiait pas d'un droit à séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois en application des dispositions précitées de l'article L. 233-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. B... A..., qui soutient que la famille de son épouse leur verse plusieurs centaines d'euros par mois, ne justifie pas que lui et son épouse disposeraient de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assurance sociale et ne critique pas utilement la décision du préfet en soutenant que leur situation professionnelle résulte, pour ce qui le concerne, de l'irrégularité de son séjour en France et, pour ce qui concerne son épouse, de ce qu'elle ne maîtrise pas la langue française. De même, la circonstance que Mme E... s'est inscrite à France Travail et devait conclure, postérieurement à l'arrêté critiqué, un contrat de formation professionnalisante, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée.

12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".

13. M. B... A... ne fait état d'aucun motif exceptionnel ni d'aucune considération humanitaire de nature à établir que le préfet de la Haute-Vienne aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

14. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public. ".

15. Il ressort des pièces du dossier que le préfet a également fondé sa décision sur la menace que présentait la présence de M. B... A... pour l'ordre public en relevant, d'une part, qu'il a avait fait l'objet d'un signalement par les autorités grecques aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen à la suite des deux condamnations à 21 et 15 mois d'emprisonnement dont il a fait l'objet en janvier et avril 2017 pour des faits de " fausse déclaration " et de " violence " et de sa condamnation, par composition pénale du 26 septembre 2023, soit peu de temps après son arrivée en France, pour outrage sexiste et sexuel sur mineure de moins de quinze ans. Malgré la relative ancienneté des faits pour lesquels M. B... A... a été condamné en Grèce, il n'est pas fondé à soutenir, notamment eu égard à la teneur des faits plus récents, tels qu'ils ressortent du procès-verbal d'audition de la victime et dont il a admis la matérialité dans le cadre de la composition pénale précitée, que sa présence en France ne constituerait pas une menace pour l'ordre public au seul motif de la faiblesse de la peine qui lui a été infligée.

16. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

17. Eu égard à tout ce qui a été dit précédemment, et notamment à la durée du séjour de l'intéressé et à la circonstance que Mme E... ne justifiait pas satisfaire les conditions pour résider en France au-delà d'un délai de trois mois, M. B... A..., qui est père de trois enfants résidant au Gabon, ne justifie de l'existence d'aucun lien d'un particulière intensité en France. Dans ces conditions, la décision contestée ne porte pas au droit de M. B... A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise.

Quant à l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour du 23 décembre 2023 :

18. Pour les motifs exposés au point 7, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'arrêté du 22 décembre 2023 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé d'admettre M. B... A... au séjour est inopérant en toutes ses branches.

S'agissant de la décision portant refus de délai de départ volontaire :

19. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public (...) ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour (...) ".

20. D'une part, pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 15, M. B... A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet a retenu que son comportement présentait une menace pour l'ordre public de nature à justifier la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. B... A... a fait l'objet d'un signalement par les autorités grecques et que le préfet pouvait, en application des dispositions précitées, refuser de lui accorder un délai de départ volontaire. Au surplus, il résulte de l'instruction que le préfet aurait adopté la même décision sur le seul fondement des dispositions du 1° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

21. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale. Par voie de conséquence, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français doit être écarté.

22. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ".

23. Pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 15, M. B... A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet a retenu que son comportement présentait une menace pour l'ordre public de nature à justifier la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire.

24. En troisième lieu, eu égard à la durée du séjour en France de M. B... A... à la date de la décision critiquée, à son absence de liens d'une particulière intensité avec la France et à la menace que son séjour en France présente pour l'ordre public, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur d'appréciation en fixant à deux ans la durée pendant laquelle il fera l'objet d'une interdiction de retour sur le territoire français.

S'agissant de la décision portant fixation du pays de renvoi :

25. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale. Par voie de conséquence, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant le pays de renvoi doit être écarté.

S'agissant de la décision portant assignation à résidence :

26. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale. Par voie de conséquence, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision portant assignation à résidence doit être écarté.

27. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet la Haute-Vienne est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé l'arrêté du 18 juin 2024 en tant qu'il fait obligation à M. B... A... de quitter le territoire français sans délai, fixe le pays de destination et lui interdit de retourner sur le territoire pour une durée de deux ans ainsi que l'arrêté du 2 juillet 2024 assignant M. B... A... à résidence. Les conclusions de M. B... A... tendant à la mise en œuvre des dispositions de l'article de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : Les articles 2 à 4 du jugement n° 2401177 du tribunal administratif de Limoges du 11 juillet 2024 sont annulés.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. B... A... en première instance tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 juin 2024 en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français sans délai, fixe le pays de renvoi et lui interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans et celles tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2024 l'assignant à résidence sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentée en appel par M. B... A... tendant à la mise en œuvre des dispositions de l'article de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Vienne.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Karine Butéri, présidente,

M. Stéphane Gueguein, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 décembre 2024.

Le rapporteur,

Stéphane Gueguein La présidente,

Karine Butéri

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX01932


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24BX01932
Date de la décision : 11/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUTERI
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: M. DUPLAN
Avocat(s) : TOULOUSE ARNAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-11;24bx01932 ?
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