Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Les Hauts de Beyris a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2018 par lequel le maire de Bayonne a refusé de lui délivrer un permis de construire modificatif relatif à un ensemble immobilier situé 56 avenue du Docteur A..., ainsi que la décision par laquelle cette même autorité a implicitement rejeté son recours gracieux formé contre cet arrêté.
Par un jugement n° 1900990 du 26 novembre 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 25 février 2022 et 30 novembre 2023, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la SARL Les Hauts de Beyris, représentée par la SELARL Etche Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°1900990 du tribunal administratif de Pau du 26 novembre 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2018 portant refus de permis de construire modificatif ainsi que la décision de rejet du recours gracieux ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Bayonne de délivrer le permis de construire sollicité ou à défaut de réinstruire la demande, ou d'ordonner toute autre mesure utile en application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Bayonne la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement du 26 novembre 2021 est irrégulier en ce que le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UB 3 du règlement du plan local d'urbanisme ;
- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ;
- l'arrêté en cause est insuffisamment motivé, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme ;
- l'arrêté est entaché d'un vice de procédure, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme, dès lors qu'il est fondé sur un avis défavorable de la direction Eaux et Littoral de la communauté d'agglomération Pays Basque qui n'a pas été rendu au regard du dossier de permis de construire modificatif M3 mais du dossier portant sur le permis modificatif précédent ;
- l'arrêté méconnait les dispositions de l'article UB 3 du règlement du plan local d'urbanisme, dès lors que la voie litigieuse est une voie interne au projet qui ne peut se voir appliquer les dispositions de l'article 3 d'un plan local d'urbanisme, relatives aux seules voies de desserte d'un terrain ; en tout état de cause, le projet ne porte pas atteinte à la sécurité de la circulation ; l'existence d'une servitude de passage, qui n'est pas démontrée, ne rend pas l'article UB 3 applicable dès lors que cette servitude n'aurait pas pour objet de desservir les constructions concernées par le projet mais un autre bâtiment situé sur une parcelle distincte ;
- l'arrêté méconnait les dispositions des articles UB 4 et UB 13 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors que le projet n'a pas pour vocation de diminuer les espaces en pleine terre en-dessous du seuil de 35% imposé par le zonage d'assainissement pluvial de l'agglomération.
Par un mémoire enregistré le 28 juin 2022, la commune de Bayonne, représentée par Me Wattine, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 200 euros soit mise à la charge de la société requérante sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du patrimoine ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sébastien Ellie ;
- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 1er février 2013, le maire de Bayonne a délivré à la société Les Hauts de Beyris un permis de construire en vue de la création d'un ensemble immobilier de 71 logements situé 56 avenue du Docteur A.... Ce permis a fait l'objet d'un premier permis modificatif délivré le 30 septembre 2013. Le maire de Bayonne, par un arrêté du 30 octobre 2018, a refusé de délivrer un second permis modificatif en vue de modifier les façades et la répartition des logements au sein des immeubles projetés. La société Les Hauts de Beyris demande à la cour d'annuler le jugement du 26 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 30 octobre 2018.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort des termes du jugement que le tribunal administratif a considéré que le projet méconnaissait les dispositions combinées des articles UB 4 et UB 13, le maire de Bayonne ayant pu, pour ce seul motif, refuser le permis de construire modificatif sollicité. Par suite, le tribunal, qui a visé le moyen tiré de ce que le motif de refus fondé sur l'article UB 3 du règlement du plan local d'urbanisme était erroné, ne peut être regardé comme ayant omis de statuer sur ce moyen.
Sur la légalité de l'arrêté du 30 octobre 2018 :
3. L'autorité compétente, saisie d'une demande en ce sens, peut délivrer au titulaire d'un permis de construire en cours de validité un permis modificatif, tant que la construction que ce permis autorise n'est pas achevée, dès lors que les modifications envisagées n'apportent pas à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même. Ces changements ne doivent en outre pas avoir pour effet d'aggraver l'atteinte à la réglementation en vigueur résultant du permis initial.
4. En outre, aux termes de l'article L. 462-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " L'autorité compétente (...) peut, dans un délai fixé par décret en Conseil d'État, procéder ou faire procéder à un récolement des travaux et, lorsque ceux-ci ne sont pas conformes au permis délivré ou à la déclaration préalable, mettre en demeure le maître de l'ouvrage de déposer un dossier modificatif ou de mettre les travaux en conformité. (...) / Passé ce délai, l'autorité compétente ne peut plus contester la conformité des travaux. (...) ". En vertu de l'article R. 462-6 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, à compter de la date de réception en mairie de la déclaration signée par le bénéficiaire du permis de construire attestant l'achèvement et la conformité des travaux, l'autorité compétente dispose, sous réserve des cas où un récolement des travaux est obligatoire, d'un délai de trois mois pour contester la conformité des travaux au permis, au-delà duquel elle ne peut plus exiger du propriétaire qui envisage de faire de nouveaux travaux qu'il présente une demande de permis portant sur les éléments de la construction existante édifiés sans respecter le permis de construire précédemment obtenu.
5. Enfin, si la construction achevée n'est pas conforme au projet autorisé, le titulaire du permis de construire conserve la faculté, notamment si une action civile tendant à la démolition ou à la mise en conformité de la construction a été engagée, de solliciter la délivrance d'un nouveau permis de construire destiné à la régulariser, qui doit porter sur l'ensemble des éléments de la construction qui ont eu pour effet de modifier le bâtiment tel qu'il avait été initialement approuvé et respecter les règles d'urbanisme en vigueur à la date de son octroi.
6. L'arrêté en cause porte sur le refus d'une demande de permis de construire modificatif, formulée dans le cadre de la mise en conformité ordonnée par le maire de la commune des travaux réalisés au regard de ceux autorisés par le permis de construire du 1er février 2013 et son modificatif du 30 septembre 2013.
7. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'auteur de la décision attaquée disposait d'une délégation de fonctions du maire de la commune, décidée par un arrêté du maire du 23 avril 2014 et portant notamment sur les décisions et la délivrance des autorisations en matière de droit des sols. Cette délégation de fonctions est suffisamment précise et ne saurait être considérée comme trop large au regard des pouvoirs du maire, de sorte que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision doit être écarté.
8. En deuxième lieu, l'arrêté du 30 octobre 2018 vise notamment les articles UB 3, 4 et 13 du règlement du plan local d'urbanisme et indique de façon précise les motifs de rejet de la demande de permis de construire modificatif, en particulier les atteintes à la sécurité publique liées à l'accès au bâtiment, en méconnaissance des dispositions de l'article UB 3, ainsi que l'aggravation de l'artificialisation du sol, déjà supérieure au seuil de 65% défini par le schéma directeur des eaux pluviales adopté après la délivrance du permis de construire initial. L'arrêté en cause est ainsi suffisamment motivé en fait et en droit.
9. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur ".
10. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en cause a notamment été pris au vu de l'avis de la direction des eaux et du littoral de la communauté d'agglomération Pays Basque. Cet avis indique que les modifications faisant l'objet de la demande de permis de construire modificatif " M3 " ne viennent pas modifier les éléments présentés dans une précédente demande de permis de construire modificatif " M2 ", qui avait fait l'objet d'un refus de la part du maire de la commune. Ainsi, et alors même que la communauté d'agglomération Pays Basque aurait ensuite repris les observations mentionnées dans son avis sur la demande de permis de construire modificatif M2, le moyen tiré de ce que la communauté d'agglomération Pays Basque n'aurait pas émis son avis au regard du dossier de demande de permis de construire modificatif M3 mais du dossier portant sur la demande de permis modificatif précédente ne peut qu'être écarté. Au surplus, un tel avis ne constitue pas un avis conforme et à supposer qu'il soit entaché d'une erreur, celle-ci est par elle-même sans incidence sur la légalité de la décision prise par le maire sur la demande de permis de construire modificatif " M3 ".
11. En quatrième lieu, aux termes de l'article UB 4 du règlement du plan local d'urbanisme : " (...) 4.2.3 Assainissement eaux pluviales (...) Les aménagements doivent être réalisés dans le respect du zonage pluvial de l'agglomération annexé au PLU (...) ". Aux termes de l'article UB 13 du même règlement : " Espaces libres, plantations et espaces boisés classés. 13.1 Règle générale : Rappel : tout projet devra respecter les dispositions graphiques et écrites du zonage pluvial de l'agglomération Côte basque-Adour annexé au PLU, notamment au regard de la limitation de l'imperméabilisation des sols. (...). " Aux termes du schéma directeur d'assainissement pluvial de l'agglomération Côte basque-Adour, approuvé au mois de décembre 2014, qui a pour objectif de maîtriser les débits d'eaux pluviales et de ruissellements : " Lorsque le règlement des zones définies dans les PLU (UA, UB, UC, ...) des communes imposent des espaces de pleine terre, les dispositions prévues aux PLU en vigueur à la date d'approbation du zonage pluvial prévalent à celles du présent document. En l'absence de règles spécifiques dans un PLU, les coefficients maximaux d'imperméabilisation identifiés dans la cartographie état tendanciel de l'imperméabilisation figurant en annexe 3 s'appliquent. ". Le terrain d'assiette du projet faisant l'objet de l'arrêté litigieux est affecté d'un coefficient d'imperméabilisation maximal de 0,65, ainsi qu'il ressort du zonage d'assainissement pluvial.
12. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet autorisé par le permis de construire initial, modifié par le permis modificatif du 30 septembre 2013, comportait plus de 35% d'espaces non imperméabilisés, comme l'exigent les dispositions rappelées au point précédent. Si le projet n'avait pas, à la date du 30 septembre 2013, à respecter cette règle qui n'est entrée en vigueur que postérieurement à la délivrance des autorisations, le projet résultant de la demande de permis en cause ne doit pas être de nature à aggraver l'atteinte à la réglementation en vigueur résultant du permis initial. Il ressort des pièces du dossier, notamment du plan de masse du dossier de demande de permis de construire modificatif M3, que les modifications apportées consistent notamment à supprimer une partie des espaces engazonnés situés au sud du projet, longeant la " servitude existante ", pour créer cinq places de stationnement en béton drainant, augmentant nécessairement la surface imperméabilisée. Par suite, pour ce seul motif, le maire de la commune a pu légalement refuser de délivrer le permis de construire modificatif demandé, dès lors que la création de ces places de stationnement imperméabilisées est de nature à aggraver la non-conformité du projet aux règles résultant des articles UB 4 et UB 13 du règlement du plan local d'urbanisme et du schéma d'assainissement pluvial. Il résulte de l'instruction que le maire aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur ce motif.
13. Il résulte de ce qui précède que la SARL Les Hauts de Beyris n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 30 octobre 2018 par lequel le maire de la commune a rejeté sa demande de permis de construire modificatif.
Sur les frais liés au litige :
14. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la SARL Les Hauts de Beyris la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Bayonne sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Les Hauts de Beyris est rejetée.
Article 2 : La SARL Les Hauts de Beyris versera à la commune de Bayonne la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Les Hauts de Beyris et à la commune de Bayonne.
Délibéré après l'audience du 27 février 2024 où siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
M. Sébastien Ellie, premier conseiller,
Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 mars 2024.
Le rapporteur,
Sébastien Ellie
La présidente,
Elisabeth Jayat
La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°22BX00718