Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2020 par lequel le préfet de la Guyane lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
Par un jugement n° 2100850 en date du 13 juillet 2023, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 janvier 2024, et des mémoires enregistrés les 18 mars et 16 mai 2024, M. D..., représenté par Me Mindren, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Guyane du 13 juillet 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2020 du préfet de la Guyane ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Guyane de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou subsidiairement de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocate au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
- le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne la méconnaissance de " l'article 9 " de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté :
- l'arrêté méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors qu'il a quitté le Brésil en 1998, a vécu en métropole de 2001 à 2013 et est installé en Guyane depuis 2014 ; il suit un traitement pour son diabète, aide sa sœur pour les soins à ses deux enfants handicapés, a occupé divers emplois et a toute sa famille en France à l'exception d'un frère ; il a obtenu une promesse d'embauche en qualité de charpentier menuisier ; les conditions de délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " étaient réunies et l'obligation de quitter le territoire porte une atteinte " déraisonnable " à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- l'arrêté est insuffisamment motivé, ce qui manifeste un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;
Par un mémoire enregistré le 22 avril 2024, le préfet de la Guyane, représenté par le cabinet Tomasi, Dumoulin, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.
M. D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 octobre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant brésilien né le 23 octobre 1981, déclare être entré pour la dernière fois en Guyane en 2014. En 2020, il a déposé une demande de titre de séjour " vie privée et familiale " auprès du préfet de la Guyane. Par un arrêté du 16 octobre 2020, le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. D... relève appel du jugement du 13 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Contrairement à ce que soutient le requérant, le tribunal a suffisamment motivé le rejet, au point 4 de son jugement, du moyen tiré de l'atteinte à sa vie privée et familiale.
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
3. Pour rejeter la demande présentée sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Guyane, après avoir cité ces dispositions, a relevé que M. C... s'était maintenu sur le territoire bien au-delà de l'expiration de son visa, était célibataire et sans enfant, que la filiation avec les membres présumés de sa famille n'était pas établie et en tout état de cause ne lui ouvrait pas un droit au séjour, et enfin qu'il ne démontrait aucune intégration dans la société française compte tenu de son absence d'emploi déclaré. Une telle motivation, qui repose, contrairement à ce qu'allègue le requérant, sur un examen réel de sa situation, était suffisante pour permettre à l'intéressé de comprendre les fondements de la décision.
4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté en litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. Si M. C... indique avoir résidé en métropole de 1998 à 2013, il ne produit de justificatifs que pour l'année 2013. En revanche, les pièces produites au dossier établissent sa présence sur le territoire de la Guyane depuis 2014, mais le maintien en situation irrégulière durant cette longue période ne lui ouvrait aucun droit particulier à un titre de séjour. Les avis d'imposition pour les années 2015 à 2022 ne mentionnent aucun revenu déclaré, et aucune précision n'est apportée sur les emplois qu'aurait exercés M. C... au profit d'employeurs qui n'ont pas souhaité le déclarer. Si l'intéressé est suivi pour un diabète depuis 2018, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette maladie ne puisse être traitée au Brésil, alors que M. C... n'a pas présenté sa demande au titre de son état de santé. S'il fait valoir que la quasi-totalité de sa famille, sœurs, neveux, beau-père, oncle, tante et cousins, dont certains sont français, réside régulièrement en Guyane ou en Charente-Maritime, et qu'il s'occupe notamment des deux enfants handicapés de sa sœur aînée qui l'héberge, ces éléments ne permettent pas de regarder l'atteinte portée à sa vie privée et familiale comme disproportionnée aux buts en vue desquels a été prise la décision, alors au demeurant qu'il conserve une attache familiale au Brésil en la personne d'un frère. Dans ces conditions, le préfet de la Guyane n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions précitées de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. D..., qui ne peut utilement se prévaloir d'une promesse d'embauche du 10 mai 2024, postérieure à la décision attaquée, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi
du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de la Guyane.
Délibéré après l'audience du 20 juin 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, présidente,
Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,
M. Olivier Cotte, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juillet 2024.
La présidente-assesseure,
Anne Meyer
La présidente, rapporteure
Catherine B...La greffière,
Virginie Guillout
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 24BX00085 2