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02/04/2024 | FRANCE | N°22BX00956

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 5ème chambre, 02 avril 2024, 22BX00956


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des pénalités mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2016 au 31 janvier 2019, pour un montant total de de 39 701 euros.



Par un jugement n° 2002636, 2002637 du 28 janvier 2022, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :



Par une requ

te et un mémoire, enregistrés le 25 mars 2022 et le 18 novembre 2023, Mme A..., représentée par Me Richard, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des pénalités mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2016 au 31 janvier 2019, pour un montant total de de 39 701 euros.

Par un jugement n° 2002636, 2002637 du 28 janvier 2022, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 mars 2022 et le 18 novembre 2023, Mme A..., représentée par Me Richard, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2002636, 2002637 du 28 janvier 2022 ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2016 au 31 janvier 2019, ainsi que des pénalités correspondantes, pour un montant total de 39 701 euros en raison des loyers qu'elle a perçus pour la location d'un local commercial ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure de taxation d'office est irrégulière, dès lors que l'administration n'a pas recherché si la location par elle d'un local à une société devait être qualifiée d'activité commerciale ;

- la location par elle d'un local à la SAS Esprit du Sel ne constitue pas une activité commerciale dès lors que ce local n'était pas équipé du matériel nécessaire à l'exploitation de l'activité de la société ;

- les revenus tirés de cette location doivent être taxés dans la catégorie des revenus fonciers et non dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ;

- le bail portait également sur une dépendance louée à titre privatif qui ne saurait être soumise à la TVA ;

- elle n'avait pas à souscrire de déclaration au titre de la TVA pour ces revenus fonciers ;

- les pénalités pour activité occulte, prévues par l'article 1728 du code général des impôts, ne sont pas fondées par voie de conséquence.

Par deux mémoires enregistrés le 27 septembre 2022 et le 29 novembre 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés sont infondés et que les rappels de TVA pouvaient également être fondés sur les dispositions de l'article 283 du code général des impôts.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sébastien Ellie ;

- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle pour les revenus perçus en 2016 et en 2017, et d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017, étendue en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) jusqu'au 31 janvier 2019. À l'issue de ces contrôles et dans le cadre d'une procédure d'imposition d'office, l'administration fiscale lui a adressé le 13 juin 2019 une proposition de rectification comportant notamment un rappel de taxe sur la valeur ajoutée à raison des loyers que lui a versés la société par actions simplifiée (SAS) Esprit du Sel pour l'occupation d'un local à usage commercial, cette location ayant été qualifiée d'activité commerciale occulte. Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis en recouvrement le 21 septembre 2019 pour la somme de 21 250 euros en droits et 18 181 euros en pénalités. Mme A... demande à la cour d'annuler le jugement du 28 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces rappels de TVA établis au titre de la période correspondant aux années 2016, 2017 et 2018.

Sur l'assujettissement à la TVA :

2. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ". Aux termes de l'article 256 A du code général des impôts : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au cinquième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. (...) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l'exploitation d'un bien meuble corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence ". Aux termes de l'article 261 D du code général des impôts : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 2° Les locations de terrains non aménagés et de locaux nus (...) ". Doit être regardée comme une location de locaux commerciaux équipés celle qui porte sur des locaux qui sont pourvus du mobilier ou du matériel nécessaires, c'est-à-dire de ceux sans lesquels l'exploitation commerciale à laquelle ils sont destinés n'est pas possible.

3. Il résulte de l'instruction que Mme A... a loué, par deux baux successifs, un local de 58 m² et une cave à la SAS Esprit du Sel, sur le territoire de la commune de La Flotte-en-Ré, destinés à l'exploitation d'une boutique de vente de sel et de fleur de sel. Le bail du 22 janvier 2016 porte sur une période de huit mois, entre le 15 mars 2016 et le 15 novembre 2016, pour un loyer annuel hors charges et hors taxe de 32 000 euros, à verser en huit échéances de 4 000 euros chacune. Ce bail précise que " le loyer est assujetti à la TVA au taux en vigueur à sa date d'exigibilité, à la charge du preneur de plein droit ". Le bail du 15 novembre 2016 porte sur une période de 23 mois, entre le 16 novembre 2016 et le 15 octobre 2018, pour un loyer annuel de 36 000 euros hors TVA pour la période courant du 16 novembre 2016 au 15 novembre 2017, soit 3 000 euros par mois, et de 39 600 euros hors TVA pour la période courant du 16 novembre 2017 au 15 octobre 2018, soit 3 600 euros par mois. Ce second bail précise que la TVA s'ajoute au montant des loyers ainsi fixé.

4. Il résulte de l'instruction, et notamment des deux baux du 22 janvier 2016 et du 15 novembre 2016, que le local en cause a été affecté à l'usage commercial " tout commerce sauf restauration ". La SAS Esprit du Sel a notamment pour objet la vente de produits du sel, activité entrant dans le champ des baux conclus avec Mme A..., lesquels mentionnent que les loyers sont augmentés de la TVA. Le local comportait des équipements divers, énumérés dans le bail au titre de " mobilier à usage commercial (2 meubles étagère en bois, 1 étagère métallique noire, 2 étagères métalliques grises, 1 meuble console de caisse, 1 ilot central, 1 étagère murale, 1 plan de travail, 5 panneaux bois et luminaires) ". Dans le cadre de l'exercice du droit de communication de l'administration, la SAS Esprit du sel a indiqué par un courriel du 4 mars 2019 que ces équipements, expressément mentionnés dans le second bail, avaient été mis à sa disposition dès la conclusion du premier bail, en janvier 2016. Si la SAS Esprit du Sel a été amenée à compléter cet équipement, notamment par une caisse enregistreuse, des étagères et présentoirs supplémentaires et des bazennes pour entreposer les produits, il résulte de l'instruction que l'ensemble des agencements, équipements ou moyens essentiels à l'exercice de l'activité a été mis à disposition de la société, pour permettre l'exposition et la vente de produits du sel. Par suite, l'administration fiscale a pu valablement considérer que Mme A... exerçait une activité économique au sens de l'article 256 A du code général des impôts et retenir que les revenus tirés de la location du local en cause, y compris la cave affectée à la même activité, étaient assujettis à la TVA.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

5. L'article 287 du code général des impôts dispose que : " 1. Tout redevable de la taxe sur la valeur ajoutée (...) est tenu de remettre au service des impôts dont il dépend et dans le délai fixé par arrêté une déclaration conforme au modèle prescrit par l'administration (...) ". L'article L. 66 du livre des procédures fiscales dispose que : " Sont taxés d'office : (...) 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes (...) ".

6. Mme A..., assujettie à la TVA, comme il a été dit précédemment, et n'ayant pas déposé de déclaration de TVA au titre des périodes faisant l'objet de la procédure de vérification, en méconnaissance des dispositions de l'article 287 du code général des impôts précité, l'administration fiscale a pu valablement recourir à la procédure de taxation d'office, les conditions posées par l'article L. 66 du livre des procédures fiscales étant remplies. Mme A... ne peut, par ailleurs, utilement soutenir que l'administration n'a pas procédé à la qualification de l'activité de location poursuivie par la requérante avant de recourir à la procédure de taxation d'office, la qualification de l'activité se rattachant au principe de l'assujettissement à la TVA et non à la régularité de la procédure.

Sur les pénalités :

7. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : (...) c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte (...) ".

8. Mme A... n'ayant déposé aucune déclaration de TVA pour l'activité de location d'un local professionnel à la SAS Esprit du Sel, laquelle a versé des loyers comprenant la TVA, cette activité doit être regardée comme occulte et l'administration fiscale a pu valablement appliquer la majoration de 80% prévue au c du 1 de l'article 1728 du code général des impôts.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de Mme A... doit être rejetée, en ce compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Une copie en sera adressée à la direction régionale de contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 12 mars 2024 où siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

M. Sébastien Ellie, premier conseiller,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 avril 2024.

Le rapporteur,

Sébastien Ellie

La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°22BX00956


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX00956
Date de la décision : 02/04/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: M. Sébastien ELLIE
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : RICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-02;22bx00956 ?
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