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03/07/2024 | FRANCE | N°22BX01562

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 3ème chambre, 03 juillet 2024, 22BX01562


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

La communauté d'agglomération de l'Espace Sud Martinique (CAESM) a demandé au tribunal administratif de la Martinique de condamner l'Etat à lui verser une somme de 41 605 467,22 euros en réparation du préjudice résultant des conditions dans lesquelles a été dissous le syndicat intercommunal du Centre et du Sud de la Martinique (SICSM).



Par un jugement n° 2100205 du 7 avril 2022, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté cette demande.



Pro

cédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 7 juin 2022, la CAESM, représentée par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté d'agglomération de l'Espace Sud Martinique (CAESM) a demandé au tribunal administratif de la Martinique de condamner l'Etat à lui verser une somme de 41 605 467,22 euros en réparation du préjudice résultant des conditions dans lesquelles a été dissous le syndicat intercommunal du Centre et du Sud de la Martinique (SICSM).

Par un jugement n° 2100205 du 7 avril 2022, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 juin 2022, la CAESM, représentée par Mes Landot et Bunod, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Martinique du 16 juin 2022 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 34 182 921,32 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis à l'occasion de la dissolution du SICSM ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 800 euros au titre des frais exposés pour l'instance.

Elle soutient que :

- la dissolution du SICSM est intervenue de manière prématurée, avant l'achèvement des opérations de liquidation et l'établissement des comptes administratifs, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 5211-26 du code général des collectivités territoriales ;

- il existe un lien de causalité entre son préjudice et les fautes ainsi commises ;

- elle justifie de la réalité et du montant de son préjudice.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales

- le code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... ;

- et les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le syndicat intercommunal du Centre et du Sud de la Martinique (SICSM) avait en charge la gestion du service public de l'eau et de l'assainissement sur un territoire composé des communes membres de la communauté d'agglomération de l'Espace Sud Martinique (CAESM), et des communes du Robert et de La Trinité. La compétence " eau et assainissement " ayant été transférée aux communautés d'agglomération en application de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, le SICSM a été dissous par le préfet de la Martinique aux termes de deux arrêtés des 16 novembre 2015 et 29 décembre 2016, avec effet au 1er janvier 2017. Par une lettre du 9 décembre 2020, le président de la CAESM a adressé au préfet de la Martinique une demande tendant à ce que soit versée à la CAESM une somme de 34 182 921,32 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis à l'occasion de la dissolution de la SICSM. La CASEM relève appel du jugement du 16 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser cette somme.

Sur la responsabilité :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 5216-6 du code général des collectivités territoriales : " La communauté d'agglomération est substituée de plein droit au syndicat de communes ou au syndicat mixte dont le périmètre est identique au sien, pour la totalité des compétences qu'il exerce. / La communauté d'agglomération est également substituée de plein droit, pour les compétences qu'elle exerce, au syndicat de communes ou au syndicat mixte inclus en totalité dans son périmètre. / La communauté d'agglomération est également substituée de plein droit, pour les compétences qu'elle exerce, au syndicat de communes ou au syndicat mixte inclus en totalité dans son périmètre ". L'article L. 5212-33 du même code prévoit en outre que : " Le syndicat est dissous : a) Soit de plein droit (...) à la date du transfert à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (...) des services en vue desquels il avait été institué. (...) / L'arrêté ou le décret de dissolution détermine, dans le respect des dispositions des articles L. 5211-25-1 et L. 5211-26 et sous la réserve des droits des tiers, les conditions dans lesquelles le syndicat est liquidé. ".

3. Aux termes de l'article L. 5211-26 du code général des collectivités territoriales : " I. - Un décret ou, selon le cas, un arrêté met fin à l'exercice des compétences de l'établissement public de coopération intercommunale dont la dissolution est demandée, requise ou de plein droit (...) Lorsque les conditions de la liquidation sont réunies, la dissolution de l'établissement public de coopération intercommunale peut être prononcée, par le même décret ou arrêté selon le cas, dans les conditions prévues au III du présent article. II. - En cas d'obstacle à la liquidation de l'établissement public, l'autorité administrative compétente sursoit à la dissolution, qui est prononcée dans un second décret ou arrêté selon le cas. (...) En cas d'absence d'adoption du compte administratif au 30 juin de l'année suivant celle où la fin de l'exercice des compétences a été prononcée, le représentant de l'Etat dans le département arrête les comptes à l'appui du compte de gestion, après avis rendu dans un délai d'un mois par la chambre régionale des comptes. Lorsque la trésorerie disponible de l'établissement public est insuffisante pour couvrir l'ensemble des charges liées à la dissolution, son assemblée délibérante adopte avant le 31 mars de l'année où l'établissement public est liquidé, ou avant le 15 avril de l'année du renouvellement des organes délibérants, un budget de l'exercice de liquidation, qui prévoit la répartition entre les membres des contributions budgétaires. Ces contributions constituent des dépenses obligatoires. A la demande du président de l'établissement public de coopération intercommunale ou s'il constate, au vu des comptes rendus d'avancement prévus au premier alinéa du présent II, que les conditions de la liquidation sont réunies, l'autorité administrative compétente prononce la dissolution de l'établissement public dans les conditions prévues au III. Au plus tard au 30 juin de l'année suivant celle où elle a prononcé la fin de l'exercice des compétences, l'autorité administrative compétente nomme, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, un liquidateur chargé, sous réserve du droit des tiers, d'apurer les dettes et les créances et de céder les actifs. III. - L'autorité administrative compétente prononce la dissolution de l'établissement public de coopération intercommunale par arrêté ou décret et constate, sous réserve des droits des tiers, la répartition entre les membres de l'ensemble de l'actif et du passif au vu du dernier compte administratif de l'établissement public de coopération intercommunale dissous voté par l'organe délibérant ou arrêté par le représentant de l'Etat dans le département dans les conditions prévues au II. "

4. En application de ces dispositions combinées, la dissolution du SICSM est intervenue de plein droit dès le 16 novembre 2015, date à laquelle le préfet a constaté qu'à la suite du retrait des communes de la Trinité et du Robert, le ressort géographique du syndicat était devenu identique à celui de la CAESM. Par un arrêté du même jour, le préfet a toutefois reporté les effets de cette dissolution au 1er janvier 2017 afin, notamment, de permettre à une commission ad hoc de régler les modalités de transfert des biens et personnels du SICSM. Par un second arrêté du 29 décembre 2016, il a explicitement dissous le SICSM, a prononcé le transfert de ses actif et passif à la CAESM et à la communauté d'agglomération CAP Nord Martinique selon une clé de répartition à définir par ces deux collectivités sur la base des modalités comptables résultant de la clôture de l'exercice 2016, les écritures comptables définitives devant être précisées par un arrêté ultérieur.

5. En premier lieu, et contrairement à ce que soutient la CAESM, il ne résulte pas des dispositions du II de l'article L. 5211-26 du code général des collectivités territoriales que d'absence d'adoption du compte administratif de l'établissement public concerné constitue, en lui-même, un obstacle au prononcé de la dissolution de cet établissement. En outre, le préfet, qui a reporté de plus d'un an la dissolution du SICSM afin, précisément, de permettre à la commission ad hoc créée par l'arrêté du 2 décembre 2015 de mener ses travaux, soutient sans être contredit qu'aucune difficulté, notamment comptable, ne lui avait été rapportée dans le courant de l'année 2016, et que la CAESM elle-même lui avait " confirmé la bonne avancée des opérations de liquidation ". Enfin, si la CAESM soutient qu'elle n'a pas disposé du temps nécessaire pour achever ces opérations et que cet achèvement était indispensable à la reprise future des activités du SICSM, ces allégations ne sont assorties d'aucune précision ni élément justificatif. Dans ces conditions, en se bornant à faire valoir que les écritures comptables de l'année 2016 et les opérations de liquidation n'ont été achevées et arrêtées qu'en 2017, la CAESM n'établit pas que la dissolution du SICSM aurait présenté un caractère prématuré.

6. En deuxième lieu, il résulte de l'arrêté du 16 novembre 2015 que les compétences exercées par le SICSM n'ont été transférées au CAESM qu'à compter du 1er janvier 2017. Dès lors, en application des dispositions précitées du II de l'article L. 5211-26 du code général des collectivités territoriales, le préfet n'était tenu d'arrêter les comptes qu'à compter du 30 juin de l'année suivant celle au cours de laquelle la fin de l'exercice des compétences a été prononcée, soit à compter du 30 juin 2017. Par suite, la CAESM n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu les dispositions de cet article en s'abstenant de procéder à l'arrêté des comptes avant de prononcer la dissolution du SICSM par arrêté du 29 décembre 2016.

7. En dernier lieu, si la CAESM soutient que l'absence de connaissance de la situation financière du SICSM était un obstacle à la dissolution et que, dès lors, cette dissolution ne pouvait être prononcée sans qu'un liquidateur soit nommé, ainsi que le prévoient dans cette hypothèse les dispositions du II de l'article L. 5211-26 du code général des collectivités territoriales, ces allégations ne sont assorties d'aucune précision alors que, comme indiqué précédemment, la communauté appelante ne conteste pas la bonne avancée des opérations de liquidation menées par la commission ad hoc.

8. Il résulte de ce qui précède que la CAESM ne peut se prévaloir de l'illégalité des arrêtés des 16 novembre 2015 et 29 décembre 2016 pour demander l'indemnisation des préjudices dont elle se prévaut. En outre, si elle se prévaut également de l'illégalité de l'arrêté du 3 avril 2018 par lequel le préfet de la Martinique a procédé à la répartition des derniers éléments d'actif et de passif du SICSM, ses préjudices ne présentent aucun lien avec cet arrêté, ainsi que l'a relevé le tribunal, et étaient d'ailleurs entièrement constitués antérieurement à la date de son édiction.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la CAESM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à l'indemniser des préjudices qu'elle a subis à l'occasion de la dissolution de la SICSM. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la CAESM est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d'agglomération de l'espace sud Martinique et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2024 à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 juillet 2024.

Le rapporteur,

Manuel A...

Le président,

Laurent PougetLa greffière,

Chirine Michallet

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°22BX01562

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01562
Date de la décision : 03/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. POUGET
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : CABINET LANDOT & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-03;22bx01562 ?
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