Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, par une première requête, d'annuler l'arrêté du 12 avril 2024 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pendant une durée de cinq ans. Par une seconde requête, M. A... a demandé à ce même tribunal d'annuler l'arrêté du 22 avril 2024 par lequel le préfet de la Gironde l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours.
Par un jugement nos 2402648 et 2402735 du 26 avril 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a renvoyé les conclusions de M. A... tendant à l'annulation du refus de séjour à une formation collégiale du tribunal, annulé l'arrêté du 12 avril 2024 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français sans délai, détermination du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans, annulé la décision du 22 avril 2024 portant assignation à résidence et enjoint au préfet de la Gironde de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 mai 2024, le préfet de la Gironde demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 26 avril 2024 en tant qu'il annule l'arrêté du 12 avril 2024 ;
2°) de rejeter la demande correspondante présentée par M. A... devant le tribunal.
Il soutient que :
- c'est à tort que le premier juge a estimé que l'arrêté du 26 avril 2024 méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et portait atteinte à l'intérêt supérieur du fils de M. A... ;
- M. A... représente une menace à l'ordre public et il ne remplit pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 12 juillet 2024, M. A..., représenté par Me Duten, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Gironde, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir et, dans l'attente, de le munir d'un récépissé l'autorisant à travailler, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande et de lui délivrer sans délai un récépissé l'autorisant à travailler, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) en toute hypothèse, à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code justice administrative.
Il soutient que :
- la requête du préfet, qui consiste en une reproduction littérale de sa défense de première instance, est irrecevable ;
- les moyens soulevés par le préfet ne sont pas fondés.
M. A... a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 26 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de procédure pénale ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Kolia Gallier,
- et les observations de Mme C..., représentant le préfet de la Gironde, et de Me Duten, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant sénégalais né le 8 octobre 1985, est entré régulièrement sur le territoire français le 26 octobre 2018, sous couvert d'un visa long séjour portant la mention " conjoint de français ". Une carte de séjour pluriannuelle lui a été délivrée le 17 février 2020 sur le fondement de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a ensuite été renouvelée jusqu'au 3 avril 2024. M. A..., depuis lors séparé de son épouse et en instance de divorce, a sollicité le 2 février 2024 le renouvellement de son titre de séjour, par changement de statut, en se prévalant de sa qualité de parent d'enfant français, sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 12 avril 2024, le préfet de la Gironde a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans. M. A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 26 avril 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a renvoyé à une formation collégiale du tribunal les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de la décision du 12 avril 2024 par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de renouveler son titre de séjour, a annulé l'arrêté du 12 avril 2024 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français sans délai, détermination du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans, a enjoint au préfet de la Gironde de procéder au réexamen de la situation de M. A... et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à l'avocate de l'intéressé en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Le préfet de la Gironde relève appel de ce jugement en tant qu'il annule l'arrêté du 12 avril 2024.
Sur la recevabilité de la requête :
2. Aux termes des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, applicables à l'introduction de l'instance d'appel en vertu des dispositions de l'article R. 811-13 du même code : " La juridiction est saisie par requête (...) Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ".
3. M. A... ne peut utilement soutenir que la requête du préfet de la Gironde, qui était défendeur en première instance, serait irrecevable au motif qu'elle consisterait en une reprise intégrale de ses écritures de première instance. En outre, la requête du préfet énonçant des conclusions d'appel et contenant l'exposé de faits et moyens, la fin de non-recevoir opposée par l'intimé ne peut qu'être écartée.
Sur l'étendue du litige :
4. Il résulte des dispositions des articles L. 614-1, L. 614-3 et L. 614-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 776-17 du code de justice administrative, applicables à la date de l'arrêté attaqué, qu'en cas d'assignation à résidence du requérant, il appartient au magistrat désigné par le président du tribunal administratif de se prononcer sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français, détermination du pays de destination et assignation à résidence, dont il pourrait être saisi. Il ne lui appartient pas, en revanche, de se prononcer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision relative au séjour.
5. Conformément aux principes rappelés ci-dessus, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a renvoyé à une formation collégiale du tribunal l'examen de la légalité de la décision de refus de séjour attaquée par M. A.... Par suite, le préfet de la Gironde et le demandeur ne sauraient demander à la cour d'examiner les conclusions présentées par le demandeur tendant à l'annulation de cette décision sur lesquelles le jugement attaqué n'a pas statué.
Sur le motif d'annulation retenu par le premier juge ;
6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces dernières stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.
7. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., entré en France le 26 octobre 2018, est le père d'un enfant français né le 19 juin 2020 de son union avec une ressortissante française, qu'il a épousée au Sénégal le 8 décembre 2017. Pour édicter l'arrêté litigieux, le préfet de la Gironde a notamment retenu que la présence de M. A... sur le territoire national représentait une menace pour l'ordre public et qu'il ne démontrait pas entretenir de lien avec son fils ni participer à son entretien. S'agissant de la menace à l'ordre public, il ressort en effet des pièces du dossier que l'intéressé a été condamné par le tribunal correctionnel de Bordeaux, respectivement le 13 octobre 2022 et le 18 décembre 2023, à des peines de deux mois d'emprisonnement avec sursis et six mois d'emprisonnement avec deux ans de sursis probatoire pour des faits de violence suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours commis par une personne ayant la qualité de conjoint, les premiers faits ayant en outre été commis en présence de l'enfant. Contrairement à ce que fait valoir l'intimé, la circonstance que le préfet n'a pas donné de suite au courrier qu'il lui a adressé à la suite de la première condamnation dont il a fait l'objet pour l'informer de ce qu'il envisageait de lui retirer son titre de séjour, ne faisait nullement obstacle à ce que cette première condamnation soit retenue par l'arrêté litigieux pour caractériser l'existence d'une menace à l'ordre public. S'agissant des liens qu'il entretient avec son fils, M. A... justifie avoir entrepris des démarches auprès du juge aux affaires familiales pour maintenir un lien avec son fils et continuer de lui rendre visite dans des conditions compatibles avec l'interdiction judiciaire d'entrer en contact avec son épouse, dont il est en instance de divorce, et de paraitre à son domicile. Il produit également quelques pièces éparses, factures, ticket de caisse et photographies non datées, qui ne sont toutefois pas de nature à établir l'intensité de la relation qu'il aurait maintenue avec son fils depuis son départ du domicile familial au mois de décembre 2023. Dans ces conditions, eu égard à la nature et au caractère récent des faits ayant donné lieu à des condamnations pénales, les premiers faits ayant été commis en présence de l'enfant et la seconde condamnation ayant été prononcée en considération d'un état de récidive légale, la décision par laquelle le préfet de la Gironde a fait obligation à M. A... de quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts que cette décision poursuivait, ni méconnu l'intérêt supérieur de l'enfant. Par suite, le préfet de la Gironde est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées pour annuler la décision obligeant M. A... à quitter le territoire français.
8. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Bordeaux et devant la cour.
Sur les autres moyens :
En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la décision de refus de séjour :
9. En premier lieu, le préfet de la Gironde a donné délégation à la signataire de l'arrêté litigieux, Mme Aurore Le Bonnec, secrétaire générale de la préfecture de la Gironde, par un arrêté du 30 janvier 2023, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de la Gironde n° 33-2023-021 du même jour, pour signer les décisions concernant les attributions de l'État dans le département de la Gironde, à l'exception de certaines matières parmi lesquelles ne figure pas la police des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'acte manque en fait et doit être écarté.
10. En deuxième lieu, la décision de refus de séjour vise les textes dont elle fait application, notamment l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et elle expose les circonstances de fait propres à la situation personnelle de M. A... sur lesquelles le préfet de la Gironde s'est fondé pour refuser le titre de séjour sollicité. Dans ces conditions, la décision de refus de séjour, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée et le moyen tiré de son défaut de motivation doit être écarté.
11. En troisième lieu, cette motivation révèle que le préfet de la Gironde a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé.
12. En quatrième lieu, d'une part, aux termes de l'article 17-1 de la loi du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité : " Il est procédé à la consultation prévue à l'article L. 234-1 du code de la sécurité intérieure pour l'instruction des demandes (...) de délivrance et de renouvellement des titres relatifs à l'entrée et au séjour des étrangers (...) ". Aux termes de l'article L. 234-1 du code de la sécurité intérieure : " Un décret en Conseil d'Etat fixe la liste des enquêtes administratives mentionnées à l'article L. 114-1 qui donnent lieu à la consultation des traitements automatisés de données à caractère personnel mentionnés à l'article 230-6 du code de procédure pénale, y compris pour les données portant sur des procédures judiciaires en cours, dans la stricte mesure exigée par la protection de la sécurité des personnes et la défense des intérêts fondamentaux de la Nation. (...) ".
13. D'autre part, aux termes de l'article 230-6 du code de procédure pénale : " Afin de faciliter la constatation des infractions à la loi pénale, le rassemblement des preuves de ces infractions et la recherche de leurs auteurs, les services de la police nationale et de la gendarmerie nationale peuvent mettre en œuvre des traitements automatisés de données à caractère personnel (...) ". Aux termes du I de l'article R. 40-29 du même code : " Dans le cadre des enquêtes prévues à l'article 17-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, (...), les données à caractère personnel figurant dans le traitement qui se rapportent à des procédures judiciaires en cours ou closes, à l'exception des cas où sont intervenues des mesures ou décisions de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenues définitives, ainsi que des données relatives aux victimes, peuvent être consultées, sans autorisation du ministère public, par : / (...) 5° Les personnels investis de missions de police administrative individuellement désignés et spécialement habilités par le représentant de l'Etat. L'habilitation précise limitativement les motifs qui peuvent justifier pour chaque personne les consultations autorisées. Lorsque la consultation révèle que l'identité de la personne concernée a été enregistrée dans le traitement en tant que mise en cause, l'enquête administrative ne peut aboutir à un avis ou une décision défavorables sans la saisine préalable, pour complément d'information, des services de la police nationale ou des unités de la gendarmerie nationale compétents et, aux fins de demandes d'information sur les suites judiciaires, du ou des procureurs de la République compétents. Le procureur de la République adresse aux autorités gestionnaires du traitement un relevé des suites judiciaires devant figurer dans le traitement d'antécédents judiciaires et relatif à la personne concernée. Il indique à l'autorité de police administrative à l'origine de la demande si ces données sont accessibles en application de l'article 230-8 du présent code. (...) ".
14. Pour retenir que la présence de M. A... sur le territoire français caractérisait une menace pour l'ordre public, le préfet de la Gironde a notamment retenu qu'il ressortait du fichier de traitement des antécédents judiciaires qu'il était défavorablement connu des services de police pour des faits commis du 21 avril 2022 au 7 juin 2023 de violence suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité. Ainsi que le soutient M. A..., il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait, avant de refuser de faire droit à sa demande de titre de séjour, saisi les services compétents de la police nationale ou de la gendarmerie nationale pour complément d'information, ou le procureur de la République compétent aux fins de demandes d'information sur les suites judiciaires, conformément aux dispositions du I de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale. Toutefois, il résulte de l'instruction que le préfet de la Gironde aurait pris la même décision s'il ne s'était pas fondé sur les mentions figurant dans le fichier de traitement des antécédents judiciaires mais uniquement sur les deux condamnations prononcées par le tribunal correctionnel de Bordeaux le 13 octobre 2022 et le 18 décembre 2023. Par suite, le moyen tiré du vice dont serait entaché la procédure préalable à la décision de refus de séjour doit être écarté.
15. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. "
16. Ainsi qu'il a été indiqué au point 7 ci-dessus, les quelques éléments produits par M. A... sont insuffisants pour établir qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de son fils depuis son départ du domicile familial au mois de décembre 2023. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.
17. En sixième lieu, M. A... n'ayant pas présenté de demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le préfet de la Gironde n'ayant pas examiné d'office la possibilité de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions, l'intéressé ne peut utilement se prévaloir de leur méconnaissance.
18. En septième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, le moyen tiré de ce que la décision de refus de séjour serait entachée d'une erreur dans l'appréciation de la menace à l'ordre public et méconnaitrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que le premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant doivent être écartés. Pour les mêmes raisons, la décision de refus de séjour n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation de M. A....
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
19. En premier lieu, les moyens soulevés, par la voie de l'exception d'illégalité, à l'encontre de la décision de refus de séjour ayant tous été écartés, M. A... n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de cette décision au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.
20. En deuxième lieu, la décision vise les textes dont elle fait application, notamment l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions utiles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et elle expose les circonstances de fait propres à la situation personnelle de M. A... sur lesquelles le préfet de la Gironde s'est fondé pour lui faire obligation de quitter le territoire français Dans ces conditions, la décision de refus de séjour, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée et le moyen tiré de l'insuffisance de sa motivation doit être écarté.
21. En troisième lieu, cette motivation révèle que le préfet de la Gironde a procédé à un examen particulier de la situation de M. A....
22. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7 ci-dessus, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intimé doit être écarté.
23. Il résulte de ce qui précède que les conclusions tendant à l'annulation de la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français doivent être rejetées.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
24. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale compte tenu de l'illégalité des décisions de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ne peuvent qu'être écartés.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
25. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, et dix ans en cas de menace grave pour l'ordre public ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
26. Pour édicter à l'encontre de M. A... une décision d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de cinq ans, le préfet de la Gironde a retenu que la présence de l'intéressé sur le territoire national représente une menace grave et actuelle pour l'ordre public, qu'il ne justifie plus de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France et qu'il n'apporte pas la preuve d'avoir rompu tout lien avec son pays d'origine. Toutefois, eu égard à la présence en France de l'enfant français de l'intimé, âgé de trois ans et dix mois à la date de l'arrêté litigieux et avec lequel il a vécu jusqu'au mois de décembre 2023 ainsi qu'à l'absence de précédente mesure d'éloignement qui n'aurait pas été exécutée, le préfet de la Gironde a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation dans le quantum de la mesure en décidant d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de cinq ans.
27. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen dirigé contre la décision portant interdiction de retour pour une durée de cinq ans, que cette décision est illégale.
28. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Gironde est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a annulé les décisions du 12 avril 2024 portant obligation de quitter sans délai le territoire français et détermination du pays de renvoi, qu'il lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de M. A... et qu'il a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser au conseil de M. A... au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Sur les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A... :
29. Le présent arrêt, eu égard à ses motifs, n'implique qu'il soit enjoint au préfet de la Gironde ni de délivrer un titre de séjour à M. A... ni de réexaminer sa situation. Les conclusions à fin d'injonction présentées par l'intimé ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie essentiellement perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement nos 2402648 et 2402735 du 26 avril 2024 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux est annulé en tant qu'il annule les décisions du préfet de la Gironde du 12 avril 2024 portant obligation de quitter sans délai le territoire français et fixant le pays de destination, ainsi qu'en ce qu'il enjoint au préfet de la Gironde de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de trois mois et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de quinze jours et, enfin, en ce qu'il met à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à Me Duten au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Bordeaux tendant à l'annulation des décisions du 12 avril 2024 lui faisant obligation de quitter sans délai le territoire français et déterminant le pays de renvoi est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de première instance et d'appel présentées par les parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. B... A... et à Me Duten.
Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 26 septembre 2024 à laquelle siégeaient :
M. Evelyne Balzamo, présidente,
Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure,
Mme Kolia Gallier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024.
La rapporteure,
Kolia GallierLa présidente,
Evelyne Balzamo
La greffière,
Stéphanie Larrue
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 24BX01315 2