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11/04/2023 | FRANCE | N°21BX01366

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 11 avril 2023, 21BX01366


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) GE O2 Terres à projets a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos les 30 juin 2012, 2013 et 2014 pour un montant de 150 792 euros, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014, pour un montant de 9 062 euros.

Par un jugement n° 190

2352 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête.

P...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) GE O2 Terres à projets a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos les 30 juin 2012, 2013 et 2014 pour un montant de 150 792 euros, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014, pour un montant de 9 062 euros.

Par un jugement n° 1902352 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 avril 2021, et des mémoires enregistrés les 27 décembre 2021 et 17 janvier 2023, la société GE O2 Terres à projets, représentée par la SCPA Bondiguel et Associés, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1902352 du 4 février 2021 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos les 30 juin 2012, 2013 et 2014 pour un montant, en droits et pénalités, de 150 792 euros, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014, pour un montant de 9 242 euros.

3°) de prendre acte de la reprise d'instance par Maître Rousselot-Gegoue, liquidateur judiciaire de la société GE O2 Terres à projet ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le résultat du droit de communication exercé auprès de tiers ne lui a pas été présenté, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; le fait que le droit de communication exercé pour le véhicule Hyundai IX35 de M. B... ne soit pas mentionné s'agissant des rappels concernant la société Terres du Sud suffit à vicier la procédure ; la présentation détaillée du résultat le moins favorable au contribuable pour fonder le redressement n'est pas acceptable, dès lors que les données relatives au véhicule Hyundai IX35 confirment un kilométrage très élevé réalisé sur la période, supérieur à celui présenté par le service pour le véhicule BMW X5 Drive ;

- la proposition de rectification ne répond pas à l'exigence de motivation prévue par l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; la méthode de reconstitution des kilomètres est totalement obscure ;

- la charge de la preuve pèse sur l'administration fiscale, qui a commis une erreur de droit ;

- le service n'a pas conclu à l'absence d'activité des trois sociétés vérifiées ;

- s'agissant de la société Terr'ha, la réalité des prestations est confirmée par des contrats et attestations ; sur la période vérifiée, le montant des commissions s'élève à 18 395 euros HT, outre la TVA de 3 638 euros ; le fait que la gérante soit la femme de M. B..., associé de GE O2 Terres à projets ne remet pas en cause cette activité ;

- les factures d'apport de foncier entre les sociétés GE O2 Terres à projets et Terres du sud matérialisent le travail effectué par chacune, dont les associés ne sont pas strictement identiques ; quelques commissions ont été facturées entre les deux sociétés ; sur la période vérifiée, une seule facture d'apport de foncier a été adressée par Terres du sud pour 13 778 euros HT, outre la TVA de 2 710 euros, sur un chiffre de plusieurs centaines de milliers d'euros ; la réalité est différente du montage décrit par le service ;

- la facture émise par Terres du sud contient un libellé précis qui permet d'identifier la prestation facturée : " commission apport foncier " Le Clos des Lavandières " commune de Ste Hélène (56) " ; Le Clos des Lavandières est un programme commercialisé par GE O2 Terres à projets ; la commission facturée par Terres du sud et qui lui a été réglée vise à tenir compte de la participation de cette société à la réalisation du projet ; pour cela, les documents mentionnent GE O2 Terres à projets et non Terres du sud ;

- l'activité de lotisseur demande d'importants déplacements ; le nombre de programmes en cours sur la période démontrent l'activité de la société ; la méthode de reconstitution des kilomètres est excessivement sommaire et radicalement viciée ; le service retient des kilomètres très faibles, en totale contradiction avec ses constatations ;

- à titre subsidiaire, il convient de retenir les kilomètres qui ressortent des factures d'entretien, documents précis utilisés par le service ;

- l'application de la majoration de 40 % est contestée ; le niveau de refacturation est en cohérence avec l'activité de chaque société ; aucune intention d'éluder l'impôt ne peut être retenue.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 octobre 2021, 12 décembre 2022 et 31 janvier 2023, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la requête présentée devant le tribunal administratif de Poitiers était irrecevable, en raison de sa tardiveté ;

- les moyens soulevés par la société GE 02 Terres à projets ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 31 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 15 février 2023 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... A...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) GE O2 Terres à projets, qui exerce une activité de prospection et de ventes de terrains à bâtir, a fait, pour la période du 1er juillet 2011 au 30 juin 2014, l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause la déductibilité du résultat imposable des frais de déplacement sous forme de remboursement d'indemnités kilométriques de deux associés, M. C... et M. B..., de frais de commercialisation facturés par l'entreprise Terr'ha, détenue par Mme B..., et de commissions d'apport foncier facturés par la société Terres du sud, dont les associés sont M. C... et M. B.... Au terme de ce contrôle, par une proposition de rectification du 27 août 2015, établie selon la procédure contradictoire, l'administration a notifié à la société GE O2 Terres à projets des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, au titre des exercices clos les 30 juin 2012, 2013 et 2014, et de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014, la somme globale en droits et pénalités de 160 214 euros, mise en recouvrement le 16 août 2016. La réclamation en date du 17 novembre 2016 a été rejetée par l'administration par une décision du 5 décembre 2017. La société GE O2 Terres à projets relève appel du jugement du 4 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions. La société GE O2 Terres à projets a fait l'objet d'un jugement rendu par le tribunal de commerce de La Rochelle le 13 avril 2021, qui a prononcé sa liquidation judiciaire et a désigné en qualité de liquidateur judicaire Maître Rousselot-Gegoue. Ce dernier entend poursuivre la présente instance et demande à la cour de lui adjuger l'entier bénéfice des écritures et conclusions déposées précédemment dans le cadre de la présente instance par la société GE O2 Terres à projets.

Sur la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, le premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dispose que : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Conformément à l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

3. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 27 août 2015 comporte la désignation des impositions concernées, des années d'imposition et de la base d'imposition, en droit et en fait. Contrairement à ce qu'affirme la société requérante, elle mentionne, de manière suffisamment précise, la nature des frais de déplacements professionnels des associés M. B... et M. C..., de commissions de commercialisation, facturées par l'entreprise unique à responsabilité limitée (EURL) Terr'ha et de prestations d'apport foncier, facturées par la société à responsabilité limitée (SARL) Terres du sud, en litige, ainsi qu'en l'absence de justificatifs produits par la contribuable, les motifs sur lesquels l'administration a entendu se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre à l'intéressée de formuler utilement ses observations. La circonstance que la proposition de rectification aurait comporté des erreurs ou des omissions n'a pas été de nature à priver la société GE O2 Terres à projets de la possibilité de formuler utilement ses observations, ainsi qu'elle l'a d'ailleurs fait. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.

4. En second lieu, aux termes de l'article L.76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". Il résulte de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée. Il en va autrement s'agissant des documents et renseignements qui, à la date de la demande de communication, sont directement et effectivement accessibles au contribuable dans les mêmes conditions qu'à l'administration. Dans cette dernière hypothèse, si le contribuable établit qu'il ne peut avoir effectivement accès aux mêmes documents et renseignements que ceux que détient l'administration, celle-ci est tenue de les lui communiquer.

5. Il résulte de l'instruction que, dans la proposition de rectification du 27 août 2015, l'administration fiscale indique avoir exercé un droit de communication auprès des concessions automobiles " BMW Espace Bienvenue " et " Hyundai Vannes " afin de pouvoir prendre connaissance des factures d'entretien des véhicules de marques BMW X5 Drive et Hyundai IX 35 respectivement détenus par M. B..., pour le premier à compter du mois de février 2014, pour le second, cédé le 11 février 2014 et d'être en mesure de comparer les kilomètres remboursés tant par la société Terres du sud que par la société GE O2 Terres à projets avec les kilomètres parcourus. Le même droit a été exercé auprès de la concession automobile " Hyundai Vannes " s'agissant du véhicule de marque Hyundai IX 55 détenu par M. C.... Le vérificateur a constaté à partir des deux factures communiquées par la concession de la marque BMW en date des 11 février et 4 septembre 2014, ainsi que des treize factures établies par la concession de la marque Hyundai, entre le 9 février 2011 et le 30 janvier 2014, une différence entre les kilomètres parcourus par les véhicules des deux associés et les indemnités kilométriques remboursées. Compte tenu de cette disproportion constatée, le vérificateur a procédé à l'évaluation des kilomètres parcourus liés aux déplacements professionnels à partir de l'examen des pièces comptables et des indications d'achats de carburant sur les relevés bancaires, les associés des deux sociétés détenant des cartes bancaires à usage professionnelle. A supposer que le vérificateur, alors même qu'il y fait référence en même temps qu'il mentionne les factures d'entretien du véhicule détenu par M. C..., associé de M. B..., entretenu dans la même concession de la marque Hyundai, se soit basé sur des éléments transmis par ladite concession pour établir le montant des frais kilométriques, déduits à tort des résultats imposables des sociétés Terres du sud et GE O2 Terres à projets, il n'est pas établi, alors que la proposition de rectification mentionnait l'origine et la teneur des documents et informations sur lesquels l'administration fiscale a fondé les rehaussements en litige, que l'associé et directeur général de la société, M. B..., ne pouvait avoir accès lui-même à ces éléments, en sa qualité de propriétaire du véhicule. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction qu'eu égard à la teneur du renseignement, nécessairement connu de la contribuable, la société requérante aurait été privée, du seul fait de l'absence d'information sur l'origine du renseignement, d'une garantie. Par suite, et alors que la société appelante ne soutient ni n'allègue avoir demandé communication des informations obtenues auprès de tiers, la proposition de rectification du 27 août 2015 comporte des indications suffisamment précises sur les éléments utilisés par l'administration pour remettre en cause les indemnités kilométriques versées par les sociétés précitées et les considérer comme des revenus distribués. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

6. Aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment :/ 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

S'agissant des indemnités kilométriques :

7. La société GE O2 Terres à projets a porté dans ses charges au titre respectif des exercices clos les 30 juin 2012, 2013 et 2014, des sommes de 57 155,64 euros, 58 678,80 euros, 46 247,26 euros, 46 833,34 euros, 16 171,88 euros et 48 370,77 euros, des indemnités kilométriques versées aux associés M. B... et M. C... pour l'utilisation de leurs véhicules personnels dans le cadre de leurs activités professionnelles. En l'absence de justificatif joint à la comptabilité, M. B..., en qualité de directeur général de la société requérante a été invité à produire toute pièce établissant les kilomètres parcourus. La seule production de tableaux mentionnant par mois le nombre de kilomètres parcourus sans aucune autre indication a été estimée insuffisamment probante pour attester du caractère professionnel des déplacements en cause. La société requérante conteste la méthode utilisée par l'administration pour réintégrer dans ses résultats imposables les sommes correspondant aux remboursements de frais kilométriques effectués par les deux associés. Il résulte de l'instruction que l'administration s'est basée non seulement à titre indicatif sur les factures d'entretien des véhicules de marques BMW X5 Drive et Hyundai IX 55, propriétés des associés, les kilométrages indiqués sur ces documents, mais à titre principal, sur les dépenses de carburant, estimées à partir des relevés bancaires et des pièces comptables, pour les trois exercices, les associés disposant de cartes bancaires à usage professionnel. Elle a ainsi conclu à un kilométrage " à finalité professionnelle " effectué par M. B..., dans l'intérêt de la société requérante, de 2 818 kilomètres au titre de l'exercice clos le 30 juin 2012 et de 7 954 kilomètres au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014, ainsi que de 6 744 kilomètres effectués par M. C..., au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014. En se bornant à faire valoir que l'activité de lotisseur nécessite de nombreux déplacements et échanges, de la recherche du foncier disponible au montage du projet jusqu'au suivi de la construction, et en produisant des documents techniques relatifs à l'élaboration et au suivi de quelques projets d'urbanisme, sans aucune autre précision, sur les déplacements réellement effectués dans le cadre des activités professionnelles exercées, la société appelante, qui ne critique pas sérieusement la méthode suivie par l'administration, notamment en renvoyant, à titre subsidiaire, aux kilométrages tels qu'ils ressortent de factures ponctuelles d'entretien des véhicules Hyundai et BMW, n'établit pas que les sommes litigieuses ont couvert des frais de déplacement que M. B... et M. C... auraient réellement exposés dans l'intérêt de l'entreprise. Par suite, c'est à bon droit que les sommes en litige ont été réintégrées dans les résultats et assujetties à l'impôt sur les sociétés.

S'agissant des commissions de commercialisation facturées par la société Terr'ha :

8. Au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014, l'administration a réintégré dans les résultats de la société une somme de 18 395 euros, correspondant à des commissions de commercialisation, facturées par la société Terr'ha dont Mme B... est gérante et associée, au motif qu'aucun mandat de commercialisation n'a pu être produit, ni aucun document justifiant le paiement de prestations en contrepartie de démarches de commercialisation. En se bornant à produire un mandat d'apporteur d'affaires entre la société appelante et la société Terr'ha en date du 15 décembre 2012 et un courrier rendant compte d'une permanence tenue pour le compte de la première par la seconde pour un programme immobilier en 2013, la société GE O2 Terres à projets n'établit pas la déductibilité de la somme qualifiée de " frais de commercialisation " au sujet de laquelle la commission départementale des impôts a d'ailleurs retenu, lors de sa séance du 14 juin 2016 que " la production de mandats de commercialisation conclus entre la SAS GE 02 Terres à projets et I'EURL Terr'ha n'est pas de nature à elle seule à justifier de la réalité des prestations réalisées par cette société ". Par suite, c'est à bon droit que l'administration a refusé d'admettre en déduction la somme en litige du résultat imposable de l'exercice clos le 30 juin 2014.

S'agissant des commissions d'apport foncier :

9. Au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014, l'administration a réintégré dans les résultats de la société une somme de 13 778 euros, correspondant à des commissions d'apport foncier, facturées par la société Terres du sud, au motif que les documents produits ne permettaient pas de justifier de la nature de la prestation effectuée et ce alors qu'il résulte des vérifications de comptabilité effectuées auprès des deux sociétés, qui ont les mêmes associés, que les intéressées se facturent mutuellement des commissions d'apport foncier. En dépit de la demande formée par l'administration, aucun élément n'a été apporté pour établir le contenu des interventions ainsi effectuées, ni le contenu et la nature des missions ainsi confiées. La seule production de la facture en date du 14 août 2013, comportant le libellé sommaire " commission apport foncier " le Clos des Lavandières " commune de Ste Hélène (56) ", pour un montant hors taxe de 13 778 euros est insuffisante pour justifier de la réalité des prestations de services qui auraient été fournies par la société Terres du sud à la société GE O2 Terres à projets. Par suite, l'administration a pu légalement refuser d'admettre en déduction la somme en litige du résultat imposable de l'exercice clos le 30 juin 2014.

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

10. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ; (...) ". Lorsque, sur le fondement de ces dispositions, l'administration met en cause la déductibilité de la taxe ayant grevé l'acquisition d'un bien ou d'un service, au motif que ce bien ou ce service n'a pas été utilisé pour les besoins des opérations imposables du redevable, il lui appartient, lorsqu'elle a mis en œuvre la procédure de rectification contradictoire et que le contribuable n'a pas accepté la rectification qui en découle, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour soutenir que les conditions posées pour une telle déduction ne sont pas remplies.

11. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 8 et 9 du présent arrêt, l'administration démontre que les charges comptabilisées par la société GE O2 Terres à projets et non admises en déduction de son résultat imposable, faute de justificatifs ou en raison de ce qu'elles n'ont pas été engagées dans l'intérêt de l'entreprise, n'ont pas été utilisées pour les besoins de ses opérations imposables. Par suite, c'est à bon droit qu'elle a refusé la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les dépenses correspondantes.

Sur les pénalités :

12. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : /a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Aux termes des dispositions de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, (...) la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ".

13. Ainsi que le fait valoir l'administration, la société appelante ne pouvait ignorer ni l'écart significatif entre les indemnités kilométriques remboursées et les déplacements réellement effectués par les deux associés, ni l'absence de justificatifs quant aux prestations facturées. Ces faits, qui au demeurant concernent deux sociétés, réunissant les mêmes associés, traduisent, en l'espèce, la volonté délibérée de la part de la société requérante d'éluder une partie de l'impôt dû. L'administration doit dès lors être regardée comme apportant la preuve du manquement délibéré de la société GE O2 Terres à projets, justifiant les pénalités pour manquement délibéré infligées.

14. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que la société GE O2 Terres à projets n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société GE O2 Terres à projets est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me Marie-Adeline Rousseolot-Gegoue, liquidateur judiciaire de la société GE O2 Terres à projets et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 avril 2023.

La rapporteure,

Bénédicte A...La présidente,

Evelyne BalzamoLe greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX01366


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01366
Date de la décision : 11/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Bénédicte MARTIN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SCP BONDIGUEL et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-04-11;21bx01366 ?
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