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07/02/2023 | FRANCE | N°21BX00825

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 07 février 2023, 21BX00825


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ixxi a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner le syndicat mixte des transports de La Réunion (SMTR) à lui verser une indemnité de 4 126 853 euros en réparation du préjudice résultant de l'abandon de la procédure de passation du marché qui lui avait été attribué.

Par un jugement n°1900232 du 23 décembre 2020, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 février

2021, la société RATP Smart Systems, représentée par Me Hasday, demande à la cour :

1°) d'annuler ce ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ixxi a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner le syndicat mixte des transports de La Réunion (SMTR) à lui verser une indemnité de 4 126 853 euros en réparation du préjudice résultant de l'abandon de la procédure de passation du marché qui lui avait été attribué.

Par un jugement n°1900232 du 23 décembre 2020, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 février 2021, la société RATP Smart Systems, représentée par Me Hasday, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 23 décembre 2020 ;

2°) de condamner le syndicat mixte des transports de La Réunion à lui verser une indemnité de 4 126 853 euros en réparation du préjudice résultant de l'abandon de la procédure de passation du marché qui lui avait été attribué ;

3°) de mettre à la charge du syndicat mixte des transports de La Réunion une somme de 5 000 euros au titre des frais exposés pour l'instance.

Il soutient que :

- il appartiendra à la cour de vérifier que la minute du jugement attaquée est signée ;

- le tribunal s'est mépris sur son office en s'abstenant de contrôler le bien-fondé du motif invoqué par le syndicat ;

- la renonciation à passation litigieuse n'est pas justifiée par un motif d'intérêt général ;

- elle justifie de la réalité et du montant de son préjudice.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics ;

- le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique,

- et les observations de Me Hasday représentant la société RATP Smart Systems.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre de son projet global de " systèmes de transports intelligents pour La Réunion " (STIR), le syndicat mixte de transports de La Réunion (SMTR), établissement public de coopération locale créé le 19 juin 2013 à l'initiative des autorités organisatrices de mobilité (AOM), a lancé le 21 juin 2016 une consultation en vue de l'attribution des trois lots correspondant aux trois systèmes composant les STIR, à savoir une billettique mutualisée à l'ensemble des réseaux de transport de l'île, un système mutualisé d'aide à l'exploitation et à l'information des voyageurs et un système d'informations multimodal. En décembre 2017, la société Ixxi a été déclarée attributaire des trois lots, à titre individuel pour les lots n° 2 et 3 et comme membre d'un groupement pour le lot n° 1. Cependant, par une délibération du 15 décembre 2017, le SMTR a suspendu l'autorisation donnée à son président de signer les marchés des trois lots. Enfin, par une délibération du 19 septembre 2018, le SMTR a déclaré la procédure de passation des marchés du projet STIR sans suite pour motif d'intérêt général. Cette décision a été notifiée à la société Ixxi le 3 octobre 2018. Le 30 novembre 2018, celle-ci a demandé au SMTR de lui verser une indemnité de 4 285 067 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi en raison de l'abandon de la procédure de passation de ces trois lots. Cette demande a été rejetée le 19 décembre 2018. La société Ixxi, devenue RATP Smart Systems, relève appel du jugement du 23 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande tendant à la condamnation du SMTR à l'indemniser des préjudices que lui a causé l'abandon de la procédure de passation du marché qui lui avait été attribué.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, la minute du jugement attaqué comporte les signatures du président de la formation de jugement, du conseiller-rapporteur et de la greffière de l'audience. Par suite, le moyen tiré de ce que ce jugement n'aurait pas été signé en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative doit être écarté comme manquant en fait.

3. En second lieu, il ressort des motifs du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments des parties, ont répondu de manière circonstanciée au moyen tiré de ce que l'abandon de la procédure de passation du marché dont s'agit n'aurait pas été motivé par un motif d'intérêt général.

4. Il résulte de ce qui précède que la société appelante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué a été irrégulièrement rendu.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué.

5. Aux termes de l'article 98 du décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics alors en vigueur : " A tout moment, la procédure peut être déclarée sans suite. Dans ce cas, l'acheteur communique aux opérateurs économiques ayant participé à la procédure, dans les plus brefs délais, les raisons pour lesquelles il a décidé de ne pas attribuer le marché public ou de recommencer la procédure. ". Il résulte de ces dispositions qu'une personne publique qui a engagé une procédure de passation d'un marché public ne saurait être tenue de conclure le contrat mais peut décider, sous le contrôle du juge, de renoncer à le conclure pour un motif d'intérêt général. En ce cas, le candidat initialement retenu avec qui le marché n'a pas été signé ne peut prétendre à une indemnisation de son manque à gagner.

6. Par une délibération du 19 septembre 2018, le comité syndical du SMTR a décidé de déclarer sans suite les procédures d'appel d'offre du projet STIR pour des motifs d'intérêt général tenant, d'une part, à la redéfinition de leurs besoins par les collectivités membres du SMTR, d'autre part, à des considérations budgétaires et financières.

7. Il résulte de l'instruction que l'appel d'offre lancé le 25 juin 2016 n'a pu aboutir que dix-huit mois plus tard, en décembre 2017, en raison des référés contractuels formés par des concurrents évincés. A cette date, le contexte local avait significativement évolué par rapport à celui qui prévalait lors la définition initiale du besoin. En particulier, la communauté intercommunale Réunion Est a déployé, dès janvier 2018, un nouveau système de billettique légère pour ses réseaux de transports publics et la région Réunion en a fait autant en avril 2018 ainsi qu'il ressort, notamment, de la délibération du 17 septembre 2018 par laquelle le conseil communautaire du Territoire de la Côte Ouest a décidé d'abroger sa délibération qui autorisait son président à signer la convention-cadre envisagée avec le SMTR. Ainsi, ces deux collectivités n'ayant plus d'intérêt, à court terme, au déploiement du STIR, le SMTR ne pouvait effectivement plus mener ce projet à terme dans le périmètre prévu à l'appel d'offre et dans les conditions financières et budgétaires initialement envisagées. Par suite, la société appelante n'est pas fondée à soutenir que le SMTR ne justifiait pas d'un motif d'intérêt général pour abandonner la procédure de passation du STIR.

8. Par ailleurs, la société RATP Smart Systems n'est pas fondée à soutenir que le SMTR aurait mal défini ses besoins en décidant de mutualiser les systèmes de billettique en se bornant à faire valoir que les membres de ce syndicat disposaient déjà, nonobstant leurs anciennetés, de systèmes de billettique. En outre elle n'est pas davantage fondée à soutenir, sans craindre la contradiction, qu'il ressort au contraire de l'audit diligenté par le SMTR en décembre 2017, dont le rapport a été remis le 19 avril 2018, que cette mutualisation constituait la solution la plus adaptée aux besoins des usagers et des membres du SMTR.

9. Enfin si la société appelante fait également valoir qu'à la date à laquelle l'appel d'offre a été lancé, les membres du SMTR avaient seulement approuvé le STIR dans son principe mais n'avaient pas encore fait valider par leurs organes décisionnaires la convention-cadre relative à l'acquisition et à la mise en œuvre de ces systèmes, qui fixait notamment le coût de l'opération et les engagements réciproques du SMTR et de ses membres, il résulte de l'instruction que, par des votes et délibérations internes, l'ensemble des membres de ce syndicat ont finalement approuvé cette convention. Par suite, la société appelante n'est pas fondée à soutenir que la précipitation fautive du SMTR à lancer un appel d'offre, à la supposer même établie, serait la cause de l'abandon de la procédure de passation ni, à fortiori, qu'elle lui aurait causé un quelconque préjudice.

10. Dans ces conditions, dès lors que l'abandon de la procédure de passation répond à un motif d'intérêt général et qu'il n'est pas d'établi que cette procédure de passation aurait été entachée de fautes du SMTR de nature à engager sa responsabilité à son égard, la société RATP Smart Systems n'est pas fondée à demander que le SMTR soit condamné à l'indemniser du préjudice que lui a causé l'abandon de cette procédure de passation.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à la condamnation du SMTR à l'indemniser de ces préjudices. Par suite sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société RATP Smart Systems est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société RATP Smart Systems et au syndicat mixte des transports de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 17 janvier 2023 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 février 2023.

Le rapporteur,

Manuel A...

Le président,

Didier ArtusLa greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au préfet de La Réunion en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°21BX00825 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX00825
Date de la décision : 07/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : HDLA - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-02-07;21bx00825 ?
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