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11/04/2023 | FRANCE | N°21BX01365

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 11 avril 2023, 21BX01365


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme F... D... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, mises à leur charge au titre des années 2012 à 2014, pour un montant total, en droits et pénalités, de 124 096 euros.

Par un jugement n° 1901531 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 avril 2021, et d

es mémoires enregistrés les 24 décembre 2021, 6 décembre 2022, 17 janvier 2023 et 3 février 2023...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme F... D... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, mises à leur charge au titre des années 2012 à 2014, pour un montant total, en droits et pénalités, de 124 096 euros.

Par un jugement n° 1901531 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 avril 2021, et des mémoires enregistrés les 24 décembre 2021, 6 décembre 2022, 17 janvier 2023 et 3 février 2023, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. et Mme D..., représentés par la SCPA Bondiguel et Associés, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1901531 du 4 février 2021 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) de prononcer un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements prononcés par l'administration fiscale le 19 janvier 2023 ;

3°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux restant à leur charge au titre des années 2012 à 2014 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

S'agissant de la procédure suivie à l'égard de M. D... :

- le résultat du droit de communication exercé auprès de tiers ne lui a pas été présenté, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; le fait que le droit de communication exercé pour son véhicule Hyundai IX35 ne soit pas mentionné s'agissant des rappels concernant la société Terres du sud suffit à vicier la procédure ; dès lors que le service a fait le choix de présenter les rappels des deux associés ensemble, le vice impacte les deux procédures ; la procédure menée à l'encontre de la société GE O2 Terres à projet ne détaille pas la teneur des informations et des renseignements obtenus auprès du concessionnaire Hyundai ;

- la proposition de rectification ne répond pas à l'exigence de motivation prévue par l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; les indemnités kilométriques des deux associés sont mélangées et la méthode de reconstitution des kilomètres est totalement obscure ; le service de contrôle n'explique pas comment les rectifications en impôt sur les sociétés deviennent des revenus distribués pour des montants différents sur les années 2012 à 2014 ; la circonstance qu'il ait possédé successivement deux véhicules au cours de la période vérifiée est éludée ;

S'agissant de la procédure suivie à l'égard de Mme D... :

- l'obligation de motivation n'apparaît pas remplie lorsque, dans un couple, l'un se voit notifier des rappels, présentés de manière illisible et concernant un tiers, tandis que l'autre ne dispose que de quatre lignes sans explication et sans que la proposition de rectification professionnelle ne soit annexée ; un tel document ne permet pas aux conjoints, membres du foyer fiscal, de répondre efficacement ;

- le service n'a pas respecté le principe d'annualité de l'impôt ;

Sur les frais de déplacement de M. D... :

- la réalité de l'activité de lotisseur exige de nombreux déplacements ; la méthode de reconstitution des kilomètres est excessivement sommaire et radicalement viciée ; le service retient un kilomètrage très faible, en totale contradiction avec ses constatations ; l'administration fiscale n'a fourni aucun élément sur le kilométrage effectivement réalisé antérieurement au 11 février 2014 pour un contrôle portant sur la période du 1er juillet 2011 au 30 juin 2014 ;

- à titre subsidiaire, il conviendrait de retenir les kilomètres qui ressortent des factures d'entretien, documents précis utilisés par le service ; le kilométrage du véhicule Hyundai IX35 détenu jusqu'en février 2014 permet de justifier d'environ 65 000 kilomètres par an ; le kilométrage du véhicule BMW X5 Drive détenu à compter de février 2014 justifie de plus de 4 000 km par mois, soit 20 000 km pour la fin de la période contrôlée ;

- s'agissant des prélèvements sociaux appliqués aux indemnités kilométriques non justifiées des années 2012 à 2014, dès lors que la somme relève de la qualification de traitements et salaires, seule l'URSSAF est compétente pour assujettir cet avantage en argent à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) applicable aux rémunérations des dirigeants salariés, en application des articles L. 136-1 à L. 136-5 du code de la sécurité sociale et de l'article 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 ;

Sur les frais de déplacement de Mme D... :

- sa société a travaillé pour la société GE O2 Terres à projets, Terres du sud et pour des tiers ; des justificatifs de l'activité de Terr'ha pour GE O2 Terres à projets et Terres du Sud ont été retrouvés ; cette activité ne se fait pas sans déplacement.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 octobre 2021, 9 et 30 janvier 2023, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur d'une somme de 51 351 euros correspondant à un dégrèvement, relatif à l'impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux, en droits et pénalités, au titre des années 2012, 2013 et 2014 et au rejet du surplus de la requête.

Il fait valoir que :

- les moyens soulevés par M. et Mme D... ne sont pas fondés ;

- il entend se prévaloir d'une substitution de base légale ; les frais de déplacements accordés par la société GE 02 Terres à projets et la société Terres du sud, considérés comme une distribution de bénéfices au profit de l'appelant, doivent être imposés à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires.

Par ordonnance du 30 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 15 février 2023 à 12 heures.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... B...,

- et les conclusions de Mme A... C.... rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) Terres du sud et la société par actions simplifiée (SAS) GE O2 Terres à projets, qui exercent une activité de lotisseur, ont fait respectivement pour les périodes du 30 août 2011 au 30 juin 2014, étendue au 30 novembre 2014 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, et du 1er juillet 2011 au 30 juin 2014, l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue desquelles l'administration a remis en cause la déductibilité du résultat imposable des frais de déplacement sous forme de remboursement d'indemnités kilométriques de M. D..., associé des deux sociétés, gérant de la société Terres du sud et directeur général de la société GE O2 Terres à projets. Mme D... est associée unique et gérante de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Terr'ha, qui a une activité de vente de terrains, prospection et négociation et a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2012 au 30 juin 2013, au terme de laquelle la déduction des remboursements d'indemnités kilométriques a également été contestée par l'administration. Au terme de ces contrôles, par une proposition de rectification du 27 août 2015, établie selon la procédure contradictoire, l'administration a notifié à M. et Mme D... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2012, 2013 et 2014, après avoir considéré que ces remboursements non justifiés constituaient des revenus imposables, sur le fondement des dispositions du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts. La réclamation présentée le 2 février 2019 par M. et Mme D... a été rejetée par l'administration par une décision du 16 avril 2019. Par la présente requête, M. et Mme D... relèvent appel du jugement du 4 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur l'étendue du litige :

2. Par décision du 19 janvier 2023, postérieure à l'introduction de la requête, la directrice départementale des finances publiques de la Vienne a prononcé le dégrèvement, à concurrence de la somme globale de 51 351 euros, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ont été assujettis M. et Mme D... au titre des années 2012, 2013 et 2014. Les conclusions de la requête relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, le premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dispose que : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Conformément à l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

4. D'une part, il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 27 août 2015 comporte la désignation des impositions concernées, des années d'imposition et de la base d'imposition, en droit et en fait. Contrairement à ce qu'affirment les requérants, elle mentionne, de manière suffisamment précise, la nature des frais de déplacements professionnels en litige ainsi qu'en l'absence de justificatifs suffisamment probants produits par les contribuables, les motifs sur lesquels l'administration a entendu se fonder pour justifier les rectifications envisagées, ainsi que les modalités de calcul des kilomètres parcourus, à partir des factures d'entretien du véhicule, des achats de carburant, mentionnés sur les relevés bancaires et des indemnités kilométriques déduites des résultats imposables des sociétés Terres du Sud et GE O2 Terres à projets, de façon à permettre aux intéressés de formuler utilement leurs observations. D'autre part, la proposition de rectification du 27 août 2015 mentionne en son point 2-3 la rectification dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux des sommes de 19 475 euros et de 24 628 euros au titre des années 2013 et 2014, réintégrées dans le revenu imposable de Mme D..., en sa qualité de gérante et associée de l'EURL Terr'ha. Elle se réfère, pour le calcul de ces bases d'imposition, aux rehaussements envisagés par l'administration dans la proposition de rectification du 27 août 2015 adressée à la gérante de l'EURL Terr'ha, par pli recommandé avec accusé de réception, distribué le 29 août 2015, laquelle précise en son point 3 B que " les conséquences financières des rectifications tant en impôt sur le revenu, contributions sociales que pour les intérêts de retard et majorations (...) seront adressées par proposition de rectification séparée ". La circonstance que la proposition de rectification contestée aurait comporté des erreurs ou des omissions n'a pas été de nature à priver M. et Mme D... de la possibilité de formuler utilement leurs observations, ainsi qu'ils l'ont d'ailleurs fait. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". Il résulte de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée. Il en va autrement s'agissant des documents et renseignements qui, à la date de la demande de communication, sont directement et effectivement accessibles au contribuable dans les mêmes conditions qu'à l'administration. Dans cette dernière hypothèse, si le contribuable établit qu'il ne peut avoir effectivement accès aux mêmes documents et renseignements que ceux que détient l'administration, celle-ci est tenue de les lui communiquer.

6. Il résulte de l'instruction que, dans la proposition de rectification du 27 août 2015, l'administration fiscale indique avoir exercé un droit de communication auprès des concessions automobiles " BMW Espace Bienvenue " et " Hyundai Vannes " afin de pouvoir prendre connaissance des factures d'entretien des véhicules de marques BMW X5 Drive et Hyundai IX 35 respectivement détenus par M. D..., pour le premier à compter du mois de février 2014, pour le second, cédé le 11 février 2014 et d'être en mesure de comparer les kilomètres remboursés tant par la société Terres du sud que par la société GE O2 Terres à projets, avec les kilomètres parcourus. Le vérificateur a constaté à partir des factures communiquées par la concession de la marque BMW en date des 11 février et 4 septembre 2014, une différence entre les kilomètres parcourus par le véhicule et les indemnités kilométriques remboursées. Compte tenu de cette disproportion constatée, le vérificateur a procédé à l'évaluation des kilomètres parcourus liés aux déplacements professionnels à partir de l'examen des pièces comptables et des indications d'achats de carburant sur les relevés bancaires, les associés des deux sociétés détenant des cartes bancaires à usage professionnel. A supposer que le vérificateur se soit basé sur des éléments transmis par la concession de la marque Hyundai pour établir le montant des frais kilométriques, déduits à tort des résultats imposables des sociétés Terres du sud et GE O2 Terres à projets et réintégrés dans le revenu imposable des époux D... au titre des années 2012, 2013 et 2014, il n'est pas établi, alors que la proposition de rectification mentionnait l'origine et la teneur des documents et informations sur lesquels l'administration fiscale a fondé les rehaussements en litige, que M. D... ne pouvait avoir accès lui-même à ces éléments, en sa qualité de propriétaire du véhicule. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction qu'eu égard à la teneur du renseignement, nécessairement connu du contribuable, celui-ci aurait été privé, du seul fait de l'absence d'information sur l'origine du renseignement, d'une garantie. Par suite, et alors que M. et Mme D... ne soutiennent ni n'allèguent avoir demandé communication des informations obtenues auprès de tiers, la proposition de rectification du 27 août 2015 comporte des indications suffisamment précises sur les éléments utilisés par l'administration pour remettre en cause les indemnités kilométriques versées par les sociétés précitées et les considérer comme des revenus distribués. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

7. Pour imposer comme revenus distribués entre les mains de M. D..., associé et directeur général de la société GE O2 Terres à projets et associé minoritaire gérant de la société Terres du sud, les sommes correspondant à des frais de déplacement non admis en déduction des résultats de ces sociétés, pour des montants de 55 698 euros, 46 247 euros et de 43 007 euros au titre des exercices clos de la société GE O2 Terres à projets les 30 juin 2012, 2013 et 2014, et de 30 205 euros et de 49 252 euros, au titre des exercices clos de la société Terres du sud les 30 juin 2013 et 2014, l'administration fiscale s'est fondée sur les dispositions de l'article 109-1-2° du code général des impôts, aux termes duquel : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) /2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) ".

En ce qui concerne l'année d'imposition :

8. Aux termes de l'article 12 du code général des impôts : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année. ".

9. Les appelants soutiennent que l'administration fiscale ne démontre pas avoir respecté le principe d'annualité de l'impôt ni pouvoir rattacher année civile par année civile à leurs bases d'imposition, les indemnités kilométriques réintégrées dans le montant de leurs revenus au titre de chaque année. Il résulte de l'instruction que, dans la proposition de rectification, le vérificateur a détaillé dans deux tableaux les sommes, correspondant à des remboursements d'indemnités kilométriques, déduits des résultats imposables des sociétés Terres du sud et GE O2 Terres à projets, qu'il entendait considérer comme constituant des revenus distribués au titre des trois années civiles. La seule circonstance que l'exercice comptable ne coïncide pas avec l'année civile ne saurait suffire à établir que l'administration aurait procédé à un rattachement erroné des sommes constatées aux clôtures des exercices comptables des sociétés vérifiées en les imposant au titre de l'année au cours de laquelle la clôture de l'exercice est intervenue. M. et Mme D... ne justifient pas que les sommes réintégrées dans leurs revenus auraient été réputées distribuées au cours d'une autre année que celle au titre de laquelle elles ont été imposées. Par suite, le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne les frais de déplacement de M. D... :

10. S'agissant des frais remboursés par les sociétés GE O2 Terres à projets et Terres du sud, le ministre, qui est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, pour justifier le bien-fondé d'une imposition, de substituer une base légale à celle qui a été primitivement invoquée, dès lors que cette substitution peut être faite sans priver le contribuable des garanties qui lui sont reconnues en matière de procédure d'imposition, demande, dans son mémoire enregistré le 9 janvier 2023, que les sommes imposées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2012, 2013 et 2014, pour des montants de 18 536 euros, 36 804 euros et 24 123 euros, s'agissant des indemnités kilométriques, remboursées à tort par la société Terres du sud, et des montants de 49 195 euros, 42 469 euros et de 19 128 euros, s'agissant des indemnités kilométriques, remboursées à tort par la société GE O2 Terres à projets, soient imposées à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des traitements et salaires, sur le fondement de l'article 79 du code général des impôts.

11. Aux termes de l'article 80 ter du code général des impôts : " a) Les indemnités, remboursements et allocations forfaitaires pour frais versés aux dirigeants de sociétés sont, quel que soit leur objet, soumis à l'impôt sur le revenu. b) Ces dispositions sont applicables : / 1° Dans les sociétés anonymes : /au président du conseil d'administration;/au directeur général;/à l'administrateur provisoirement délégué ; /aux membres du directoire; / à tout administrateur ou membre du conseil de surveillance chargé de fonctions spéciales ; 2° Dans les sociétés à responsabilité limitée : aux gérants minoritaires ; (...) ". Aux termes de l'article 81 du même code : " Sont affranchis de l'impôt : /1° Les allocations spéciales destinées à couvrir les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi et effectivement utilisées conformément à leur objet. (...) ". Aux termes de l'article 1655 quinquies du même code : " Pour l'application du présent code et de ses annexes, la société par actions simplifiée est assimilée à une société anonyme. ". Les dirigeants de sociétés mentionnés à l'article 80 ter du code général des impôts qui entendent bénéficier de l'exonération prévue par les dispositions précitées du 1° de l'article 81 à raison de sommes que leur a versées leur entreprise doivent être en mesure de justifier que ces sommes ont couvert des frais qu'ils ont réellement exposés, ainsi que l'exigeaient leurs fonctions au sein de l'entreprise, dans l'intérêt de cette dernière.

12. Il résulte de l'instruction que l'administration a adressé à M. et Mme D... une proposition de rectification en date du 27 août 2015 et qu'après le suivi d'une procédure de rectification contradictoire, les compléments d'impôts ont été mis en recouvrement le 30 septembre 2016. Par suite, il y a lieu de faire droit à la demande de substitution de base légale demandée par l'administration tendant à ce que les sommes litigieuses soient imposées sur le fondement de l'article 79 du code général des impôts à concurrence de ce qu'implique sa qualification de traitements et salaires en lieu et place de la qualification de revenus distribués.

13. Les requérants contestent toutefois la méthode utilisée par l'administration pour réintégrer dans leurs revenus imposables, les sommes correspondant aux remboursement de frais kilométriques effectués par les deux sociétés. Il résulte de l'instruction que la société GE O2 Terres à projets, dont M. D... est le directeur général, et la société Terres du sud dont il est gérant et associé minoritaire, ont procédé au remboursement d'indemnités kilométriques de l'intéressé, au motif de leur caractère professionnel, sans exiger de justificatif. L'administration fiscale a réintégré dans les revenus imposables des appelants, au titre respectif des années 2012, 2013 et 2014, les sommes globales de 67 731 euros (18 536+49 195), 79 273 euros (36 804+42 469) et de 43 251 euros (24 123+19 128). Pour remettre en cause les montants déduits des résultats imposables de la société GE O2 Terres à projets et de la société Terres du sud, l'administration, en l'absence de justificatifs probants produits par M. D..., s'est basée non seulement à titre indicatif sur les factures d'entretien du véhicule de marque BMW X5 Drive, propriété de l'intéressé, le kilométrage indiqué sur ces documents, mais surtout, à titre principal sur les dépenses de carburant, estimées à partir des relevés bancaires et des pièces comptables, pour les trois exercices, les associés disposant de cartes bancaires à usage professionnel. Elle a ainsi conclu à un kilométrage " à finalité professionnelle " effectué par M. D..., dans l'intérêt de la société Terres du sud, de 14 816 kilomètres au titre de l'exercice clos le 30 juin 2013 et de 5 614 kilomètres au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014 ainsi que, dans l'intérêt de la société GE O2 Terres à projet, de 2 818 kilomètres au titre de l'exercice clos le 30 juin 2012 et de 7 954 kilomètres au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014. En se bornant à faire valoir que son activité de lotisseur nécessite de nombreux déplacements et échanges, de la recherche du foncier disponible au montage du projet jusqu'au suivi de la construction, et en produisant des documents techniques relatifs à l'élaboration et au suivi de quelques projets d'urbanisme, sans aucune autre précision sur les déplacements réellement effectués dans le cadre des activités professionnelles exercées, les requérants, qui ne critiquent pas sérieusement la méthode suivie par l'administration, notamment en renvoyant, à titre subsidiaire, aux kilométrages tels qu'ils ressortent de factures ponctuelles d'entretien des véhicules Hyundai IX35 et BMW X5 Drive, n'établissent pas que les sommes litigieuses ont couvert des frais de déplacement que M. D... aurait réellement exposés dans l'intérêt des entreprises qu'il dirigeait ou gérait. Par suite, c'est à bon droit que les sommes en litige ont été assujetties à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires.

14. Si les requérants soutiennent que l'administration fiscale ne pouvait assujettir les sommes imposées dans la catégorie des traitements et salaires à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), il résulte de l'instruction que, par son avis en date du 19 janvier 2023, l'administration fiscale a tiré les conséquences fiscales de la réintégration dans le revenu imposable de M. et Mme D... à l'impôt sur le revenu au titre des années 2012 à 2014, de sommes dans la catégorie des traitements et salaires et a procédé au dégrèvement des contributions sociales correspondantes. Les appelants ne produisent aucun élément de nature à remettre en cause les calculs ainsi effectués par le service.

Sur les frais de déplacement de Mme D... :

15. Il résulte de l'instruction que le vérificateur a, en l'absence de justificatifs, admis des frais de déplacement, à caractère professionnel, effectués chaque mois par Mme D... en qualité de gérante et associée unique de l'EURL Terr'ha à hauteur de 500 kilomètres et a procédé à la réintégration dans le résultat imposable de l'entreprise dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux des indemnités kilométriques remboursées à tort à la gérante au titre de l'exercice clos le 30 juin 2012. En se bornant à soutenir que l'activité de l'EURL nécessitait des déplacements pour les comptes de tiers, notamment des sociétés GE O2 Terres à projets et Terres du sud et à produire deux documents relatifs à un contrat d'apporteur d'affaires et la tenue de permanences pour la vente de maisons individuelles, M. et Mme D... n'apportent pas la preuve de l'exagération des impositions mises à leur charge en matière de bénéfices industriels et commerciaux.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande.

Sur les frais liés à l'instance :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d'instance par l'administration au titre des années 2012, 2013 et 2014, pour un montant total de 51 351 euros.

Article 2 : Le surplus de la requête de M. et Mme D... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme F... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction régionale de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 avril 2023.

La rapporteure,

Bénédicte B...La présidente,

Evelyne Balzamo

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX01365


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01365
Date de la décision : 11/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Bénédicte MARTIN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SCP BONDIGUEL et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-04-11;21bx01365 ?
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