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06/04/2023 | FRANCE | N°21BX02561

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 06 avril 2023, 21BX02561


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 30 avril 2019 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice a mis fin, à compter du 1er octobre 2018, à l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire de 30 points dont il bénéficiait au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville.

Par un jugement n° 1901082 du 14 avril 2021, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une

requête enregistrée le 15 juin 2021, M. A..., représenté par Me Baulimon, demande à la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 30 avril 2019 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice a mis fin, à compter du 1er octobre 2018, à l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire de 30 points dont il bénéficiait au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville.

Par un jugement n° 1901082 du 14 avril 2021, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 juin 2021, M. A..., représenté par Me Baulimon, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 14 avril 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 avril 2019, par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice a mis fin, à compter du 1er octobre 2018, à l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire de 30 points dont il bénéficiait au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville ;

3°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de lui attribuer une nouvelle bonification indiciaire de 30 points à compter du 1er octobre 2018, de lui verser un rattrapage au titre de cette nouvelle bonification indiciaire entre octobre 2018 et la date de l'arrêt à intervenir à raison de 138,90 euros par mois, de lui verser une nouvelle bonification indiciaire de 30 points à compter de cet arrêt et de reconstituer sa carrière et ses droits à pension, le tout dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du garde des sceaux, ministre de la justice une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés pour l'instance.

Il soutient que :

- la signataire de l'arrêté attaqué n'avait pas reçu délégation pour ce faire ;

- cet arrêté a méconnu les dispositions de l'article 27 de la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 dès lors qu'il exerce son activité dans le ressort d'un contrat local de sécurité.

Par un mémoire enregistré le 30 janvier 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 ;

- le décret n° 93-522 du 26 mars 1993 ;

- le décret n° 2001-1061 du 14 novembre 2001 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique,

- et les observations de Me Baulimon, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., éducateur de la protection judiciaire de la jeunesse, a été affecté à l'unité éducative d'activité de jour (UEAJ) de Saint-Pierre de La Réunion à compter du 1er octobre 2018. Par un arrêté du 30 avril 2019, la garde des sceaux, ministre de la justice a mis fin, à compter du 1er octobre 2018, à l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) de 30 points dont il bénéficiait jusqu'alors à raison des fonctions qu'il exerçait au sein de l'unité éducative de milieu ouvert de Cenon au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville. M. A... relève appel du jugement du 14 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, et contrairement à ce que soutient le ministre de la justice, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A... ne caractérisent pas une demande indemnitaire mais tendent à ce que les mesures d'exécution impliquées par l'annulation de l'arrêté litigieux soient prescrites à l'administration conformément aux dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative. Par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que ces conclusions seraient tardives.

3. En second lieu, aux termes du I de l'article 27 de la loi du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales : " La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires et des militaires instituée à compter du 1er août 1990 est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulières dans des conditions fixées par décret. " L'article 1er du décret du 26 mars 1993 relatif aux conditions de mise en œuvre de la nouvelle bonification indiciaire dans la fonction publique de l'Etat précise que " la nouvelle bonification indiciaire est attachée à certains emplois comportant l'exercice d'une responsabilité ou d'une technicité particulière. Elle cesse d'être versée lorsque l'agent n'exerce plus les fonctions y ouvrant droit. " Aux termes de l'article 1er du décret du 14 novembre 2001 relatif à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice : " Une nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville, prise en compte et soumise à cotisation pour le calcul de la pension de retraite, peut être versée mensuellement, dans la limite des crédits disponibles, aux fonctionnaires titulaires du ministère de la justice exerçant, dans le cadre de la politique de la ville, une des fonctions figurant en annexe au présent décret. " Figurent dans cette annexe les fonctions d'éducateur de la protection judiciaire de la jeunesse " Intervenant dans le ressort territorial d'un contrat local de sécurité. (...) ". Enfin, en application de l'article D. 132-7 du code de la sécurité intérieure : " Le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance constitue le cadre de concertation sur les priorités de la lutte contre l'insécurité et de la prévention de la délinquance dans la commune. / (...) / Il assure l'animation et le suivi du contrat local de sécurité lorsque le maire et le préfet de département, après consultation du procureur de la République et avis du conseil, ont estimé que l'intensité des problèmes de délinquance sur le territoire de la commune justifiait sa conclusion. "

4. Les dispositions précitées de l'article 1er du décret du 14 novembre 2001 selon lesquelles la nouvelle bonification indiciaire " peut être versée mensuellement dans la limite des crédits disponibles " ne saurait avoir pour objet ni pour effet de dispenser l'administration du respect du principe d'égalité, lequel exige que les agents qui occupent effectivement des emplois correspondant aux fonctions ouvrant droit à cet avantage et qui comportent la même responsabilité ou la même technicité particulières bénéficient de la même bonification. Ainsi, il résulte des dispositions citées au point 3 que, dès lors que le demandeur remplit les conditions tenant à l'exercice des fonctions mentionnées à l'annexe du décret du 14 novembre 2001, il dispose d'un droit à percevoir le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire.

5. M. A... produit, pour la première fois en appel, plusieurs documents et, notamment, un article de presse circonstancié, publié le 11 janvier 2002, dont il ressort que la commune de Saint-Pierre de La Réunion a signé, le 10 janvier 2002, un contrat local de sécurité. Il produit également le " contrat " de stratégie territoriale de sécurité et de prévention de la délinquance sous-titré " contrat local de sécurité ", signé notamment par la commune et par le préfet du département, dont l'objet est notamment, ainsi que le prévoit d'ailleurs la circulaire n° 6238-SG du 23 décembre 2020 relative à la mise en œuvre opérationnelle de la stratégie nationale de prévention de la délinquance 2020-2024, d'actualiser et de compléter le contrat local de sécurité existant.

6. Dans ces conditions et contrairement à ce que soutient le ministre, M. A..., qui exerce à Saint-Pierre de La Réunion, doit être regardé comme établissant qu'il intervient dans le ressort territorial d'un contrat local de sécurité en cours d'exécution et qu'il remplissait par conséquent les conditions auxquelles les dispositions précitées du décret du 14 novembre 2001 et de son annexe subordonnent le versement de la NBI.

7. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 avril 2019 par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice a mis fin, à compter du 1er octobre 2018, à l'attribution d'une NBI de 30 points dont il bénéficiait précédemment en application d'un arrêté ministériel en date du 4 décembre 2001 fixant par département les emplois éligibles à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice. Par suite, il y a lieu d'annuler ce jugement et cet arrêté.

8. En outre, eu égard au motif de cette annulation, il est également fondé à demander qu'il soit enjoint au ministre de la justice, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui attribuer une NBI de 30 points à compter du 1er octobre 2018, de procéder à la reconstitution de sa carrière et ses droits à pension à compter de cette date et de lui verser, en conséquence, les sommes correspondantes. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

9. Enfin, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés pour l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 14 avril 2021 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 30 avril 2019, par lequel le ministre de la justice a mis fin, à compter du 1er octobre 2018, à l'attribution d'une NBI de 30 points à M. A... est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice, d'attribuer à M. A... une NBI de 30 points à compter du 1er octobre 2018, de procéder à la reconstitution de sa carrière et de ses droits à pension à compter de cette date et de lui verser, en conséquence, les sommes correspondantes.

Article 4 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,

Mme Agnès Bourjol, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 avril 2023.

Le rapporteur,

Manuel C...

La présidente,

Marie-Pierre Beuve DupuyLa greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de la justice en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°21BX02561 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02561
Date de la décision : 06/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : BAULIMON

Origine de la décision
Date de l'import : 15/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-04-06;21bx02561 ?
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