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07/02/2023 | FRANCE | N°20BX02575

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 07 février 2023, 20BX02575


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la délibération du conseil municipal de Pau 18 décembre 2017 en tant qu'elle a révisé le montant de la redevance d'occupation domaniale des commerces ambulants au titre de l'année 2018, ensemble la décision par laquelle le maire de Pau a implicitement rejeté son recours gracieux formé le 7 février 2018 à l'encontre de cette délibération.

Par un jugement n° 1801458 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Pau a rejeté la r

equête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la délibération du conseil municipal de Pau 18 décembre 2017 en tant qu'elle a révisé le montant de la redevance d'occupation domaniale des commerces ambulants au titre de l'année 2018, ensemble la décision par laquelle le maire de Pau a implicitement rejeté son recours gracieux formé le 7 février 2018 à l'encontre de cette délibération.

Par un jugement n° 1801458 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Pau a rejeté la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 août 2020 et 12 avril 2022, M. C..., représenté par Me Marcel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 30 juin 2020 ;

2°) d'annuler la délibération du 18 décembre 2017 en tant que la commune de Pau a révisé le montant de la redevance d'occupation domaniale des commerces ambulants au titre de l'année 2018 ainsi que la décision par laquelle le maire de Pau a implicitement rejeté son recours gracieux formé le 7 février 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Pau une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a écarté son moyen tiré du défaut d'information des conseillers municipaux avant l'adoption de la délibération contestée ; s'agissant de la révision du montant des redevances d'occupation du domaine public par les commerçants ambulants, seul un projet de délibération a été adressé aux conseillers municipaux ; or, le motif principal de révision résidait dans une étude comparative avec d'autres collectivités montrant que le tarif pratiqué par la commune de Pau était relativement faible ; il était donc indispensable que cette étude soit portée à la connaissance des conseillers municipaux, sans qu'ils aient à en solliciter la communication ;

- la commune n'a apporté aucun élément de nature à justifier que le nouveau montant de la redevance serait en rapport avec l'avantage procuré par l'occupation du domaine public ; l'étude comparative dont se prévaut la commune n'est pas pertinente ; sur les 8 communes prises comme bases de comparaison, 4 communes, à savoir Nantes, Bordeaux, Le Havre et Toulouse, ont des bassins de population incomparables ; deux autres communes, à savoir Antibes et La Rochelle, sont des stations touristiques balnéaires, incomparables en matière de fréquentation des emplacements ; la différence de redevance entre les emplacements fixes et les manifestations ponctuelles était justifiée compte tenu de la différence de situation des commerçants ; la commune a ainsi commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- la fixation d'un montant minimal de 150 euros par mois, sans prendre en compte les particularités du commerçant ambulant et en particulier son outil de travail, méconnaît le principe d'égalité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2020, la commune de Pau, représentée par Me Gallardo, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. C... d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance était irrecevable ; la délibération ne fixe pas un tarif minimal mais renvoie à une décision ultérieure le soin d'organiser une procédure de publicité et de mise en concurrence, prévue par l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques, pour l'attribution d'un droit privatif sur le domaine public ; cette décision ultérieure pourra fixer elle-même un prix minimal, qui pourra être revu à la baisse en cas de procédure infructueuse ; le processus de sélection d'un candidat à l'occupation du domaine public est un processus unique s'achevant par la décision d'attribution ; la délibération en cause constitue ainsi un acte préparatoire ;

- les conseillers municipaux ont été suffisamment informés par le projet de délibération, qui comportait les motifs et la nature de la révision proposée ; l'absence de transmission de l'étude comparative, qui constitue seulement une compilation des tarifs pratiqués, ne faisait pas obstacle à ce que les conseillers municipaux comprennent les motifs de l'augmentation, alors au demeurant qu'ils pouvaient le cas échéant solliciter un complément d'information ;

- le moyen, invoqué en première instance, tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2224-18 du code général des collectivités territoriales, était inopérant ;

- la détermination du montant d'une redevance domaniale relève d'un pouvoir discrétionnaire ; en l'espèce, le minimum de 150 euros par mois posé est si faible au regard du montant ordinaire d'un loyer pour un commerce de bouche qu'il est évident qu'il ne peut procéder d'une erreur manifeste d'appréciation ; les critiques de M. C... ne peuvent qu'être écartées ;

- le principe d'égalité n'implique pas un droit à une différence de traitement.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... A...,

- et les conclusions de Mme Isabelle Le Bris, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 18 décembre 2017, la commune de Pau a révisé les montants des redevances d'occupation du domaine public au titre de l'année 2018. M. C..., qui exerce une activité de commerçant ambulant sur un emplacement fixe situé place d'Espagne à Pau, a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler cette délibération en tant qu'elle fixe au minimum de 150 euros par mois le montant de la redevance d'occupation domaniale des commerces ambulants au titre de l'année 2018 ainsi que la décision par laquelle le maire de Pau a implicitement rejeté son recours gracieux formé le 7 février 2018. Il relève appel du jugement du 30 juin 2020 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal (...) ". Aux termes de l'article L. 2121-13 du même code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ".

3. Le défaut d'envoi, avec la convocation aux réunions du conseil municipal d'une commune de 3 500 habitants et plus, de la note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour prévue à l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.

4. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des attestations établies par cinq membres du conseil municipal de Pau et du courriel de convocation des élus, que les conseillers municipaux ont été convoqués par courriel du 12 décembre 2017 au conseil municipal du 18 décembre suivant. Ce courriel de convocation comportait un lien vers l'application internet " Bureau des élus " leur permettant de consulter les documents relatifs à cette séance, en particulier le projet de délibération relatif à la fixation du montant de la redevance d'occupation domaniale des commerces ambulants au titre de l'année 2018. Ce projet de délibération indiquait que le montant actuel de la redevance, fixé à 84,77 euros par mois, ne tenait pas compte de l'avantage que retirait le commerçant en fonction de l'attractivité commerciale d'un emplacement en centre-ville, était disproportionné par rapport à celui appliqué pour les manifestations culturelles et sportives, compris entre 40 et 100 euros par jour, et était relativement faible au regard des montants institués dans d'autres communes, compris entre 95 et 678 euros par mois. Ce document proposait en conséquence de porter le montant minimal de cette redevance à 150 euros par mois. Les conseillers municipaux ont, dans ces conditions, disposé d'une information suffisante sur les motifs et les implications de la mesure envisagée. Si M. C... fait valoir qu'ils n'ont pas été rendus destinataires de l'étude comparative des montants des redevances dans différentes communes, ils étaient informés, par le projet de délibération, de l'échelle des montants fixés dans d'autres communes, et disposaient ainsi d'une information suffisante compte tenu de la nature et de l'importance de l'affaire. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l'obligation d'information des membres du conseil municipal prescrite par les dispositions citées au point 2 doit être écarté.

5. En deuxième lieu, il appartient à l'autorité gestionnaire du domaine public de fixer le tarif de la redevance due en contrepartie de l'occupation de ce domaine en tenant compte des avantages de toute nature que le titulaire de l'autorisation est susceptible de retirer de cette occupation.

6. M. C... fait valoir que la commune de Pau s'est basée sur une comparaison dénuée de pertinence, prenant comme éléments de référence des communes présentant des caractéristiques différentes de la commune de Pau en termes de " bassin de population " et de fréquentation touristique. Il ajoute que la différence entre le montant de la redevance fixé pour les emplacements fixes et celui instauré lors de manifestations ponctuelles est justifiée par l'affluence qu'engendre l'organisation de telles manifestations. Toutefois, compte tenu de l'avantage que procure aux commerçants ambulants l'autorisation d'occuper le domaine public du centre-ville de Pau aux fins d'y exercer leur activité économique, en fixant le montant minimal de la redevance litigieuse à 150 euros, tarif qui est au demeurant peu élevé par rapport aux autres communes et qui reste très en-deçà de celui instauré lors de l'organisation de manifestations culturelles ou sportives, la commune de Pau n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

7. En dernier lieu, le requérant fait valoir qu'en méconnaissance du principe d'égalité, la délibération en litige a fixé un montant minimal unique de la redevance, sans opérer de distinction suivant les particularités du commerçant ambulant et notamment du volume de son outil de travail. Cependant, le principe d'égalité n'implique pas que des personnes placées dans des situations différentes doivent être soumises à des régimes différents. Le moyen ne peut dès lors qu'être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande.

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Pau au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et à la commune de Pau.

Délibéré après l'audience du 17 janvier 2023 à laquelle siégeaient :

M. Didier Artus, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 février 2023.

La rapporteure,

Marie-Pierre Beuve A...

Le président,

Didier Artus

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 20BX02575


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. ARTUS
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre BEUVE-DUPUY
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : MARCEL

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 07/02/2023
Date de l'import : 27/03/2023

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20BX02575
Numéro NOR : CETATEXT000047277732 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-02-07;20bx02575 ?
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