Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler la décision du 27 mai 2020 par laquelle la directrice des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Martinique lui a notifié le montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise au titre de l'année 2020, en tant qu'elle ne lui a pas attribué l'indemnité correspondant au groupe de fonctions n° 2, et d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par la même autorité sur sa demande du 31 décembre 2019 tendant à la réévaluation du montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise à compter du 1er septembre 2019.
Par un jugement n° 2000372 du 17 mai 2021, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 18 juillet 2021, 4 avril 2023 et 20 avril 2023, M. B..., représenté par Me Beaulac, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par la directrice des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Martinique sur sa demande du 31 décembre 2019 tendant à la réévaluation du montant de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et la décision du 27 mai 2020 par laquelle la même autorité lui a notifié le montant de son indemnité de fonctions, sujétions et d'expertise au titre de l'année 2020 ;
3°) d'enjoindre à la même autorité de procéder à la régularisation de sa situation au titre de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise, en assortissant cette injonction d'une astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il ne comporte ni la signature du président de la formation de jugement ni celle du rapporteur ;
- les premiers juges ont entaché leur jugement d'une erreur de droit liée à la méconnaissance de l'article 3 du décret du 20 mai 2014 et ont retenu une interprétation erronée de l'instruction du 17 octobre 2016, en méconnaissance de la règle du maintien de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise à un niveau équivalent à celui dont l'agent bénéficiait dans ses précédentes fonctions ; il aurait dû obtenir une revalorisation de l'IFSE à la suite de sa mutation ;
- en application du paragraphe II-3 de l'instruction du 17 octobre 2016, l'administration ne pouvait pas lui attribuer un montant d'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise inférieur à celui relevant du groupe de fonctions n°2 ;
- les décisions contestées sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation compte-tenu des fonctions de " gestionnaire crédits Titre 6, assistant contrôle interne " qu'il exerce au sein de la direction des entreprises de la concurrence de la consommation du travail et de l'emploi de Martinique ; ces missions, eu égard à leur technicité et leur niveau d'expertise, le rendaient éligible au montant socle de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise correspondant au groupe de fonctions n°2 ;
- les décisions contestées portent atteinte au principe d'égalité de traitement entre les agents.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 avril 2023, le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête de M. B....
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 6 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 avril 2023 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 2010-302 du 19 mars 2010 ;
- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;
- l'arrêté du 19 mars 2015 pris pour l'application aux corps des secrétaires administratifs des administrations de l'Etat des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Agnès Bourjol,
- et les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a été recruté en février 2014 par l'agence régionale de santé d'Ile-de-France en qualité d'assistant communication-infographiste dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée. Il a été nommé, en qualité de stagiaire, dans le corps des secrétaires administratifs relevant des ministères chargés des affaires sociales à compter du 17 mars 2018. Titularisé par un arrêté du 17 mars 2019 dans le corps des secrétaires administratifs de classe normale, M. B... a obtenu, à sa demande, son changement d'affectation à la direction des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIECCTE) de Martinique à compter du 1er septembre 2019. Par un courrier du 31 décembre 2019, resté sans réponse, M. B... a sollicité auprès de sa hiérarchie la réévaluation du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) perçue depuis son changement d'affectation, soit le 1er septembre 2019. Par un courriel du 27 mai 2020, la directrice des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Martinique lui a notifié le montant de son IFSE au titre de l'année 2020. M. B... relève appel du jugement du 17 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision implicite de rejet de sa demande de réévaluation du montant de l'IFSE perçue à compter du 1er septembre 2019, d'autre part, de la décision de la directrice des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail, et de l'emploi de Martinique du 27 mai 2020, en tant que ces décisions ne lui ont pas attribué l'indemnité correspondant au groupe de fonctions n° 2.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".
3. M. B... soutient que le jugement attaqué est irrégulier dès lors que la copie qui lui a été notifiée ne permet pas de s'assurer que la minute comportait les signatures requises par les dispositions précitées de l'article R. 741-7. Il résulte toutefois de l'examen du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué comporte bien la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. L'article 1er du décret du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat dispose : " Les fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée peuvent bénéficier, d'une part, d'une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (...) ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est fixé selon le niveau de responsabilité et d'expertise requis dans l'exercice des fonctions. / Les fonctions occupées par les fonctionnaires d'un même corps ou statut d'emploi sont réparties au sein de différents groupes au regard des critères professionnels suivants : / 1° Fonctions d'encadrement, de coordination, de pilotage ou de conception ; / 2° Technicité, expertise, expérience ou qualification nécessaire à l'exercice des fonctions ; / 3° Sujétions particulières ou degré d'exposition du poste au regard de son environnement professionnel. / Le nombre de groupes de fonctions est fixé pour chaque corps ou statut d'emploi par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé. / Ce même arrêté fixe les montants minimaux par grade et statut d'emplois, les montants maximaux afférents à chaque groupe de fonctions et les montants maximaux applicables aux agents logés par nécessité de service. Le versement de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est mensuel. " L'article 3 du même décret dispose : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise fait l'objet d'un réexamen : / 1° En cas de changement de fonctions ; 2° au moins tous les quatre ans, en l'absence de changement de fonctions et au vu de l'expérience acquise par l'agent ; 3° En cas de changement de grade à la suite d'une promotion. ".
5. L'arrêté du 19 mars 2015, pris notamment pour l'application aux corps des secrétaires administratifs relevant des ministres chargés des affaires sociales du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP), a prévu trois groupes de fonctions au sein desquels doivent être classés les secrétaires administratifs. En vertu de l'article 2 de cet arrêté, le plafond annuel de l'IFSE est fixé, pour le groupe 2, correspondant aux fonctions spécifiques ou complexes, à 16 015 euros et, pour le groupe 3, à 14 650 euros. Selon le paragraphe II-3 de l'instruction n° DRH/SDIG-SD2H/311 du 17 octobre 2016 relative à la mise en place du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel, le montant minimal annuel de l'IFSE s'élève à 4 800 euros pour le groupe 2 et à 4 200 euros pour le groupe 3.
6. En premier lieu, il résulte des dispositions précitées de l'article 3 du décret du 20 mai 2014 que le montant de l'IFSE fait l'objet d'un réexamen en cas de changement de fonctions, y compris au sein d'un même groupe de fonctions. Il ne résulte cependant ni de ces dispositions ni d'aucun autre texte ou principe que ce réexamen devrait nécessairement se traduire par une revalorisation du montant de l'IFSE, l'agent n'ayant aucun droit au maintien du montant de l'indemnité qu'il percevait dans le cadre de sa précédente affectation.
7. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui occupait un poste d'assistant communication-infographiste, a obtenu, à sa demande, sa mutation au sein de la DIECCTE de Martinique pour y exercer les fonctions de gestionnaire de crédits à compter du 1er septembre 2019. A compter de cette date, il a ainsi changé de fonctions, ce qui impliquant un réexamen de son IFSE. Eu égard à ce qui a été dit au point 6, il n'est pas fondé à soutenir que ce réexamen, en ce qu'il a abouti à un abaissement du montant de cette indemnité, serait entaché d'une erreur de droit.
8. Par ailleurs, à supposer même que le poste d'assistant communication-infographiste que le requérant a occupé jusqu'en août 2019 aurait été classé dans le groupe de fonctions n°2, M. B... ne bénéficiait d'aucun droit à être maintenu dans ce groupe à la suite de son changement de fonctions. Par suite, en application des articles 2 et 3 du décret du 20 mai 2014 cités au point 4, M. B... n'est pas fondé à revendiquer, compte tenu de sa nouvelle affectation, une revalorisation du montant de son IFSE à hauteur de ce qu'il percevait dans ses précédentes fonctions.
9. En deuxième lieu, si M. B... persiste en appel à se prévaloir du paragraphe II-3 de l'instruction du 17 octobre 2016 relative à la mise en place du RIFSEEP au sein des ministères sociaux, selon lequel " un socle indemnitaire est défini en gestion pour chaque corps et groupe de fonctions " et qu' " il s'agit du montant minimum de l'IFSE garanti à l'agent lorsqu'il est affecté sur un emploi appartenant au groupe considéré ", cette instruction interministérielle, qui a pour seul objet d'expliciter les règles du nouveau régime indemnitaire des fonctionnaires de l'Etat, est dépourvue de toute portée impérative.
10. En troisième lieu, M. B... soutient qu'eu égard aux fonctions et aux responsabilités lui incombant en qualité de gestionnaire de crédits, il pouvait prétendre à un classement de ses fonctions dans le groupe n° 2. Il ressort de sa fiche de poste " gestionnaire crédits Titre 6, assistant contrôle interne " qu'il avait pour missions d'assurer la gestion comptable et financière des crédits du Titre 6 de la nomenclature du budget de l'Etat qui sont attribués aux budgets opérationnels des programmes des pôles 3 E, T et C de la DECCTE, d'assurer la gestion budgétaire et comptable sur Chorus, d'apporter son conseil aux gestionnaires, de participer au contrôle de gestion et enfin d'assurer le contrôle interne des opérations comptables. En outre, si la fiche de poste indique que M. B... était également en charge d'assister le gestionnaire, cette mention n'est pas de nature à établir que cette mission relèverait de " l'assistance de direction " au sens et pour l'application de l'article 2 précité du décret du 20 mai 2014. Dans ces conditions, ses fonctions en qualité de gestionnaire de crédits n'impliquaient aucune fonction d'encadrement et n'induisaient aucune sujétion particulière. Par suite, et alors même que le requérant aurait été amené à traiter des dossiers complexes, les décisions en litige, en ce qu'elles ont fixé le montant de l'IFSE de l'intéressé en fonction du groupe de fonctions n°3, ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.
11. Enfin, le réexamen de l'IFSE à raison d'un changement de fonctions étant applicable à tous les agents, le requérant n'est pas fondé à se prévaloir d'une méconnaissance du principe d'égalité de traitement des agents.
12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion. Copie en sera adressée à la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Fort-de-France.
Délibéré après l'audience du 2 mai 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,
Mme Agnès Bourjol, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 mai 2023.
La rapporteure,
Agnès BOURJOLLa présidente,
Marie Pierre BEUVE DUPUY
La greffière,
Sylvie HAYET
La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX03094