Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme F... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 21 mars 2021 par lequel la préfète de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2101152 du 14 septembre 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 12 octobre 2021, Mme B..., représentée par Me Marques-Melchy, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 14 septembre 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 mars 2021 par lequel la préfète de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés pour l'instance ;
Elle soutient que :
- le signataire de l'arrêté litigieux ne bénéficiait pas d'une délégation de signature régulière ;
- la préfète s'est estimée à tort liée par le caractère irrégulier de son entrée
sur le territoire ;
- l'arrêté litigieux a méconnu les dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cet arrêté a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale.
Par ordonnance du 10 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 15 juillet 2022 à 12h00.
Un mémoire du préfet de la Vienne a été enregistré le 14 octobre 2022, postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante chinoise née le 29 septembre 1966, a déclaré être entrée en France le 17 septembre 2019 sous couvert d'un visa d'entrée de court séjour délivré par les autorités espagnoles et valable du 17 septembre au 31 octobre 2019. Le 19 juin 2020, elle a contracté mariage avec un ressortissant français et a alors sollicité la délivrance d'un titre de séjour en sa qualité de conjoint de français. Par un arrêté du 31 mars 2021, la préfète de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme B... relève appel du jugement du 14 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, l'arrêté litigieux a été signé par M. C... D..., qui bénéficiait, en sa qualité de secrétaire général de la préfecture de la Vienne, d'une délégation de signature consentie par un arrêté préfectoral du 26 mars 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de la Vienne, aux fins de signer tous les actes relevant des attributions de l'Etat dans le département à l'exception de certaines décisions dont ne relève pas les arrêtés contestés. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte ne peut qu'être écarté.
3. En deuxième lieu et contrairement à ce que soutient Mme B..., la préfète de la Vienne, après avoir estimé que l'appelante ne justifiait pas être régulièrement entrée en France, s'est également fondée sur ses antécédents judiciaires pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de français et ne s'est ainsi pas estimée, à tort, liée par le caractère irrégulier de cette entrée sur le territoire.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ".
5. Mme B... fait valoir qu'elle a rencontré son futur époux, de nationalité française, en 2006, qu'elle était titulaire d'un visa de court séjour et qu'elle résidait depuis plus de six mois avec son conjoint à la date de l'arrêté litigieux. Toutefois, Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'extrait du casier judiciaire produit en défense, que, par un jugement du tribunal correctionnel de Créteil du 11 mai 2009, Mme B... a été condamnée à une peine de cinq ans d'emprisonnement ainsi qu'à une amende de 20 000 euros et à une peine complémentaire d'interdiction du territoire français d'une durée de dix ans pour des faits de proxénétisme aggravé, de mise d'un local privé à la disposition d'une personne s'y livrant à la prostitution et de mise en contact avec la victime par réseau de télécommunications. L'appelante, qui avait quitté la France antérieurement à l'audience correctionnelle et à l'encontre de laquelle ce jugement a été, par suite, rendu par défaut, soutient qu'elle aurait été recrutée au mois de janvier 2008 pour assurer des tâches de cuisine et d'entretien au sein d'un appartement servant de lieu de prostitution, qu'elle aurait quitté cet emploi dès le mois de mars suivant pour exercer un emploi de garde d'enfant et d'aide à domicile en Espagne mais ne produit toutefois aucun élément à l'appui de ces allégations alors, en tout état de cause, qu'elle n'a pas souhaité faire opposition à ce jugement, lequel est dès lors revêtu de l'autorité de la chose jugée, mais a attendu la prescription de sa condamnation principale puis l'expiration de l'interdiction de territoire prononcée à son encontre avant de revenir en France.
6. Dans ces conditions, eu égard à la gravité des faits dont elle s'est rendu coupable et en dépit de leur caractère ancien, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la préfète de la Vienne, qui aurait pris la même décision si elle c'était fondée sur ce seul motif, a commis une erreur de droit ou une erreur d'appréciation en considérant que sa présence en France constituait une menace pour l'ordre public et que, dès lors, elle ne pouvait se prévaloir des dispositions précitées du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans les prévisions duquel elle ne rentrait au demeurant pas, faute de justifier de la date de son entrée sur le territoire.
7. En troisième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. Mme B... épouse A... établit, par les pièces qu'elle produit, avoir résidé habituellement en France de 2005 à 2008, avoir suivi des cours de français en 2021 et entretenir une relation de couple avec son époux depuis de nombreuses années. Elle soutient également mais sans l'établir que celui-ci présente des " problèmes de santé invalidants ". Toutefois, l'appelante ne résidait en France que depuis moins de deux ans à la date de l'arrêté litigieux, n'est pas dépourvue d'attaches en Chine où vivent ses deux enfants, nés d'une précédente union, tandis qu'elle présente une menace pour l'ordre public ainsi qu'il a été dit précédemment. En outre, contrairement à ce qu'elle soutient, la seule circonstance que la fille cadette de son époux, âgée de 17 ans, poursuive des études ne fait pas obstacle à ce que celui-ci, qui est retraité, puisse lui rendre visite en Chine où y résider avec elle ainsi qu'il l'a d'ailleurs précédemment fait lorsqu'elle a résidé en Espagne, au Portugal puis en Chine entre 2008 et 2019. Dans ces conditions, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté litigieux aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, ni, par voie de conséquence, qu'il aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 21 mars 2021. Par suite sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Vienne.
Délibéré après l'audience du 18 octobre à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président ;
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,
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Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 novembre 2022.
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Le rapporteur,
Manuel E...
Le président,
Didier ArtusLa greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX03934 2