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25/05/2023 | FRANCE | N°22BX01242

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 25 mai 2023, 22BX01242


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Occa Mat et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 2 mars 2020 par laquelle le conseil municipal de Sallebœuf a approuvé la révision du plan local d'urbanisme communal, ainsi que la décision de rejet de leur recours gracieux, ou, à titre subsidiaire, d'annuler cette délibération en tant qu'elle classe en espace boisé classé et en zone N les parcelles cadastrées section AL n° 407, 409, 411, 412, 467 et

500.

Par un jugement n° 2005590 du 3 mars 2022, le tribunal administratif de B...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Occa Mat et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 2 mars 2020 par laquelle le conseil municipal de Sallebœuf a approuvé la révision du plan local d'urbanisme communal, ainsi que la décision de rejet de leur recours gracieux, ou, à titre subsidiaire, d'annuler cette délibération en tant qu'elle classe en espace boisé classé et en zone N les parcelles cadastrées section AL n° 407, 409, 411, 412, 467 et 500.

Par un jugement n° 2005590 du 3 mars 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 mai 2022, la SARL Occa Mat et M. B..., représentés par Me Ferrant et Me Jouanneau, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 mars 2022 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de Sallebœuf du 2 mars 2020, ainsi que la décision de rejet de leur recours gracieux ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler cette délibération en tant qu'elle classe en zone N et en espace boisé classé les parcelles cadastrées section AL n° 407, 409, 411, 412, 467 et 500 ;

4°) d'enjoindre à la commune de procéder à la rectification des erreurs matérielles affectant la rédaction du règlement dans la zone UY afin d'y intégrer une exception pour les industries existantes, et de procéder à la rectification du zonage des parcelles cadastrées section AL n° 407, 409, 411, 412, 467 et 500 en zone UY ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Sallebœuf la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les conseillers municipaux n'ont pas été régulièrement convoqués à la séance du conseil municipal du 2 mars 2020, ni suffisamment informés en l'absence de note de synthèse ;

- les modalités de la concertation n'ont pas été respectées, dès lors que les informations fournies au public n'étaient pas suffisamment lisibles ; les habitants de la commune n'ont pas pu faire d'observations ou comprendre le projet de plan local d'urbanisme ;

- le classement en zone N des parcelles cadastrées section AL n° 411, 412 et 467 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; les caractéristiques de ces parcelles démontrent que leur classement en zone UY s'impose et qu'elles ne présentent pas de caractère naturel ;

- le classement en zone A des parcelles cadastrées section AL n° 407, 409 et 500 est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; en effet, elles sont artificialisées et situées dans une aire industrielle bordée d'habitations ;

- le règlement du plan local d'urbanisme n'est pas cohérent avec le plan d'aménagement et de développement durables dès lors que ce dernier document prévoit le renforcement de l'attractivité économique de la RD 936 ;

- ce classement méconnaît le principe de confiance légitime, et il existe une rupture d'égalité entre les différents propriétaires ; en effet, le souhait de développer une zone d'activité à Plantey Sud est incohérent avec le classement de leurs parcelles, qui sont situées dans une zone d'activité et un bassin d'emplois, en zone N et en espace boisé classé.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 novembre 2022, la commune de Sallebœuf, représentée par Me Boissy, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de la SARL Occa Mat et de M. B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens de la SARL Occa Mat et de M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Charlotte Isoard,

- les conclusions de M. Romain Roussel Cera, rapporteur public,

- et les observations de Me Guillout, représentant la SARL Occa Mat et M. B..., et les observations de Me Dubois, représentant la commune de Sallebœuf.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 2 mars 2020, le conseil municipal de Sallebœuf a approuvé la révision générale du plan local d'urbanisme communal. La SARL Occa Mat et M. B... relèvent appel du jugement du 3 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du 2 mars 2020.

Sur la légalité de la délibération du 2 mars 2020 :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour (...) ". Et aux termes de l'article L. 2121-11 de ce code : " Dans les communes de moins de 3 500 habitants, la convocation est adressée trois jours francs au moins avant celui de la réunion (...) ".

3. Les mentions de la délibération du 2 mars 2020 en litige, qui font foi jusqu'à la preuve du contraire, indiquent que les conseillers municipaux ont été convoqués le 25 février 2020. Alors que les requérants n'apportent aucun élément circonstancié de nature à remettre en cause ces mentions, le moyen tiré de ce que le conseil municipal n'aurait pas été convoqué dans les délais prévus par les dispositions de l'article L. 2121-11 du code général des collectivités territoriales citées ci-dessus doit être écarté.

4. En deuxième lieu, dès lors qu'il est constant que la commune de Sallebœuf compte moins de 3 500 habitants, l'obligation de joindre à la convocation des conseillers municipaux une note explicative de synthèse n'était pas applicable. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales doit être écarté.

5. En troisième lieu, le moyen tiré de l'illégalité de la délibération prescrivant l'adoption ou la révision du plan local d'urbanisme qui porte, d'une part, sur les objectifs, au moins dans leurs grandes lignes, poursuivis par la commune en projetant d'élaborer ou de réviser ce document d'urbanisme et, d'autre part, sur les modalités de la concertation avec les habitants et les associations locales ne peut, eu égard à son objet et à sa portée, être utilement invoqué contre la délibération approuvant le plan local d'urbanisme. Ainsi, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir du caractère prétendument imprécis des modalités de la concertation définies par la délibération du 7 mai 2018. La SARL Occa Mat et M. B... ne sauraient utilement se prévaloir des diverses remarques émises par la commissaire-enquêtrice dans son rapport dès lors qu'elles ne concernaient pas des insuffisances de la procédure de concertation, mais étaient relatives à l'information du public au cours de l'enquête publique. Enfin, si les requérants évoquent le changement de zonage de leurs parcelles, ils ne précisent pas en quoi la procédure de concertation aurait été insuffisante sur ce point.

6. Enfin, la SARL Occa Mat et M. B... se bornent à reprendre en appel, sans critique sérieuse et sans apporter d'élément nouveau par rapport à leurs productions de première instance, le moyen tiré de l'insuffisance de l'information du public au cours de l'enquête publique, auquel le tribunal a suffisamment et pertinemment répondu. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

En ce qui concerne la légalité interne :

7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3 ".

8. Si le plan d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de Sallebœuf indique, dans l'objectif " Assurer un développement économique équilibré ", qu'il convient de prévoir des zones d'activités et de services, et notamment de " renforcer l'attractivité économique de la RD 936 ", que jouxte les parcelles cadastrées section AL n° 407, 409, 411, 412, 467 et 500, il est indiqué que ce renforcement doit se faire " en harmonie avec le territoire communal ". Il ressort d'ailleurs des pièces du dossier que le zonage des parcelles des requérants, a été maintenu, tandis que d'autres parcelles ont fait l'objet d'un classement en zone UY dans le secteur " Plantey Sud ", également situé le long de cette route départementale, afin de créer une zone artisanale. Par ailleurs, le plan d'aménagement et de développement durables fixe également comme objectif de conserver le cadre environnemental de la commune en préservant les entités agricoles et l'image rurale de Sallebœuf, et préconise de limiter l'urbanisation à proximité des zones cultivées et de protéger et mettre en valeur les paysages, notamment dans le but de préserver l'activité agricole. Au regard de ces éléments, le classement des parcelles en cause en zone A et N ne saurait être regardé comme incohérent avec le plan d'aménagement et de développement durables. Ce moyen doit par suite être écarté.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ". Et aux termes de l'article R. 151-24 de ce code : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; / 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; / 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues ".

10. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme, qui ne sont pas liés par les modalités existantes d'utilisation du sol, de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

11. D'une part, les parcelles cadastrées section AL n° 407, 409 et 500 sont directement situées en bordure est de vastes parcelles agricoles. Elles jouxtent ainsi un secteur dont la vocation agricole est avérée et ne présentent, pour les parcelles cadastrées section AL n° 409 et 500 que des aménagements dont l'ampleur doit être regardée comme limitée. A cet égard, les requérants ne sauraient se prévaloir du caractère artificialisé des parcelles cadastrées section AL n° 409 et 500 dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que cette artificialisation résulte directement des travaux qu'ils ont eux-mêmes réalisés sans autorisation, malgré un arrêté d'interruption de travaux pris à leur encontre, sur ces terrains. Par ailleurs, le maintien de ces parcelles en zone A répond aux objectifs définis par le plan d'aménagement et de développement durables, lequel reflète le parti d'aménagement retenu par les auteurs du plan, de préserver les entités agricoles et de limiter l'urbanisation à proximité de secteurs cultivés. Par suite, le conseil municipal de Sallebœuf n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en maintenant le classement en zone A des parcelles en cause.

12. D'autre part, les auteurs d'un plan local d'urbanisme peuvent être conduits à classer en zone naturelle, pour les motifs énoncés par les dispositions de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme citées ci-dessus, un secteur qu'ils entendent soustraire, pour l'avenir, à l'urbanisation. En l'espèce, la parcelle cadastrée section AL n° 467 s'ouvre au nord et à l'est sur un vaste espace boisé, qui a été classé en zone naturelle, tandis que les parcelles cadastrées section AL n° 411 et 412 jouxtent de vastes parcelles agricoles situées à l'ouest. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il ressort des pièces du dossier, et notamment des photographies aériennes permettant d'appréhender l'évolution des terrains depuis 2009, que ces parcelles présentaient des boisements, qui ont été supprimés par les requérants sans autorisation. Ces derniers ne sauraient ainsi se prévaloir de ce qu'elles ne présenteraient plus de caractère boisé et de ce qu'elles se situeraient " dans la continuité " de constructions à usage commercial, artisanal et industriel. En outre, le classement de ces parcelles, qui avaient une vocation naturelle, en zone N, répond à l'objectif de mise en place de zones tampons entre les zones agricoles et les zones urbaines défini par le plan d'aménagement et de développement durables. Dans ces conditions, le conseil municipal de Sallebœuf n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en maintenant ces parcelles en zone N.

13. Enfin, le choix du développement de la zone d'activité sur le secteur de Plantey-Sud, qui reflète le parti d'aménagement retenu par les auteurs du plan d'aménagement et de développement durables, ne peut être regardé comme méconnaissant le principe d'égalité entre les administrés, contrairement à ce que soutiennent les requérants. Par ailleurs, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, le principe de confiance légitime, qui fait partie des principes généraux du droit communautaire, ne trouve à s'appliquer dans l'ordre juridique national que lorsque la situation juridique dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit communautaire. Dès lors que la délibération approuvant le plan local d'urbanisme ne relève pas d'une telle situation, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de la méconnaissance du principe de confiance légitime, alors au demeurant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune se serait engagée, à un quelconque moment, sur un classement de leurs parcelles en zone UY.

14. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Occa Mat et M. B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de Sallebœuf du 2 mars 2020.

Sur l'injonction :

15. Eu égard à ses motifs, le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par la SARL Occa Mat et M. B..., n'implique aucune mesure d'exécution. Ainsi, leurs conclusions présentées à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Sallebœuf, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SARL Occa Mat et M. B... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants une somme 1 500 euros à verser à la commune de Sallebœuf, en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Occa Mat et M. B... est rejetée.

Article 2 : La SARL Occa Mat et M. B... verseront à la commune de Sallebœuf une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Occa Mat, à M. A... B... et à la commune de Sallebœuf.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2023 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mai 2023.

La rapporteure,

Charlotte IsoardLe président,

Jean-Claude Pauziès

La greffière,

Stéphanie Larrue

La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22BX01242 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01242
Date de la décision : 25/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: Mme Charlotte ISOARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : CABINET FERRANT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-05-25;22bx01242 ?
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