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17/11/2022 | FRANCE | N°20BX03227

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 17 novembre 2022, 20BX03227


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SELARL Pharmacie de l'Europe, la SELARL Pharmacie du Progrès, la SELARL Pharmacie Saint-Jacques, la SELARL Pharmacie de Terves et la SELARL Pharmacie Notre-Dame ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 26 avril 2019 par lequel le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Nouvelle Aquitaine a autorisé le transfert de l'officine de la SELARL Pharmacie Oyono du 17, rue Gambetta au 4, rue Marcel Pagnol à Bressuire.

Par un jugement n° 1901666 du 28 juillet

2020, le tribunal a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SELARL Pharmacie de l'Europe, la SELARL Pharmacie du Progrès, la SELARL Pharmacie Saint-Jacques, la SELARL Pharmacie de Terves et la SELARL Pharmacie Notre-Dame ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 26 avril 2019 par lequel le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Nouvelle Aquitaine a autorisé le transfert de l'officine de la SELARL Pharmacie Oyono du 17, rue Gambetta au 4, rue Marcel Pagnol à Bressuire.

Par un jugement n° 1901666 du 28 juillet 2020, le tribunal a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 septembre 2020 et un mémoire enregistré le 25 mars 2021, la SELARL Pharmacie de l'Europe, la SELARL Pharmacie du Progrès, la SELARL Pharmacie Saint-Jacques, la SELARL Pharmacie de Terves et la SELARL Pharmacie Notre-Dame, représentées par la SCP Ten France, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 avril 2019 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la pharmacie Oyono une somme de 2 500 euros chacun à leur verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la zone IRIS Saint-Porchaire ne présente pas d'unité géographique et humaine permettant de la regarder comme un quartier dès lors que l'ancien bourg de Saint-Porchaire et la zone d'activité immédiatement proche sont séparés du site de Bocapôle et du lieu de transfert par les deux ronds-points d'accès à la route nationale 149 constituant des obstacles infranchissables pour les piétons et les cyclistes, et que cet IRIS comporte un bourg densément urbanisé, de vastes champs agricoles et une zone d'activités sans population résidente significative ; cette dernière zone constitue en réalité le quartier du transfert et comporte moins d'une dizaine de logements ;

- si la cour estimait que le quartier d'accueil est constitué par l'ensemble de la zone IRIS Saint-Porchaire, ce quartier est déjà desservi par la pharmacie de l'Europe aisément accessible ainsi que par la pharmacie Notre-Dame, de sorte que contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, le nouvel emplacement de la pharmacie Oyono ne constitue pas une optimisation de la desserte en médicaments mais une simple amélioration, insuffisante pour autoriser le transfert ;

- le nouvel emplacement de la pharmacie Oyono est situé à l'extérieur de " l'enveloppe urbanisée " et n'est pas entouré d'une population résidente ; contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, le dépôt de permis de construire pour la construction de logements HLM et d'une résidence seniors à proximité du lieu de transfert n'a pas été constaté, et les seuls " signes d'urbanisation " concernent des activités tertiaires qui ne sauraient caractériser une évolution démographique prévisible ;

- la population résidente de Saint-Porchaire n'est pas desservie par une ligne de bus pour se rendre au futur emplacement de la pharmacie Oyono et ne peut pas s'y rendre à pied ;

- l'arrêté autorisant le transfert est ainsi illégal en tant qu'il est fondé sur une optimisation de la desserte en médicaments de la zone IRIS Saint-Porchaire et qu'il retient en outre que le transfert permettrait de desservir la zone IRIS Malabry - Bois d'Anne, alors que cette dernière est déjà desservie par d'autres pharmacies et que le transfert de la pharmacie Oyono ne permettrait pas une amélioration certaine de la desserte en médicaments de sa population.

Par des mémoires en défense enregistrés les 1er décembre 2020 et 27 mai 2021, la SELARL Pharmacie Oyono, représentée par la SELARL Séqueval Porte Neuve Avocats, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre solidairement à la charge de la SELARL Pharmacie de l'Europe, de la SELARL Pharmacie du Progrès, de la SELARL Pharmacie Saint-Jacques, de la SELARL Pharmacie de Terves et de la SELARL Pharmacie Notre-Dame une somme de 5 000 euros chacune à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens invoqués par la SELARL Pharmacie de l'Europe et autres ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 décembre 2020, l'ARS Nouvelle-Aquitaine conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens invoqués par la SELARL Pharmacie de l'Europe et autres ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Kolia Gallier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Leeman, représentant la SELARL Pharmacie de l'Europe et autres et de Me Séqueval, représentant la SELARL Pharmacie Oyono.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 26 avril 2019, le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Nouvelle-Aquitaine a autorisé le transfert de l'officine exploitée par la SELARL Pharmacie Oyono du 17, rue Gambetta au 4, rue Marcel Pagnol, sur le territoire de la commune de Bressuire. La SELARL Pharmacie de l'Europe, la SELARL Pharmacie du Progrès, la SELARL Pharmacie Saint-Jacques, la SELARL Pharmacie de Terves et la SELARL Pharmacie Notre-Dame relèvent appel du jugement du 28 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande d'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique : " Lorsqu'ils permettent une desserte en médicaments optimale au regard des besoins de la population résidente et du lieu d'implantation choisi par le pharmacien demandeur au sein d'un quartier défini à l'article L. 5125-3-1, d'une commune ou des communes mentionnées à l'article L. 5125-6-1, sont autorisés par le directeur général de l'agence régionale de santé, respectivement dans les conditions suivantes : / 1° Les transferts et regroupements d'officines, sous réserve de ne pas compromettre l'approvisionnement nécessaire en médicaments de la population résidente du quartier, de la commune ou des communes d'origine. / L'approvisionnement en médicaments est compromis lorsqu'il n'existe pas d'officine au sein du quartier, de la commune ou de la commune limitrophe accessible au public par voie piétonnière ou par un mode de transport motorisé répondant aux conditions prévues par décret, et disposant d'emplacements de stationnement ; / (...). " Aux termes de l'article L. 5125-3-1 du même code : " Le directeur général de l'agence régionale de santé définit le quartier d'une commune en fonction de son unité géographique et de la présence d'une population résidente. L'unité géographique est déterminée par des limites naturelles ou communales ou par des infrastructures de transport. / (...). " Aux termes de l'article L. 5125-3-2 de ce code : " Le caractère optimal de la desserte en médicaments au regard des besoins prévu à l'article L. 5125-3 est satisfait dès lors que les conditions cumulatives suivantes sont respectées : / 1° L'accès à la nouvelle officine est aisé ou facilité par sa visibilité, par des aménagements piétonniers, des stationnements et, le cas échéant, des dessertes par les transports en commun ; / 2° Les locaux de la nouvelle officine remplissent les conditions d'accessibilité mentionnées à l'article L. 111-7-3 du code de la construction et de l'habitation, ainsi que les conditions minimales d'installation prévues par décret. Ils permettent la réalisation des missions prévues à l'article L. 5125-1-1 A du présent code et ils garantissent un accès permanent du public en vue d'assurer un service de garde et d'urgence ; / 3° La nouvelle officine approvisionne la même population résidente ou une population résidente jusqu'ici non desservie ou une population résidente dont l'évolution démographique est avérée ou prévisible au regard des permis de construire délivrés pour des logements individuels ou collectifs. "

3. En premier lieu, l'arrêté du 26 avril 2019 définit comme quartier d'accueil " le quartier en cours d'urbanisation de la commune de Bressuire situé au nord-est de la ville et qui correspond à la zone IRIS (îlot regroupé pour l'information statistique) Saint-Porchaire ".

Il ressort des pièces du dossier que cette zone, limitrophe au sud-est d'un quartier pavillonnaire inclus dans l'IRIS Malabry - Bois d'Anne, est occupée, de part et d'autre de la route départementale n° 938 ter reliant Bressuire à Thouars qui en constitue l'axe structurant, par des activités artisanales, commerciales, administratives et de services, et à son extrémité nord-est par l'ancien bourg de Saint-Porchaire, intégré à la commune de Bressuire en 1964, dont la population était estimée à 2 048 habitants à la date de l'arrêté. La circonstance que l'IRIS Saint-Porchaire inclut des secteurs à vocations différentes, y compris agricole, ne suffit pas à le faire regarder comme dépourvu d'unité géographique au sens des dispositions de l'article L. 5125-3-1 du code de la santé publique. Si le boulevard de Thouars, tronçon de la route départementale n° 938 ter sur lequel le transfert contesté a été autorisé, comporte deux ronds-points d'accès à la route nationale n° 149 perpendiculaire à la route départementale n° 938 ter, ceux-ci ne constituent pas des obstacles infranchissables séparant deux quartiers, ainsi qu'il ressort des photographies dont se prévalent les requérantes. Ainsi, la SELARL Pharmacie de l'Europe et autres ne sont pas fondées à soutenir que l'IRIS Saint-Porchaire ne pouvait être défini comme quartier d'accueil. Par suite, le moyen tiré de la faiblesse de la seule population résidant à proximité de l'emplacement du transfert autorisé, occupé par des activités commerciales, administratives et de services, est inopérant.

4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que l'emplacement du transfert autorisé est situé à proximité immédiate de l'angle du boulevard de Thouars et de la

rue Marcel Pagnol, que l'accès des véhicules à la pharmacie est assuré par une voie privée débouchant sur cette rue et conduisant à un parking de 1 110 m² sur lequel est aménagé

un cheminement pour les piétons, et qu'un passage pour les piétons est également prévu pour rejoindre la voie cyclo-piétonne du boulevard de Thouars. Le constat d'huissier des 17

et 24 janvier 2020 produit par la SELARL Pharmacie Oyono fait apparaître que malgré le caractère discontinu de la piste cyclable et des trottoirs, la route reliant l'ancien bourg de Saint-Porchaire au lieu du transfert, qui assure une desserte aisée pour les véhicules, comporte des aménagements praticables par les piétons et les cyclistes. Dès lors que la distance de 2,3 km, mesurée par un huissier missionné par la SELARL Pharmacie de l'Europe et autres, qui l'a parcourue en voiture en 3,52 minutes, représente environ 20 minutes de marche, l'absence de desserte appropriée par le bus ne saurait caractériser une insuffisance de l'accessibilité pour la population de l'ancien bourg de Saint-Porchaire, laquelle ne pouvait accéder à pied à aucune officine avant le transfert.

5. En troisième lieu, le respect des dispositions du 2° de l'article L. 5125-3-2 n'est pas contesté.

6. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que quatre des sept officines installées sur le territoire de la commune de Bressuire sont concentrées au centre-ville dont la population est de 2 707 habitants, tandis que l'IRIS Saint-Porchaire, avec 2 048 habitants dans l'ancien bourg de Saint-Porchaire, outre un habitat pavillonnaire dans le prolongement de l'IRIS Malabry - Bois d'Anne et d'autres habitations plus dispersées, en est dépourvu. Si l'arrêté

du 26 avril 2019 précise que l'officine transférée " approvisionnera la population de l'IRIS Saint-Porchaire estimée à 2 048 habitants actuellement non desservie, mais aussi la population de l'IRIS Malabry - Bois d'Anne estimée à 1 837 habitants située à proximité et également non desservie ", il résulte de l'instruction que le directeur général de l'ARS aurait pris la même décision s'il n'avait pas tenu compte de cette dernière population, non incluse dans le quartier d'accueil, pour retenir que le transfert permet une desserte en médicaments optimale au sens

des dispositions citées au point 2. La pharmacie de l'Europe n'étant pas située dans l'IRIS

Saint-Porchaire, les requérantes ne peuvent utilement faire valoir qu'elle desservirait déjà l'ancien bourg de Saint-Porchaire, dont elle est au demeurant plus éloignée que l'emplacement du transfert autorisé.

7. Il résulte de ce qui précède que la SELARL Pharmacie de l'Europe et autres ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande.

8. La SELARL Pharmacie de l'Europe, la SELARL Pharmacie du Progrès,

la SELARL Pharmacie Saint-Jacques, la SELARL Pharmacie de Terves et la SELARL Pharmacie Notre-Dame, qui sont la partie perdante, ne sont pas fondées à demander

qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat ou de la SELARL Pharmacie Oyono au titre

de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à leur charge solidaire une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par

la SELARL Pharmacie Oyono à l'occasion du présent litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SELARL Pharmacie de l'Europe et autres est rejetée.

Article 2 : La SELARL Pharmacie de l'Europe, la SELARL Pharmacie du Progrès, la SELARL Pharmacie Saint-Jacques, la SELARL Pharmacie de Terves et la SELARL Pharmacie

Notre-Dame verseront solidairement à la SELARL Pharmacie Oyono une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 76-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à La SELARL Pharmacie de l'Europe, représentante unique pour l'ensemble des requérantes, à la SELARL Pharmacie Oyono, à l'agence régionale de santé Nouvelle-Aquitaine et au ministre de la santé et de la prévention.

Délibéré après l'audience du 25 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Luc Derepas, président,

Mme Catherine Girault, présidente de chambre,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 novembre 2022.

La rapporteure,

Anne A...

Le président,

Luc DerepasLa greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20BX03227


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX03227
Date de la décision : 17/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. DEREPAS
Rapporteur ?: Mme Anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme GALLIER
Avocat(s) : CABINET TEN FRANCE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-11-17;20bx03227 ?
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