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20/02/2024 | FRANCE | N°22BX01446

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 20 février 2024, 22BX01446


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société civile immobilière Les greniers de Sophie a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 mars 2013 et 31 mars 2014, ainsi que des majorations et intérêts de retard, pour un montant total de 563 772 euros.

Par un jugement n° 1902706 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de Pau a partiellement fait d

roit à sa demande.

Procédure devant la cour :



Par une requête et des mémoi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière Les greniers de Sophie a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 mars 2013 et 31 mars 2014, ainsi que des majorations et intérêts de retard, pour un montant total de 563 772 euros.

Par un jugement n° 1902706 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de Pau a partiellement fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 24 mai 2022, 19 décembre 2022 et 13 septembre 2023, la SCI Les greniers de Sophie, représentée par Me Martin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 17 mars 2022 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos les 31 mars 2013 et 31 mars 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que le comptable public de Pau n'était pas compétent territorialement pour établir l'avis de mise en recouvrement ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

- la méthode de reconstitution des recettes de la société est radicalement viciée dès lors que l'administration a analysé les débits bancaires correspondant aux retraits d'espèces et aux dépenses personnelles à des recettes ;

- dès lors qu'elle n'a pas déposé de déclarations de résultat au titre des exercices clos les 31 mars 2013 et 31 mars 2014, et qu'elle n'a pas produit de comptabilité, l'administration fiscale ne pouvait pas procéder à la rectification de son résultat et ne pouvait dès lors retenir une minoration d'un actif non déclaré ; la rectification portant sur les retraits d'espèces et les dépenses bancaires non effectuées dans l'intérêt de la société n'est par conséquent pas fondée en droit ;

- le crédit bancaire du 15 octobre 2012 d'un montant de 59 226,81 euros, correspondant à un virement bancaire effectué par une des deux associés de la société, n'est pas assimilable à une recette mais constitue le remboursement d'avances effectuées au profit de cette associée les 3 et 11 octobre 2012 ; elle est ainsi fondée à demander que ce crédit soit déduit du montant des " encaissements divers " assimilés à des recettes par l'administration fiscale au titre de l'exercice clos le 31 mars 2013 ;

- elle demande que les travaux réalisés en 2014 sur le local situé avenue de la république à Pau, ainsi que les frais de notaire relatifs à la vente réalisée le 12 mars 2014 et la commission versée à l'agent immobilier, viennent en déduction du rehaussement qui lui a été notifié ;

- elle produit des justificatifs de charges dont elle est fondée à demander la déduction du résultat de la société au titre des exercices clos en mars 2013 et mars 2014 ;

- elle justifie ainsi, au titre de l'exercice clos en mars 2013, d'honoraires pour un montant de 38 867,43 euros que le tribunal administratif de Pau aurait dû admettre, de frais d'actes et de contentieux pour un montant de 63 918,01 euros, de taxe foncière à hauteur de 35 390 euros et d'intérêts pour un montant de 938,64 euros ;

- s'agissant de l'exercice clos en mars 2014, elle justifie de charges d'assurances pour un montant de 11 126 euros, d'honoraires à hauteur de 26 618,24 euros, de frais d'actes et de contentieux pour une somme de 210 320,20 euros, de taxe foncière pour 17 055 euros, d'intérêts à hauteur de 66 882,78 euros et de services bancaires pour 75,20 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 28 novembre 2022 et les 8 septembre et 12 octobre 2023, ces deux derniers n'ayant pas été communiqués, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la société Les greniers de Sophie ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 15 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 16 octobre 2023 à 12h00.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Pauline Reynaud,

- les conclusions de Mme Nathalie Gay, rapporteure publique,

- et les observations de Me Martin, représentant la société Les greniers de Sophie.

Une note en délibéré présentée par la SCI Les greniers de Sophie a été enregistrée le12 février 2024.

Considérant ce qui suit :

1. La société civile immobilière Les greniers de Sophie exerce une activité d'acquisition, de gestion et d'administration de biens immobiliers. Cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période courant du 1er avril 2012 au 31 mars 2014 s'agissant de l'impôt sur les sociétés et la période courant du 1er janvier 2014 au 30 novembre 2014 en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), aux termes de laquelle l'administration fiscale, après avoir procédé à la reconstitution du résultat de la société, selon la procédure de taxation d'office en l'absence de dépôt de déclaration de résultat, a notifié à cette dernière par proposition de rectification du 25 novembre 2015, des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés et de taxe sur les véhicules de société ainsi que des rappels de TVA. Sa réclamation préalable ayant été rejetée par une décision de l'administration fiscale du 16 septembre 2019, la société Les greniers de Sophie a demandé au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 31 mars 2013 et le 31 mars 2014, ainsi que des majorations et intérêts de retard pour un montant total de 563 772 euros. Par un jugement n° 1902706 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de Pau a déchargé la société Les greniers de Sophie du montant des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en mars 2013 et mars 2014 à hauteur des montants correspondants à la prise en compte pour le calcul de son bénéfice net, des charges et des réductions de recettes pour un montant de 5 340 euros au titre de l'exercice clos au mois en mars 2013 et de 22 558,72 euros au titre de l'exercice clos au mois de mars 2014, et a rejeté le surplus des conclusions de la requête. La société Les Greniers de Sophie relève appel de ce jugement.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article 218 A du code général des impôts : " 1. L'impôt sur les sociétés est établi au lieu du principal établissement de la personne morale. / Toutefois, l'administration peut désigner comme lieu d'imposition : / soit celui où est assurée la direction effective de la société ; / soit celui de son siège social. / (...) ". Selon l'article L. 256 du livre des procédures fiscales : " Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public compétent à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité. (...) ". L'article L. 257 A du même livre prévoit que : " Les avis de mises en recouvrement peuvent être signés et rendus exécutoires (...) sous l'autorité et la responsabilité du comptable public compétent, par les agents du service ayant reçu délégation ". Selon l'article R. 256-8 de ce livre : " (...) / Le comptable public compétent pour établir l'avis de mise en recouvrement est soit celui du lieu de déclaration ou d'imposition du redevable, soit, dans le cas où ce lieu a été ou aurait dû être modifié, celui compétent à l'issue de ce changement, même si les sommes dues se rapportent à la période antérieure à ce changement. (...) ". Aux termes de l'article 350 terdecies de l'annexe III au code général des impôts : " I. Sous réserve des dispositions des articles 409 et 410 de l'annexe II au code général des impôts, seuls les fonctionnaires de la direction générale des impôts appartenant à des corps des catégories A et B peuvent fixer les bases d'imposition et liquider les impôts, taxes et redevances ainsi que proposer les rectifications. / (...) II. Les fonctionnaires mentionnés au premier alinéa du I peuvent exercer les attributions que ces dispositions leur confèrent à l'égard des personnes physiques ou morales (...) qui ont déposé ou auraient dû déposer dans le ressort territorial du service déconcentré ou du service à compétence nationale dans lequel ils sont affectés une déclaration, un acte ou tout autre document (...). / V. Sans préjudice des dispositions des II, III et IV, les fonctionnaires mentionnés au premier alinéa du I peuvent exercer leurs attributions à l'égard des personnes physiques ou morales et des groupements liés aux personnes ou groupements qui relèvent de leur compétence. / (...) ".

3. L'article L. 206 du livre des procédures fiscales prévoit que : " En ce qui concerne l'impôt sur le revenu et les taxes assimilées et l'impôt sur les sociétés, les contestations relatives au lieu d'imposition ne peuvent, en aucun cas, entraîner l'annulation de l'imposition ". Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires, qu'elles font obstacle à ce que le contribuable obtienne la décharge de l'une des impositions qu'elles mentionnent au seul motif que l'avis de mise en recouvrement qui l'a établie aurait été signé par une autorité territorialement incompétente. Il y a lieu ainsi d'écarter comme inopérant le moyen tiré de l'incompétence du comptable public soulevé par la requérante.

Sur le bien-fondé des impositions :

4. En vertu de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. La société requérante, qui ne conteste pas le recours à la procédure de la taxation d'office, supporte la charge de la preuve du caractère exagéré du montant du chiffre d'affaires reconstitué par l'administration.

5. Aux termes des dispositions du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ". Par ailleurs, aux termes du 1 de l'article 39 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ; / 4° (...) les impôts à la charge de l'entreprise, mis en recouvrement au cours de l'exercice (...) ; / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...) ". Pour être admis en déduction des bénéfices imposables les frais et charges doivent être exposés dans l'intérêt direct de l'exploitation ou se rattacher à la gestion normale de l'entreprise, correspondre à une charge effective, être appuyés de justifications suffisantes et être compris dans les charges de l'exercice au cours duquel ils ont été engagés.

En ce qui concerne les recettes perçues au titre des exercices clos le 31 mars 2013 et le 31 mars 2014 :

6. En premier lieu, il résulte de la proposition de rectification du 15 novembre 2015 qu'eu égard à l'absence de déclaration de résultats et de présentation d'une comptabilité au titre de la période vérifiée, l'administration a mis en place la procédure de taxation d'office et procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires de la société Les greniers de Sophie, en exerçant son droit de communication prévu à l'article L. 81 du livre des procédures fiscales auprès des établissements bancaires et des clients de la société. L'administration a alors évalué les recettes de la société pour la période considérée, provenant des loyers perçus par celle-ci de la part des sociétés Babou, Casino distribution France et Sebra, à partir des baux commerciaux communiqués par ces sociétés, et des encaissements bancaires apparaissant sur les comptes de la société Les greniers de Sophie. L'administration a ajouté à ces montants des encaissements inscrits sur les relevés bancaires de la société, une plus-value professionnelle non-taxée résultant d'une vente d'un local à Pau le 12 mars 2014, ainsi que des retraits d'espèces et dépenses personnelles identifiées sur les relevés bancaires ouverts auprès de la CCSO et de la banque Pouyanne, venus en minoration de l'actif de la société. L'administration a par ailleurs reconstitué les charges admises en déduction à partir des justificatifs présentés par la société et des informations recueillies dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès des établissements bancaires.

7. Il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient la société Les greniers de Sophie, son résultat pour la période considérée n'a pas été reconstitué à partir de l'examen de comptes d'actif, la société requérante n'ayant d'ailleurs pas produit d'éléments de comptabilité, mais à partir des encaissements retracés sur les relevés bancaires auprès des banques CIC sud-ouest et Pouyanne, ainsi que des éléments communiqués par les clients de la société appelante. Or, la société Les greniers de Sophie ne produit aucun élément de nature à justifier du montant total des recettes professionnelles qu'elle aurait réellement encaissées sur cette période. Dans ces conditions, la société Les greniers de Sophie, qui ne propose aucune méthode alternative susceptible d'aboutir à des résultats inférieurs et plus précis que ceux auxquels l'administration est régulièrement parvenue, n'apporte pas la preuve qui lui incombe que la méthode de reconstitution mise en œuvre par le service, dont la pertinence doit être appréciée au regard des éléments d'information dont celui-ci disposait effectivement, serait radicalement viciée dans son principe.

8. En deuxième lieu, s'il résulte de l'instruction que le relevé du compte CIC d'octobre 2012 fait apparaître un virement d'un montant de 42 542,22 euros le 3 octobre 2012 au bénéfice de Mme C... A... et un virement d'un montant de 16 684,59 euros le 11 octobre 2012 au profit de la même personne, elle n'apporte toutefois pas d'éléments sur la nature de ces virements ni sur le motif du crédit bancaire du 15 octobre 2012. La société appelante n'est, par suite, pas fondée à soutenir que l'administration ne pouvait pas prendre en compte cette somme de 59 226,18 euros au titre des recettes de l'exercice clos au 31 mars 2013.

En ce qui concerne les charges engagées au titre des exercices clos le 31 mars 2013 et le 31 mars 2014 :

S'agissant des charges d'honoraires :

Quant à l'exercice clos au 31 mars 2013 :

9. Pour justifier des honoraires facturés par l'étude d'huissier Brun, la société Les greniers de Sophie produit, au titre de l'exercice clos le 31 mars 2013, des lettres de rappel datant des 18 juin 2012, 4 juillet 2012, 16 juillet 2012, 2 octobre 2012, pour absence de paiement, mais ne produit pas les factures détaillant la nature des prestations effectuées ou les éléments attestant du caractère certain de la dette, dont la société n'établit pas, notamment par la production de relevés bancaires, qu'elle aurait été effectivement réglée.

10. Il résulte des notes de frais des 26 juillet 2012 et 13 septembre 2012 produites par la société appelante que les frais de conseil du cabinet juridique Rodon, pour un montant de 1 505,86 euros, correspondent au remboursement de frais irrépétibles dans le cadre d'une affaire contre le syndic de la copropriété de la résidence Victoria Surf à Biarritz, au sein de laquelle la société Les greniers de Sophie détient un local. Toutefois, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, en l'absence de précision sur la nature exacte du contentieux, le lien avec l'exploitation de la société n'est pas établi.

11. En se bornant à produire une facture d'un montant de 210,33 euros adressée par l'étude Dantil, huissier de justice, portant la mention " congé avec offre de renouvellement " de la société Babou, locataire de la société Les greniers de Sophie, cette dernière n'apporte pas d'élément suffisant pour justifier du caractère déductible de cette charge.

12. Si la société appelante produit des factures datées des 18 septembre 2012, 15 février 2013, 26 mars 2013 du cabinet d'expertise comptable Rouffiac pour des prestations de conseil et assistance, de recherche de documentations sur les charges déductibles des revenus fonciers, de reconstitution de l'exercice comptable, d'établissement des comptes annuels, relatives à l'exercice social de 2013, elle n'apporte pas suffisamment de précision sur la nature exacte de ces prestations et leur lien avec l'exploitation de la société, ni qu'elles auraient été effectivement réglées. Dans ces conditions, la société Les greniers de Sophie n'est pas fondée à demander la prise en compte de ses frais à hauteur de la somme de 1 435,20 euros.

13. Enfin, en se bornant à produire une facture établie le 27 août 2012 par le cabinet Michel Dombre, dont l'objet mentionne " Victoria surf aspect juridique et stratégie capitalistique ", la société appelante n'apporte pas de précision sur la nature exacte de la prestation, de sorte que le lien avec l'exploitation de la société n'est pas établi.

Quant à l'exercice clos au 31 mars 2014 :

14. Si la société produit des lettres de rappels d'impayés des 13 juin 2013 et 4 octobre 2013 de la société d'huissiers de justice Calvo et Camino, celles-ci mentionnent toutefois " 19/10/09 PV constat ", de sorte que ces charges ne peuvent être regardées comme se rapportant à l'exercice en litige. Par ailleurs, la lettre adressée le 25 juillet 2013 par des huissiers de justice relative à un impayé, faisant mention d'un constat, ne permet pas de déterminer avec suffisamment de précision l'objet de la prestation ou son lien avec l'activité de la société, ni que cette dette aurait été effectivement payée. Il en va de même s'agissant de la note de frais émise par Me Maier, avocat, le 3 mars 2014, de la note de frais émise le même jour par Me Guizard, avocat, relative à des timbres fiscaux, de la lettre d'impayés adressée par des huissiers de justice le 25 juillet 2013, de la note de frais et honoraires émise par le cabinet Brun le 20 mars 2014, de la lettre de rappel d'impayés de la société Lartigau émise le 27 mars 2014 ainsi que de la facture d'honoraires établie par Me Lefebvre le 31 mai 2013. Si la société produit différentes factures émises par Me Cohen, avocat, concernant des procédures judiciaires, elle n'apporte toutefois pas de précision sur la nature exacte de ces prestations, de sorte que le lien avec l'exploitation de la société n'est pas plus établi. La société appelante produit enfin des factures émises par le cabinet d'expertise comptable Rouffiac les 24 avril 2013, 24 juillet 2013 et 17 avril 2014 pour des prestations de travaux excel, et de reconstitution des exercices 2004, 2011 et 2012, qui ne sont dès lors pas relatives à l'exercice clos au 31 mars 2014. Dans ces conditions, la société Les greniers de Sophie n'est pas fondée à demander la prise en compte de ces différentes charges d'honoraires.

S'agissant des charges d'assurances :

15. La société requérante demande que des charges supplémentaires d'assurances à hauteur de 11 126 euros soient déduites de son résultat au titre de l'exercice clos le 31 mars 2014. Si elle produit à l'appui de sa demande des avis d'échéance établis le 16 décembre 2013 par la compagnie d'assurance Aviva relatifs à une assurance risque industrielle, deux assurances de véhicules, et deux assurances risques logement, pour la période courant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014, elle ne justifie pas avoir effectivement réglé ces avis d'échéance. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à demander que ces charges soient déduites de son résultat.

S'agissant des frais d'actes et de contentieux :

Quant à l'exercice clos au 31 mars 2013 :

16. La société Les greniers de Sophie demande la déduction du résultat de l'exercice clos le 31 mars 2013 des frais d'actes et de contentieux pour un montant de 63 918,01 euros. Ces charges correspondent, à hauteur de 41 723,74 euros, à la condamnation prononcée par un arrêt de la cour d'appel de Pau du 12 avril 2012 et à hauteur de 15 000 euros à la condamnation prononcée par une ordonnance du tribunal de grande instance de Pau, ainsi qu'à d'autres frais d'actes et de contentieux, en particulier des frais d'avocat et d'huissiers de justice.

17. Il résulte de l'instruction que l'arrêt de la cour d'appel de Pau du 12 avril 2012 prononce la condamnation de la société Les greniers de Sophie à régler des impayés de charges de copropriété dues au titre de l'année 2011 et que le jugement du 13 avril 2012 du tribunal de grande instance de Bayonne prononce la liquidation d'une astreinte pour non-exécution d'un jugement du 7 novembre 2011 de ce même tribunal. Or, en produisant uniquement ces décisions de justice, la société Les greniers de Sophie n'établit pas que les dettes découlant de ces décisions de justice se rattachent effectivement à l'exercice clos au 31 mars 2013. Par ailleurs, les différents justificatifs de frais d'actes et de contentieux produits ne sont pas suffisamment précis s'agissant de la nature des prestations effectuées par les huissiers de justice et avocats, et ne permettent pas d'établir que ces dettes auraient été effectivement réglées au titre de l'exercice en litige et seraient en lien avec l'activité de la société.

Quant à l'exercice clos au 31 mars 2014 :

18. La société Les greniers de Sophie demande la déduction du résultat de l'exercice clos le 31 mars 2014 des frais d'actes et de contentieux pour un montant de 210 320,02 euros. Ces charges correspondent, à hauteur de 165 000 euros à une condamnation de la cour d'appel de Pau du 15 avril 2013, et à hauteur de 31 400 euros, relatif à une autre condamnation du même jour de la même juridiction, ainsi qu'à des frais d'avocats et d'huissiers de justice.

19. Il résulte toutefois de l'instruction que le premier arrêt prononce une liquidation d'astreinte pour non-exécution d'un jugement du tribunal de grande instance de Bayonne du 9 novembre 2011 pour la période du 27 novembre 2011 au 15 avril 2012 relative notamment au retrait d'une palissade et que le second arrêt liquide l'astreinte prononcée par un jugement du 7 novembre 2011. Il en va de même s'agissant des condamnations prononcées par un jugement des prud'hommes de Bayonne du 31 janvier 2014 relatif à la rupture des relations de travail avec un salarié de la société en 2011 à propos de salaires dus en 2011, qui ne se rattachent pas à l'exercice en litige. Par ailleurs, les différents justificatifs de frais d'actes et de contentieux produits ne sont pas suffisamment précis s'agissant de la nature des prestations effectuées par les huissiers de justice et avocats, et ne permettent pas d'établir que ces dettes auraient été effectivement réglées au titre de l'exercice en litige et seraient en lien avec l'activité de la société.

S'agissant de la taxe foncière :

20. La société Les greniers de Sophie demande la déduction du résultat des exercices clos le 31 mars 2013 et le 31 mars 2014 des cotisations de taxe foncière à hauteur respectivement de 33 966 euros et 17 055 euros. Elle produit à cet égard des avis d'imposition de taxe foncière établis en 2012 et 2013, des lettres de relance, ainsi que des avis à tiers détenteur, démontrant qu'elle en est débitrice légale. Il résulte toutefois de l'annexe 1a de la proposition de rectification du 25 novembre 2015 que l'appelante a facturé aux sociétés Babou, Casino et Sebra, le montant de la taxe foncière pour les biens qu'elle leur loue pour la période concernée et dont elle demande la déduction. Ainsi, elle ne peut prétendre à la déduction de ce montant à titre de charge au titre des exercices clos le 31 mars 2013 et le 31 mars 2014.

S'agissant des intérêts :

21. La société requérante demande la prise en compte des charges résultant des intérêts de retard pour un montant de 938,64 euros au titre de l'exercice clos au 31 mars 2013 et à hauteur de 66 882,78 euros au titre de l'exercice clos le 31 mars 2014. Il résulte toutefois de l'instruction que les sommes inscrites sur les tableaux " décompte des sommes dues " édités le 3 mai 2021 ne correspondent pas aux montants des tableaux récapitulatifs de la requête de la société appelante. Par ailleurs, en se bornant à produire un tableau de décompte des sommes dues au titre de ces intérêts, la société requérante ne produit aucun élément permettant de retenir que ces prêts sont en rapport avec l'activité de l'entreprise et ne justifie pas sur ce point de charges rattachables aux exercices en litige. Dans ces conditions, ces seuls éléments ne permettent pas de justifier la prise en compte de ces charges d'intérêt de retard.

S'agissant des frais de services bancaires :

22. Si la société produit une facture de la CIC émise le 4 novembre 2013 pour un montant de 20,20 euros ainsi qu'un avis de prélèvement non réglé d'un montant de 55 euros émis par la banque Pouyanne le 19 novembre 2013, justifiant de frais liés au fonctionnement de ses comptes bancaires, elle n'apporte pas la preuve qui lui incombe dès lors que les impositions en litige ont été établies selon la procédure de taxation d'office, que les dépenses à l'origine de ces frais sont en lien avec son activité. L'administration était par suite fondée à refuser la déduction des charges correspondantes.

S'agissant des frais liés à la vente de ses locaux :

23. Il résulte de l'instruction que la société Les greniers de Sophie a, par acte notarié du 12 mars 2014, cédé ses locaux situés 17 avenue de la république et 86 rue Emile Guichené, pour une somme de 150 000 euros. La société requérante demande la déduction du résultat de l'exercice clos le 31 mars 2014 du montant des travaux engagés avant de pouvoir louer le bien situé 17 avenue de la république à la société Casino, des frais de notaire engagés pour la vente de ces biens, et de la commission de l'agent immobilier. Il résulte toutefois de l'instruction que les différents travaux réalisés dans le local situé 17 avenue de la République, mis en location par la société Les greniers de Sophie, ainsi que les frais de notaire liés à l'achat de ce local, ont été engagés aux cours des années 2005 et 2006, et ne se rapportent donc pas à l'exercice en litige. Par ailleurs, la société ne justifie pas de la commission de 24 000 euros qui aurait été versée à M. B... dans le cadre de l'achat de ce bien, qui se rapporte en tout état de cause également à l'année 2005. Par suite, la société Les greniers de Sophie n'est pas fondée à demander la déduction des différents frais en lien avec l'achat et la revente des biens en cause.

24. Il résulte de tout ce qui précède que la société Les greniers de Sophie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre au titre des exercices clos les 31 mars 2013 et 31 mars 2014.

Sur les frais liés au litige :

25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Les greniers de Sophie demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Les greniers de Sophie est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Les greniers de Sophie et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera délivrée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 30 janvier 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 février 2024.

La rapporteure,

Pauline ReynaudLa présidente,

Evelyne BalzamoLe greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX01446


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01446
Date de la décision : 20/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Pauline REYNAUD
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : SELARL DGM & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-20;22bx01446 ?
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