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09/07/2024 | FRANCE | N°24BX00083

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 4ème chambre, 09 juillet 2024, 24BX00083


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Le syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion (SAFPTR) a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler, d'une part, la décision du maire de Sainte-Marie ayant accepté les listes de candidats des syndicats Force ouvrière (FO) Sainte-Marie et Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) mairie de Sainte-Marie pour les élections des représentants du personnel au comité social territorial (CST) de la commune, d'autre part, la décision du pr

ésident du bureau de vote rejetant implicitement le recours préalable formé à l'enco...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion (SAFPTR) a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler, d'une part, la décision du maire de Sainte-Marie ayant accepté les listes de candidats des syndicats Force ouvrière (FO) Sainte-Marie et Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) mairie de Sainte-Marie pour les élections des représentants du personnel au comité social territorial (CST) de la commune, d'autre part, la décision du président du bureau de vote rejetant implicitement le recours préalable formé à l'encontre des élections susmentionnées, enfin, les opérations électorales ayant eu lieu le 8 décembre 2022 pour la désignation des représentants du personnel au CST de la commune de Sainte-Marie.

Par un jugement n° 2300106 du 6 novembre 2023, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une protestation, enregistrée le 12 janvier 2024, le syndicat autonome de la fonction publique territoriale (SAFPTR) de La Réunion, représenté par Me Saint-Martin, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 novembre 2023 du tribunal administratif de La Réunion ;

2°) d'annuler, d'une part, les élections au comité social territorial de la commune de Sainte-Marie en date du 8 décembre 2022, d'autre part, la décision par laquelle le maire de Sainte-Marie a accepté la liste de candidats des syndicats FO mairie de Sainte-Marie et UNSA mairie de Sainte-Marie, enfin, la décision du président du bureau central de vote rejetant son recours gracieux préalable ;

3°) d'enjoindre à la commune de Sainte-Marie d'organiser de nouvelles élections, dans un délai de six mois à compter de la date de notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Sainte-Marie la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le syndicat UNSA mairie de Sainte-Marie n'a pas de statuts et n'a aucune existence légale ; le tribunal a méconnu l'article L. 2131-3 du code de travail, et commis une mauvaise appréciation des faits en jugeant que le syndicat UNSA avait déposé ses statuts en mairie le 15 mars 2011 ; les récépissés de dépôts de ces statuts n'ont pas été communiqués ;

- les syndicats FO et UNSA n'ont pas justifié de la publication de leurs comptes financiers en méconnaissance de l'article L. 211-1 du code général de la fonction publique et de l'article D. 2135-8 du code du travail ; la commune a fait preuve d'incompétence négative en refusant, en l'absence de publicité des comptes, de s'assurer du respect du principe d'indépendance financière des organisations syndicales alors admises à déposer une liste.

La protestation a été communiquée à la commune de Sainte-Marie, au syndicat Union nationale des syndicats autonomes (UNSA) mairie de Sainte-Marie le 23 janvier 2024.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2024, le syndicat Force Ouvrière des territoriaux de Sainte-Marie, représenté par Me Grimaldi, conclut au rejet de la protestation et à ce que soit mise à la charge du syndicat SAFPTR la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, assortie des intérêts au taux légal.

Il fait valoir que :

- le syndicat SAFPTR n'a pas intérêt à agir contre les opérations électorales du 8 décembre 2022 ;

- les griefs soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 23 janvier 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 28 mai 2024 à 12h00.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- le code du travail ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 85-397 du 3 avril 1985 ;

- le décret n° 2021-571 du 10 mai 2021 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Martin,

- les conclusions de Mme Nathalie Gay, rapporteure publique,

- et les observations de Me Choplin, pour Me Saint-Martin, représentant le syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion.

Considérant ce qui suit :

1. Le 8 décembre 2022, ont eu lieu les élections des représentants du personnel siégeant au comité social territorial de la commune de Sainte-Marie. Le syndicat autonome de la fonction publique territoriale (SAFPTR) de La Réunion relève appel du jugement en date du 6 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa protestation tendant à l'annulation, d'une part, de ces élections, d'autre part, de la décision par laquelle le maire de Sainte-Marie a accepté la liste de candidats des syndicats FO mairie de Sainte-Marie et UNSA mairie de Sainte-Marie, enfin, de la décision du président du bureau central de vote rejetant son recours gracieux préalable formé le 12 décembre 2022.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 2131-1 du code du travail : " Les syndicats professionnels ont exclusivement pour objet l'étude et la défense des droits ainsi que des intérêts matériels et moraux, tant collectifs qu'individuels, des personnes mentionnées dans leurs statuts. ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 2131-3 du code du travail : " Les fondateurs de tout syndicat professionnel déposent les statuts et les noms de ceux qui, à un titre quelconque, sont chargés de l'administration ou de la direction (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 2131-1 du même code : " Les statuts du syndicat sont déposés à la mairie de la localité où le syndicat est établi. Le maire communique ces statuts au procureur de la République ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 1er du décret du 3 avril 1985 relatif à l'exercice du droit syndical dans la fonction publique territoriale : " Les organisations syndicales des agents de la fonction publique territoriale déterminent librement leurs structures dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur./L'autorité territoriale est informée, en cas de création d'un syndicat ou d'une section syndicale, des statuts et de la liste des responsables de l'organisme syndical lorsque cet organisme compte des adhérents parmi les agents relevant de cette autorité territoriale. ".

4. Enfin, l'article 35 du décret du 10 mai 2021 relatif aux comités sociaux territoriaux des collectivités territoriales et de leurs établissements publics dispose que les candidatures sont présentées par les organisations syndicales qui, dans la fonction publique territoriale, remplissent les conditions fixées au I de l'article 9 bis de la loi du 13 juillet 1983 dont les termes ont été repris à l'article L. 211-1 du code de la fonction publique. Aux termes de ce dernier article : " Peuvent se présenter aux élections professionnelles : / 1° Les organisations syndicales représentant les agents publics qui, dans la fonction publique où est organisée l'élection, sont légalement constituées depuis au moins deux ans à compter de la date de dépôt légal des statuts et satisfont aux critères de respect des valeurs républicaines et d'indépendance;/ 2° Les organisations syndicales représentant les agents publics affiliées à une union de syndicats de la fonction publique remplissant les conditions mentionnées au 1°. / (...) ".

5. En premier lieu, il ne résulte pas des dispositions précitées que les organisations syndicales qui souhaitent présenter des listes en vue de la participation à un scrutin relatif à la désignation des représentants du personnel au comité social territorial des collectivités territoriales ou d'établissements publics doivent nécessairement avoir au préalable déposé leurs statuts en mairie du lieu de l'élection. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 211-1 du code général de la fonction publique que toutes les organisations syndicales de fonctionnaires légalement constituées depuis au moins deux ans à la date de dépôt légal des statuts et satisfaisant aux critères de respect des valeurs républicaines et d'indépendance, dans la fonction publique où est organisée l'élection, ainsi que toutes les organisations syndicales de fonctionnaires affiliées à une union de syndicats de fonctionnaires remplissant ces conditions pourraient se présenter aux élections professionnelles. Il résulte de l'instruction que le syndicat UNSA mairie de Sainte-Marie a notamment déposé ses statuts de constitution auprès de la commune de Sainte-Marie dont le maire a accusé réception le 15 mars 2011 par la production d'un récépissé, produit au dossier, mentionnant l'inscription de cette formalité au registre communal. Par suite, alors même qu'il n'est pas justifié du dépôt en mairie des statuts modifiés adoptés le 23 mai 2022 dont la commune a d'ailleurs eu connaissance, son maire a pu légalement retenir la liste déposée par le syndicat UNSA mairie de Sainte-Marie. Le grief soulevé doit être écarté.

6. En second lieu, aux termes de l'article L. 2135-1 du code du travail : " Les syndicats professionnels et leurs unions mentionnés aux articles L. 2131-2, L. 2133-1 et L. 2133-2 relatifs à la création de syndicats professionnels (...) sont soumis aux obligations comptables définies à l'article L. 123-12 du code de commerce. Lorsque leurs ressources annuelles n'excèdent pas un seuil fixé par décret, ils peuvent adopter une présentation simplifiée de leurs comptes avec la possibilité de n'enregistrer leurs créances et leurs dettes qu'à la clôture de l'exercice. Si leurs ressources annuelles n'excèdent pas un second seuil fixé par décret, ils peuvent tenir un livre enregistrant chronologiquement l'ensemble des mouvements de leur patrimoine. Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret. " et de l'article D. 2135-8 du même code : " Les syndicats professionnels de salariés ou d'employeurs et leurs unions, (...) assurent la publicité de leurs comptes (...) Toutefois, les comptes annuels des syndicats professionnels de salariés (...) et de leurs unions, (...) ne le sont qu'à la condition que cette consultation ne soit pas susceptible de porter atteinte à la vie privée de leurs membres. (...) ".

7. Si le syndicat requérant soutient qu'il appartenait à la collectivité territoriale de vérifier le principe d'indépendance financière des organisations syndicales admises à déposer une liste, qui, elles, devaient justifier de la publication de leurs comptes financiers, il résulte des dispositions précitées de l'article L. 211-1 du code général de la fonction publique qu'il n'appartenait pas à la commune de Sainte-Marie de vérifier au préalable les conditions légales relatives à l'administration interne des organisations syndicales candidates. Au demeurant, il résulte de l'instruction que le syndicat UNSA mairie de Sainte-Marie a justifié de la publication de ses comptes financiers au titre des années 2020 et 2021, consultables sur le site internet de la fédération nationale UNSA Territoriaux. Le syndicat Force ouvrière des territoriaux Sainte-Marie, affilié à la fédération des personnels des services publics et des services de santé Force Ouvrière et à l'union départementale de La Réunion, récemment créé, a déclaré, quant à lui, les comptes au titre de l'année 2023. Par suite, le grief ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que le syndicat SAFPTR de La Réunion n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa protestation. Les conclusions à fin d'injonction sont rejetées par voie de conséquence.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Sainte-Marie, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge du syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion une somme de 1 500 euros à verser au syndicat Force ouvrière des territoriaux Sainte-Marie, sur le fondement des mêmes dispositions. Aux termes du deuxième alinéa de l'article 1153-1 du code civil, sauf disposition contraire de la loi, les intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement. En vertu de ces dispositions, tout jugement prononçant une condamnation à une indemnité fait courir les intérêts jusqu'à son exécution, c'est-à-dire, en principe, et sous réserve d'un délai anormalement long entre la liquidation et le paiement effectif, jusqu'à la date à laquelle l'indemnité est liquidée.

DECIDE :

Article 1er : La requête du syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion est rejetée.

Article 2 : Le syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion versera au syndicat Force ouvrière des territoriaux Sainte-Marie une somme de 1 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat autonome de la fonction publique territoriale de La Réunion, à la commune de Sainte-Marie, au syndicat Force ouvrière mairie de Sainte-Marie et au syndicat Union nationale des syndicats autonomes mairie de Sainte-Marie.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 juillet 2024.

La rapporteure,

Bénédicte MartinLa présidente,

Evelyne BalzamoLe greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX00083


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24BX00083
Date de la décision : 09/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Bénédicte MARTIN
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : SELARL GRIMALDI-MOLINA ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-09;24bx00083 ?
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