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26/03/2024 | FRANCE | N°22BX00942

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 4ème chambre, 26 mars 2024, 22BX00942


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société Conseil gestion financement de flotte (CGFF) a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de prononcer la réduction, à hauteur des sommes de 1 374 euros et de 3 016 euros, de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie au titre des années 2016 et 2018 pour le local qu'elle exploite 1, rue Nicolas Appert sur la commune de Baie-Mahault.



Par un jug

ement n° 2100077 et 2100078 du 10 février 2022, le tribunal administratif de la Guadeloupe a re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Conseil gestion financement de flotte (CGFF) a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de prononcer la réduction, à hauteur des sommes de 1 374 euros et de 3 016 euros, de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie au titre des années 2016 et 2018 pour le local qu'elle exploite 1, rue Nicolas Appert sur la commune de Baie-Mahault.

Par un jugement n° 2100077 et 2100078 du 10 février 2022, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 mars 2022, et des mémoires complémentaires enregistrés le 28 septembre 2022, 20 juillet 2023 et 28 septembre 2023, la société CGFF, représentée par Me Zapf, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 10 février 2022 ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe pour frais de chambres de commerce et d'industrie pour les montants respectifs au titre des années 2016 et 2018 de 1 374 euros et de 3 016 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de 1'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le local type n° 49 du procès-verbal des évaluations foncières de la commune de Baie-Mahault de référence ayant servi à l'évaluation de son établissement ne peut être retenu comme terme de comparaison ; le propriétaire et l'occupant de ce local sont une seule et même personne ; ce local-type, d'une superficie de 511 m² et dont le tarif atteint 16,46 euros, accueille une activité différente de la sienne ; elle propose deux autres locaux-type pouvant servir de terme de comparaison pour l'évaluation de son local permettant de retenir un tarif unitaire de 9,38 euros/m² pondérés, justifiant des dégrèvements de 1 108,96 euros et de 170 euros au titre de la CFE, de la TSE et de la TCCI au titre de l'année 2016 ;

- la CFE 2018 mise à sa charge doit être calculée par application des différentes mesures de neutralisation des effets de la réforme des valeurs locatives des locaux professionnels, en prenant en compte la valeur locative 1975 telle qu'elle ressort de sa contestation relative à l'année 2016 ; elle peut dès lors prétendre à un dégrèvement de 3 016 euros ;

- l'administration fiscale, qui a finalement admis en 2020 que le local-type n° 49 du procès-verbal de Baie-Mahault ne peut être retenu, propose le local-type n° 45 de la commune de Baie-Mahault, qui ne peut davantage servir de référence dès lors qu'il est évalué par comparaison avec le local-type n° 54 construit en 1995, qui n'était pas loué au 1er janvier 1975 ;

- les éléments factuels empêchent de considérer le caractère valide du local-type n° 54 des Abymes ; l'ancien local-type n° 2 des Abymes a été supprimé ; le procès-verbal litigieux ne mentionne pas sa date de construction ; le procès-verbal des Abymes dans lequel figure le local-type n° 54 mentionne une date de construction de 1995, postérieure à la date d'édiction du procès-verbal de 1977.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 4 août 2022 et les 7 septembre et 19 octobre 2023, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, le ministre chargé des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la société CGFF ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 29 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 23 octobre 2023 à 12h00.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Martin,

- et les conclusions de Mme Nathalie Gay, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée Conseil gestion financement de flotte (CGFF) exploite un bâtiment à usage commercial zone industrielle de Jarry sur le territoire de la commune de Baie-Mahault. Elle a été assujettie, à raison de cet établissement, à la cotisation foncière des entreprises (CFE), à la taxe spéciale d'équipement (TSE) et à la taxe additionnelle pour frais de chambres de commerce et d'industrie, au titre des années 2016 et 2018. Par deux réclamations introduites les 11 décembre 2017 et 23 décembre 2019, la société CGFF a demandé une réduction de ces impositions. Ses réclamations ayant été rejetées, la société CGFF a porté le litige devant le tribunal administratif de la Guadeloupe, en sollicitant, par deux demandes, la décharge partielle des cotisations primitives de cotisation foncière des entreprises, de taxe spéciale d'équipement et de taxe additionnelle pour frais de chambres de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre des deux années à raison des locaux qu'elle exploite à Baie-Mahault. La société CGFF relève appel du jugement du 10 février 2022 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté ses demandes en tant qu'elles portent sur la décharge partielle de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe additionnelle pour frais de chambres de commerce et d'industrie, à hauteur des sommes respectives de 1 374 euros et de 3 016 euros pour les années 2016 et 2018.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'année 2016 :

2. Aux termes de l'article 1498 du code général des impôts, dans sa version applicable aux impositions de l'année 2016 : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; / 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; / 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe. ".

3. Aux termes de l'article 324 AA de l'annexe III du même code alors en vigueur : " La valeur locative cadastrale des biens loués à des conditions anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un titre autre que celui de locataire, vacants ou concédés à titre gratuit est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance ". Aux termes du I de l'article 324 Z de l'annexe III au code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année en litige : " L'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types. ".

4. Il résulte des dispositions précitées que lorsque l'administration procède à une évaluation par comparaison, il appartient au contribuable, s'il s'y croit fondé, de contester devant le juge de l'impôt la pertinence du local-type retenu pour le calcul de la valeur locative. Pour arrêter la valeur locative de l'immeuble à évaluer, l'administration, faisant application de la méthode par comparaison, peut procéder par comparaisons itératives, pourvu qu'il n'existe pas pour chacune de ces évaluations un terme de comparaison plus approprié, que le terme de comparaison ultime ne soit pas inadéquat et que l'analogie de la situation économique des communes en cause puisse être admise. L'administration a la faculté, à tout moment au cours de la procédure contentieuse, de justifier l'évaluation de la valeur locative d'un bien par référence à un terme de comparaison autre que celui, inapproprié, auquel elle s'est initialement référée pour autant que son évaluation soit établie dans le respect des dispositions de l'article 1498 précité.

5. La société requérante conteste le choix du local type n° 49 du procès-verbal des évaluations foncières de la commune de Baie-Mahault de référence ayant servi initialement à l'évaluation de son établissement par l'administration fiscale et propose deux autres locaux-types à usage d'atelier pour réparations automobiles. Toutefois, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de la Guadeloupe, la société CGFF ne produit aucune pièce de nature à établir que ses locaux, d'une surface pondérée de 403 m², sont principalement à usage d'atelier mécanique alors qu'il résulte de l'instruction que son activité déclarée est celle de loueur de véhicules longue durée. L'administration propose, devant la cour, de substituer au local type n° 49 d'une surface pondérée de 511 m² et au tarif de 16, 46 euros/m² le local-type n° 45 construit en 2003, à usage de bureau d'une surface de 98 m² situé à Baie-Mahault, évalué par comparaison avec le local-type n° 54 du procès-verbal des Abymes du 31 janvier 2005, et de retenir le tarif de 17,68 euros/m² après application d'un abattement de 20 % pour tenir compte de la différence de superficie. La société appelante conteste en réplique le choix de ce local-type au motif qu'il est évalué par comparaison avec le local-type n° 54, construit en 1995, postérieurement au procès-verbal établi en 1977, lequel renvoie au local-type n° 2 du procès-verbal des Abymes du 18 février 1977, qui n'existerait plus. Il résulte toutefois de l'instruction et des pièces produites par l'administration que le local-type n° 54 correspond à l'ancien local-type n° 2, à usage de bureaux, d'une surface pondérée de 185 m² au tarif de 22, 10 euros/m² qui n'a pas été supprimé des procès-verbaux d'évaluation des valeurs locatives et figure au cadastre dans la commune des Abymes. Dans ces conditions, le local n° 45 pouvait être retenu comme terme de comparaison pour évaluer le bien en litige. Par suite, en l'absence de tout élément permettant de remettre en cause la méthode d'évaluation retenue en cours d'instance en application du b du 2° de l'article 1498 du code général des impôts, l'administration a fait une juste appréciation en évaluant le bien litigieux situé dans la zone industrielle de Jarry d'une surface pondérée de 403 m² au tarif de 16,46 euros/m².

En ce qui concerne l'année 2018 :

6. Aux termes du 1 du I de l'article 1518 A quinquies du code général des impôts, applicable aux impositions de l'année 2018 : " En vue de l'établissement de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe d'habitation et de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, la valeur locative des propriétés bâties mentionnées au I de l'article 1498 est corrigée par un coefficient de neutralisation. / Ce coefficient est égal, pour chaque taxe et chaque collectivité territoriale, au rapport entre, d'une part, la somme des valeurs locatives non révisées au 1er janvier 2017 des propriétés bâties (...) imposables au titre de cette année dans son ressort territorial, à l'exception de celles mentionnées au 2 (...), et, d'autre part, la somme des valeurs locatives révisées de ces propriétés à la date de référence du 1er janvier 2013. / Le coefficient de neutralisation déterminé pour chacune de ces taxes s'applique également pour l'établissement de leurs taxes annexes. (...) ". Aux termes du III du même article : " Pour les impositions dues au titre des années 2017 à 2025 : / 1° Lorsque la différence entre la valeur locative non révisée au 1er janvier 2017 et la valeur locative résultant du I est positive, celle-ci est majorée d'un montant égal à la moitié de cette différence ; / 2° Lorsque la différence entre la valeur locative non révisée au 1er janvier 2017 et la valeur locative résultant du même I est négative, celle-ci est minorée d'un montant égal à la moitié de cette différence. / (...). ". Enfin, aux termes du 1° du I de l'article 1518 E du code général des impôts : " (...) Des exonérations partielles d'impôts directs locaux sont accordées au titre des années 2017 à 2025 lorsque la différence entre la cotisation établie au titre de l'année 2017 en application du présent code et la cotisation qui aurait été établie au titre de cette même année sans application du A du XVI de l'article 34 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010, dans sa rédaction en vigueur le 31 décembre 2016, est positive. / Pour chaque impôt, l'exonération est égale aux neuf dixièmes de la différence définie au premier alinéa du présent 1° pour les impositions établies au titre de l'année 2017, puis réduite chaque année d'un dixième de cette différence. / L'exonération cesse d'être accordée à compter de l'année qui suit celle au cours de laquelle la propriété ou fraction de propriété est concernée par l'application du I de l'article 1406, sauf si le changement de consistance concerne moins de 10 % de la surface de la propriété ou fraction de propriété ; (...) ".

7. L'administration fiscale a fait application des articles 1518 A quinquies I et III du code général des impôts respectivement fondés sur une comparaison entre l'ancienne valeur locative et la nouvelle valeur locative révisée et neutralisée (planchonnement) et sur la variation de cotisations avant et après réforme du fait du passage au nouveau système d'évaluation (lissage). Ces dispositifs de neutralisation, de planchonnement et de lissage ont permis de corriger la valeur locative des locaux en cause, et ce afin d'atténuer l'impact de la réforme de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels visant à une mise en cohérence avec la réalité du marché locatif. Ainsi qu'il a été indiqué précédemment, la critique de l'évaluation retenue du bien sur l'année 2016 par la société requérante n'étant pas pertinente, celle-ci n'est pas fondée à demander que la cotisation foncière des entreprises, la taxe spéciale d'équipement et la taxe additionnelle pour frais de chambre de commerce et d'industrie, mises à sa charge en 2018, soient calculées par application des différentes mesures de neutralisation des effets de la réforme des valeurs locatives des locaux professionnels, lesquelles doivent tenir compte de la valeur locative de son immeuble établie au titre de l'année 2016.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la société CGFF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce que soit mise à la charge de l'Etat le versement d'une somme d'argent au titre des frais de justice ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société CGFF est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société CGFF et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 5 mars 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 mars 2024.

La rapporteure,

Bénédicte MartinLa présidente,

Evelyne BalzamoLe greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX00942


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX00942
Date de la décision : 26/03/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Bénédicte MARTIN
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : SCP TZA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-26;22bx00942 ?
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