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13/07/2023 | FRANCE | N°21BX02748

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 13 juillet 2023, 21BX02748


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part, d'annuler la décision par laquelle l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Val-de-Gères a implicitement rejeté sa demande du 2 avril 2019, reçue le 3 avril suivant, tendant à reconstituer sa carrière et à la faire bénéficier d'un plein traitement entre les mois de janvier 2018 et de juillet 2019, du fait de l'imputabilité au service de sa lombosciatique, et, d'autre part, de condamner ce même

tablissement à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des préjudices...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'une part, d'annuler la décision par laquelle l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Val-de-Gères a implicitement rejeté sa demande du 2 avril 2019, reçue le 3 avril suivant, tendant à reconstituer sa carrière et à la faire bénéficier d'un plein traitement entre les mois de janvier 2018 et de juillet 2019, du fait de l'imputabilité au service de sa lombosciatique, et, d'autre part, de condamner ce même établissement à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis dans l'exercice de ses fonctions.

Par un jugement n° 1901876 du 13 avril 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juin 2021, Mme B..., représentée par la SELARL Cabinet Sanzalone, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 13 avril 2021 ;

2°) d'annuler la décision de l'EHPAD Val-de-Gères refusant de reconstituer sa carrière entre les mois de janvier 2018 et juillet 2019 et de faire droit à ses demandes indemnitaires ;

3°) de mettre à la charge de de l'EHPAD Val-de-Gères la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que l'établissement était tenu de suivre l'avis de la commission de réforme du 15 février 2019, qui a qualifié sa lombosciatique de rechute de l'accident de service du 26 janvier 2015, dès lors qu'il ne l'a pas contesté ; pourtant, il n'a toujours pas reconstitué sa carrière en la plaçant à plein traitement, et ne lui a pas davantage proposé de reclassement à mi-temps thérapeutique depuis 2016, ce qui caractérise une situation de harcèlement ; c'est donc à tort que le tribunal a opposé l'irrecevabilité de son recours.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 septembre 2021, l'EHPAD Val-de-Gères, représenté par la SCP inter-barreaux Drouineau, Bacle, Veyrier, Le Lain, Barroux et Verger, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme B... de la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la requête d'appel est irrecevable car tardive, le jugement attaqué ayant été mis à disposition des parties le 15 avril 2021 ;

- ainsi que l'a relevé à juste titre le tribunal, la demande tendant au versement de la somme de 15 000 euros en réparation de préjudices que Mme B... allègue avoir subis n'a pas été précédée d'une demande adressée à l'établissement ; le contentieux n'est donc pas lié ;

- la requérante ne peut être regardée comme maintenant sa demande d'annulation d'une décision implicite, dès lors qu'elle ne sollicite que le constat de l'inexistence d'une demande de l'établissement tendant à remettre en cause l'avis de la commission de réforme ; au demeurant, en se bornant à soutenir que l'avis de cette commission est en sa faveur, l'intéressée ne remet pas en cause la décision de refus d'imputabilité au service de sa maladie, l'établissement, qui n'est pas lié par cet avis, ayant pris en compte les autres éléments du dossier administratif et médical de l'agent ; Mme B... n'est pas recevable à contester une décision de refus de saisir à nouveau cette instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Cotte,

- les conclusions de Mme Kolia Gallier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Porchet, représentant l'EHPAD Résidence Val-de-Gères.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., infirmière diplômée d'Etat, a été recrutée par l'EHPAD Résidence Val-de-Gères à Surgères, le 20 septembre 1999 et titularisée le 1er juillet 2002. Elle a été victime, le 26 janvier 2015, d'une entorse au genou qui a été reconnue imputable au service par décision du directeur de l'établissement du 9 août 2017. Ses lésions ont été regardées comme consolidées au 30 avril 2015, avec retour à l'état antérieur, et elle a été placée en congé de maladie ordinaire à compter du 1er mai 2015, puis en disponibilité d'office pour raisons de santé à compter du 1er mai 2016. Par un courrier du 11 juillet 2017, l'intéressée a demandé à son employeur de regarder la lombosciatique dont elle souffre comme une rechute de son accident de service. Bien qu'ayant estimé, dans son avis du 20 mai 2016 relatif aux douleurs du membre inférieur droit, que cette pathologie lombaire était indépendante de l'accident du 26 janvier 2015, la commission de réforme a, par un nouvel avis du 15 février 2019, considéré que l'état pathologique de l'intéressée était constitutif d'une rechute de son accident de service, au vu notamment d'une expertise réalisée le 8 juin 2018. Par un courrier reçu par l'EHPAD le 3 avril 2019, Mme B... a demandé à l'établissement de reconstituer sa carrière à compter du 13 juillet 2017, date à laquelle elle a été placée en arrêt de travail pour lombalgie, en lui reconnaissant un plein traitement.

2. Mme B... a saisi le tribunal administratif de Poitiers qui l'a regardée comme sollicitant, d'une part, l'annulation de la décision implicite par laquelle l'établissement a rejeté sa demande tendant au maintien de son plein traitement sur la période comprise entre le mois de janvier 2018 et le mois de juillet 2019, qu'elle évalue à la somme de 21 432 euros, et, d'autre part, la condamnation de ce même établissement à lui verser la somme de 15 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis dans l'exercice de ses fonctions. Par la présente requête, elle relève appel du jugement du 13 avril 2021 qui a rejeté sa demande.

Sur les conclusions indemnitaires :

3. Il n'appartient pas au juge d'appel, devant lequel l'appelant ne conteste pas l'irrecevabilité opposée à ses conclusions par les juges de premier ressort, de rechercher d'office si cette irrecevabilité a été soulevée à bon droit. Or, Mme B... ne conteste pas l'irrecevabilité qui a été opposée par le tribunal administratif à sa demande, qui n'avait pas fait l'objet d'une demande préalable auprès de son employeur, tendant à la condamnation de l'EHPAD à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de ses conditions d'emploi. Le rejet de cette demande ne peut, dès lors, qu'être confirmé.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. D'une part, aux termes de l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, alors en vigueur : " Les dispositions du présent titre s'appliquent aux personnes qui, régies par les dispositions du titre premier du statut général, ont été nommées dans un emploi permanent à temps complet ou à temps non complet dont la quotité de travail est au moins égale au mi-temps, et titularisées dans un grade de la hiérarchie des établissements ci-après énumérés : (...) 3° Etablissements publics locaux accueillant des personnes âgées relevant du 6° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'exclusion de ceux rattachés au centre communal d'action sociale de la ville de Paris (...) ".

5. L'EHPAD Val-de-Gères étant un établissement public relevant de la catégorie des établissements sociaux et médico-sociaux au sens du code de l'action sociale et des familles, la situation de Mme B..., infirmière titulaire à temps complet, relève des dispositions de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

6. D'autre part, aux termes de l'article 41 de cette loi : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) ".

7. Le droit, prévu par les dispositions citées au point précédent, de conserver l'intégralité du traitement est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions.

8. Mme B... a été victime d'un accident de service le 26 janvier 2015 qui a été regardé comme ayant occasionné une fissuration du ménisque interne droit. Son état a été jugé consolidé le 30 avril 2015. Elle a demandé le 11 juillet 2017 à son employeur de reconnaître la lombosciatique dont elle souffre comme une rechute de son accident de service. Après avoir estimé dans un premier temps, dans un avis du 20 mai 2016, que cette pathologie lombaire était indépendante de l'accident de service, la commission de réforme est revenue sur sa position, dans un avis du 15 février 2019, en retenant qu'il s'agissait d'une rechute de l'accident de service. Elle s'est prononcée au vu d'une expertise effectuée, le 8 juin 2018, par un chirurgien orthopédiste, à la demande de Mme B.... Il ressort toutefois de cette expertise que ce médecin s'est prononcé au vu des déclarations de Mme B... selon lesquelles elle aurait été victime d'un accident, le 26 janvier 2015, occasionnant une torsion du tronc, ce qui ne correspond pas aux mentions figurant sur son certificat médical d'arrêt de travail. Si les IRM réalisées en août 2015 et mars 2018, que le médecin a consultées, montrent une anomalie de la charnière lombo sacrée, une discopathie des deux derniers disques lombaires avec une saillie discale intra foraminale L4L5 droite, il ne résulte d'aucune des pièces produites qu'un lien de causalité pourrait être établi entre ces problèmes lombaires et la pathologie du genou. Dans ces conditions, et alors que le tribunal administratif de Poitiers, dans un jugement n° 1701799, 1702240 du 3 avril 2019 confirmé par la Cour le 7 avril 2022, avait déjà écarté l'imputabilité au service de la pathologie lombaire, au vu notamment des expertises médicales réalisées par deux médecins les 14 avril 2016 et 30 septembre 2017, la décision implicite refusant de reconstituer sa carrière et de lui accorder un plein traitement pour la période comprise entre les mois de janvier 2018 et juillet 2019 ne méconnaît pas les dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986.

9. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, tirée de la tardiveté de la requête, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'EHPAD Val-de-Gères, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme B... la somme que l'EHPAD Val-de-Gères au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'EHPAD Val-de-Gères sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Val-de-Gères.

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente assesseure,

M. Olivier Cotte, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 juillet 2023.

Le rapporteur,

Olivier Cotte

La présidente,

Catherine Girault

La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21BX02748


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02748
Date de la décision : 13/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Olivier COTTE
Rapporteur public ?: Mme GALLIER
Avocat(s) : CABINET DROUINEAU 1927

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-07-13;21bx02748 ?
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