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16/01/2024 | FRANCE | N°23BX01774

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 16 janvier 2024, 23BX01774


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 29 mars 2023 par lequel le préfet de la Vienne l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une mesure d'interdiction de retour sur le territoire national pour une durée de deux ans et l'arrêté du 14 juin 2023 par lequel cette même autorité l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours.



Par un juge

ment n° 2301616, 2301618 du 20 juin 2023, le magistrat désigné du tribunal administratif de Poitiers a rej...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 29 mars 2023 par lequel le préfet de la Vienne l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une mesure d'interdiction de retour sur le territoire national pour une durée de deux ans et l'arrêté du 14 juin 2023 par lequel cette même autorité l'a assigné à résidence pour une durée de 45 jours.

Par un jugement n° 2301616, 2301618 du 20 juin 2023, le magistrat désigné du tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 juin 2023, M. A..., représenté par Me Dumaz Zamora, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2301616, 2301618 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) d'annuler les arrêtés des 29 mars et 14 juin 2023 du préfet de la Vienne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, et de procéder à l'effacement du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui restituer son passeport original dans un délai de 48 heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le jugement est irrégulier dès lors que le magistrat désigné n'a pas statué sur le moyen tiré de ce que la décision d'obligation de quitter le territoire avait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'un défaut de motivation en méconnaissance des dispositions de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;

- elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que le préfet n'a pas saisi les services de police ou le procureur de la République pour connaître les suites judiciaires de l'enquête pénale sur laquelle s'est basée la mesure d'éloignement, ce qui l'a privé d'une garantie ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-1 5° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que son comportement ne constitue pas une menace à l'ordre public ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3 5° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il est le père d'un enfant français à l'entretien et à l'éducation duquel il contribue ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délai de départ volontaire :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français ;

Sur la légalité de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale du fait de l'illégalité des décisions d'obligation de quitter le territoire français, de refus de délai de départ volontaire et fixant le pays de renvoi ;

- sa durée est disproportionnée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision d'assignation à résidence :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 732-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par ordonnance du 5 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 6 novembre 2023.

Un mémoire a été enregistré pour le préfet de la Vienne le 10 novembre 2023, postérieurement à la clôture d'instruction et n'a pas été communiqué.

M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 14 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien né le 13 avril 1984, est entré régulièrement en France en 2016, selon ses déclarations. Il a sollicité le 25 juin 2020 le bénéfice de l'asile, demande qui a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 12 janvier 2021. Il a l'objet d'une première mesure d'éloignement par arrêté du 14 avril 2021, qu'il n'a pas exécutée. A la suite de son interpellation par les services de police le 27 avril 2022, il a fait l'objet d'une nouvelle mesure d'éloignement par arrêté du 28 avril 2022, à laquelle il s'est de nouveau soustrait. Le 29 mars 2023, il a fait l'objet d'une interpellation pour des faits de violences sans incapacité totale de travail et menaces de mort. Par arrêté du 29 mars 2023, le préfet de la Vienne a obligé M. A... à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une mesure d'interdiction de retour sur le territoire national pour une durée de deux ans. Par arrêté du 14 juin 2023, cette même autorité a assigné M. A... à résidence pour une durée de 45 jours dans le département de la Vienne. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 20 juin 2023 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation des arrêtés des 29 mars et 14 juin 2023.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort des termes du jugement attaqué, et notamment de ses points 13 et 14, que le magistrat désigné du tribunal administratif de Poitiers a répondu de manière suffisamment motivée au moyen tiré de ce que la décision d'obligation de quitter le territoire avait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué sur ce point doit être écarté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les arrêtés dans leur ensemble :

3. M. A... se borne à reprendre en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse qui a été apportée par le tribunal administratif sur ces points, les moyens tirés des défauts de motivation de chacune des décisions attaquées et d'examen de sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par le premier juge.

En ce qui concerne la légalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 17-1 de la loi susvisée du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité : " Il est procédé à la consultation prévue à l'article L. 234-1 du code de la sécurité intérieure pour l'instruction des demandes (...) de délivrance et de renouvellement des titres relatifs à l'entrée et au séjour des étrangers (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 230-6 du code de procédure pénale : " Afin de faciliter la constatation des infractions à la loi pénale, le rassemblement des preuves de ces infractions et la recherche de leurs auteurs, les services de la police nationale et de la gendarmerie nationale peuvent mettre en œuvre des traitements automatisés de données à caractère personnel (...) ". Aux termes du I de l'article R. 40-29 du même code : " Dans le cadre des enquêtes prévues à l'article 17-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, (...), les données à caractère personnel figurant dans le traitement qui se rapportent à des procédures judiciaires en cours ou closes, à l'exception des cas où sont intervenues des mesures ou décisions de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenues définitives, ainsi que des données relatives aux victimes, peuvent être consultées, sans autorisation du ministère public, par : / (...) 5° Les personnels investis de missions de police administrative individuellement désignés et spécialement habilités par le représentant de l'Etat. L'habilitation précise limitativement les motifs qui peuvent justifier pour chaque personne les consultations autorisées. Lorsque la consultation révèle que l'identité de la personne concernée a été enregistrée dans le traitement en tant que mise en cause, l'enquête administrative ne peut aboutir à un avis ou une décision défavorables sans la saisine préalable, pour complément d'information, des services de la police nationale ou des unités de la gendarmerie nationale compétents et, aux fins de demandes d'information sur les suites judiciaires, du ou des procureurs de la République compétents. Le procureur de la République adresse aux autorités gestionnaires du traitement un relevé des suites judiciaires devant figurer dans le traitement d'antécédents judiciaires et relatif à la personne concernée. Il indique à l'autorité de police administrative à l'origine de la demande si ces données sont accessibles en application de l'article 230-8 du présent code. (...) ".

5. M. A... ne peut utilement soutenir que la décision attaquée aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière et qu'il aurait été privé d'une garantie du fait de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale, qui encadrent la consultation du fichier " traitement des antécédents judiciaires ", dès lors qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le motif tiré de ce que le comportement de M. A... constituerait une menace à l'ordre public aurait été pris à la suite d'une consultation de ce fichier. Par suite, ce moyen doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) 5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public ; (...) ".

7. Il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet a fondé l'obligation de quitter le territoire français en litige sur les motifs tirés de ce que, suite à son interpellation et son placement en garde à vue par les services de police de Châtellerault le 29 mars 2023 pour des faits de violences sans interruption temporaire de travail et menaces de mort, M. A... ne pouvait justifier de son séjour régulier en France d'une part, et d'autre part, de ce que son comportement constituait une menace à l'ordre public.

8. Il ressort des termes de la décision attaquée que pour considérer que le comportement de M. A... constituait une menace à l'ordre public de nature à justifier, sur le fondement des dispositions précitées du 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français en litige, le préfet a retenu que ce dernier avait été interpellé et placé en garde à vue par les services de police de Châtellerault le 29 mars 2023 pour des faits de violences sans interruption temporaire de travail et menaces de mort et que sa concubine était la victime de ces faits. Toutefois, en l'absence de tout élément relatif à cette procédure pénale de nature à corroborer les infractions retenues, ou relatifs aux suites judiciaires de cette garde à vue, ou encore, plus généralement, à une quelconque condamnation pénale dont M. A... aurait fait l'objet depuis son arrivée sur le territoire français, le requérant est fondé à soutenir que le préfet a méconnu le 5° de l'article L. 611-1 dès lors qu'il n'apparaît pas que son comportement constituait une menace pour l'ordre public. Cependant, il résulte de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision d'éloignement s'il s'était fondé sur le seul motif tiré de ce que M. A... ne pouvait justifier être entré régulièrement sur le territoire français et qu'il s'y était maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, point qui n'est au demeurant pas contesté par le requérant, et qui suffit à fonder légalement la décision contestée.

9. En troisième lieu, aux termes du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : " 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ". Aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant (...) ".

10. M. A... est père d'une petite fille de nationalité française, née le 24 février 2022 en France de son union avec Mme D.... Il se prévaut des dispositions du 5° de l'article L. 611-3 pour contester l'obligation de quitter le territoire français en litige. Toutefois, la contribution effective à l'entretien et l'éducation de sa fille ne peut résulter des quelques factures d'achats de vêtements et de lait de faibles montants qu'il produit, qui sont toutes datées de 2022. Il en est de même de la circonstance, au demeurant non étayée, qu'il aurait résidé avec elle depuis sa naissance jusqu'au 29 mars 2023, jour de son interpellation pour des faits de violences et menaces de mort envers la mère de cette enfant. Enfin, s'il se prévaut d'un courrier adressé à la coordinatrice de l'aide sociale à l'enfance et d'un calendrier prévisionnel de visites médiatisées, ces faits sont postérieurs à la décision attaquée et ses allégations sur ce point au demeurant peu circonstanciées. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... contribuait effectivement, à la date de la décision contestée, à l'entretien et l'éducation de sa fille depuis la naissance de celle-ci. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait, en prenant la décision contestée, méconnu les dispositions précitées du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2 Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

12. M. A... soutient que la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale dès lors qu'il est présent depuis 6 ans en France, qu'il n'a plus aucun lien avec l'Algérie et qu'il père d'un enfant français. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la durée de sa présence en France n'est consécutive qu'au rejet de ses différentes demandes d'asile puis de titres de séjour, et qu'il s'est maintenu en France alors même qu'il a déjà fait l'objet de deux mesures d'éloignement qu'il n'a pas exécutées. Par ailleurs, et alors que M. A... est hébergé chez son cousin depuis qu'il est séparé de sa concubine qui l'accuse de violences conjugales, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'il entretienne des liens stables, anciens et intenses en France, et plus particulièrement avec sa fille, ni qu'il y dispose de perspectives particulières d'emploi. Dans ces conditions, et quand bien même il n'aurait plus d'attaches en Algérie, allégations qui ne sont au demeurant pas étayées, alors qu'il a vécu dans ce pays jusqu'à l'âge de 32 ans, le moyen tiré de ce que la décision attaquée méconnaitrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

13. En cinquième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

14. Dans les circonstances rappelées aux points 10 et 12 du présent arrêt, et alors qu'il ne ressort qu'aucune pièce du dossier que le requérant entretiendrait des liens affectifs avec sa fille, la décision attaquée ne peut être regardée comme portant atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant de M. A.... Par suite le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité de la décision de refus de délai de départ volontaire et de la décision fixant le pays de renvoi :

15. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de ce que ces décisions seraient illégales du fait de l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français sur laquelle elles se fondent doivent être écartés.

En ce qui concerne la légalité de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans :

16. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité de la décision attaquée du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de l'illégalité du refus de délai de départ volontaire et de la décision fixant le pays de renvoi doit être écarté.

17. En deuxième lieu, compte tenu des circonstances exposées aux points 10 et 12, les moyens tirés de ce que la décision attaquée méconnaitrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doivent être écartés.

18. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

19. Compte tenu des circonstances exposées aux points 10 et 12, et quand bien même pour les raisons évoquées au point 8, il ne ressort pas des pièces du dossier que la présence de M. A... représente une menace à l'ordre public, la durée de deux ans fixée par le préfet de l'interdiction de retour en litige n'apparait pas disproportionnée. Par suite, ce moyen doit être écarté.

En ce qui concerne la légalité de l'assignation à résidence :

20. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'assignation à résidence serait illégale du fait de l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

21. En second lieu, aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) ". Aux termes de l'article L. 731-3 du même code : " L'autorité administrative peut autoriser l'étranger qui justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne pouvoir ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, à se maintenir provisoirement sur le territoire en l'assignant à résidence jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation, dans les cas suivants : 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé (...) ". Aux termes de l'article L. 732-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'assignation à résidence prévue à l'article L. 731-1 ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours. Elle est renouvelable une fois dans la même limite de durée. ". Aux termes de l'article L. 732-4 du même code : " Lorsque l'assignation à résidence a été édictée en application des 1°, 2°, 3°, 4° ou 5° de l'article L. 731-3, elle ne peut excéder une durée de six mois. Elle peut être renouvelée une fois, dans la même limite de durée. (...) ".

22. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a fait l'objet, par arrêté du 2 avril 2023, d'une mesure d'assignation à résidence d'une durée de six mois, prise sur le fondement de l'article L. 731-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 14 juin 2023, le préfet de la Vienne a abrogé cette première assignation à résidence et a pris une nouvelle mesure, sur le fondement distinct des dispositions de l'article L. 731-1 du même code, assignant M. A... à résidence pour une durée de 45 jours. Par suite cette dernière assignation respecte la durée maximale fixée par les dispositions précitées de l'article L. 731-3, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que la précédente mesure d'assignation à résidence d'une durée de six mois ait été exécutée entre le 2 avril 2023 et le 14 juin 2023. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 732-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

23. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes d'annulation des arrêtés des 29 mars et 14 juin 2023. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente de chambre,

M. Sébastien Ellie, premier conseiller,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2024.

La rapporteure,

Héloïse C...

La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX01774


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01774
Date de la décision : 16/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Héloïse PRUCHE-MAURIN
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : DUMAZ ZAMORA

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-16;23bx01774 ?
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