Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SARL Rigoulet et la SCI Saint Georges les Bains ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 28 août 2019 par lequel le maire de Périgueux a délivré à la SCI la Garenne un permis de démolir une maison d'habitation implantée sur un terrain situé 3 rue des Bains.
Par un jugement n° 2000134 du 18 novembre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 janvier 2021, la SARL Rigoulet, représentée par Me Saint-Supery, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 novembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 août 2019 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Périgueux une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement a considéré à tort qu'elle ne disposait pas d'un intérêt à agir au sens de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;
- au vu de son délai très court de délivrance, cet arrêté n'a pas fait l'objet d'une instruction et d'un examen effectifs ;
- cet arrêté a été délivré en méconnaissance des règles d'insertion dans le paysage prévues dans le règlement du PLUi et de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme ;
- le dossier était incomplet au regard de l'article L. 451-2 du code de l'urbanisme en l'absence de plan masse des bâtiments à démolir ;
- cette décision méconnaît l'article 2.3.4 du règlement du PLUi alors applicable, concernant la conservation des plantations existantes.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 mai 2021, la SCI La Garenne, représentée par Me Duchet, demande à la cour, à titre principal, de rejeter la requête, à titre subsidiaire, de prononcer un sursis à statuer en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de la SARL Rigoulet en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable en l'absence d'intérêt à agir de la requérante sur le fondement de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;
- la requête est tardive ;
- les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 septembre 2022, la commune de Périgueux, représentée par le cabinet HMS Atlantique Avocats, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SARL Rigoulet en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable en l'absence d'intérêt à agir de la requérante sur le fondement de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;
- les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A... B...,
- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,
- les observations de Me Cazcarra, représentant la commune de Périgueux, et de Me Duchet, représentant la SCI La Garenne.
Considérant ce qui suit :
1. La SCI la Garenne a déposé, le 27 août 2019, une demande de permis de démolir une maison d'habitation lui appartenant située 3 rue des Bains et 163 boulevard du Petit-Change à Périgueux. Par un arrêté du 28 août 2019, le maire a délivré ce permis de démolir. La SARL Rigoulet relève appel du jugement du 18 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
3. La SARL Rigoulet, qui exploite un établissement de pompes funèbres, se prévaut de ce qu'elle partage un mur mitoyen avec le bâtiment dont la démolition est autorisée et que le pignon de l'immeuble dans lequel elle exerce son activité se trouvera ainsi exposé aux intempéries et pourrait être fragilisé. Toutefois, alors que la société requérante n'est que locataire du bâtiment qu'elle occupe, et dès lors que le permis de démolir, qui est délivré sous réserve du droit des tiers, n'a d'autre objet que d'autoriser la démolition après contrôle de la conformité aux règles d'urbanisme des plans et indications fournis par le pétitionnaire, les circonstances ainsi invoquées ne sont pas de nature à faire regarder la décision attaquée comme affectant les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son établissement. Par ailleurs, elle ne saurait utilement se prévaloir de l'impact des conditions de déroulement du chantier, qui ne peuvent être prises en compte pour apprécier l'intérêt pour agir contre une autorisation d'urbanisme. Enfin, alors qu'aucune disposition législative ou règlementaire ne fait obligation à un pétitionnaire de déposer simultanément les demandes de permis de démolir et de permis de construire relatives à une même parcelle, elle ne saurait soutenir que son intérêt à agir doit être apprécié au regard du permis de construire accordé le 27 janvier 2020 sur cette même parcelle, au demeurant postérieurement à l'introduction de sa requête.
4. Il résulte de ce qui précède que la SARL Rigoulet n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande comme irrecevable. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
5. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la SARL Rigoulet une somme de 1 500 euros chacune au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la commune de Périgueux et la SCI La Garenne.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Rigoulet est rejetée.
Article 2 : La SARL Rigoulet versera une somme de 1 500 euros chacune à la commune de Périgueux et à la SCI La Garenne au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Sarl Rigoulet, à la commune de Périgueux et la SCI La Garenne.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,
Mme Charlotte Isoard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 décembre 2022.
La rapporteure,
Christelle B...La présidente,
Marianne Hardy
La greffière,
Marion Azam Marche
La République mande et ordonne au préfet de la Dordogne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX00212 2