Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du maire de Montendre du 12 novembre 2018 portant délimitation du domaine public communal.
Par un jugement n° 1900064 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour avant cassation :
Par un arrêt n° 20BX02602 du 17 novembre 2022, la cour administrative d'appel de Bordeaux a notamment annulé l'arrêté du maire de Montendre du 12 novembre 2018 en tant qu'il inclut dans l'emprise du domaine public la portion de terrain appartenant à M. B... comprise entre les points B et F du plan annexé à cet arrêté ainsi que le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 16 juin 2020 en tant qu'il ne prononçait pas cette annulation, et a enjoint au maire de Montendre de prendre un arrêté de délimitation du domaine public de la fontaine de l'Essert tenant compte des limites de ce domaine décrites dans l'arrêt.
Par une décision n° 470623 du 18 octobre 2023, le Conseil d'Etat a annulé cette partie du dispositif de l'arrêt du 17 novembre 2022 et a renvoyé dans cette mesure l'affaire à la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Procédure devant la cour après cassation :
Par un mémoire du 27 septembre 2024, M. B..., représenté par Me Ferrer, demande à la cour d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Montendre du 12 novembre 2018 portant délimitation du domaine public communal, d'enjoindre au maire de Montendre, après détermination de l'appartenance au domaine public ou au domaine privé de la commune en considération de l'arrêt à intervenir, soit de prendre un arrêté de délimitation, soit de faire réaliser un bornage sous le contrôle du juge judiciaire, et de mettre à la charge de la commune de Montendre une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté litigieux n'a pas une simple portée déclarative ; il ne comporte pas de précisions cadastrales et considère que le terrain d'emprise de la fontaine appartient au domaine public sans qu'aucune décision préalable du conseil municipal ne soit intervenue ; or le maire n'était pas compétent pour déterminer l'appartenance au domaine public de cette fontaine, seul le conseil municipal pouvait y procéder ; cet arrêté porte atteinte au droit de propriété de M. B... et est ainsi entaché d'un détournement de pouvoir ;
- l'arrêté est insuffisamment précis, il devait mentionner les références cadastrales ;
- la délimitation aurait dû se faire sur la base du document d'arpentage du 6 novembre 2001 ; le domaine public délimité par l'arrêté litigieux excède le domaine appartenant à la commune de Montendre et constitue une emprise irrégulière ;
- le chemin d'accès à la fontaine a pour seule utilité sa desserte, sans aménagement particulier en rapport avec son affectation ; les parcelles lui servant d'emprise ne pouvaient par suite être regardées comme appartenant au domaine public communal.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 octobre 2024 et complété de pièces le même jour, la commune de Montendre, représentée par Me Denis, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 8 octobre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 22 octobre 2024 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de la voirie routière ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laurent Pouget,
- les conclusions de M. Julien Dufour, rapporteur public ;
- et les observations de Me Ferrer, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... est propriétaire de parcelles cadastrées section 090 B n° 1962 et n° 1567 sur le territoire de la commune de Montendre (Charente-Maritime), au lieu-dit La Chapelle, qui jouxtent la fontaine de l'Essert ainsi que le chemin permettant l'accès à cette fontaine. Par un arrêté du 12 novembre 2018, le maire de Montendre a procédé à la délimitation du domaine public entre les parcelles appartenant à la commune, lesquelles supportent le chemin et la fontaine de l'Essert, et celles de M. B.... Ce dernier a relevé appel du jugement du 16 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 novembre 2018. Par un arrêt n° 20BX02602 du 17 novembre 2022, la cour a annulé l'arrêté du maire de Montendre du 12 novembre 2018 en tant seulement qu'il a inclus dans l'emprise du domaine public la portion de terrain comprise entre les points B et F du plan annexé à cet arrêté, a annulé le jugement du tribunal du 16 juin 2020 dans la seule mesure où il ne prononçait pas cette annulation partielle, et a enjoint au maire de la commune de Montendre de prendre un nouvel arrêté de délimitation du domaine public tenant compte de cette annulation. Par une décision n° 470623 du 18 octobre 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt du 17 novembre 2022 de la cour en tant qu'il a prononcé une annulation partielle de l'arrêté du maire de Montendre du 12 novembre 2018 et tiré les conséquences de cette annulation, et a renvoyé l'affaire à la cour dans la mesure de la cassation ainsi prononcée.
Sur l'étendue du litige :
2. Après cassation partielle par le Conseil d'Etat statuant au contentieux, il appartient à la cour à laquelle le jugement d'une affaire est renvoyé de se prononcer de nouveau sur le litige dans les limites résultant de la décision du juge de cassation. Par suite, ne peuvent qu'être rejetées devant la cour les conclusions des parties qui tendent à faire trancher des questions étrangères aux seuls points restant à juger en vertu de la décision du Conseil d'Etat, soit parce qu'elles relèvent de litiges distincts, soit parce qu'elles tendent à remettre en cause l'autorité de la chose jugée par la cour telle qu'elle a été confirmée par le juge de cassation.
3. Ainsi qu'il a été dit au point 1, le Conseil d'Etat n'a annulé que les articles 1ers à 4 de l'arrêt de la cour du 17 novembre 2024 prononçant l'annulation partielle de l'arrêté du maire de Montendre en tant qu'il inclut dans l'emprise du domaine public la portion de terrain appartenant à M. B... comprise entre les points B et F du plan annexé à cet arrêté, annulant le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 16 juin 2020 en ce qu'il est contraire au prononcé de cette annulation partielle, enjoignant au maire de reprendre un arrêté de délimitation du domaine public tirant les conséquences de cette annulation, et mettant à la charge de la commune une somme à verser à M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dès lors, les conclusions présentées par M. B... qui tendent à une annulation complète de l'arrêté du maire de Montendre du 12 novembre 2018 y compris en tant qu'il porte délimitation du domaine public communal au-delà des points B et F du plan annexé à cet arrêté, notamment en ce qui concerne l'emprise du chemin d'accès, ne peuvent être accueillies dans cette mesure, de même que ses conclusions connexes à fin d'injonction, eu égard à l'autorité de chose jugée qui s'attache à l'article 5 de l'arrêt de la cour du 27 octobre 2022 rejetant ces mêmes conclusions.
Sur la légalité de l'arrêté du 12 novembre 2018 :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : 1° D'arrêter et modifier l'affectation des propriétés communales utilisées par les services publics municipaux et de procéder à tous les actes de délimitation des propriétés communales (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 21 septembre 2017, le conseil municipal de Montendre a donné délégation à son maire, pour la durée de son mandat, pour procéder à " tout acte de délimitation des propriétés communales " en application des dispositions du 1° de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales citées ci-dessus. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du maire de Montendre pour prendre l'arrêté litigieux doit être écarté, ainsi que l'a jugé la cour dans son arrêt du 17 novembre 2022.
6. En deuxième lieu, la seule circonstance que l'arrêté contesté ne mentionne pas les références cadastrales des parcelles appartenant à la commune n'affecte pas celui-ci d'une imprécision de nature l'entacher d'irrégularité, dès lors notamment que le plan qui lui est annexé indique clairement les limites du domaine public aux abords de sa propriété, qui sont matérialisées par une ligne joignant les points A à H.
7. En troisième et dernier lieu, l'appartenance au domaine public d'un bien appartenant à une personne publique était, avant la date d'entrée en vigueur du code général de la propriété des personnes publiques, sauf si ce bien était directement affecté à l'usage du public, subordonnée à la double condition que le bien ait été affecté au service public et spécialement aménagé en vue du service public auquel il était destiné.
8. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le terrain supportant la fontaine de l'Essert a été acquis par la commune en 1883 en vue de l'alimentation en eau des habitants de Montendre et qu'un réseau d'adduction d'eau potable a été mis en œuvre à la fin du XIXème siècle, comprenant la réalisation d'un bassin de captation maçonné sur " la source du Prêtre ", ancien nom de cette fontaine. Ainsi, ce bien appartenant à la commune était spécialement aménagé en vue du service public de fourniture d'eau. Par suite, et ainsi que l'a jugé la cour le 17 novembre 2022, alors même que la fontaine en cause a depuis cessé d'être affectée à ce service public, cet ouvrage, en l'absence de déclassement, appartient au domaine public communal, en ce compris ses dépendances.
9. D'autre part, il résulte des documents graphiques et photographiques au dossier que si l'angle nord de l'édicule principal jouxte exactement la ligne droite tracée entre les points A et G du plan annexé à l'arrêté et correspondant à la limite séparative figurant dans un document d'arpentage du 6 novembre 2001, cet édifice comporte également un dôme maçonné situé dans sa partie arrière, auquel a été adjoint un mur de soutènement en 2004 à l'occasion d'une opération d'entretien de l'édifice, dont l'emprise forme une portion de terrain triangulaire d'environ deux mètres carrés située au nord de la ligne susmentionnée, représentée entre les points B et E du plan, que l'arrêté inclut dans le domaine public. M. B..., au soutien de son allégation selon laquelle il en résulterait une emprise irrégulière sur sa propriété, ne peut utilement se prévaloir du document d'arpentage susmentionné dès lors que, eu égard à ce qui a été dit au point 8, l'élément structurel arrière de la fontaine appartient nécessairement au domaine public, contrairement aux mentions dudit document. Par ailleurs, aucun élément du dossier ne peut conduire à exclure du champ de l'acte notarié du 24 février 1883 l'emprise du mur de soutènement accessoire à la fontaine, alors notamment que cet acte, s'il ne se réfère pas à une numérotation cadastrale, indique que l'acquisition, destinée au réaménagement de la fontaine ancienne existante, porte sur " la parcelle de terrain d'une contenance d'un are dans laquelle jaillit la source ", et que selon un constat d'huissier dressé en 2021 " en sous-sol, l'emprise des fondations de la fontaine est, en tous points, plus étendue que l'emprise au sol de la partie visible au-dessus du sol, et ce en raison de la forme pyramidale de la fondation ". Enfin, le second mur de soutènement édifié par la commune, représenté entre les points E et F du plan annexé à l'arrêté litigieux, est implanté le long de la ligne reliant les points A et G, du côté de celle-ci opposé à la propriété de M. B..., et ne peut dès lors être regardé comme empiétant sur cette propriété. Dans ces conditions, c'est sans commettre d'illégalité que le maire de Montendre a, par l'arrêté contesté, inclus dans l'emprise du domaine public communal la portion de terrain comprise entre les points B et F du plan annexé à cet arrêté. Le détournement de pouvoir allégué n'est en outre aucunement établi.
11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté contesté du maire de la commune de Montendre, y compris en ce qu'il porte sur la portion de terrain située entre les points B et F du plan annexé à cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 12 novembre 2018 du maire de Montendre, n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de M. B... tendant à ce que cette autorité prenne un nouvel arrêté de délimitation du domaine public de la fontaine de l'Essert ou fasse réaliser un bornage sous le contrôle du juge judiciaire doivent être rejetées.
Sur les frais de l'instance :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Montendre la somme que demande M. B... au titre des frais qu'il a exposés. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Montendre en application de ces mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée en ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du maitre de Montendre du 12 novembre 2018 en tant qu'il porte sur la portion de terrain comprise entre les points B et F du plan annexé à cet arrêté.
Article 2 : M. B... versera une somme de 1 500 euros à la commune de Montendre en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Montendre.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2024 à laquelle siégeaient :
M. Laurent Pouget, président,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,
Mme Valérie Réaut, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 novembre 2024.
La présidente-assesseure,
Marie-Pierre Beuve Dupuy
Le président-rapporteur,
Laurent Pouget Le greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23BX02606