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05/03/2024 | FRANCE | N°21BX04524

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 05 mars 2024, 21BX04524


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 12 septembre 2019 par lequel le maire de la commune de Sainte-Marie-de-Ré s'est opposé à la déclaration préalable qu'il a déposée le 2 juillet 2019 portant sur l'installation d'un assainissement individuel, le remplacement d'une verrière existante et la pose d'une terrasse en bois en remplacement de l'existante, ensemble la décision implicite du 13 janvier 2020 rejetant son recours gracieux d

u 12 novembre 2019.



Par un jugement n° 2000681 du 28 octobre 2021, le tribu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 12 septembre 2019 par lequel le maire de la commune de Sainte-Marie-de-Ré s'est opposé à la déclaration préalable qu'il a déposée le 2 juillet 2019 portant sur l'installation d'un assainissement individuel, le remplacement d'une verrière existante et la pose d'une terrasse en bois en remplacement de l'existante, ensemble la décision implicite du 13 janvier 2020 rejetant son recours gracieux du 12 novembre 2019.

Par un jugement n° 2000681 du 28 octobre 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 décembre 2021, un mémoire enregistré le 25 août 2023, et un mémoire enregistré le 13 octobre 2023 qui n'a pas été communiqué, M. A..., représenté par Me Boulineau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 28 octobre 2021 ;

2°) d'annuler la décision d'opposition à déclaration préalable du maire de la commune de Sainte-Marie-de-Ré du 12 septembre 2019, ensemble la décision du 13 janvier 2020 portant rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au maire de la commune de Sainte-Marie-de-Ré de procéder à une nouvelle instruction de sa déclaration préalable ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Sainte-Marie-de-Ré une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne le jugement attaqué :

- il est insuffisamment motivé ;

En ce qui concerne l'arrêté du 12 septembre 2019 :

- il est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'une erreur de droit dès lors que les parcelles concernées par le projet ne constituent pas un espace remarquable au sens de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme ;

- il est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions des articles L. 121-24 et R. 121-5 du code de l'urbanisme dès lors que les aménagements projetés sont légers ; la terrasse comme la verrière sont de simples réfections de constructions existantes et les matériaux utilisés permettront un retour à l'état naturel du site.

Par des mémoires en défense enregistrés les 12 juillet et 22 septembre 2023, la commune de Sainte-Marie-de-Ré, représentée par Me Verger, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés ;

- à supposer que la cour considère que les motifs de la décision ne sont pas fondés elle sollicite une substitution de motifs compte tenu de l'irrégularité des constructions déjà édifiées situées en site classé et inscrit et en PPRN et ne pouvant bénéficier de la prescription prévue par l'article L 421-9 du code de l'urbanisme ce qui fait obstacle à ce que les travaux projetés soient considérés comme des travaux de réfection de l'existant.

Par ordonnance du 22 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 16 octobre 2023 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Evelyne Balzamo,

- les conclusions de Mme Nathalie Gay, rapporteure publique,

- et les observations de Me Boulineau, représentant M. A..., et de Me Perotin, représentant la commune de Sainte-Marie-de-Ré.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... est propriétaire d'une résidence secondaire située sur les parcelles cadastrées AN n° 249, 263, 264 et 265 sur le territoire de la commune de Sainte-Marie-de-Ré, au lieu-dit " le Peux des Amourettes ". Il a déposé le 2 juillet 2019, à titre de régularisation, une déclaration de travaux, qu'il a ultérieurement complétée, portant sur l'installation d'un assainissement individuel, le remplacement d'une verrière sur un bâtiment annexe à l'habitation principale et la pose d'une terrasse en bois en remplacement de la terrasse existante. Par un arrêté du 12 septembre 2019, le maire de la commune de Sainte-Marie-de-Ré s'est opposé à cette déclaration préalable. M. A... relève appel du jugement du 28 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 septembre 2019, ensemble la décision implicite du 13 janvier 2020 portant rejet de son recours gracieux.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges ont exposé avec suffisamment de précision les motifs pour lesquels ils ont estimé que les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article R. 121-5 du code de l'urbanisme devaient être écartés. Dans ces conditions, le tribunal administratif de Poitiers, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a suffisamment motivé son jugement. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité.

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 12 septembre 2019 :

4. En premier lieu, l'appelant soulève à nouveau en appel le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté en litige. Toutefois, il ne se prévaut d'aucun élément de droit ou de fait nouveau susceptible de remettre en cause la réponse apportée par les premiers juges. Par suite, il y a d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par le tribunal administratif.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. / Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver, comportant notamment, en fonction de l'intérêt écologique qu'ils présentent, les dunes et les landes côtières, les plages et lidos, les forêts et zones boisées côtières, les îlots inhabités, les parties naturelles des estuaires, des rias ou abers et des caps, les marais, les vasières, les zones humides et milieux temporairement immergés ainsi que les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par la directive 79/409 CEE du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages ". Aux termes de l'article R. 121-4 du même code : " En application de l'article L. 121-23, sont préservés, dès lors qu'ils constituent un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral et sont nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentent un intérêt écologique : (...) / 7° Les parties naturelles des sites inscrits ou classés en application des articles L. 341-1 et L. 341-2 du code de l'environnement, des parcs nationaux créés en application de l'article L. 331-1 du code de l'environnement et des réserves naturelles instituées en application de l'article L. 332-1 du code de l'environnement ; (...) ". Il ressort de ces dispositions que les parties naturelles des sites inscrits ou classés en application de la loi du 2 mai 1930, aujourd'hui codifiée aux articles L. 341-1 et suivants du code de l'environnement, sont présumées constituer des sites ou paysages remarquables. Toutefois, si cette qualification présumée est contestée, leur caractère remarquable doit être justifié. Pour apprécier si les parcelles en cause présentent le caractère de site ou paysage remarquable à protéger au sens du premier alinéa de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme, l'autorité compétente ne peut se fonder sur leur seule continuité avec un espace présentant un tel caractère, sans rechercher si elles constituent avec cet espace une unité paysagère justifiant dans son ensemble cette qualification de site ou paysage remarquable à préserver.

6. L'article 3 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) de la commune de Sainte-Marie-de-Ré indique que les zones NDr sont constituées des " espaces remarquables visés aux articles L. 121-23 et suivants ainsi que le R. 121-5 du code de l'urbanisme ". En soutenant que le maire de la commune de Sainte-Marie-de-Ré a commis une erreur de droit en estimant que les parcelles concernées par le projet présentaient le caractère d'un espace remarquable au sens des dispositions de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme, alors que l'arrêté du 12 septembre 2019 s'est borné à faire application des dispositions précitées du POS de la commune qui classent les parcelles de l'appelant en zone NDr, M. A... doit être regardé comme contestant le classement opéré par le POS.

7. Le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle normal sur l'application des dispositions de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme en vertu desquelles les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques.

8. Il ressort des pièces du dossier que l'ensemble de l'Ile de Ré constitue, en vertu d'un arrêté ministériel du 23 octobre 1979, un site inscrit à l'inventaire des sites au titre de la loi du 2 mai 1930. L'ensemble foncier d'un seul tenant constitué des parcelles cadastrées section AN n° 249, 263, 264 et 265, d'une superficie d'environ 7 600 m2, est situé au sein d'une vaste zone densément boisée, avec laquelle elle forme une unité paysagère. Si cette zone est bordée à l'est par un camping, elle constitue un espace boisé classé de 20 hectares et est intégralement comprise dans une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique de type I. Elle présente dès lors un caractère remarquable. En outre, la présence de quelques constructions, notamment des serres agricoles et une maison d'habitation sur une parcelle voisine, ainsi que d'une zone artisanale au demeurant située à plus de 500 m de l'espace boisé classé, n'est pas de nature à ôter aux terrains de M. A... leur caractère naturel. Dans ces conditions, en classant les parcelles de M. A... en zone NDr, les auteurs du plan d'occupation des sols de la commune de Sainte-Marie-de-Ré n'ont pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 121-24 du code de l'urbanisme, relatif aux espaces remarquables : " Des aménagements légers, dont la liste limitative et les caractéristiques sont définies par décret en Conseil d'Etat, peuvent être implantés dans ces espaces et milieux lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public, et qu'ils ne portent pas atteinte au caractère remarquable du site ". Aux termes de l'article R. 121-5 du même code : " Seuls peuvent être implantés dans les espaces et milieux mentionnés à l'article L. 121-24, dans les conditions prévues par cet article, les aménagements légers suivants, à condition que leur localisation et leur aspect ne dénaturent pas le caractère des sites, ne compromettent pas leur qualité architecturale et paysagère et ne portent pas atteinte à la préservation des milieux : (...) 3° La réfection des bâtiments existants et l'extension limitée des bâtiments et installations nécessaires à l'exercice d'activités économiques ; (...) Les aménagements mentionnés aux 1°, 2° et 4° et les réfections et extensions prévues au 3° du présent article doivent être conçus de manière à permettre un retour du site à l'état naturel ".

10. Il ressort des pièces du dossier de la déclaration préalable que les travaux projetés consistent en l'installation d'un assainissement individuel, au remplacement d'une verrière et à la pose d'une terrasse en bois. Si l'appelant soutient que ces travaux doivent être regardés comme des aménagements légers au sens des dispositions citées au point précédent, il ressort des pièces du dossier et en particulier des photographies produites par la commune de Sainte-Marie-de-Ré que l'espace concerné par la pose de la terrasse en bois, d'une superficie de plus de 90m2 ne faisait précédemment l'objet que d'un revêtement en pierre d'une bien moindre superficie. S'agissant de la verrière, il ressort des pièces du dossier notamment des photographies produites par les parties que la version existante à la date de la décision litigieuse, dont il est constant qu'elle a été construite sans autorisation d'urbanisme entre 2011 et 2012, est constituée d'aluminium de couleur sombre, tandis que la verrière initiale, érigée dans les années 1990, était plus petite et faite d'acier de couleur blanche. Dans ces conditions, eu égard à la nature et à l'importance des travaux et des changements projetés, ceux-ci ne peuvent être regardés comme des aménagements légers au sens de l'article R. 121-5 du code de l'urbanisme. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation doivent être écartés.

11. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la substitution de motifs demandée par la commune de Sainte-Marie-de-Ré, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Sainte-Marie-de-Ré, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Sainte-Marie-de-Ré en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera à la commune de Sainte-Marie-de-Ré une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Sainte-Marie-de-Ré.

Délibéré après l'audience du 13 février 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 mars 2024.

La présidente-assesseure,

Bénédicte MartinLa présidente-rapporteure,

Evelyne Balzamo Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX04524


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX04524
Date de la décision : 05/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Evelyne BALZAMO
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : CABINET OCEANIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-05;21bx04524 ?
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