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12/03/2024 | FRANCE | N°22BX01406

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 12 mars 2024, 22BX01406


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 14 août 2019 par laquelle la ministre des armées a considéré qu'elle avait renoncé au bénéfice du concours interne organisé au titre de l'année 2019 pour l'accès au corps de secrétaire administratif, ensemble la décision implicite de rejet de sa demande d'affectation sur un poste en résidence à Saint-Denis de La Réunion.



Par un jugement n° 1901421 du 14 mar

s 2022, le tribunal administratif de La Réunion a fait droit à cette demande.



Procédure devant...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler la décision du 14 août 2019 par laquelle la ministre des armées a considéré qu'elle avait renoncé au bénéfice du concours interne organisé au titre de l'année 2019 pour l'accès au corps de secrétaire administratif, ensemble la décision implicite de rejet de sa demande d'affectation sur un poste en résidence à Saint-Denis de La Réunion.

Par un jugement n° 1901421 du 14 mars 2022, le tribunal administratif de La Réunion a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 mai 2022, le ministre des armées demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 14 mars 2022 ;

2°) des rejeter les demandes présentées par Mme A... devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- les dispositions des articles 58 et 60 de la loi du n° 84-16 du 11 janvier 1984 ne sont pas applicables aux personnes qui changent de corps par la voie du concours ;

- les dispositions de l'arrêté du 21 janvier 2019 précisaient que les lauréats devaient rejoindre leur lieu d'affectation sous peine de renoncer au bénéfice de leur réussite au concours ;

- l'auteur de la décision du 14 août 2019 disposait d'une délégation de signature régulière.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2010-302 du 19 mars 2010 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux corps des secrétaires administratifs des administrations de l'Etat et à certains corps analogues relevant du décret n° 2009-1388 du 11 novembre 2009 portant dispositions statutaires communes à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique de l'Etat ;

- l'arrêté du 21 janvier 2019 autorisant au titre de l'année 2019 l'ouverture et fixant les conditions l'organisation d'un concours interne pour le recrutement de secrétaires administratifs de classe normale des administrations de l'Etat au sein du ministère des armées

- le code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... A..., adjointe administrative principale de 2ème classe affectée au sein du groupement de soutien de la base de défense La Réunion-Mayotte, a été déclarée admise au concours interne organisé au titre de l'année 2019 pour l'accès au corps des secrétaires administratifs du ministère des armées. Elle a sollicité sa nomination sur un poste vacant en résidence à Saint-Denis de La Réunion mais la ministre des armées n'a pas donné suite à cette demande. Par une décision du 14 août 2019, la ministre a en revanche pris acte de ce que Mme A... n'avait pas accepté la proposition d'affectation sur un poste de secrétaire administratif au sein de la plateforme du commissariat d'Ile-de-France et du service du commissariat des armées basé à Saint-Germain-en-Laye, et a dès lors considéré qu'elle avait renoncé au bénéfice du concours. Le ministre des armées relève appel du jugement du 14 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a annulé la décision implicite rejetant la demande d'affectation de Mme A... à Saint-Denis de La Réunion et la décision du 14 août 2019 actant son renoncement au bénéfice du concours.

Sur le moyen retenu par le tribunal :

2. D'une part, aux termes de l'article 20 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Chaque concours donne lieu à l'établissement d'une liste classant par ordre de mérite les candidats déclarés aptes par le jury (...). Les nominations sont prononcées dans l'ordre d'inscription sur la liste principale, puis dans l'ordre d'inscription sur la liste complémentaire (...). ". Si les candidats à un concours ont le droit d'être nommés suivant l'ordre d'inscription sur la liste principale, puis dans l'ordre d'inscription sur la liste complémentaire, conformément aux dispositions de l'article 20 de la loi du 11 janvier 1984, en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires limitant ses pouvoirs à cet effet, il appartient à l'administration de leur désigner les postes qu'ils doivent occuper.

3. D'autre part, aux termes de l'article 58 de la loi du 11 janvier 1984 : " (...) Tout fonctionnaire bénéficiant d'un avancement de grade est tenu d'accepter l'emploi qui lui est assigné dans son nouveau grade. Sous réserve de l'application des dispositions de l'article 60, son refus peut entraîner la radiation du tableau d'avancement ou, à défaut, de la liste de classement. " Les dispositions de l'article 60 de la même loi prévoient que : " (...) Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service et sous réserve des priorités instituées à l'article 62 bis, les affectations prononcées tiennent compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille ".

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été déclarée admise le 21 juin 2019 au 38ème rang sur la liste principale du concours interne organisé au titre de l'année 2019 pour le recrutement dans le corps des secrétaires administratifs de classe normale des administrations de l'Etat au sein du ministère des armées. Elle a été informée par un courriel du 18 juillet 2019 qu'il lui était proposé une affectation sur un poste de secrétaire administratif au sein du service du commissariat des armées basé à Saint-Germain-en-Laye, dans les Yvelines, correspondant au troisième choix qu'elle avait exprimé lors de sa candidature. Toutefois, par une lettre datée du 15 juillet 2019, elle a sollicité sa nomination, par dérogation, sur un poste à Saint-Denis de La Réunion, sans recevoir de réponse de son employeur. Finalement, en dépit de plusieurs relances, Mme A... n'a pas accepté son affectation sur le poste qui lui avait été proposé et, par une décision du 14 août 2019, la ministre des armées a pris acte de ce qu'elle avait renoncé au bénéfice du concours.

5. Il est constant que le bénéfice du concours interne dont Mme A... était lauréate conduisait non pas à son avancement de grade au sein du corps des adjoint administratifs principaux mais à son recrutement dans un autre corps de fonctionnaires du ministère de la défense. Aussi, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, elle n'entrait pas dans les prévisions des articles 58 et 60 de la loi du 11 juillet 1984 cités au point 2 prescrivant à l'autorité compétente de prendre en compte la situation familiale de l'agent en cas d'avancement de grade ou de mutation. Ainsi, en vertu des principes énoncés au point 3 et conformément aux dispositions de l'arrêté de la ministre des armées du 21 janvier 2019 autorisant au titre de l'année 2019 l'ouverture du concours considéré, la requérante a pu être légalement regardée comme ayant perdu le bénéfice de son admission au concours interne pour le recrutement de secrétaires administratifs de classe normale dès lors qu'elle a refusé le poste qui lui était proposé, son seul choix ne pouvant être satisfait, et qu'en dépit des rappels qui lui ont été adressés l'informant qu'à défaut de choisir parmi les postes proposés elle serait considérée comme renonçant au bénéfice du concours, elle a maintenu son attitude initiale.

6. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de La Réunion s'est fondé, pour annuler la décision refusant implicitement d'affecter Mme A... à La Réunion ainsi que la décision du 14 août 2019 prenant acte de son renoncement au bénéfice du concours, sur le motif tiré d'une méconnaissance des dispositions des articles 58 et 60 de la loi du 11 janvier 1984,

7. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A....

Sur les autres moyens invoqués devant le tribunal administratif :

8. La décision du 14 août 2019 a été signée par Mme E... B..., adjointe au directeur du centre ministériel de gestion de Saint-Germain-en-Laye, qui, par arrêté du 1er mars 2019 régulièrement publié au Bulletin Officiel des armées du 12 avril 2019, bénéficiait d'une délégation de signature aux fins de signer au nom de la ministre des armées tous actes et décisions à l'exception des décrets. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la signataire de la décision du 14 août 2019 n'était pas compétente pour la signer.

9. L'arrêté du 21 janvier 2019 autorisant au titre de l'année 2019 l'ouverture et fixant les conditions d'organisation d'un concours interne pour le recrutement de secrétaires administratifs de classe normale des administrations de l'Etat au sein du ministère des armées a prévu que " Les lauréates et lauréats doivent accepter l'affectation qui leur est notifiée au moment de leur nomination en vue de leur prise de fonctions. Ils sont réputés renoncer au bénéfice du concours s'ils ne rejoignent pas leur poste dans le délai qui leur est imparti au moment de la notification d'affectation. "

10. Mme A... soutient que la décision du 14 août 2019 indique à tort qu'en dépit de plusieurs relances elle n'a donné aucune réponse à la proposition d'affectation qui lui a été communiquée, alors qu'après ces relances elle a, le 25 juillet 2019, rempli le formulaire d'acceptation d'affectation et l'a adressé à l'administration. Toutefois, en indiquant dans ce formulaire, à la fois qu'elle acceptait le bénéfice du concours et qu'elle refusait l'affectation qui y était associée, alors qu'en application des dispositions précitées de l'arrêté du 21 janvier 2019 il lui était demandé si elle acceptait ou pas son affectation, un refus valant renoncement au bénéfice du concours, Mme A... ne peut être regardée comme ayant utilement répondu à la demande qui lui était faite, et à tout le moins comme ayant fourni une réponse positive. Par suite, le moyen tiré de ce que la ministre aurait commis une erreur de fait en considérant qu'elle n'avait pas répondu à l'alternative qui lui était proposée doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre des armées est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a annulé la décision implicite rejetant la demande d'affectation de Mme A... à Saint-Denis de La Réunion et la décision du 14 août 2019 actant son renoncement au bénéfice du concours de secrétaire administratif de classe normale. Par suite, il est également fondé à demander l'annulation de ce jugement et le rejet des demandes présentées par Mme A... devant le tribunal administratif.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de la Réunion n° 1901421 du 14 mars 2022 est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par Mme A... devant le tribunal administratif de la Réunion sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 13 février 2024 à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 mars 2024.

.

Le rapporteur,

Manuel D...

Le président,

Laurent PougetLe greffier,

Anthony Fernandez

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°22BX01406 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01406
Date de la décision : 12/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. POUGET
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-12;22bx01406 ?
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