Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler la décision du 28 juillet 2020 par laquelle le premier président de la cour d'appel de Fort-de-France et le procureur général près la même juridiction ont rejeté sa demande du 22 juillet 2020 tendant à la prise en charge de ses frais de déplacement domicile - travail, d'enjoindre à l'Etat d'établir, à son profit, un ordre de mission, dans le cadre de l'exercice de ses missions au centre de services partagés de Ducos, et enfin d'enjoindre à l'Etat de lui verser les frais de mission auxquels elle a droit depuis le 1er mars 2017.
Par un jugement n° 2000588 du 21 juin 2021, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 septembre 2021 et un mémoire enregistré le 1er juin 2023, Mme B..., représentée par Me Labejof-Lordinot, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Martinique du 21 juin 2021 ;
2°) d'annuler la décision du 28 juillet 2020 par laquelle le premier président de la cour d'appel de Fort-de-France et le procureur général près la même juridiction ont rejeté sa demande tendant à la prise en charge de ses frais de déplacement domicile-travail ;
3°) de condamner l'Etat lui verser la somme de 16 046,76 euros au titre des frais de mission auxquels elle estime avoir droit ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le refus contesté de prise en charge de ses frais de déplacement quotidien entre son domicile, situé à Fort-de-France, et son lieu de travail, situé à Ducos, méconnaît les dispositions du 1° de l'article 2 du décret du 3 juillet 2006 dès lors que son affectation opérationnelle au centre de services partagés de Ducos doit être assimilée à une mission temporaire ; elle établit par les pièces produites que son service d'affectation, qui détermine sa résidence administrative, est à Fort-de-France
- la décision contestée entraîne une rupture d'égalité de traitement entre elle et les agents qui, placés dans la même situation que la sienne, bénéficient pourtant de la prise en charge des frais de mission.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués par Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Agnès Bourjol,
- et les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique.
Une note en délibéré, présentée pour Mme B..., a été enregistrée le 19 juin 2023.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., adjointe administrative de 2nde classe des services judiciaires, a, par arrêté du 19 décembre 2016, été mutée dans l'intérêt du service au SAR de la cour d'appel de Fort-de-France et affectée au centre de services partagés du centre pénitentiaire de Ducos à compter du 1er mars 2017. Par courrier du 22 juillet 2020, elle a demandé au premier président de la cour d'appel de Fort-de-France et au procureur général près la même juridiction la prise en charge des frais de déplacement entre son domicile, situé à Fort-de-France, et Ducos, son lieu d'affectation. Par une décision du 28 juillet 2020, cette demande a été rejetée au motif que l'arrêté de nomination de l'intéressée mentionne que son poste est situé au centre de services partagés de Ducos. Mme B... a alors saisi le tribunal administratif de la Martinique d'une demande tendant à l'annulation de cette décision de refus de prise en charge de ses frais de déplacement et à la condamnation de l'Etat à lui verser les frais de mission auxquels elle estime avoir droit depuis son affectation en Martinique. Elle relève appel du jugement du 21 juin 2021 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article 1er du décret du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l'Etat : " Le présent décret fixe les conditions et les modalités de règlement des frais de déplacements temporaires des personnels civils à la charge des budgets des services de l'Etat ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Pour l'application du présent décret, sont considérés comme : 1° Agent en mission : agent en service, muni d'un ordre de mission pour une durée totale qui ne peut excéder douze mois, qui se déplace, pour l'exécution du service, hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale ; (...) 6° Résidence administrative : le territoire de la commune sur lequel se situe le service où l'agent est affecté (...). Lorsqu'il est fait mention de la résidence de l'agent, sans autre précision, cette résidence est sa résidence administrative ; / 7° Résidence familiale : le territoire de la commune sur lequel se situe le domicile de l'agent (...) ". L'article 3 de ce décret dispose : " Lorsque l'agent se déplace pour les besoins du service hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale à l'occasion d'une mission, d'une tournée ou d'un intérim, il peut prétendre à la prise en charge de ses frais de transport ". Il résulte de ces dispositions que les missions ouvrant droit, sur leur fondement, à la prise en charge des frais de transport et au versement d'indemnités de mission sont celles qui résultent de déplacements à caractère temporaire. Aux termes de son article 9 : " Les déplacements effectués par l'agent entre son domicile et son lieu de travail ne donnent lieu, sous réserve des dispositions du décret du 1er juillet 1983 susvisé et du décret n° 2010-676 du 21 juin 2010 instituant une prise en charge partielle du prix des titres d'abonnement correspondant aux déplacements effectués par les agents publics entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail, à aucun remboursement ".
3. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 19 décembre 2016 portant mutation de Mme B..., après avoir indiqué que l'intéressée est mutée à la cour d'appel de Fort-de-France, précise qu'elle occupera un poste au sein du centre de services partagés du centre pénitentiaire situé à Ducos. L'intéressée ayant ainsi été affectée, de manière pérenne et non dans le cadre d'une mission temporaire, sur un poste situé à Ducos, sa résidence administrative correspond au territoire de cette commune. Ni la circonstance alléguée que certains documents, en particulier des décisions de changement d'échelon et d'autorisation de congés, indiquent, sans autre précision, que l'intéressée relève de la cour d'appel de France, ni celle qu'un extrait, au demeurant non daté, de l'annuaire du centre pénitentiaire de Ducos ne comporte pas son nom, ne permettent de remettre en cause la réalité de son affectation, par l'arrêté susmentionné du 19 décembre 2016, sur un poste situé à Ducos. Il s'ensuit que la décision attaquée ne repose pas sur une inexacte application des dispositions précitées.
4. Mme B... soutient également que la décision contestée entraîne une rupture d'égalité entre agents et se prévaut de pièces concernant l'une de ses collègues bénéficiant de la prise en charge de ses frais de transports en vertu d'un ordre de mission délivré par l'administration pour intervenir au CSP de Ducos entre le 1er janvier et le 31 décembre 2021. Toutefois, la requérante ayant été affectée de manière pérenne et non pas de manière temporaire sur un poste situé à Ducos, elle n'est pas dans la même situation que cet agent. Dès lors, le moyen ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
5. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision contestée n'est pas illégale. Par suite, les conclusions présentées par Mme B... tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 16 046,76 euros au titre des frais de mission dont elle estime avoir été illégalement privée depuis son affectation en Martinique ne peuvent dès lors qu'être rejetées.
6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
Sur les frais d'instance :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont Mme B... demande le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 13 juin 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,
Mme Agnès Bourjol, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juillet 2023.
La rapporteure,
Agnès BOURJOLLa présidente,
Marie Pierre BEUVE DUPUY
La greffière,
Sylvie HAYET
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX03752