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17/11/2022 | FRANCE | N°22BX01151

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 17 novembre 2022, 22BX01151


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 13 mars 2020 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2000403 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de la Guyane a annulé l'arrêté du 13 mars 2020, a enjoint au préfet de la Guyane de délivrer à Mme A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois et a mis à la charge de l'État le versement à M

e Balima d'une somme de 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 13 mars 2020 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2000403 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de la Guyane a annulé l'arrêté du 13 mars 2020, a enjoint au préfet de la Guyane de délivrer à Mme A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois et a mis à la charge de l'État le versement à Me Balima d'une somme de 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 avril 2022, le préfet de la Guyane, représenté par Me Tomasi, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 17 mars 2022 ;

2°) de rejeter la requête de Mme A....

Il soutient que Mme A... ne démontre pas que le père de son enfant contribue à son éducation et à son entretien.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 mai 2022, Mme A..., représentée par Me Balima, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête du préfet de la Guyane ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Guyane de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé ;

- le préfet a entaché cet arrêté d'une erreur de fait et d'une erreur de droit dès lors que le préfet ne justifie pas du caractère frauduleux de la reconnaissance de son fils et ne démontre pas qu'elle aurait fait l'objet de poursuites pénales pour les faits qu'il dénonce ;

- l'arrêté a été pris antérieurement à l'entrée en vigueur du nouveau code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle remplit les conditions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cet arrêté méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cet arrêté méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle vit en France depuis 2013, qu'elle est la mère d'un enfant français et qu'une partie de sa famille réside sur le territoire français ;

- cet arrêté méconnaît les article 3-1, 9-1 et 16 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant, ainsi que l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- cet arrêté méconnaît le préambule de la Constitution.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 16 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 ;

- le décret n° 2019-141 du 27 février 2019 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante haïtienne née le 25 juillet 1980, entrée sur le territoire français au mois d'avril 2013, a sollicité un titre de séjour en tant que parent d'enfant français sur le fondement du 6° l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable. Par un arrêté du 13 mars 2020, le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer le titre de séjour demandé. Le préfet de la Guyane relève appel du jugement du 17 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a annulé l'arrêté du 13 mars 2020, lui a enjoint de délivrer à Mme A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois et a mis à la charge de l'État le versement à son avocat d'une somme de 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Le tribunal administratif de la Guyane a annulé l'arrêté du 13 mars 2020 aux motifs, d'une part, qu'aucun élément au dossier ne permettait de considérer que la nationalité française de l'enfant de Mme A... aurait été obtenue par fraude, et, d'autre part, que la condition du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, selon laquelle le demandeur du titre de séjour doit justifier que le parent français contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, n'était pas applicable à la demande de titre de séjour de Mme A....

3. Les dispositions du deuxième alinéa du 6° l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile selon lesquelles " Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ; (...) " ont été introduites par l'article 55 de la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie. Il résulte des dispositions combinées du IV de l'article 71 de la loi du 10 septembre 2018 et du I de l'article 52 du décret du 27 février 2019 pris pour son application que les dispositions citées ci-dessus s'appliquent aux demandes postérieures au 1er mars 2019.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a présenté une demande de titre de séjour en tant que parent d'enfant français le 19 octobre 2017. Par conséquent, les dispositions du deuxième alinéa du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui étaient pas opposables. Par suite, le préfet ne pouvait refuser à Mme A... de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de cet article au motif qu'elle ne justifiait pas d'une contribution effective de la part du père de son fils de nationalité française à l'entretien et à l'éducation de cet enfant. Il ne peut ainsi utilement se prévaloir, pour critiquer le jugement attaqué, de ce qu'aucun élément au dossier n'établit que le père de l'enfant de Mme A... contribue à son entretien et son éducation.

5. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Guyane, qui ne conteste pas le bien-fondé de l'autre motif retenu par les premiers juges, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a annulé l'arrêté du 13 mars 2020, lui a enjoint de délivrer à Mme A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois et a mis à la charge de l'État le versement à son avocat d'une somme de 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Sur l'injonction :

6. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions du préfet de la Guyane tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de la Guyane, lequel lui enjoignait de délivrer à Mme A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois, n'implique pas qu'une nouvelle injonction soit prononcée. Par suite, les conclusions présentées par Mme A... à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais d'instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à Me Balima d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Guyane est rejetée.

Article 2 : L'État versera à Me Balima une somme de 1 200 euros au titre de de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Balima.

Copie en sera adressée au préfet de la Guyane.

Délibéré après l'audience du 27 octobre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 novembre 2022.

La rapporteure,

Charlotte C...La présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 22BX01151 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22BX01151
Date de la décision : 17/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Charlotte ISOARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : TOMASI

Origine de la décision
Date de l'import : 29/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-11-17;22bx01151 ?
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