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31/10/2024 | FRANCE | N°24BX00625

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 4ème chambre, 31 octobre 2024, 24BX00625


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2022 par lequel le préfet de la Guadeloupe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.



Par un jugement n° 2300079 du 22 septembre 2023, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.


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Par une requête, enregistrée le 11 mars 2024, M. B..., représenté par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2022 par lequel le préfet de la Guadeloupe a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Par un jugement n° 2300079 du 22 septembre 2023, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 mars 2024, M. B..., représenté par Me Lagarde, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 22 septembre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Guadeloupe du 23 novembre 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Guadeloupe de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer, dans l'attente et dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la présence de sa mère à ses côtés est nécessaire et qu'il n'aura accès ni aux structures ni à un traitement approprié en République dominicaine ;

- il méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que sa mère, qui l'héberge, est la seule personne qui est en mesure de s'occuper de lui ; par ailleurs, ses troubles trouvent leur origine dans de la maltraitance dont il a été victime à Saint-Domingue ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

Par une ordonnance du 14 juin 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 19 août 2024 à 12h00.

Le préfet de la Guadeloupe a produit un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2024, qui n'a pas été communiqué.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Lucie Cazcarra.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant dominicain né le 10 février 2003, déclare être entré en France le 24 novembre 2018. Le 2 janvier 2022, il a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 23 novembre 2022, le préfet de la Guadeloupe a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 22 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an (...) / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat ".

3. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi et la possibilité d'en bénéficier effectivement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

4. Pour refuser de délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade à M. B..., le préfet de la Guadeloupe s'est fondé sur l'avis rendu le 5 septembre 2022 par le collège de médecins de l'OFII selon lequel, si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut toutefois bénéficier effectivement d'un traitement approprié à sa pathologie dans son pays d'origine. Il ressort des pièces médicales versées au dossier que M. B... souffre de troubles psychiatriques chroniques et bénéficie d'un traitement à base de Risperdal et de Tercian qui ne serait pas disponible, selon lui, dans son pays d'origine. Si M. B... verse au dossier des certificats médicaux attestant de ce que son état de santé requiert un suivi médical dans un centre médico-psychologique, ainsi qu'une ordonnance du 18 décembre 2023 attestant de la prise de Risperdal et de Tercian, ces documents ne permettent pas d'établir qu'il ne pourrait pas bénéficier effectivement d'une prise en charge appropriée dans son pays d'origine. M. B... ne peut utilement se prévaloir d'articles de presse des 19 mars et 24 novembre 2021, rédigés en des termes généraux, pour justifier qu'au regard de sa propre pathologie il ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié. Dans ces conditions, les éléments apportés par le requérant ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation du collège des médecins de l'OFII en ce qui concerne la disponibilité en République dominicaine du traitement requis par son état de santé. Si M. B... fait enfin valoir que son état de santé ne lui permet pas de vivre seul et requiert la présence de sa mère à ses côtés, ainsi que cela ressort des certificats médicaux établis les 5 décembre 2022 et 13 décembre 2023, il n'établit pas qu'il ne pourrait pas bénéficier de l'accompagnement d'un tiers dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 15 ans. Au regard de l'ensemble de ces éléments, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En deuxième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) " et, aux termes des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger (...) qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine (...) ".

6. M. B... soutient vivre en France avec sa mère et son demi-frère depuis 2018 et indique que, dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, sa mère est la seule personne qui peut s'occuper de lui. Il est toutefois constant que M. B... a vécu séparé de sa mère et de son frère durant de nombreuses années, sa mère résidant sur le territoire français depuis le 8 octobre 2006. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient M. B..., il n'est pas dépourvu de toute attache dans son pays d'origine, dans lequel résident sa grand-mère et un de ses frères. Enfin, si M. B... justifie avoir besoin d'une assistance quotidienne en raison de son état de santé, il n'établit pas que seule sa mère serait à même de lui fournir cette assistance. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à faire valoir que l'arrêté en litige porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de M. B... doit être écarté.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

8. M. B..., dont l'état de santé ne justifie pas le maintien sur le territoire français, ne fait état d'aucune menace précise pour sa vie ou sa sécurité en cas de retour en République dominicaine. S'il fait valoir que les troubles dont il souffre trouvent leur origine dans de la maltraitance dont il a été victime à Saint-Domingue, il ne justifie d'aucun caractère réel, personnel et actuel d'un risque de mauvais traitement en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en prenant l'arrêté en litige, le préfet de la Guadeloupe aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande. Dès lors, la requête de M. B... doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

Mme Lucie Cazcarra, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 octobre 2024.

La rapporteure,

Lucie CazcarraLa présidente,

Frédérique Munoz-Pauziès La greffière,

Laurence Mindine

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX00625


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24BX00625
Date de la décision : 31/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur ?: Mme Lucie CAZCARRA
Rapporteur public ?: Mme REYNAUD
Avocat(s) : LAGARDE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-31;24bx00625 ?
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