Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2022 par lequel la préfète de la Gironde a rejeté sa demande de renouvellement de certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2300101 du 21 mars 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une ordonnance du 2 mai 2023, le président de la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris a, en application des dispositions de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, transmis à la cour la requête de M. C... enregistrée le 21 avril 2023.
Par cette requête et un mémoire enregistré le 24 mai 2023 au greffe de la cour, M. C..., représenté par la SAS ITRA Consulting, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 21 mars 2023 du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2022 de la préfète de la Gironde ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence de dix ans, à titre subsidiaire un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", à titre infiniment subsidiaire, de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté en litige est insuffisamment motivé ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'erreur d'appréciation dès lors que la préfète de la Gironde, sur laquelle repose la charge de la preuve, ne pouvait pas se fonder sur l'absence de cohabitation pour considérer que la communauté de vie entre les époux n'existait plus ;
- il peut bénéficier d'un certificat de résidence au titre du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- l'arrêté en litige méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour qui la fonde ;
- elle est également illégale dès lors qu'il remplissait les conditions légales pour obtenir de plein droit un titre de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 juin 2023, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Il s'en rapporte à ses écritures en première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Laurent Pouget a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien, est entré en France le 1er février 2019 sous couvert d'un visa de court séjour valable jusqu'au 21 juillet 2019. Il a bénéficié d'un certificat de résidence algérien en qualité de conjoint de français valable du 13 mars 2020 au 12 février 2021. Le 21 décembre 2020, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence de dix ans en qualité de conjoint de français. Par un arrêté du 9 décembre 2022, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C... relève appel du jugement du 21 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, à l'appui du moyen tiré de ce que l'arrêté en litige serait insuffisamment motivé, l'appelant ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de droit ou de fait nouveau par rapport à son argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) / Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux ". Aux termes de l'article 7 bis du même accord : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a) (...) : a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que le requérant est marié depuis le 24 juillet 2016 à une ressortissante française, Mme B..., dont il est constant qu'elle réside depuis le mois d'août 2021 en région parisienne. M. C... fait valoir que cet éloignement est indépendant de leur volonté, son épouse ayant été contrainte de déménager à la suite d'une mutation professionnelle tandis qu'il doit lui-même demeurer à Bordeaux, où il dispose d'un emploi. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme B... ne s'est rendue, sans explication, à aucune des trois convocations qui lui ont été adressées par la préfecture afin de permettre aux intéressés de démontrer l'effectivité de leur communauté de vie, alors qu'il n'est pas contesté que les dates avaient été choisies de façon à ce qu'elle puisse se rendre disponible. En outre, M. C... se borne à produire quelques photographies non datées et remontant pour la plupart au mariage du couple ainsi que des justificatifs concernant huit déplacements à Paris qu'il a effectués entre les mois d'octobre 2021 et décembre 2022 pour des séjours très courts, couvrant une quinzaine de jours au total sur la période, et sans que rien n'indique que ces voyages avaient pour objet de rejoindre Mme B.... Dans ces conditions, la préfète de la Gironde, qui a pu valablement estimer que la communauté de vie entre époux avait cessé, n'a pas méconnu les stipulations citées au point 3 en refusant de délivrer à M. C... le certificat de résidence sollicité.
5. En troisième lieu, M. C... soutient qu'il remplissait les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour en tant que salarié sur le fondement des stipulations du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé, qui a formulé une demande de renouvellement de titre de séjour en qualité de conjoint de ressortissant français, aurait également sollicité un changement de statut et demandé un titre de séjour en qualité de salarié, ni que la préfète de la Gironde aurait examiné d'office s'il pouvait prétendre à un titre de séjour sur ce fondement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations est inopérant et doit être écarté. Il en va de même, pour les mêmes motifs, du moyen tiré de ce qu'il remplissait les conditions légales pour obtenir un titre de séjour de plein droit sur un autre fondement que les dispositions citées au point 3.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " l. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, et la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé et de la morale, ou à la protection des droits et des libertés d'autrui ".
7. Ainsi qu'il a été dit au point 4, M. C... n'établit pas le caractère actuel de la communauté de vie avec son épouse. Il est par ailleurs sans charge de famille et n'a fait état d'aucun autre lien particulier sur le territoire français que celui résultant de son mariage avec Mme B.... En outre, le requérant n'allègue pas ne plus disposer d'attaches dans son pays d'origine, dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 40 ans. Dans ces conditions, compte tenu du caractère récent de son entrée en France et en dépit de sa relative insertion professionnelle, la préfète de la Gironde n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. En cinquième lieu, il résulte de ce qui précède que le refus de titre de séjour opposé à M. C... n'est entaché d'aucune illégalité. L'appelant n'est donc pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
9. En sixième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 6° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française (...) ".
10. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que la communauté de vie entre M. C... et son épouse ne peut être tenue pour effective. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa requête. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2023 à laquelle siégeaient :
M. Luc Derepas, président de la cour,
M. Laurent Pouget, président de la 3ème chambre,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023.
Le président-rapporteur,
Laurent Pouget
Le président,
Luc Derepas La greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23BX01224