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25/04/2024 | FRANCE | N°23BX02773

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 4ème chambre, 25 avril 2024, 23BX02773


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2022 par lequel la préfète de la Charente a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2202854 du 28 septembre 2023, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et des pièces, enregistrées les 8 novembre et 12 décembre 2023, M. B..., représenté par M

e Rahmani, demande à la cour :



1°) d'annuler le jugement n° 2202854 du tribunal administratif de Poitiers...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2022 par lequel la préfète de la Charente a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2202854 du 28 septembre 2023, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces, enregistrées les 8 novembre et 12 décembre 2023, M. B..., représenté par Me Rahmani, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2202854 du tribunal administratif de Poitiers du 28 septembre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2022 de la préfète de la Charente ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Charente de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- son comportement actuel ne constitue pas une menace pour l'ordre public ; la préfète ne pouvait, à cet égard, se fonder sur les violations d'une interdiction de paraitre les 7 et 16 janvier 2020 pour lesquelles il a simplement fait l'objet d'un rappel à ses obligations ; dès lors, l'arrêté est entaché d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- eu égard à sa situation personnelle et familiale, la décision attaquée porte une atteinte manifestement excessive au droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée à la préfète de la Charente, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 décembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Michaël Kauffmann a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant malien né le 15 mai 1987, est entré en France, selon ses affirmations, en août 1987 et a sollicité, le 1er février 2021, un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 22 septembre 2022, la préfète de la Charente, après avoir saisi pour avis la commission départementale du titre de séjour, a rejeté sa demande, au motif que son comportement constitue une menace pour l'ordre public. M. B... relève appel du jugement du 28 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 septembre 2022.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ". Aux termes de l'article L. 432-1 du même code : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été condamné le 16 juin 2006 à dix mois d'emprisonnement dont quatre mois avec sursis pour transport, acquisition, détention et cession non autorisée de stupéfiants. Pour ces mêmes faits, commis en récidive, l'intéressé a été condamné le 24 décembre 2010 à quatre ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis et le 29 novembre 2013 à quatre ans d'emprisonnement. Par ailleurs, le requérant a été condamné le 5 février 2013 à 3 mois d'emprisonnement pour destruction du bien d'autrui et vol en réunion en récidive, le 6 juin 2016 à six mois d'emprisonnement pour recel de bien provenant d'un délit et le 16 septembre 2016 pour outrage et violence sur une personne dépositaire de l'autorité publique. A raison de ces condamnations, M. B... a été incarcéré du 3 décembre 2010 au 24 juillet 2012, du 5 février au 22 mars 2013 puis du 27 octobre 2013 au 10 août 2019. Compte tenu de la gravité et de la réitération des faits pour lesquels l'intéressé a été condamné et incarcéré jusqu'en 2019 et quand bien même la dernière condamnation datait de six années à la date de l'arrêté contesté, la préfète n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 432-1 rappelées ci-dessus en estimant qu'ils témoignaient d'un comportement de nature à menacer l'ordre public et en lui refusant, pour ce seul motif, la délivrance d'un titre de séjour, suivant l'avis défavorable de la commission départementale du titre de séjour du 16 septembre 2021. S'il résulte des termes de l'arrêté que la préfète s'est également fondée sur la circonstance que le requérant est défavorablement connu des services de police pour deux violations d'une interdiction de paraitre les 7 et 16 janvier 2020 pour lesquelles il allègue avoir simplement fait l'objet d'un rappel à ses obligations, il ressort des pièces du dossier que la préfète aurait pris la même décision si elle n'avait pas retenu cette circonstance. Dès lors, les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur d'appréciation doivent être écartés.

4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

5. M. B... soutient qu'il réside avec sa compagne, Mme A..., de nationalité française, depuis le mois de septembre 2020 et qu'il est père d'un enfant français né de cette union le 5 juillet 2021. Toutefois, alors qu'au demeurant, la décision contestée n'implique pas son éloignement, toutes les pièces versées au dossier par le requérant pour établir la réalité, l'intensité et la stabilité de cette relation et justifier qu'il participerait effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille, telles une déclaration de concubinage, un certificat médical, une attestation de paiement de la caisse d'allocations familiales, un contrat de fourniture d'eau et des attestations de sa compagne ou de proches, sont postérieures à la date de l'arrêté contesté et ne sont pas de nature, en l'espèce, à révéler une situation qui lui est antérieure. Par ailleurs, le requérant n'établit ni même n'allègue avoir exercé une activité professionnelle en France ou disposer de ressources financières stables et ne justifie pas, par la seule production de quelques attestations postérieures à la date de l'arrêté attaqué, avoir tissé, en dehors de son environnement familial immédiat, des liens d'une particulière intensité et stabilité sur le territoire français. Dès lors, en tenant compte du comportement de l'intéressé qui, ainsi qu'il a été exposé au point 3, constitue une menace à l'ordre public, et quand bien même il participerait à des missions de bénévolat, compte tenu des conditions de son séjour en France, la préfète de la Charente n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision lui refusant le séjour a été prise et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de la Charente.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Bénédicte Martin, présidente,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 avril 2024.

Le rapporteur,

Michaël Kauffmann La présidente,

Bénédicte Martin La greffière,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 23BX027732


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX02773
Date de la décision : 25/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: M. Michaël KAUFFMANN
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : RAHMANI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-25;23bx02773 ?
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