Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2022 par lequel la préfète de la Gironde lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une mesure d'interdiction de retour sur le territoire national pour une durée de trois ans, ainsi que l'arrêté du même jour par lequel la même autorité l'a assigné à résidence dans le département de la Gironde pour une durée de quarante-cinq jours.
Par un jugement n° 2205542 du 19 octobre 2022, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour administrative d'appel :
Par une requête enregistrée le 15 décembre 2023, M. C..., représenté par Me Duten, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 19 octobre 2022 de la magistrate désignée du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2022 par lequel la préfète de la Gironde lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une mesure d'interdiction de retour sur le territoire national pour une durée de trois ans, ainsi que l'arrêté du même jour par lequel la même autorité l'a assigné à résidence dans le département de la Gironde pour une durée de quarante-cinq jours ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de faire procéder à l'effacement de son signalement dans le système d'information Schengen ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement, à son conseil, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle a été prise par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée en ce que les éléments concernant sa vie privée et familiale n'ont pas été pris en compte par l'autorité préfectorale qui a seulement indiqué qu'il était célibataire et sans enfant ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation dès lors qu'il n'a jamais été condamné et que le seul renseignement de ses antécédents judiciaires ne suffit pas à caractériser une menace pour l'ordre public ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il est intégré en France où se trouvent ses attaches personnelles depuis plus de trois ans.
S'agissant de la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :
- elle est insuffisamment motivée ;
- le seul fait qu'il est entré irrégulièrement en France n'est pas de nature à justifier cette décision tandis qu'il n'a jamais fait l'objet d'aucune mesure d'éloignement.
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
- elle a été prise par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée faute de prendre en considération sa situation personnelle et familiale ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;
- elle n'est pas justifiée dans son principe et elle est excessive dans sa durée dès lors qu'il n'a jamais fait l'objet d'aucune mesure d'éloignement et que le seul renseignement de ses antécédents judiciaires ne suffit pas à caractériser une menace pour l'ordre public tandis qu'il n'a jamais été condamné ;
- elle revient à le sanctionner une deuxième fois.
S'agissant de la décision portant assignation à résidence :
- elle a été prise par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est injustifiée ;
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
La requête a été transmise au préfet de la Gironde qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Par une ordonnance du 9 février 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 19 mars 2023.
M. D... C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2022/016792 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux du 9 février 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Karine Butéri a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... C..., ressortissant algérien né le 13 avril 1999, déclare être entré en France en 2020. Par un arrêté du 16 octobre 2022, la préfète de la Gironde lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une mesure d'interdiction de retour sur le territoire national pour une durée de trois ans. Par un arrêté du même jour, la même autorité l'a assigné à résidence dans le département de la Gironde pour une durée de quarante-cinq jours. L'intéressé relève appel du jugement du 19 octobre 2022 par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés.
Sur la légalité des décisions attaquées :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, M. C... se borne à reprendre en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse qui a été apportée par la magistrate désignée du tribunal administratif sur ce point, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision en litige. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par le premier juge.
3. En deuxième lieu, M. C... soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en ce que les éléments concernant sa vie privée et familiale n'ont pas été pris en compte par l'autorité préfectorale qui a seulement à cet égard indiqué qu'il était célibataire et sans enfant. Il ressort toutefois des termes de l'arrêté attaqué que, s'agissant des considérations de fait sur lesquelles elle s'est fondée, la préfète de la Gironde a retenu qu'il ne pouvait justifier être entré régulièrement sur le territoire français et s'y était maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité depuis une date indéterminée. Au surplus, l'arrêté mentionne également, pour motiver la mesure d'interdiction de retour sur le territoire, qu'il est sans domicile fixe et sans ressources légales sur le territoire national, qu'il a été interpellé pour des faits de dégradations volontaires et qu'il est défavorablement connu des services de police pour des faits de vol simple, d'injure publique envers un particulier en raison de sa race, de sa religion ou de son origine par parole, image, écrit ou moyen de communication par voie électronique et menace de mort réitérée. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que cette décision, qui n'avait pas à exposer tous les éléments de sa situation personnelle, serait insuffisamment motivée en fait.
4. En troisième lieu, M. C... repend son moyen de première instance tiré du défaut d'examen sérieux de sa situation au soutien duquel il fait nouvellement valoir que la préfète de la Gironde ne pouvait estimer que sa présence sur le territoire français représentait une menace pour l'ordre public en se fondant seulement sur les signalements dont il a fait l'objet auprès des services de police pour des faits pour lesquels il n'a ensuite pas été condamné. Toutefois, il résulte des indications portées dans la décision attaquée que, pour faire obligation à M. C... de quitter le territoire français, la préfète de la Gironde s'est fondée sur le seul fait qu'il ne pouvait justifier être entré régulièrement sur le territoire français et s'y était maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité et qu'elle a, par ailleurs, pris en compte la situation de l'intéressé au regard de ses liens personnels et familiaux et au regard de ses conditions d'entrée et de séjour en France. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut d'examen sérieux de la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté.
5. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application de ces dispositions et stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
6. Si M. C... se prévaut de ce qu'il parle couramment le français, cette seule circonstance, à la supposer établie, ne traduit pas une intégration particulière en France. Alors qu'il soutient, sans l'établir, qu'il serait entré en France en 2020, il ne justifie d'aucun lien personnel sur le territoire français où il est célibataire et sans charge de famille. Dans ces conditions, la préfète de la Gironde n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision contestée a été prise et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :
7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; (...) 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5. ".
8. D'une part, la décision portant refus d'octroi de délai de départ volontaire vise l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les 1°, 4° et 8° de l'article L. 612-3 du même code, et mentionne que M. C... est entré irrégulièrement sur le territoire français, qu'il ne remplit aucune condition pour y résider et qu'il ne présente pas de garanties de représentation suffisantes. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision portant refus de délai de départ volontaire doit être écarté.
9. D'autre part, alors qu'il n'est pas contesté par M. C... qu'il est entré irrégulièrement sur le territoire français où il s'est depuis lors maintenu en situation irrégulière, il ressort de son audition, le 16 octobre 2022, par les services de police, qu'il est dépourvu de tout document d'identité et qu'il ne veut pas retourner dans son pays d'origine. Dans ces conditions, et alors même qu'il n'a fait l'objet d'aucune précédente mesure d'éloignement, la préfète de la Gironde n'a pas méconnu les dispositions citées au point 7 des articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant d'accorder un délai de départ volontaire à M. C....
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
10. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, soulevé à l'encontre de la décision en litige, doit être écarté.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
11. Aux termes de l'article L. 612-6 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...). / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. / (...) La durée de l'interdiction de retour (...) ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour (...) sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
12. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les motifs qu'invoque l'autorité compétente sont de nature à justifier légalement dans son principe et sa durée la décision d'interdiction de retour et si la décision ne porte pas au droit de l'étranger au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. En revanche, lorsqu'il est saisi d'un moyen le conduisant à apprécier les conséquences de la mesure d'interdiction de retour sur la situation personnelle de l'étranger et que sont invoquées des circonstances étrangères aux quatre critères posés par les dispositions précitées, il incombe seulement au juge de l'excès de pouvoir de s'assurer que l'autorité compétente n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
13. Pour décider de prononcer à l'encontre de M. C..., soumis à une obligation de quitter le territoire français sans délai, une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans, la préfète de la Gironde a tenu compte de ce qu'il est entré et s'est maintenu irrégulièrement en France depuis une date indéterminée, s'y trouve sans domicile fixe et sans ressources légales, ne justifie pas de l'intensité et de l'ancienneté de liens en France, a été interpellé pour des faits de dégradations volontaires et est défavorablement connu des services de police pour des faits de vol simple, d'injure publique envers un particulier en raison de sa race, de sa religion ou de son origine par parole, image, écrit ou moyen de communication par voie électronique et menace de mort réitérée.
14. M. C... a fait l'objet d'une mesure d'éloignement pour laquelle aucun délai de départ volontaire n'a été accordé. Il entre ainsi dans les cas prévus à l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour lesquels le préfet doit assortir son obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, sauf s'il existe des circonstances humanitaires de nature à justifier qu'une telle interdiction ne soit pas décidée.
15. Toutefois, alors qu'il est constant que M. C... n'a fait l'objet d'aucune précédente mesure d'éloignement et qu'il n'est pas contesté qu'il n'a pas été condamné pour les faits mentionnés au point 13, qui ont seulement fait l'objet d'une mention dans le traitement d'antécédents judiciaires constitué par les services de police, l'intéressé est fondé à soutenir qu'en fixant à trois ans, soit la durée maximale prévue par les dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'interdiction de retour prononcée à son encontre, la préfète de la Gironde a entaché cette décision d'une erreur d'appréciation.
16. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués à l'encontre de cette décision, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. Il y a lieu, dès lors, d'annuler cette décision.
En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
17. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, soulevé à l'encontre de la décision en litige, doit être écarté.
18. En deuxième lieu, par un arrêté du 30 août 2022 régulièrement publié au recueil des actes administratifs du lendemain, produit devant le tribunal, la préfète de la Gironde a donné délégation à Mme A... B..., sous-préfète de l'arrondissement de Blaye et signataire de la décision litigieuse, à l'effet de signer, à compter du 1er septembre 2022, toutes décisions d'éloignement et décisions accessoires s'y rapportant prises en application des livres II, IV, V, VI, VII et VIII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les décisions d'assignation à résidence relevant des six arrondissements de la Gironde lors des permanences qu'elle est amenée à assurer. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision litigieuse, dont la permanence du dimanche 16 octobre 2022 n'est pas contestée, doit être écarté.
19. En troisième lieu, M. C... se borne à reprendre en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse qui a été apportée par la magistrate désignée du tribunal administratif sur ce point, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision en litige. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par le premier juge.
20. En quatrième lieu, le moyen tiré de ce que la décision portant assignation à résidence est injustifiée est dépourvu de toute précision permettant d'en apprécier le bien-fondé et doit être écarté pour ce motif.
21. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, et à en obtenir l'annulation.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
22. Aux termes de l'article L. 613-5 du code de l'entrée et du séjour
des étrangers en France et du droit d'asile : " L'étranger auquel est notifiée une interdiction
de retour sur le territoire français est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins
de non-admission dans le système d'information Schengen, conformément à l'article 24 du règlement (UE) n° 2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d'application de l'accord de Schengen et modifiant et abrogeant le règlement (CE) n° 1987/2006. Les modalités de suppression du signalement de l'étranger en cas d'annulation ou d'abrogation de l'interdiction de retour sont fixées par voie réglementaire. ". Aux termes de l'article R. 613-7 du même code : " Les modalités de suppression du signalement d'un étranger effectué au titre d'une décision d'interdiction de retour sont celles qui s'appliquent, en vertu de l'article 7 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées, aux cas d'extinction du motif d'inscription dans ce traitement. ". Aux termes de l'article 7 du décret du 28 mai 2010 : " Les données à caractère personnel enregistrées dans le fichier sont effacées sans délai en cas (...) d'extinction du motif de l'inscription. (...) ".
23. Le présent arrêt, qui annule la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, implique l'effacement du signalement de M. C... aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Gironde de mettre en œuvre la procédure d'effacement de ce signalement dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais exposés à l'occasion du litige :
24. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite,
son conseil peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances
de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros, à verser
à Me Duten.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement de la magistrate désignée du tribunal administratif de Bordeaux du 19 octobre 2022 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. C... tendant à l'annulation de la décision du 16 octobre 2022 de la préfète de la Gironde lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans.
Article 2 : La décision du 16 octobre 2022 de la préfète de la Gironde portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Gironde de faire procéder à l'effacement des informations concernant l'interdiction de retour sur le territoire français de M. C... dans le système d'information Schengen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.
Article 5 : L'Etat versera à Me Duten la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., au préfet de la Gironde et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 4 juin 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
Mme Karine Butéri, présidente-assesseure,
Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 juin 2024.
La rapporteure,
Karine Butéri
La présidente,
Elisabeth Jayat
La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23BX03073