Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2021 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'un an à son encontre.
Par un jugement n° 2102767 du 21 octobre 2021, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2021 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'un an à son encontre.
Par un jugement n° 2102928 du 10 novembre 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée sous le n° 22BX00271 le 24 janvier 2022, M. D..., représenté par Me Massou dit F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 21 octobre 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 14 octobre 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de lui délivrer un titre de séjour, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- son droit à être entendu et les droits de la défense ont été méconnus ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors que la décision en litige aura des conséquences graves sur sa situation personnelle ; l'ancienneté de sa présence en France doit être appréciée sans tenir compte de la précédente mesure d'éloignement dont il a fait l'objet à partir de son entrée sur le territoire français en 2017 ; il est très bien intégré dans la société française avec sa famille et travaille comme compagnon d'Emmaüs ; toute sa famille, mise à part ses deux filles ainées, réside en France, lui et sa femme ont des revenus et ses enfants sont scolarisés ;
- cette décision méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il a fixé le centre de ses intérêts privés et familiaux en France ;
- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît également l'article 3-1 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant dès lors que ses enfants perdront le bénéfice de l'année scolaire en cours ;
En ce qui concerne la décision de refus de délai de départ volontaire :
- cette décision n'est pas suffisamment motivée ;
- elle se fonde sur une décision portant obligation de quitter le territoire français illégale ;
- il ne répond à aucune des conditions définies par l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle se fonde sur une décision portant obligation de quitter le territoire français illégale ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il risque sa vie en cas de retour dans son pays d'origine ;
En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- son droit à être entendu a été méconnu ;
- cette décision se fonde sur une décision portant obligation de quitter le territoire français illégale ;
- cette décision est entachée d'une erreur d'appréciation ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 novembre 2022, le préfet des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
II. Par une requête enregistrée sous le n° 22BX00894 le 20 mars 2022, Mme D..., représentée par Me Massou dit F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 10 novembre 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 2 novembre 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours et de mettre fin aux mesures de surveillance dont elle fait l'objet ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle invoque les mêmes moyens que ceux soulevés dans la requête n° 21BX00271 et soutient en outre qu'en ce qui concerne le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet sur les conséquences de la décision portant obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle, elle présente de graves problèmes de santé qui ont justifié une demande de titre de séjour en tant qu'étranger malade.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 novembre 2022, le préfet des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 16 décembre 2021.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 27 janvier 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme E... C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 14 octobre 2021, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a fait obligation de quitter le territoire français sans délai à M. D..., ressortissant albanais né le 18 novembre 1966, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'un an à son encontre. Par ailleurs, par un arrêté du 2 novembre 2021, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a fait obligation de quitter le territoire français sans délai à son épouse, Mme D..., ressortissante albanaise née le 10 février 1969, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'un an à son encontre. Par la requête enregistrée sous le numéro 22BX00271, M. D... relève appel du jugement du 21 octobre 2021 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 octobre 2021. Par la requête enregistrée sous le numéro 22BX00894, Mme D... relève appel du jugement du 10 novembre 2021 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 novembre 2021. Ces deux requêtes, qui concernent les membres d'une même famille, présentent à juger des questions identiques et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.
Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, les arrêtés litigieux, après avoir visé les textes applicables, font état de la situation administrative des requérants, notamment concernant le rejet de leurs demandes présentées au titre de l'asile, l'absence de titre de séjour et l'existence de précédentes mesures d'éloignement prises à leur égard. Ils indiquent également les éléments tenant à la situation familiale et personnelle des intéressés. La seule circonstance qu'il n'est pas fait mention de leur compagnonnage au sein de l'association Emmaüs est sans influence sur la régularité de la motivation de ces arrêtés, les requérants ayant été mis à même de comprendre les motifs fondant les décisions portant obligation de quitter le territoire prises à leur encontre et de les contester utilement. Ainsi, les décisions en litige énoncent les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de ces décisions doit être écarté.
3. En deuxième lieu, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente serait tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter son point de vue de manière utile et effective. En particulier, l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français au titre de l'asile ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Il lui appartient donc, lors du dépôt de sa demande, de produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande, et il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Par ailleurs, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu avoir une influence sur le contenu de la décision. Si M. et Mme D... soutiennent qu'ils n'ont pas été mis à même de présenter utilement leurs observations préalablement à l'édiction des décisions en litige, il ne ressort pas des pièces du dossier que les intéressés auraient eu des éléments nouveaux à faire valoir qui auraient conduit le préfet à prendre des décisions différentes à leur égard. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à être entendu et de la violation du principe des droits de la défense doit être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Et aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits de libertés d'autrui ".
5. M. et Mme D... font valoir qu'ils sont entrés sur le territoire français en 2017 avec leurs trois enfants alors mineurs et qu'ils sont hébergés au sein du village Emmaüs de Lescar-Pau et y travaillent de manière bénévole. Les attestations établies par le responsable de ce village Emmaüs le 14 octobre 2021, par la présidente de l'association catholique des enfants le 16 octobre 2021 et par les éducateurs de rue du service prévention jeunesse de la communauté d'agglomération Pau Béarn Pyrénées versées au dossier, qui concernent principalement les enfants du couple, ne permettent pas de considérer que les époux seraient particulièrement insérés dans la société française, alors en outre qu'il ressort des pièces du dossier qu'ils n'ont pas exécuté des précédentes mesures d'éloignement en date du 16 avril 2019 ni respecté l'assignation à résidence qui leur avait été faite. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que les requérants seraient dépourvus d'attaches dans leur pays d'origine, où ils ont vécu respectivement jusqu'à l'âge de cinquante-et-un ans et quarante-huit ans, et rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue dans ce pays dès lors qu'ils font tous deux l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français. A cet égard, si trois de leurs enfants, dont deux étaient mineurs à la date des arrêtés litigieux, sont présents sur le territoire français, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils ne pourraient pas poursuivre leur scolarité en Albanie, alors même que l'année scolaire a déjà débuté. Dans ces conditions, au regard notamment de la durée de leur séjour et de l'absence de liens suffisamment anciens et stables en France, M. et Mme D... ne peuvent être regardés comme ayant fixé le centre de leurs intérêts privés et familiaux sur le territoire national, alors qu'il ressort en outre des pièces du dossier que leurs deux filles ainées n'y résident pas. Ainsi, les décisions portant obligation de quitter le territoire français ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale des requérants au regard des buts qu'elles poursuivent. Enfin, si Mme D... se prévaut de ses problèmes de santé, les éléments versés au dossier permettent seulement de constater qu'elle a demandé à retirer un dossier de demande de titre de séjour en tant qu'étranger malade postérieurement à l'arrêté du 2 novembre 2021. En outre, les certificats médicaux produits, s'ils attestent de ses troubles, ne permettent pas à eux seuls de considérer qu'un suivi médical serait nécessaire en France. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de celle de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet sur les conséquences des décisions en litige sur la situation des requérants doivent être écartés.
6. Enfin, aux termes de l'article 3-1 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
7. Les décisions litigieuses n'impliquent pas que M. et Mme D... soient séparés de leurs enfants, qui ne sont pas tenus de terminer leur année scolaire en France, contrairement à ce que soutiennent les requérants. Par ailleurs, ainsi qu'il vient d'être dit, rien ne fait obstacle à ce que la scolarité de leurs enfants mineurs nés en 2004 et 2005 se poursuive dans leur pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
Sur les décisions de refus de délai de départ volontaire :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soulever, par la voie de l'exception, l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre des décisions de refus de délai de départ volontaire.
9. En deuxième lieu, les arrêtés litigieux citent les articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indiquent que les époux se sont volontairement soustraits à des précédentes mesures d'éloignement. Ils précisent en outre qu'au regard de leurs déclarations, il y a lieu de penser qu'ils pourraient tenter de se soustraire aux obligations de quitter le territoire français prises à leur encontre. Ainsi, ces décisions, qui n'avaient pas à reprendre tous les éléments relatifs à la situation personnelle des requérants déjà exposés dans le même arrêté, énoncent les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de leur insuffisante motivation doit être écarté.
10. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Et aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; / 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ".
11. Il ressort des termes de l'arrêté litigieux que le préfet a considéré qu'il existait un risque que M. et Mme D... se soustraient à la mesure dont ils faisaient l'objet dès lors qu'ils n'avaient pas respecté une précédente mesure d'éloignement et qu'ils ont tous deux déclaré ne pas vouloir retourner en Albanie. Par suite, le moyen tiré du défaut de base légale des décisions de refus de délai de départ volontaire doit être écarté.
12. Enfin, si les requérants soutiennent qu'en raison de leurs obligations familiales et leur travail, ils auraient dû bénéficier d'un délai de départ volontaire, il ressort des pièces du dossier qu'ils travaillent tous deux à titre bénévole et que la cellule familiale pourra se reconstituer dans leur pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet des Pyrénées-Atlantiques quant aux conséquences de ces décisions sur leur situation personnelle doit être écarté.
Sur les décisions fixant le pays de renvoi :
13. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soulever, par la voie de l'exception, l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre des décisions fixant le pays de renvoi.
14. En deuxième lieu, les arrêtés litigieux, qui citent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, indiquent que les requérants n'ont pas fait état d'éléments permettant de considérer qu'ils seraient exposés à des traitements inhumains et dégradants dans leur pays d'origine et font état du rejet de leur demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile. Par suite, ces décisions fixant le pays de renvoi, qui énoncent les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, sont suffisamment motivées.
15. Enfin, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
16. Les requérants se bornent à soutenir qu'ils risquent leur vie en cas de retour en Albanie sans apporter plus de précisions. Dans ces conditions, il ne peut être tenu pour établi qu'il existerait pour M. et Mme D... un risque personnel, réel et actuel d'être soumis à des traitements inhumains ou dégradants dans leur pays d'origine, alors qu'il ressort des pièces du dossier que leurs demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 28 février 2018, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 4 septembre 2018 et que leurs demandes de réexamen ont été rejetées comme irrecevables. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français :
17. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soulever, par la voie de l'exception, l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre des interdictions de retour sur le territoire français prises à leur encontre.
18. En deuxième lieu, les arrêtés litigieux, qui visent l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, indiquent que les intéressés, qui ne représentent pas de menace à l'ordre public, se sont déjà soustraits à une mesure d'éloignement, et qu'au regard de leur situation, qui a été précisée dans le corps de ces arrêtés, une interdiction de retour sur le territoire français d'un an ne porterait pas d'atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale. La seule circonstance qu'il n'est pas fait mention de leur bénévolat au sein de l'association Emmaüs n'a pas eu d'incidence sur la régularité de la motivation des décisions en litige, contrairement à ce que M. et Mme D... soutiennent. Ces décisions énoncent ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de leur insuffisante motivation doit être écarté.
19. En troisième lieu, si M. et Mme D... soutiennent qu'ils n'ont pas été mis à même de présenter utilement leurs observations préalablement à l'édiction des décisions en litige, il ne ressort pas des pièces du dossier que les intéressés auraient eu des éléments nouveaux à faire valoir qui auraient conduit le préfet à prendre des décisions différentes à leur égard. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à être entendu doit être écarté.
20. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5, les moyens tirés de l'erreur d'appréciation qui aurait été commise par le préfet et de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.
21. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les deux jugements attaqués, les magistrats désignés par la présidente du tribunal administratif de Pau ont rejeté leurs demandes. Leurs requêtes doivent ainsi être rejetées, y compris leurs conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes n° 22BX00271 et n° 22BX00894 sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., à Mme A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Atlantiques.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,
Mme Charlotte Isoard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 décembre 2022.
La rapporteure,
Charlotte C...La présidente,
Marianne Hardy
La greffière,
Marion Azam Marche
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 22BX0271, 22BX00894 2