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12/10/2023 | FRANCE | N°23BX00858

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 12 octobre 2023, 23BX00858


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 28 février 2022 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2200694 du 23 février 2023, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 mars 2023, et un mémoire enregistré



le 5 septembre 2023, M. A... B..., représenté par Me Galinon, demande à la cour :

1°) d'annuler ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 28 février 2022 par lequel le préfet des Hautes-Pyrénées a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2200694 du 23 février 2023, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 mars 2023, et un mémoire enregistré

le 5 septembre 2023, M. A... B..., représenté par Me Galinon, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 février 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Pyrénées, à titre principal de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ", ou à titre subsidiaire de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- il justifie d'une entrée régulière sur le territoire français dès lors qu'il bénéficie d'une carte de résident de longue durée - UE délivrée par les autorités italiennes, et ses revenus des années 2021 et 2022 n'ont pas été étudiés, ce qui démontre que le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation ;

- la décision est entachée d'erreur de droit au regard de l'article L. 435-1 du code

de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet n'a pas examiné

sa capacité à exercer les fonctions envisagées et l'état du marché du travail dans le secteur concerné ; la circonstance que les conditions de l'accord franco-tunisien, de l'article L. 421-1

du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles des articles L. 5221-2,

R. 5221-11 et R. 5221-14 du code du travail n'étaient pas satisfaites ne pouvait valablement fonder un refus de mise en œuvre du pouvoir discrétionnaire du préfet ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des circulaires sur l'admission au séjour par le travail dès lors qu'il justifie d'une ancienneté de séjour sur le territoire français de six années, qu'il dispose d'une expérience professionnelle certaine en qualité d'employé polyvalent dans la restauration, secteur en difficulté de recrutement, qu'il justifie d'une rémunération équivalente au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) sur les années 2021 et 2022, et qu'il ne constitue aucune menace pour l'ordre public ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et d'erreur de droit car il justifie être en possession d'une carte de résident de longue durée - UE délivrée par les autorités italiennes, de sorte qu'il aurait dû faire l'objet d'une décision de remise aux autorités italiennes ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 août 2023, le préfet des Hautes-Pyrénées conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par M. A... B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Meyer a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant tunisien, a déclaré être entré en France

le 1er février 2016, muni d'une carte d'autorisation de travail délivrée par les autorités italiennes, valable jusqu'au 20 décembre 2020. Le 5 mai 2021, il a sollicité une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ". Par un arrêté du 28 février 2022, le préfet des Hautes-Pyrénées

a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... B... relève appel du jugement

du 23 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation

de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 28 février 2022 :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Il ressort de la rédaction de la décision que le préfet ne s'est pas fondé sur la circonstance que les conditions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles des articles L. 5221-2, R. 5221-11 et R. 5221-14 du code du travail n'étaient pas satisfaites, ce qu'au demeurant le requérant ne conteste pas, mais qu'il a retenu, après avoir écarté un droit au séjour au regard de ces dispositions, un ensemble de considérations qu'il place après la citation des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile invoquées dans la demande. Si ces dernières dispositions ne sont en principe pas applicables aux ressortissants tunisiens, le préfet pouvait néanmoins examiner la demande au titre de son pouvoir de régularisation, ce qu'il doit être regardé comme ayant fait. Il résulte des nombreuses considérations qu'il a évoquées qu'il n'a pas manqué d'apprécier complètement la situation du demandeur. Par suite, l'erreur de droit invoquée ne peut être retenue.

3. M. A... B... se prévaut de sa présence en France depuis six ans à la date de la décision, ainsi que de son expérience professionnelle en qualité de salarié d'une entreprise de restauration rapide à Lourdes, dont il a été associé, puis président. S'il soutient que son activité a été défavorablement impactée par la crise sanitaire, les bulletins de salaire qu'il produit font apparaître une rémunération annuelle nette inférieure à 1 200 euros en 2017 et 2018,

et de 4 536,57 euros en 2019, ce qui est très faible. Une amélioration n'a été constatée

qu'en 2021 avec un salaire net de 13 728,40 euros, et les revenus de l'année 2022 sont pour l'essentiel postérieurs à la décision du 28 février 2022. M. A... B... ne peut utilement se prévaloir de dispositions non impératives d'une circulaire du 28 novembre 2012 relative à l'admission au séjour de travailleurs salariés justifiant d'une ancienneté de travail significative. Par ailleurs, ainsi que le préfet l'a souligné, il ne justifie ni d'un talent exceptionnel, ni de considérations humanitaires, et il a commis à deux reprises, en 2019 et 2020, les infractions d'emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail et d'aide à l'entrée et à la circulation ou au séjour irrégulier d'un étranger en France. Enfin, M. A... B... s'est marié

le 15 juillet 2020 en Tunisie, où réside son épouse. Dans ces circonstances, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de l'admettre au séjour à titre exceptionnel.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, une illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 621-1 du code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation au refus d'entrée à la frontière prévu

à l'article L. 332-1, à la décision portant obligation de quitter le territoire français prévue

à l'article L. 611-1 et à la mise en œuvre des décisions prises par un autre État prévue à

l'article L. 615-1, l'étranger peut être remis, en application des conventions internationales ou du droit de l'Union européenne, aux autorités compétentes d'un autre État, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas prévus aux articles L. 621-2 à L. 621-7(...) ". Aux termes de l'article L. 621-4 du même code : " Peut faire l'objet d'une décision de remise aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne l'étranger, détenteur d'un titre de résident de longue durée - UE en cours de validité accordé par cet Etat, en séjour irrégulier sur le territoire français (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions que la remise aux autorités d'un Etat membre de l'Union d'un étranger titulaire d'une carte de résident de longue durée - UE délivrée par cet Etat est une simple faculté, et non une obligation. Par suite, M. A... B... n'est pas fondé à se prévaloir de sa qualité de résident de longue durée en Italie pour soutenir que l'obligation de quitter le territoire français serait entachée d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation. Ainsi que l'a souligné à bon droit le tribunal, la décision prévoit qu'il pourra être reconduit dans tout pays où il établit être légalement admissible. Il appartient au requérant de solliciter, s'il n'a pas rejoint de lui-même le pays qui lui a délivré un titre de séjour, à y être reconduit, et il ne justifie pas qu'il aurait présenté une demande en ce sens avant la décision en cause.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

7. Il résulte de ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à invoquer, par la voie de l'exception, une illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au ministre de l'intérieur

et des outre-mer. Une copie en sera adressée au préfet des Hautes-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Meyer, présidente-assesseure,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 octobre 2023.

La rapporteure,

Anne Meyer La présidente,

Catherine Girault

La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23BX00858


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX00858
Date de la décision : 12/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme ISOARD
Avocat(s) : GALINON

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-10-12;23bx00858 ?
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