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11/04/2023 | FRANCE | N°21BX01364

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 11 avril 2023, 21BX01364


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, mises à sa charge au titre des années 2012 à 2014, pour un montant total, en droits et pénalités, de 148 368 euros.

Par un jugement n° 1902743 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 avril 2021, et des mémoires

enregistrés les 24 décembre 2021, 6 décembre 2022, 9, 17 et 27 janvier 2023, 3 et 17 février 2023...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, mises à sa charge au titre des années 2012 à 2014, pour un montant total, en droits et pénalités, de 148 368 euros.

Par un jugement n° 1902743 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 avril 2021, et des mémoires enregistrés les 24 décembre 2021, 6 décembre 2022, 9, 17 et 27 janvier 2023, 3 et 17 février 2023, M. C..., représenté par la SCPA Bondiguel et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1902743 du 4 février 2021 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) de prononcer un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements prononcés par l'administration fiscale le 19 janvier 2023 ;

3°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et de prélèvements sociaux restant à sa charge au titre des années 2012 à 2014 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le résultat du droit de communication exercé auprès de tiers ne lui a pas été présenté, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; le fait que le droit de communication exercé pour le véhicule Hyundai IX35 de M. B... ne soit pas mentionné, s'agissant des rappels concernant la société Terres du Sud, suffit à vicier la procédure ; dès lors que le service a fait le choix de présenter les rappels des deux associés ensemble, le vice impacte les deux procédures ;

- la proposition de rectification ne répond pas à l'exigence de motivation prévue par l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; les indemnités kilométriques des deux associés sont mélangées et la méthode de reconstitution des kilomètres est totalement obscure ; le service de contrôle n'explique pas comment les rectifications en impôt sur les sociétés deviennent des revenus distribués pour des montants différents sur les années 2012 à 2014 ;

- le service n'a pas respecté le principe d'annualité de l'impôt ;

- la réalité de l'activité de lotisseur exige de nombreux déplacements ; la méthode de reconstitution des kilomètres est excessivement sommaire et radicalement viciée ; le service retient peu de kilomètres, en totale contradiction avec ses constatations ;

- à titre subsidiaire, il conviendrait de retenir les kilomètres qui ressortent des factures d'entretien, documents précis utilisés par le service ; le kilométrage du véhicule Hyundai IX55 de février 2011 à janvier 2014 permet de justifier d'environ 55 000 kilomètres par an, données cohérentes avec celles qui ressortent pour le véhicule acquis ensuite de mars 2014 à décembre 2018 ;

- il justifie de la qualité de dirigeant imposable dans la catégorie de traitements et salaires en tant que président de la société " GE O2 Terres à Projet " ainsi que de la qualité d'associé minoritaire dans la société Terres du Sud ; les frais kilométriques litigieux ont été comptabilisés comme tels ; toute rémunération perçue par un associé non gérant d'une SARL soumise à l'impôt sur les sociétés en contrepartie de son activité au sein de la structure doit être traitée comme des salaires ; l'activité au sein de la société Terres du Sud relève d'un statut de salarié, notion qui doit s'entendre largement ; l'administration n'a pas contesté le fait qu'il exerçait une activité professionnelle pour le compte de cette société ;

- s'agissant des prélèvements sociaux appliqués aux indemnités kilométriques non justifiées des années 2012 à 2014, dès lors que la somme relève de la qualification de traitements et salaires, seule l'URSSAF est compétente pour assujettir cet avantage en argent à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) applicable aux rémunérations des dirigeants salariés, en application des articles L. 136-1 à L. 136-5 du code de la sécurité sociale et de l'article 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 ;

- l'avis de dégrèvement contient diverses insuffisances dès lors qu'il ne prévoit aucun dégrèvement au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2014 et un dégrèvement minime en droits de 105 euros au titre de l'année 2013 ; un dégrèvement doit être prononcé à concurrence de l'abattement de 10 % applicable aux traitements et salaires ;

- il ressort de cet avis de dégrèvement des erreurs matérielles ; il ne peut pas être imposé sur une base supérieure à celle retenue par la proposition de rectification ; le total des rectifications en matière d'indemnités kilométriques prises en compte au niveau de la liquidation de l'impôt sur le revenu ne saurait excéder les chiffres notifiés en 2015 de 78 487 euros au titre de l'année 2012, 86 809 euros au titre de l'année 2013 et 46 347 euros au titre de l'année 2014.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 octobre 2021, 24 novembre et 12 décembre 2022, 9, 18 et 31 janvier 2023 et 14 et 27 février 2023, la production de pièces complémentaires enregistrées le 2 mars 2023, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur de deux sommes de 29 048 euros et de 6 421 euros, relatifs à l'impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux, en droits et pénalités, au titre des années 2012, 2013 et 2014 et au rejet du surplus de la requête.

Il fait valoir que :

- les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés ;

- il entend se prévaloir d'une substitution de base légale ; les frais de déplacements accordés par la SAS GE 02 Terres à projets, considérés comme une distribution de bénéfices au profit de l'appelant, doivent être imposés à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires pour les montants suivants en base : 56 872 euros, 42 405 euros et 20 339 euros au titre des années 2012, 2013 et 2014.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... A...,

- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure public.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) Terres du sud et la société par actions simplifiée (SAS) GE O2 Terres à projets, qui exercent une activité de lotisseur, ont fait respectivement pour les périodes du 30 août 2011 au 30 juin 2014, étendue au 30 novembre 2014 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, et du 1er juillet 2011 au 30 juin 2014, l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue desquelles l'administration a remis en cause la déductibilité du résultat imposable des frais de déplacement sous forme de remboursement d'indemnités kilométriques de M. C..., associé des deux sociétés et président de la société GE O2 Terres à projets. Au terme de ces contrôles, par une proposition de rectification du 27 août 2015, établie selon la procédure de rectification contradictoire, l'administration a notifié à M. C... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2012, 2013 et 2014, après avoir considéré que ces remboursements non justifiés constituaient des revenus imposables, sur le fondement des dispositions du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts. La réclamation présentée le 9 avril 2019 par M. C... a été rejetée par l'administration par une décision du 2 mai 2019. M. C... relève appel du jugement du 4 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur l'étendue du litige :

2. Par décisions des 19 janvier et 2 mars 2023, postérieures à l'introduction de la requête, la directrice départementale des finances publiques de la Vienne a prononcé le dégrèvement, à concurrence des sommes de 29 048 euros et de 6 421 euros, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels a été assujetti M. C... au titre des années 2012, 2013 et 2014. Les modalités du dégrèvement ont été précisées dans les mémoires enregistrés les 14 février et 2 mars 2023. Les conclusions de la requête relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, le premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dispose que : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Conformément à l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

4. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 27 août 2015 comporte la désignation des impositions concernées, des années d'imposition et de la base d'imposition, en droit et en fait. Contrairement à ce qu'affirme le requérant, elle mentionne, de manière suffisamment précise, la nature des frais de déplacements professionnels en litige ainsi, qu'en l'absence de justificatifs produits par le contribuable, les motifs sur lesquels l'administration a entendu se fonder pour justifier les rectifications envisagées, ainsi que les modalités de calcul des kilomètres parcourus, à partir des factures d'entretien du véhicule, des achats de carburant, mentionnés sur les relevés bancaires et des indemnités kilométriques déduites des résultats imposables des sociétés Terres du Sud et GE O2 Terres à projets, de façon à permettre à l'intéressé de formuler utilement ses observations. La circonstance que la proposition de rectification aurait comporté des erreurs ou des omissions n'a pas été de nature à priver M. C... de la possibilité de formuler utilement ses observations, ainsi qu'il l'a d'ailleurs fait. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". Il résulte de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée.

6. Il résulte de l'instruction que, dans la proposition de rectification en date du 27 août 2015, adressée à M. C..., l'administration a précisé l'origine et la teneur des éléments obtenus de tiers dans le cadre du droit de communication qu'elle a exercé auprès de la concession Hyundai Vannes, chargée de l'entretien du véhicule du modèle Hyundai IX55, propriété du requérant, afin d'établir les kilomètres parcourus au cours des déplacements professionnels effectuées par lui au cours des années contrôlées. Il ne résulte pas de l'instruction que l'appelant ait demandé communication des informations ainsi obtenues. La circonstance, à la supposer démontrée, que l'administration aurait omis de mentionner l'exercice du droit de communication s'agissant du véhicule du modèle Hyundai IX35, utilisé par M. B..., n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure d'imposition, dès lors qu'elle a bien communiqué les informations concernant les motifs justifiant l'imposition de M. C.... Ce dernier n'est, par suite, pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales auraient été méconnues.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

7. Pour imposer comme revenus distribués entre les mains de M. C..., associé et président de la société GE O2 Terres à projets et associé minoritaire de la société Terres du sud, les sommes correspondant à des frais de déplacement non admis en déduction des résultats de ces sociétés, pour des montants de 56 872 euros, 42 405 euros et de 20 339 euros au titre des exercices clos de la société GE O2 Terres à projets les 30 juin 2012, 2013 et 2014, et de 34 933 euros et de 46 294 euros, au titre des exercices clos de la société Terres du sud les 30 juin 2013 et 2014, l'administration fiscale s'est fondée sur les dispositions de l'article 109-1-2° du code général des impôts, aux termes duquel : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) /2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) ".

En ce qui concerne l'année d'imposition :

8. Aux termes de l'article 12 du code général des impôts : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année. ".

9. L'appelant soutient que l'administration fiscale ne démontre pas avoir respecté le principe d'annualité de l'impôt ni pouvoir rattacher année civile par année civile à ses bases d'imposition, les indemnités kilométriques réintégrées dans le montant de ses revenus au titre de chaque année. Il résulte de l'instruction que, dans la proposition de rectification, le vérificateur a détaillé dans deux tableaux les sommes, correspondant à des remboursements d'indemnités kilométriques, déduits des résultats imposables des sociétés Terres du sud et GE O2 Terres à projets, qu'il entendait considérer comme constituant des revenus distribués au titre des trois années civiles. La seule circonstance que l'exercice comptable ne coïncide pas avec l'année civile ne saurait suffire à établir que l'administration aurait procédé à un rattachement erroné des sommes constatées aux clôtures des exercices comptables des sociétés vérifiées en les imposant au titre de l'année au cours de laquelle la clôture de l'exercice est intervenue. M. C... ne justifie pas que les sommes réintégrées dans ses revenus auraient été réputées distribuées au cours d'une autre année que celle au titre de laquelle elles ont été imposées. Par suite, le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne les indemnités kilométriques relatives à la société GE O2 Terres à projets :

10. S'agissant des frais remboursés par la société GE O2 Terres à projets, le ministre, qui est en droit à tout moment de la procédure contentieuse, pour justifier le bien-fondé d'une imposition, de substituer une base légale à celle qui a été primitivement invoquée, dès lors que cette substitution peut être faite sans priver le contribuable des garanties qui lui sont reconnues en matière de procédure d'imposition, demande, dans son mémoire enregistré le 27 février 2023, que les sommes de 56 872 euros, 42 405 euros et de 20 339 euros soient imposées à l'impôt sur le revenu, au titre respectif des années 2012, 2013 et 2014, dans la catégorie des traitements et salaires, sur le fondement de l'article 79 du code général des impôts.

11. Aux termes de l'article 80 ter du code général des impôts : " a) Les indemnités, remboursements et allocations forfaitaires pour frais versés aux dirigeants de sociétés sont, quel que soit leur objet, soumis à l'impôt sur le revenu. b) Ces dispositions sont applicables : / 1° Dans les sociétés anonymes :/au président du conseil d'administration;/au directeur général;/à l'administrateur provisoirement délégué;/aux membres du directoire;/ à tout administrateur ou membre du conseil de surveillance chargé de fonctions spéciales ; (...) ". Aux termes de l'article 81 du même code : " Sont affranchis de l'impôt:/1° Les allocations spéciales destinées à couvrir les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi et effectivement utilisées conformément à leur objet. (...) ". Aux termes de l'article 1655 quinquies du même code : " Pour l'application du présent code et de ses annexes, la société par actions simplifiée est assimilée à une société anonyme. ". Les dirigeants de sociétés mentionnés à l'article 80 ter du code général des impôts qui entendent bénéficier de l'exonération prévue par les dispositions précitées du 1° de l'article 81 à raison de sommes que leur a versées leur entreprise doivent être en mesure de justifier que ces sommes ont couvert des frais qu'ils ont réellement exposés, ainsi que l'exigeaient leurs fonctions au sein de l'entreprise, dans l'intérêt de cette dernière.

12. Il résulte de l'instruction que l'administration a adressé à M. C... une proposition de rectification en date du 27 août 2015 et qu'après le suivi d'une procédure de rectification contradictoire, les compléments d'impôts ont été mis en recouvrement le 31 octobre 2018. Par suite, il y a lieu de faire droit à la demande de substitution de base légale demandée par l'administration tendant à ce que les sommes litigieuses soient imposées sur le fondement de l'article 79 du code général des impôts à concurrence de ce qu'implique la qualification de traitements et salaires en lieu et place de la qualification de revenus distribués.

13. Le requérant conteste toutefois la méthode utilisée par l'administration pour réintégrer dans ses revenus imposables, les sommes correspondant au remboursement de frais kilométriques effectués par la société GE O2 Terres à projets. Il résulte de l'instruction que la société GE O2 Terres à projets, dont M. C... est le président, a procédé au remboursement d'indemnités kilométriques de l'intéressé, au motif de leur caractère professionnel, sans exiger de justificatif. L'administration fiscale a réintégré dans les revenus imposables de l'appelant, au titre respectif des années 2012, 2013 et 2014, les sommes de 56 872 euros, 42 405 euros et de 20 339 euros. Pour remettre en cause les montants déduits des résultats imposables de la société GE O2 Terres à projets, l'administration, en l'absence de justificatifs produits par M. C..., s'est basée sur les factures d'entretien du véhicule de marque Hyundai IX55, propriété de l'intéressé, le kilométrage indiqué sur ces documents, les dépenses de carburant, estimées à partir des relevés bancaires et des pièces comptables, les associés disposant de cartes bancaires à usage professionnel. Elle a ainsi conclu à l'absence de kilométrage effectué par M. C... au titre des exercices clos les 30 juin 2012 et l'a évalué à 6 744 kilomètres au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014. En se bornant à faire valoir que son activité de lotisseur nécessite de nombreux déplacements et échanges, de la recherche du foncier disponible au montage du projet jusqu'au suivi de la construction, et en produisant des documents techniques relatifs à l'élaboration et au suivi de quelques projets d'urbanisme, sans aucune autre précision, le requérant, qui ne critique pas sérieusement la méthode suivie par l'administration, n'établit pas que les sommes litigieuses ont couvert des frais de déplacement qu'il aurait réellement exposés dans l'intérêt de l'entreprise qu'il présidait. Par suite, c'est à bon droit que ces sommes ont été assujetties à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires.

En ce qui concerne les indemnités kilométriques relatives à la société Terres du sud :

14. M. C... soutient que les dispositions précitées des articles 80 ter et 81 du code général des impôts doivent également s'appliquer aux indemnités kilométriques déduites des résultats imposables de la société Terres du sud et réintégrées, dans la catégorie des traitements et salaires, dans son revenu imposable, dès lors qu'il y a exercé une activité professionnelle. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction que l'intéressé se serait impliqué dans la gestion de la société autrement qu'en qualité d'associé, ainsi qu'il ressort des statuts de la SARL Terres du sud, en date du 19 juillet 2011, désignant d'ailleurs comme gérant M. B.... Dans ces conditions, sans que l'appelant puisse utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale, relatives au champ d'application des assurances sociales, c'est sans commettre d'erreur de droit que l'administration a qualifié les revenus en litige de revenus distribués au sens de l'article 109-1-2° du code général des impôts.

15. Il résulte de l'instruction que la société Terres du sud a procédé au remboursement d'indemnités kilométriques de M. C..., au motif de leur caractère professionnel, sans exiger de justificatif. L'administration fiscale a réintégré dans les revenus imposables de l'appelant, au titre respectif des années 2012, 2013 et 2014, les sommes de 18 015 euros, 40 804 euros et de 22 408 euros. Elle a également évalué le kilométrage effectué à des fins professionnelles par M. C... au titre de l'exercice clos le 30 juin 2013 à 6 688 km et à 6 844 kilomètres au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014. Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 12, c'est à bon droit que l'administration a considéré que les sommes en litige constituaient des revenus distribués imposables entre les mains de M. C... sur le fondement du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts.

En ce qui concerne l'application d'un abattement de 10 % au titre de l'impôt sur le revenu des années 2013 et 2014 :

16. Au titre de l'article 83 du code général des impôts : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : (...)/3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales./ La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut, après défalcation des cotisations, contributions et intérêts mentionnés aux 1° à 2° ter ; elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu. (...)/ Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels. (...) ". Il résulte de ces dispositions que le contribuable est admis à justifier du montant des frais professionnels réels à déduire de son revenu. Toutefois, il doit en ce cas fournir des justifications suffisamment précises pour permettre d'apprécier le montant des frais effectivement exposés par lui à l'occasion de l'exercice de sa profession. Ainsi, il ne peut se borner, ni à présenter un calcul théorique de ses frais, ni à faire état de dépenses réelles sans établir qu'elles ont constitué une charge de sa fonction ou de son emploi.

17. Il résulte des points 12 et 14, qui précèdent, que l'administration fiscale a regardé les sommes correspondant à des remboursements de frais sans justificatif comme des compléments de rémunération imposables entre les mains du requérant et les a réintégrées à son revenu imposable dans la catégorie des traitements et salaires, en se prévalant d'une substitution de base légale. A supposer que M. C... ait entendu se prévaloir des dispositions précitées de l'article 83 du code général des impôts, pour soutenir qu'un abattement de 10 % devait s'appliquer sur les sommes ainsi réintégrées dans son revenu imposable au titre des années 2012 et 2013, il n'établit pas en remplir les conditions. Par suite, le moyen doit être écarté.

18. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d'instance par l'administration au titre des années 2012, 2013 et 2014, pour un montant total de 35 469 euros.

Article 2 : Le surplus de la requête de M. C... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction régionale du contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 avril 2023.

La rapporteure,

Bénédicte A...La présidente,

Evelyne Balzamo

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX01364


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01364
Date de la décision : 11/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Bénédicte MARTIN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SCP BONDIGUEL et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-04-11;21bx01364 ?
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