Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 19 janvier 2022 par lequel la préfète de la Gironde lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.
Par un jugement n° 2200314 du 27 janvier 2022, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 22BX02418 du 6 avril 2023, la cour a annulé le jugement n° 2200314 et l'arrêté du 19 janvier 2022 et a enjoint au préfet de la Gironde de réexaminer la situation de M. A... dans le délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt en lui délivrant dans un délai de quinze jours une autorisation provisoire de séjour valable durant ce réexamen.
Procédure d'exécution devant la cour :
Par un courrier enregistré le 30 mai 2023, M. A..., représenté par Me Foucard, a demandé à la cour l'ouverture d'une procédure d'exécution de l'arrêt n° 22BX02418 du 6 avril 2023.
Par une ordonnance du 10 avril 2024, prise en application de l'article R. 921-6 du code de justice administrative, le président de la cour a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle en vue de prescrire, s'il y a lieu, les mesures qui seraient nécessaires à l'exécution de l'arrêt n° 22BX02418 du 6 avril 2023.
Par un mémoire enregistré le 29 juillet 2024, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la demande d'exécution.
Il fait valoir qu'il a notifié le 4 mars 2024 une nouvelle décision à M. A..., dont il a donc bien réexaminé la situation en exécution de l'arrêt de la cour du 6 avril 2023.
Par un mémoire enregistré le 8 août 2024, M. A..., représenté par Me Foucard, demande qu'une astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir soit mise à la charge de l'Etat en cas de non-exécution de l'arrêt de la cour du 6 avril 2023.
Il soutient qu'il ne s'est jamais vu délivrer une autorisation provisoire de séjour et que la décision prise par le préfet sur sa demande de protection temporaire formée dans le cadre fixé par la décision (UE) 2022-358 du Conseil du 4 mars 2022 ne correspond pas à un réexamen de sa demande de titre de séjour, formée notamment au titre de la vie privée et familiale ; l'arrêt du 6 avril 2023 n'a donc aucunement été exécuté.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laurent Pouget,
- et les conclusions de M. Julien Dufour, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. (...) Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ".
2. Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence de définition, par le jugement ou l'arrêt dont l'exécution lui est demandée, des mesures qu'implique nécessairement cette décision, il appartient au juge saisi sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative d'y procéder lui-même en tenant compte des situations de droit et de fait existant à la date de sa décision. Si la décision faisant l'objet de la demande d'exécution prescrit déjà de telles mesures en application de l'article L. 911-1 du même code, il peut, dans l'hypothèse où elles seraient entachées d'une obscurité ou d'une ambigüité, en préciser la portée. Le cas échéant, il lui appartient aussi d'en édicter de nouvelles en se plaçant, de même, à la date de sa décision, sans toutefois pouvoir remettre en cause celles qui ont précédemment été prescrites ni méconnaître l'autorité qui s'attache aux motifs qui sont le soutien nécessaire du dispositif de la décision juridictionnelle dont l'exécution lui est demandée. En particulier, la rectification des erreurs de droit ou de fait dont serait entachée la décision en cause ne peut procéder que de l'exercice, dans les délais fixés par les dispositions applicables, des voies de recours ouvertes contre cette décision.
3. Par son arrêt n° 22BX02418 du 6 avril 2023, la cour a annulé le jugement n° 2200314 du tribunal administratif de Bordeaux ainsi que l'arrêté du 19 janvier 2022, et a enjoint au préfet de la Gironde de réexaminer la situation de M. A... dans le délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt, en le munissant dans un délai de quinze jours d'une autorisation provisoire dans l'attente de ce réexamen.
4. Le préfet de la Gironde soutient qu'il a exécuté l'arrêt de la cour du 6 avril 2023 dès lors qu'il a pris le 4 mars 2024 une décision refusant à M. A... le bénéfice de la protection temporaire prévue par la décision (UE) 2022-358 du Conseil de l'Union européenne du 4 mars 2022. Cependant, cette décision, qui répond à une demande spécifique déposée le 2 avril 2023 par l'intéressé, ne saurait résulter du réexamen global de son droit au séjour que prescrivait l'arrêt de la cour du 6 avril 2023. Par suite, le préfet de la Gironde, qui n'a d'ailleurs pas davantage délivré une autorisation provisoire de séjour à M. A..., ne peut être regardé comme ayant procédé à l'exécution de cet arrêt.
5. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de la Gironde d'engager un réexamen effectif de la situation de M. A... au regard de son droit au séjour, tout en mettant celui-ci en possession d'une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt, puis de justifier de l'exécution complète de l'arrêt du 6 avril 2023 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en statuant sur sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
DECIDE :
Article 1er : Une astreinte est prononcée à l'encontre de l'Etat si le préfet de la Gironde ne justifie pas, d'une part, avoir dans les huit jours suivant la notification du présent arrêt, engagé le réexamen de la situation de M. A... au regard de son droit au séjour en le munissant d'une autorisation provisoire de séjour, d'autre part, avoir procédé à ce réexamen dans un délai de deux mois suivant cette même notification. Le taux de l'astreinte est fixé à 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration des délais susmentionnés.
Article 2 : Le préfet de la Gironde communiquera à la cour copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter le présent arrêt et l'arrêt n° 22BX02418 du 6 avril 2023.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au préfet de la Gironde et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 3 septembre 2024 à laquelle siégeaient :
M. Laurent Pouget, président,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,
M. Vincent Bureau, conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 septembre 2024.
La présidente-assesseure,
Marie-Pierre Beuve Dupuy
Le président-rapporteur,
Laurent Pouget Le greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 24BX00818