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30/01/2024 | FRANCE | N°23BX01719

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 30 janvier 2024, 23BX01719


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 1er juin 2022 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.



Par un jugement n° 2205051 du 7 mars 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une r

equête, enregistrée le 20 juin 2023, M. B..., représenté par Me Lanne, demande à la cour :



1°) d'annuler le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 1er juin 2022 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2205051 du 7 mars 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 juin 2023, M. B..., représenté par Me Lanne, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 7 mars 2023 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er juin 2022 de la préfète de la Gironde ;

3°) d'enjoindre au préfet de Gironde de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou à défaut de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois et, dans l'attente, de lui délivrer un récépissé ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement combiné des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

Sur la décision portant refus de délivrer un titre de séjour :

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son fils ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle méconnaît les dispositions du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel qu'il est garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire enregistré le 11 octobre 2023, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête et fait valoir que les moyens soulevés sont infondés.

Par une ordonnance du 4 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 5 décembre 2023.

M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2023/005007 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux du 25 avril 2023.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les observations de Me Chevallier-Chiron représentant M. A... B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant ivoirien, déclare être entré en France le 14 juillet 2018. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 15 janvier 2021. Par un arrêté du 23 avril 2021, la préfète du Loiret lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Le 18 août 2021, M. B... a demandé à la préfète de la Gironde la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 1er juin 2022, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. L'intéressé relève appel du jugement du 7 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er juin 2022.

Sur la décision portant refus de délivrer un titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ". Aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. (...) ".

3. M. B... soutient qu'il contribue à l'entretien et à l'éducation de son enfant français né le 2 décembre 2020. Il se prévaut des éléments produits en première instance tels que le justificatif de virement effectué en décembre 2021 et les quelques justificatifs d'achats effectués entre juillet 2021 et février 2022, et produit nouvellement en appel quatre justificatifs de virements effectués en octobre 2022, avril et mai 2023 ainsi que des factures de dépenses d'alimentation et de vêtements pour enfants datées des mois d'avril, juin et décembre 2022 et des mois de janvier et février 2023. Toutefois la majorité de ces justificatifs, au demeurant peu nombreux, est postérieure à l'arrêté contesté. Si l'achat de vêtements divers achetés le 2 avril 2022 pour un montant de 58,40 euros est antérieur à l'arrêté contesté, il est insuffisant pour caractériser à lui seul la participation de l'intéressé à l'entretien de l'enfant. Par ailleurs, si l'intéressé produit en appel une attestation de la mère de l'enfant, des discussions par messagerie téléphonique, au demeurant non datées, et une attestation d'un médecin quant à la présence du père aux consultations, il ressort des pièces du dossier, ainsi que les premiers juges l'ont relevé, que l'intéressé vit alternativement dans le Loiret et en Seine-Saint-Denis sans faire état de motifs qui l'y contraindraient, et qu'il ne produit que peu de justificatifs de transport entre son lieu de résidence et celui de son fils, dans la région bordelaise, dont un seul est antérieur à l'arrêté contesté. Ainsi en dépit de sa présence à l'accouchement, de la production d'attestations de voisins, peu circonstanciées, et de plusieurs photos, M. B... n'établit pas la participation effective à l'entretien et l'éducation de son fils depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans à la date de la décision. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour attaquée méconnaitrait les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; / (...) ".

5. Dans les circonstances exposées au point 3, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application de ces dispositions et stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

7. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit, que si M. B... a un enfant de nationalité française née d'une relation avec une ressortissante française, il n'établit pas contribuer effectivement à son entretien et à son éducation. En outre, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Côte d'Ivoire où vivent ses trois enfants nés d'une précédente union ainsi que la plupart des membres de sa famille et dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-et-un an. Dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de ce dernier à mener une vie privée et familiale normale et n'a dès lors pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

9. Ainsi qu'il a été dit au point 3, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté contesté, M. B... avait avec son enfant des liens tels que la décision portant obligation de quitter le territoire français puisse être regardée comme ayant été prise en méconnaissance de ces stipulations.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement combiné des dispositions de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être écartées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera adressée pour information au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

M. Ellie, premier conseiller,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2024.

La rapporteure,

Héloïse C...La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX01719


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01719
Date de la décision : 30/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Héloïse PRUCHE-MAURIN
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : LANNE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-30;23bx01719 ?
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