La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/03/2024 | FRANCE | N°22BX00265

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 05 mars 2024, 22BX00265


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Gers (FDSEA 32), la chambre d'agriculture du Gers, M. B... D... et Mme C... A... ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 27 mars 2019 du ministre de l'agriculture et de l'alimentation et du ministre de l'économie et des finances portant délimitation des zones agricoles défavorisées, en tant qu'il n'intègre pas les communes d'Arblade-le-Bas, Labarthète, Armentieux, Ladevèze-Rivière, Armous-Et-Ca

u, Ladevèze-Ville, Saint-Aunix-Lengros, Aurensan, Lannux, Saint-Germe, Barce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Gers (FDSEA 32), la chambre d'agriculture du Gers, M. B... D... et Mme C... A... ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 27 mars 2019 du ministre de l'agriculture et de l'alimentation et du ministre de l'économie et des finances portant délimitation des zones agricoles défavorisées, en tant qu'il n'intègre pas les communes d'Arblade-le-Bas, Labarthète, Armentieux, Ladevèze-Rivière, Armous-Et-Cau, Ladevèze-Ville, Saint-Aunix-Lengros, Aurensan, Lannux, Saint-Germe, Barcelonne-du-Gers, Lasserade, Saint-Justin, Beaumarches, Laveraet, Saint-Mont, Bernède, Lelin-Lapujolle, Sarragachies, Cahuzac-Sur-Adour, Louslitges, Scieurac-et-Flourès, Caumont, Marciac, Segos, Corneillan, Mascaras, Sembouès, Couloume-Mondebat, Maulichères, Tarsac, Courties, Monlezun, Tasque, Galiax, Plaisance, Termes-D'armagnac, Gee-Rivière, Pouydraguin, Tieste-Uragnoux, Goux, Préchac-Sur-Adour, Tourdun, Izotges, Projan, Vergoignan, Jû-Belloc, Ricourt, Verlus, Juillac, Riscle et Viella ainsi que la décision implicite rejetant leur recours gracieux du 27 mai 2019.

Par un jugement n° 1902466 du 25 novembre 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 janvier 2022, la FDSEA 32 et autres, représentés par Me Briand, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1902466 du tribunal administratif de Pau du 25 novembre 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 mars 2019 du ministre de l'agriculture et de l'alimentation et du ministre de l'économie et des finances portant délimitation des zones agricoles défavorisées, en tant qu'il n'intègre pas lesdites communes, ensemble la décision implicite rejetant leur recours gracieux du 27 mai 2019 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire de modifier l'arrêté du 27 mars 2019 afin d'intégrer les communes concernées par l'exclusion du zonage dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- pour six communes exclues du critère biophysique dans la mesure où elles se situent sous le seuil de 60 % constituant le seuil d'éligibilité, l'écart est excessivement faible et résulte uniquement de l'imprécision quant à la détermination de la surface agricole utile ; les données issues des déclarations annuelles des agriculteurs sont, à cet égard, trop approximatives ;

- l'hétérogénéité entre les communes du nord et celles du sud de la petite région agricole " Rivière Basse " fait obstacle à ce qu'un tel échelon géographique soit utilisé, s'agissant du critère économique, pour mettre en œuvre le réglage fin ; il convient d'appliquer le critère de la production brute standard au niveau communal ;

- la production de maïs semence n'a, à tort, pas été distinguée de la production maïs consommation, la première production, à forte valeur ajoutée, venant impacter le montant de la production brute standard totale et de la production brute standard restreinte ; les semences devraient donc être exclues dans le calcul de la production brute standard restreinte, ce qui aurait pour effet de réduire les surfaces affectées du coefficient maïs et de satisfaire aux seuils nationaux ; la prise en compte de la production de maïs semence au titre de la production brute standard restreinte permet de constater l'éligibilité de onze communes ;

- l'examen des situations individuelles des communes permet de constater que vingt-cinq communes de la petite région agricole " Rivière Basse " remplissent les conditions de seuil au regard de la production brute standard communale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2023, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par un courrier du 19 octobre 2023, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions de la FDSEA 32 et autres tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 mars 2019, en tant qu'il ne classe pas les communes de Louslitges, Armous-et-Cau, Courties, Tourdun, Mascaras, Laveraët, Sembouès, Scieurac-et-Flourès et Préchac-sur-Adour en zones agricoles défavorisées, ainsi que, dans cette mesure, sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite rejetant leur recours gracieux du 27 mai 2019 et sur les conclusions accessoires tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire de modifier l'arrêté afin d'y intégrer ces communes.

Un courrier en réponse au moyen d'ordre public, présenté pour la FDSEA 32 et autres, a été enregistré le 23 octobre 2023 et a été communiqué au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 1305/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 ;

- la décision d'exécution C (2019) 1769 de la Commission européenne du 27 février 2019 ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le décret n° 2019-243 du 27 mars 2019 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michaël Kauffmann,

- et les conclusions de Mme Nathalie Gay, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 27 mars 2019, les ministres en charge de l'économie et de l'agriculture ont énuméré les communes classées comme zones soumises à des contraintes naturelles (ZSCN) et comme zones soumises à des contraintes spécifiques (ZSCS), en application de l'article 32 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural et de l'article D. 113-15 du code rural et de la pêche maritime, dans sa version issue du décret du 27 mars 2019 relatif à la révision des critères de délimitation des zones agricoles défavorisées autres que les zones de montagne, permettant le versement de l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) aux exploitants agricoles installés dans ces zones. La FDSEA 32 et autres relèvent appel du jugement du 25 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté, en tant qu'il n'intègre pas les 52 communes mentionnées dans les visas du présent arrêt, ensemble la décision implicite rejetant leur recours gracieux du 27 mai 2019.

Sur l'étendue du litige :

2. Il ressort des pièces du dossier que, par un jugement n° 1902159 du 31 décembre 2021 du tribunal administratif de Pau, devenu définitif en cours d'instance, l'arrêté du 27 mars 2019 contesté, portant délimitation des zones agricoles défavorisées, a été annulé en tant qu'il ne classe pas les communes de Louslitges, Armous-et-Cau, Courties, Tourdun, Mascaras, Laveraët, Sembouès, Scieurac-et-Flourès et Préchac-sur-Adour en ZSCN. Dès lors, les conclusions à fin d'annulation de cet arrêté et de la décision implicite rejetant le recours gracieux du 27 mai 2019 présentées par les requérants ont perdu leur objet en ce qu'elles concernent le classement de ces communes, de même que les conclusions accessoires tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire de modifier l'arrêté du 27 mars 2019 afin d'y intégrer ces communes.

Sur le surplus des conclusions :

3. D'une part, aux termes de l'article 31 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 : " 1. Les paiements destinés aux agriculteurs situés dans des zones de montagne et d'autres zones soumises à des contraintes naturelles ou autres contraintes spécifiques sont accordés annuellement par hectare de surface agricole, afin d'indemniser les agriculteurs pour tout ou partie des coûts supplémentaires et de la perte de revenu résultant de ces contraintes pour la production agricole dans la zone concernée (...) ". Le paragraphe 3 de l'article 32 de ce même règlement, relatif aux ZSCN, stipule que : " Afin de pouvoir bénéficier des paiements prévus à l'article 31, les zones autres que les zones de montagne sont considérées comme soumises à des contraintes naturelles importantes lorsqu'au moins 60 % de la surface agricole remplit au moins l'un des critères énumérés à l'annexe III, à la valeur seuil indiquée. / Le respect de ces conditions est assuré au niveau des unités administratives locales (niveau "UAL 2") ou au niveau d'une unité locale nettement délimitée qui couvre une zone géographique clairement d'un seul tenant et dotée d'une identité économique et administrative définissable. / Lorsqu'ils délimitent les zones concernées par le présent paragraphe, les États membres procèdent à un exercice d'affinement basé sur des critères objectifs, afin d'exclure les zones dans lesquelles des contraintes naturelles importantes, visées au premier alinéa, ont été démontrées, mais ont été surmontées par des investissements ou par l'activité économique, ou par une productivité normale des terres dûment attestée, ou dans lesquelles les méthodes de production ou les systèmes agricoles ont compensé la perte de revenus ou les coûts supplémentaires visés à l'article 31, paragraphe 1 ". Enfin, le paragraphe 4 de ce même article, relatif aux ZSCS, stipule que : " Les zones autres que celles visées aux paragraphes 2 et 3 peuvent bénéficier des paiements prévus à l'article 31 si elles sont soumises à des contraintes spécifiques et lorsque la poursuite de la gestion des terres est nécessaire pour assurer la conservation ou l'amélioration de l'environnement, l'entretien du paysage rural et la préservation du potentiel touristique de la zone ou pour protéger le littoral. / Les zones soumises à des contraintes spécifiques comprennent les surfaces agricoles dans lesquelles les conditions naturelles de production sont similaires et dont la superficie totale ne dépasse pas 10 % du territoire de l'État membre concerné. / En outre, des zones peuvent également bénéficier des paiements au titre du présent paragraphe si: / - 60 % au moins de la surface agricole remplit au moins deux des critères énumérés à l'annexe III, avec une marge ne dépassant pas 20 % de la valeur seuil indiquée, ou / - 60 % au moins de la surface agricole est composée de zones qui remplissent au moins l'un des critères énumérés à l'annexe III à la valeur seuil indiquée et de zones remplissant au moins deux des critères énumérés à l'annexe III, avec pour chacune d'elles une marge ne dépassant pas 20 % de la valeur seuil indiquée. / Le respect de ces conditions est assuré au niveau des UAL de niveau 2 ou au niveau d'une unité locale clairement définie qui couvre une seule zone géographique précise d'un seul tenant ayant une identité économique et administrative définissable. Lorsqu'ils délimitent les zones concernées par le présent alinéa, les États membres procèdent à un exercice d'affinement, comme prévu à l'article 32, paragraphe 3. Les zones considérées admissibles au titre du présent alinéa sont prises en considération pour le calcul de la limite de 10 % visée au deuxième alinéa ".

4. D'autre part, aux termes de l'article D. 113-15 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue du décret du 27 mars 2019 relatif à la révision des critères de délimitation des zones agricoles défavorisées autres que les zones de montagne : " Les autres zones agricoles défavorisées sont constituées : - des zones autres que les zones de montagne qui sont soumises à des contraintes naturelles importantes, dites ZSCN, telles que définies au 3 de l'article 32 du règlement (UE) n° 1305/2013 du 13 décembre 2013 ; / - des autres zones soumises à des contraintes spécifiques, dites ZSCS, telles que définies au 4 de l'article 32 du règlement (UE) n° 1305/2013 du 13 décembre 2013. / Leurs éléments de définition sont ceux précisés dans le cadre national, pris en application du 3 de l'article 6 du règlement (UE) n° 1305/2013 du 13 décembre 2013, approuvé par la décision d'exécution C (2019) 1769 de la Commission du 27 février 2019. ".

5. Dans le cadre de la révision des zones défavorisées rendue nécessaire par l'entrée en vigueur des stipulations des articles 31 et 32 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatifs aux paiements en faveur des ZSCN et des ZSCS et à leur désignation, la France a présenté à la Commission européenne une demande de modification du cadre national selon la procédure prévue au b) de l'article 11 de ce règlement. Les points 5.2.7.3.2 et 5.2.7.3.3 de ce document précisent, en application des stipulations combinées du 3 de l'article 6 du règlement et de l'annexe I du décret du 16 avril 2015, les conditions d'admissibilité, les montants et les taux d'aide applicables ainsi que les critères d'affinement visés à l'article 32 de ce même règlement. Les annexes intitulées " Définitions et méthodologie dans l'Hexagone pour les ZSCN (sous-mesure 13.2) et pour les ZSCS (sous-mesure 13.3) " et " Définition des ZSCN et ZSCS en Corse, Guyane, Guadeloupe, Martinique, La Réunion et Mayotte " décrivent la méthode et les données utilisées afin de délimiter les zones dans lesquelles les exploitants agricoles peuvent bénéficier de l'ICHN, conformément aux critères fixés par le règlement et les points précités du cadre national. Par une décision d'exécution du 27 février 2019, la Commission européenne a approuvé le cadre national ainsi modifié. Par les dispositions précédemment rappelées du décret du 27 mars 2019 relatif à la révision des critères de délimitation des zones agricoles défavorisées autres que les zones de montagne, le Premier ministre a donné effet aux éléments de définition des ZSCN et des ZSCN contenus dans le cadre national. Sur le fondement de ce décret, l'arrêté litigieux du 27 mars 2019 portant délimitation des zones agricoles défavorisées a fixé la liste des communes et parties de communes classées au titre de ces deux types de zones.

6. Il résulte de ces dispositions, et notamment de celles du cadre national, que le classement d'une commune en ZSCN, comme en ZSCS, que ce soit, dans ce dernier cas, par application combinée des critères biophysiques ou par la méthode dite " hors critères combinés ", est subordonné à un " exercice d'affinement ", destiné à exclure de ces classements les zones considérées comme ayant surmonté les contraintes naturelles ou spécifiques auxquelles elles sont soumises. En vertu du cadre national, plus particulièrement de ses annexes, les critères retenus par l'Etat pour procéder à l'exercice d'affinement prévu à l'article 32 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 pour déterminer si les contraintes naturelles ont été surmontées par des investissements, par l'activité économique, par une productivité normale des terres ou si les méthodes de production ou les systèmes agricoles ont compensé la perte de revenus ou les coûts supplémentaires sont, pour les ZSCN et les ZSCS critères combinés : une production brute standard (PBS) par hectare supérieure à 80 % de la PBS nationale (soit 1 858 euros par hectare) ou un niveau de PBS dit " restreinte " par hectare supérieure à 80 % de la PBS restreinte nationale (soit 1 070 euros par hectare) / le chargement en unité gros bétail alimentation grossière par hectare de surface fourragère principale (UGB AG/ha de SFP) supérieur à 1,4 UGB AG/ha / un rendement départemental du blé supérieur à la moyenne nationale (72,6 quintaux/ha). Le respect des critères ainsi mis en œuvre pour cet exercice d'affinement, à l'exception de celui tiré du rendement départemental du blé, est apprécié à l'échelle des " petites régions agricoles " (PRA) ou, pour les 10 % de PRA les plus grandes, à l'échelle cantonale.

7. Le surplus des communes concernées par l'appel de la FDSEA 32 et autres, dont le classement en zone défavorisée a été refusé, fait partie de la PRA " Rivière Basse " dans le département du Gers.

8. En premier lieu, l'article 2 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 définit la " surface agricole " comme " l'ensemble de la superficie des terres arables, des prairies permanentes et des pâturages permanents ou des cultures permanentes ". Il ressort des pièces du dossier que le registre parcellaire graphique utilisé pour délimiter les ZSCN ou autres contraintes spécifiques permet d'identifier précisément, à l'échelle 1/5 000ème, la superficie des parcelles exploitées par les agriculteurs telle qu'ils la déclarent annuellement dans le cadre de la télé-déclaration " politique agricole commune ". Les requérants soutiennent que, pour six communes exclues du critère biophysique dans la mesure où elles se situent sous le seuil de 60 % constituant le seuil d'éligibilité, l'écart est excessivement faible, de l'ordre de 0,047 % à 3,887 %, et résulte uniquement de l'imprécision quant à la détermination de la surface agricole utile. Toutefois, la FDSEA 32 et autres n'apportent aucun élément de nature à établir que les données issues des déclarations annuelles des agriculteurs, qui font l'objet de contrôles menés notamment par l'Agence de services et de paiement, ne seraient pas fiables ou présenteraient un caractère trop approximatif. Par suite, le moyen doit être écarté.

9. En deuxième lieu, pour contester l'appréciation du respect des critères d'affinement à l'échelle de la PRA " Rivière Basse ", les requérants et autres soutiennent que l'hétérogénéité entre les communes du nord de cette PRA et celles du sud fait obstacle à ce qu'un tel échelon géographique soit retenu. Toutefois, les stipulations précitées de l'article 32 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatives à l'exercice d'affinement n'imposent pas à l'Etat un échelon géographique déterminé ni une méthode particulière pour déterminer les zones dans lesquelles les contraintes naturelles ont été surmontées. A cet égard, la FDSEA 32 et autres ne remettent pas sérieusement en cause les affirmations du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire qui indique que l'échelon géographique de la PRA permet de réaliser un réglage économique précis et adapté ainsi que le calcul des critères spécifiques de délimitation des zones en permettant le regroupement de communes contiguës en fonction d'une vocation agricole homogène, tout en évitant les fortes discontinuités territoriales qui auraient résulté de l'application d'un zonage géographique plus fin. Enfin, les appelants ne sauraient utilement se plaindre des disparités, tenant plus particulièrement à la part de cultures à forte valeur ajoutée, telles les semences, existant entre les communes de la PRA, le critère subsidiaire de la PBS dite " restreinte ", qui s'active à l'échelle de l'ensemble de la PRA lorsque, le cas échéant, les productions à forte valeur ajoutée représentent plus de 50 % de la valeur de la PBS et que la valeur des productions résiduelles reste significative, en représentant plus de 10 % de la PBS, ayant précisément pour objet de neutraliser la PBS liée à ces cultures au stade de l'exercice d'affinement.

10. En troisième lieu, il résulte des termes du cadre national que la PBS dite " restreinte " s'active uniquement lorsque, notamment, les productions à plus forte valeur ajoutée, telles les semences, représentent plus de 50 % de la valeur de la PBS de la PRA considérée. Il ressort des pièces du dossier et notamment de la note sur la problématique maïs semence établie par la FDSEA 32 que la PBS totale de la PRA " Rivière Basse " s'élève à 79 188 993 euros. La part du maïs dans l'assolement représente 13 917 hectares sur 36 781 hectares. A supposer même, ainsi que le soutiennent les appelants, qu'il convient de distinguer entre le maïs semence, qui représenterait 1 652 hectares à 2 945 euros par hectare, et le maïs consommation, qui représenterait 12 265 hectares à 1 262 euros par hectare, la valeur totale de la PBS du maïs s'élèverait alors à 19 083 110 euros, soit moins de 50 % de la valeur de la PBS totale de la PRA " Rivière Basse ". La PBS dite " restreinte " ne pouvant ainsi s'activer, en l'absence d'éléments précis fournis par la FDSEA 32 et autres quant aux autres productions à forte valeur ajoutée qu'il conviendrait, le cas échéant, de cumuler avec le maïs, les intéressés ne peuvent utilement se prévaloir d'une erreur de droit ou d'une erreur d'appréciation dans le calcul de la PBS dite " restreinte " ou de ce que la prise en compte de la production de maïs semence au titre de la PBS dite " restreinte " permet de constater l'éligibilité de onze communes.

11. En dernier lieu, ainsi qu'il a été exposé au point 6, le respect des critères mis en œuvre pour l'exercice d'affinement, à l'exception de celui tiré du rendement départemental du blé, est apprécié à l'échelle des PRA ou, pour les 10 % de PRA les plus grandes, à l'échelle cantonale. Dès lors, la FDSEA 32 et autres ne peuvent utilement soutenir que l'examen des situations individuelles des communes de la PRA " Rivière Basse " permet de constater que vingt-cinq d'entre elles remplissent les conditions de seuil au regard de la PBS communale.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la FDSEA 32 et autres ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté le surplus de leur demande. Les conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la FDSEA 32 et autres tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 mars 2019, en tant qu'il ne classe pas les communes de Louslitges, Armous-et-Cau, Courties, Tourdun, Mascaras, Laveraët, Sembouès, Scieurac-et-Flourès et Préchac-sur-Adour en zones agricoles défavorisées, ainsi que, dans cette mesure, sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite rejetant leur recours gracieux du 27 mai 2019 et sur les conclusions accessoires tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire de modifier l'arrêté afin d'y intégrer ces communes.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la FDSEA 32 et autres est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Gers, à la chambre d'agriculture du Gers, à M. B... D..., à Mme C... A... et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Délibéré après l'audience du 13 février 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 mars 2024.

Le rapporteur,

Michaël Kauffmann La présidente,

Evelyne BalzamoLe greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chacun en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 22BX00265

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX00265
Date de la décision : 05/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Michaël KAUFFMANN
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : BRIAND

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-05;22bx00265 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award