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07/05/2024 | FRANCE | N°24BX00444

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 1ère chambre, 07 mai 2024, 24BX00444


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 12 juin 2023 par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour.



Par un jugement n°2303747 du 7 février 2024, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision du 12 juin 2023.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 22 février 2024, le préfet de la Gironde demande à l

a cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 février 2024.



Il soutient qu'il n'était pas ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 12 juin 2023 par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n°2303747 du 7 février 2024, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision du 12 juin 2023.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 février 2024, le préfet de la Gironde demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 février 2024.

Il soutient qu'il n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour pour obtenir son avis sur la demande de titre de séjour de Mme B... dès lors qu'un étranger ne peut se prévaloir du temps passé sur le territoire français au titre des dix ans de résidence habituelle si ce temps correspond à une mesure d'interdiction du territoire à laquelle il s'est soustrait ; ainsi, il convient de déduire des 10 ans de résidence de l'intéressée la durée de la mesure d'interdiction du territoire, réduisant son temps de présence à 8 ans et 9 mois sur le territoire au moment de la décision en litige, soit une durée inférieure aux 10 années exigées.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 avril 2024, Mme A... B..., représentée par Me Lanne, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à Me Lanne sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que les moyens soulevés par le préfet de la Gironde ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 avril 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Edwige Michaud,

- et les observations de Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., née le 25 février 1963, de nationalité arménienne est entrée en France le 16 septembre 2012 et a déposé une demande d'asile le 18 septembre 2012. Cette demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 24 octobre 2013 et son recours contre cette décision devant la Cour nationale du droit d'asile a été rejeté le 24 juillet 2014. Le 28 juillet 2014, elle a sollicité son admission au séjour sur le fondement du 1° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 20 avril 2015, le préfet de la Gironde a rejeté cette demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours. L'intéressée s'est ensuite maintenue irrégulièrement sur le territoire français. Elle a formé le 4 novembre 2019 une nouvelle demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui a été rejeté par une décision du 3 juin 2021. Elle a formulé une demande de réexamen de sa demande d'asile le 20 octobre 2020 qui a été déclarée irrecevable par une décision de l'OFPRA du 18 décembre 2020. Par arrêté du 7 octobre 2021, le préfet de la Gironde a alors rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans. Le 13 mars 2023, elle a de nouveau sollicité la délivrance d'un titre de séjour, sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 12 juin 2023, le préfet de la Gironde a rejeté cette demande. Le préfet de la Gironde relève appel du jugement du 7 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé sa décision du 12 juin 2023.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Pour annuler la décision du 12 juin 2023, le tribunal administratif, après avoir jugé que la requérante justifiait d'une résidence habituelle sur le territoire français depuis plus de 10 ans, a accueilli le moyen tiré de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour en méconnaissance de l'article L.435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

3. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 ".

4. Si le préfet de la Gironde soutient qu'il convient de déduire des dix ans de résidence de l'intéressée la durée de la mesure d'interdiction du territoire, réduisant son temps de présence à 8 ans et 9 mois sur le territoire au moment de la décision en litige, la durée de résidence habituelle requise par les dispositions précitées est relative à la seule situation effective de l'intéressée et les mesures d'éloignement ou d'interdiction de retour non exécutées prononcées à l'encontre de Mme B... ne peuvent être prises en considération à ce titre. Dans ces conditions, et alors que le préfet ne conteste pas que Mme B... résidait habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée, c'est à bon droit que le tribunal a retenu qu'en application des dispositions précitées de l'article L.435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il était tenu, avant de statuer sur sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, de saisir la commission du titre de séjour.

5. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Gironde n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé la décision du 12 juin 2023.

Sur les frais liés au litige :

6. Mme B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à Me Lanne, avocat de Mme B..., de la somme de 1 200 euros.

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Gironde est rejetée.

Article 2 : L'État versera à Me Lanne une somme de 1 200 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Mme A... B....

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente,

Mme Edwige Michaud, première conseillère,

Mme Kolia Gallier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 mai 2024.

La rapporteure,

Edwige MichaudLa présidente,

Christelle Brouard-Lucas

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX00444


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24BX00444
Date de la décision : 07/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROUARD-LUCAS
Rapporteur ?: Mme Edwige MICHAUD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL CERA
Avocat(s) : LANNE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-07;24bx00444 ?
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