Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 15 décembre 2021 par lequel la préfète de la Haute-Vienne a refusé de renouveler le titre de séjour dont elle bénéficiait, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2200225 du 12 mai 2022, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2022, Mme D..., représentée par Me Karakus, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 12 mai 2022 du tribunal administratif de Limoges ;
2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de la Haute-Vienne du 15 décembre 2021 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des articles
L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- le refus de séjour est entaché d'une erreur d'appréciation de sa situation dès lors qu'elle a conclu un contrat d'apprentissage d'une durée de deux ans le 20 septembre 2021 dans le cadre d'un BTS analyse de biologie médicale et qu'elle souhaite poursuivre cette formation pour laquelle elle obtient de bons résultats ;
- cet arrêté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que sa mère et sa fratrie résident régulièrement en France depuis plusieurs années et qu'elle a rejoint la France à la suite des maltraitances subies de la part de son père resté au Congo.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 décembre 2022, la préfète de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête, en faisant valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Bordeaux, par une décision n° 2022/08593 en date du 16 juin 2022, a admis Mme D... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. B... A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante congolaise née en 1996, est entrée régulièrement en France le 19 août 2019 pour y effectuer des études supérieures. Son titre de séjour " étudiant " a été régulièrement renouvelé jusqu'au 30 août 2021 et elle en a sollicité un nouveau renouvellement le 8 août 2021. Par un arrêté du 15 décembre 2021, la préfète de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer ce titre, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme D... fait appel du jugement du
12 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an (...) ". Il appartient à l'administration, saisie d'une demande de renouvellement de titre de séjour présentée en qualité d'étudiant, de rechercher à partir de l'ensemble du dossier et notamment au regard de sa progression dans le cursus universitaire, de son assiduité aux cours, et de la cohérence de ses choix d'orientation, si le demandeur peut être regardé comme poursuivant avec sérieux les études entreprises.
3. Il ressort des pièces du dossier que lors de l'année universitaire 2019/2020, Mme D..., inscrite en DUT carrières juridiques à Colmar, a été ajournée après avoir obtenu des moyennes de 7,11 sur 20 au premier semestre et 9,09 sur 20 au second semestre. Après avoir fait le choix de se réorienter, Mme D... s'est inscrite pour l'année universitaire 2020/2021 en DTS Imagerie médicale à Limoges. Si elle a obtenu la moyenne au cours du premier semestre, elle a échoué au second semestre et a été " exclue de la formation ". Ainsi, à la date de la décision attaquée, la requérante n'avait obtenu aucun diplôme. Mme D... produit en appel des bulletins de salaire du laboratoire d'analyses avec lequel elle a conclu un contrat d'apprentissage dans le cadre d'un BTS en analyse médicale ainsi qu'une attestation de réussite aux examens concluant sa première année. Toutefois, la nouvelle formation suivie est sans lien avec les deux formations précédemment suivies. Par suite, en refusant, à la date de la décision attaquée, de renouveler son titre de séjour " étudiant ", la préfète de la Haute-Vienne n'a pas commis une erreur d'appréciation, Mme D... pouvant si elle s'y croit fondée, compte tenu de sa nouvelle scolarité et du contrat d'apprentissage conclu, présenter une nouvelle demande de titre de séjour en qualité d'étudiant.
4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure (...) nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre (...) ".
5. Il ressort des mentions de l'arrêté en litige que la préfète de la Haute-Vienne a aussi examiné la situation de Mme D... au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressée est célibataire et sans enfant à charge, qu'elle est entrée en France sous couvert de titres étudiants, lesquels n'ont pas vocation à lui permettre de séjourner durablement sur le territoire. Si l'intéressée se prévaut de la présence en France de sa mère, de plusieurs de ses frères, dont deux ont la nationalité française, et de ses sœurs en situation régulière depuis plusieurs années, elle ne démontre pas avoir entretenu avec les membres de sa famille présents en France des liens anciens et intenses, alors qu'elle n'est par ailleurs pas dépourvue de toute attache dans son pays d'origine, le Congo, où résident notamment son père et un autre de ses frères. En outre, elle ne justifie pas d'une intégration particulièrement notable ni, comme l'ont d'ailleurs relevé les premiers juges, n'apporte aucun élément permettant de caractériser les maltraitances que son père et sa nouvelle épouse lui auraient fait subir et qui l'auraient contrainte à quitter son pays d'origine. Ainsi, la décision de refus de titre de séjour prise à l'encontre de la requérante ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts poursuivis. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tenant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de la Haute-Vienne du 15 décembre 2021. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie sera adressée pour information à la préfète de la Haute-Vienne.
Délibéré après l'audience du 9 février 2023 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Claude Pauziès, président,
Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,
Mme Charlotte Isoard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 mars 2023.
La présidente-assesseure,
Christelle Brouard-LucasLe président-rapporteur,
Jean-Claude A...La greffière,
Marion Azam-MarcheLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, chacun en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 22BX01950