Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 30 mai 2023 par lequel le préfet de la Gironde lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
Par un jugement n° 2303288 du 12 octobre 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 9 décembre 2023, M. B..., représenté par Me Aymard, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2023 du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 mai 2023 par lequel le préfet de la Gironde lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir et de le munir dans ce délai d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de l'obligation de quitte le territoire français :
- l'article L. 611-3 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu ; il est atteint d'une hépatite chronique virale D avec infection virale B à antigène HBE négatif pour laquelle un défaut de soins aura des conséquences d'exceptionnelle gravité ; le seul médicament efficace contre le virus de l'hépatite D n'est pas disponible en Géorgie ; le système de santé de son pays ne prendra pas en charge son traitement ;
S'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français :
- elle est privée de base légale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2024, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.Il fait valoir que les moyens ne sont pas fondés et il s'en rapporte au mémoire produit devant le tribunal.
Par ordonnance du 9 avril 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 24 mai 2024 à 12 heures.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 23 novembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Bénédicte Martin.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant géorgien né le 19 septembre 1986, serait entré en France, selon ses déclarations, le 11 novembre 2022. Sa demande d'asile en procédure accélérée a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) par une décision du 6 mars 2023. L'intéressé a fait l'objet d'un arrêté du 30 mai 2023 par lequel le préfet de la Gironde a rejeté pour ce motif sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a interdit de revenir sur le territoire français pour une durée d'un an. M. B... a contesté cet arrêté devant le tribunal administratif de Bordeaux qui a rejeté sa demande par un jugement du 12 octobre 2023. Le requérant relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne l'obligation de quitte le territoire français :
2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) / 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ; (...) " et aux termes de l'article L. 611-3 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".
3. M. B... étant originaire de Géorgie, son droit au maintien sur le territoire français a pris fin dès la notification, le 20 mars 2023, de la décision du directeur général de l'OFPRA refusant de lui reconnaître la qualité de réfugié. Le préfet de la Gironde était dès lors légalement fondé à prendre la mesure d'éloignement contestée. Pour faire échec à son éloignement, l'appelant se prévaut des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, d'une part, il n'établit pas résider régulièrement en France alors qu'à la date de l'arrêté contesté, il ne se trouvait sur le territoire français que depuis un peu plus de six mois. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait informé le préfet de la Gironde de ses problèmes médicaux lors du dépôt ou durant l'instruction de sa demande d'asile, alors que la mesure d'éloignement dont il fait l'objet et les décisions subséquentes ont été prises à la suite du rejet de sa demande d'asile, ni que lesdits problèmes médicaux auraient pu ressortir des pièces ou décisions portées à la connaissance du préfet. Enfin, si M. B... fait valoir qu'il est atteint de l'hépatite D et qu'il fait l'objet d'un suivi médical concernant cette pathologie, les certificats médicaux établis postérieurement à la date de la décision contestée, dont l'un en termes très généraux, ne sont pas de nature à établir que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. La fiche du Conseil de l'Europe ne permet pas davantage d'établir son impossibilité d'accéder effectivement à un traitement. Si le requérant produit une attestation d'un médecin généraliste géorgien précisant le coût de certaines molécules et l'indisponibilité du médicament Hepcludex, lequel ne devait d'ailleurs être prescrit au requérant qu'après réalisation au cours du mois de juin 2023 d'une biopsie hépatique, il ne ressort pas des pièces du dossier que des molécules équivalentes n'existeraient pas et que M. B..., qui ne justifie pas de sa situation financière en Géorgie, ne serait pas en mesure de se les procurer. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.
En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :
4. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, l'exception que M. B... tire de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, à l'encontre de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français, ne peut qu'être écartée.
5. En second lieu, M. B... n'établit pas avoir des liens particuliers en France. Alors même qu'il ne présente pas une menace pour l'ordre public, le préfet a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, fixer à un an la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français en litige.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, fondées sur les dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 11 juin 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,
Mme Pauline Reynaud, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 juillet 2024.
La rapporteure,
Bénédicte MartinLa présidente,
Evelyne BalzamoLe greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23BX03015