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11/12/2024 | FRANCE | N°22BX02087

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 6ème chambre, 11 décembre 2024, 22BX02087


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux correspondant, auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014.



Par un jugement n° 2001616 du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des

prélèvements sociaux mis à leur charge au titre de l'année 2014 à concurrence d'une diminution de la b...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux correspondant, auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014.

Par un jugement n° 2001616 du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a prononcé la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux mis à leur charge au titre de l'année 2014 à concurrence d'une diminution de la base imposable d'une somme de 1 530 euros et a rejeté le surplus de leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés le 22 juillet 2022 et les

17 et 27 avril 2023, M. et Mme B..., représentés par la société TAX team et conseils, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'article 3 du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du

23 juin 2022 et de prononcer la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels ils restent assujettis au titre des années 2013 et 2014 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la procédure de présomption prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales a été irrégulièrement mise en œuvre ; la procédure de taxation d'office en découlant est irrégulière ;

- la somme de 9 700 euros créditée sur le compte bancaire de M. B..., retenue par le service comme constituant des revenus d'origine indéterminée, correspond en réalité à des revenus fonciers perçus directement ;

- à supposer que cette requalification ne soit pas retenue, il conviendra de mettre en œuvre le mécanisme de compensation prévu par les articles L. 203 à L. 205 du livre des procédures fiscales compte tenu de l'inclusion dans la base imposable à l'impôt sur les revenus de la somme de 7 700 euros au titre des loyers perçus par M. B... déclarée dans le formulaire 2072 de la SCI MTV ; si la cour retient qu'il n'y a pas de bail, il conviendra de mettre en œuvre ce mécanisme de compensation à hauteur de 12 000 euros, soit les revenus fonciers déclarés à tort par la SCI MTV ;

- les sommes retenues par le service comme des revenus distribués constituent en réalité des avances de frais effectuées par M. B... pour le compte de la société " Les vignobles réunis " pour un montant de 20 575,26 euros au titre de l'année 2013 et de 38 795 euros au titre de l'année 2014.

Par trois mémoires en défense enregistrés les 3 février, 5 avril et 17 mai 2023, dont le dernier n'a pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Stéphane Gueguein,

- les conclusions de M. Anthony Duplan, rapporteur public,

- et les observations de Me Calderini, représentant M. et Mme B....

Une note en délibéré présentée pour M. et Mme B... a été enregistrée le

25 novembre 2024.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., gérant de la société civile immobilière (SCI) Gironde Littoral Location et de la société anonyme (SA) Les vignobles réunis, et son épouse, laquelle est gérante et associée majoritaire de la SCI MTV, ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle concernant les revenus des années 2013 et 2014 à l'issue duquel le service leur a notifié, par deux propositions de rectification des 9 décembre 2016 et 7 mars 2017, des rehaussements de leurs revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers (RCM) et des revenus d'origine indéterminée (ROI). A la suite du rejet partiel de leur réclamation, M. et Mme B... ont saisi le tribunal administratif de Bordeaux d'une demande de réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mises à leur charge au titre des années 2013 et 2014. Ils relèvent appel du jugement du 23 juin 2022 prononçant la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux mises à leur charge au titre de l'année 2014 à concurrence d'une diminution de la base imposable d'une somme de 1 530 euros dont ils demandent l'annulation en tant qu'il rejette le surplus de leurs demandes.

Sur les conclusions à fin de réduction :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. Elle peut, en outre, lui demander des justifications au sujet de sa situation et de ses charges de famille, des charges retranchées du revenu net global ou ouvrant droit à une réduction d'impôt sur le revenu en application des articles 156 et 199 septies du code général des impôts, ainsi que des avoirs ou revenus d'avoirs à l'étranger. / L'administration peut demander au contribuable des justifications sur tous les éléments servant de base à la détermination du revenu foncier tels qu'ils sont définis aux articles 28 à 33 quinquies du code général des impôts ainsi que des gains de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux tels qu'ils sont définis aux articles 150-0 A à 150-0 E du même code et des plus-values telles qu'elles sont définies aux articles 150 U à 150 VH du même code. / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, notamment lorsque le total des montants crédités sur ses relevés de compte représente au moins le double de ses revenus déclarés ou excède ces derniers d'au moins 150 000 euros. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que la différence constatée entre les sommes portées au crédit du compte bancaire personnel et des autres comptes ouverts au nom d'un contribuable, d'une part, et les revenus bruts par lui déclarés, d'autre part, dont l'importance doit justifier la mise en œuvre de la procédure de demande de justifications prévue par l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, s'entend de celle que l'administration constate avant tout examen critique préalable à cette mise en œuvre des crédits qu'elle a recensés, quelles que soient les premières justifications que le contribuable a pu spontanément apporter après l'engagement de la vérification, et qui peuvent être de nature à réduire le montant des crédits sur lesquels il sera effectivement interrogé.

4. En premier lieu, s'agissant de l'année 2013, il résulte de l'instruction qu'après avoir relevé 276 opérations créditrices de toutes natures pour un montant brut cumulé de 634 223 euros, le service a extourné 48 opérations relevant de virements de compte à compte ou d'opérations annulées, pour un montant cumulé de 122 952 euros, et a retenu, en vue d'établir l'existence d'indices de revenus dissimulés, qu'il existait une différence de 161 304 euros, supérieure au seuil de 150 000 euros, entre le montant des revenus déclarés, soit 349 967 euros, et le montant des crédits constatés corrigés, soit 511 271 euros.

5. Contrairement à ce que soutiennent M. et Mme B..., dans ce cadre, l'administration, qui peut se fonder sur les revenus figurant sur la déclaration des revenus que doit déposer le contribuable en vertu des articles 170 et suivants du code général des impôts, y compris sur des revenus nets lorsque celle-ci ne comporte pas d'information sur les revenus bruts, a pu valablement, en l'absence de document joint à la déclaration de revenus lui permettant d'avoir connaissance du montant du rachat partiel du contrat d'assurance-vie, retenir au titre de la somme de 511 271 euros les trois virements des 3 et 25 juin et 29 octobre 2013, pour une somme totale de 19 280 euros, identifiés comme des rachats d'assurance-vie sans avoir à y substituer la somme de 326 euros porté par M. B... sur sa déclaration de revenus.

6. En second lieu, s'agissant de l'année 2014, il résulte de l'instruction que le montant des crédits bancaires retenu, après correction, par l'administration, s'élevait à la somme de

263 319 euros et représentait plus du double des revenus déclarés pour 2014, soit 121 145 euros. Comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, l'administration n'est pas tenue d'extourner les remises de chèques des crédits pris en compte alors même que certaines d'entre elle correspondraient à des versements de compte à compte dès lors qu'une telle exclusion nécessiterait une analyse critique des relevés bancaires. Les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration a inclus, au titre de la somme de 263 319 euros précitée, la somme de 29 116 euros, correspondant à l'encaissement de cinq chèques émanant de comptes appartenant aux contribuables.

7. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'irrégularité de la mise en œuvre de la procédure prévue par les dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales citées au point 2 doit être écarté en toute ses branches.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

S'agissant des rehaussements notifiés au titre des revenus d'origine indéterminée :

8. En application du dernier alinéa de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, il incombe à un contribuable taxé d'office en application des articles L. 16 et L. 69 du même livre, de démontrer le caractère exagéré des sommes imposées au titre des revenus d'origine indéterminée.

9. Il résulte de l'instruction que, parmi les sommes retenues au titre des revenus d'origine indéterminée imposables au titre de l'année 2014, figurent dix dépôts en espèces effectués de janvier à novembre 2014 sur trois comptes personnels des contribuables ouverts auprès de la BNP, pour un montant total de 9 700 euros.

10. Les contribuables soutiennent que ces versements en espèces correspondent, à hauteur de 7 700 euros, à l'encaissement sur leurs comptes personnels des loyers dus à la

SCI MTV, dont Mme B... est gérante et associée à hauteur de 96 %, pour la location d'une dépendance située au sein d'un immeuble implanté au Bouscat. Les documents produits, à savoir notamment un courrier du 25 novembre 2013 adressé au père de la résidente étrangère lui proposant une location temporaire pour le compte de sa fille moyennant un loyer de 820 euros, un courrier du 23 décembre 2013 ayant le même destinataire, précisant les termes de la location, effective à compter du 5 janvier 2014, des quittances trimestrielles de loyers au titre de l'année 2014 au nom de la résidente étrangère pour un montant total de 12 000 euros, correspondant à la somme de douze loyers, du montant de la caution et d'un ajustement de charges de 660 euros, sont de nature à étayer les éléments figurant sur la déclaration de revenus, indiquant la perception de 12 000 euros, déposée au titre de l'année 2014 par la SCI MTV. Toutefois, en l'absence totale de correspondance entre les dates d'établissement des quittances de loyers mentionnant l'absence de soldes à payer, soit les 5 janvier, 2 avril, 2 juillet et 3 octobre 2014, et la périodicité des dépôts d'espèces, la seule circonstance, au demeurant non établie, que les comptes bancaires ouverts au nom de la SCI MTV n'enregistreraient que la perception d'une somme de 4 300 euros n'est pas de nature à établir l'existence d'une corrélation entre la somme manquante de 7 700 euros et les dépôts d'espèces enregistrés sur les comptes personnels des requérants. Ainsi, M. et Mme B... n'apportent pas la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration au titre des revenus d'origine indéterminée.

11. Eu égard à l'absence d'éléments de nature à établir un lien entre la somme de

9 700 euros en litige et les revenus déclarés par la SCI MTV au titre de l'année 2014, les demandes de compensation présentées par les requérants sur le fondement des articles L. 203 à L. 205 du livre des procédures fiscales ne peuvent qu'être écartées.

S'agissant des rehaussements notifiés au titre des revenus distribués :

12. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ". Aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes (...) ". En vertu de ces dispositions, les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés sont, sauf preuve contraire, à la disposition de cet associé et ont donc le caractère de revenus distribués, imposables entre les mains de cet associé dans la catégorie des revenus de capitaux mobilier. Pour que l'associé échappe à cette imposition, il lui incombe de démontrer, le cas échéant, qu'il n'a pas pu avoir la disposition de ces sommes ou que ces sommes ne correspondent pas à la mise à disposition d'un revenu.

13. M. et Mme B... soutiennent que les sommes de 20 575 euros au titre de l'année 2013, et de 38 795 euros au titre de l'année 2014, inscrites au crédit du compte courant d'associé de M. B... de la société " Les vignobles réunis ", correspondent à des avances de frais que ce dernier aurait consenties à cette société. S'il résulte de l'instruction que l'administration a, au cours de la procédure, identifié le paiement de certaines des sommes enregistrées dans la comptabilité de cette société comme ayant été effectivement réglées par M. B..., les contribuables n'apportent pas d'éléments permettant de démontrer, pour les sommes restantes, que l'intéressé aurait personnellement exposé les sommes en litige et que ces dernières ne correspondraient ainsi pas à la mise à disposition d'un revenu. Il y a donc lieu d'écarter ce moyen.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté le surplus de leur demande. Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et au ministre en charge du budget et des comptes publics.

Copie sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Karine Butéri, présidente,

M. Stéphane Gueguein, président-assesseur,

Mme Caroline Gaillard, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 décembre 2024.

Le rapporteur,

Stéphane Gueguein La présidente,

Karine Butéri

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre en charge du budget et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX02087


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX02087
Date de la décision : 11/12/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BUTERI
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: M. DUPLAN
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS TAX TEAM & CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-11;22bx02087 ?
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