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09/11/2022 | FRANCE | N°20BX01740

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 09 novembre 2022, 20BX01740


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... I... et la SCI le Château de Balanzac ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 28 avril 2018 par lequel le maire de la commune de Balanzac a délivré à la SCI D... Immo un permis de construire valant autorisation de démolir en vue de la création de deux logements, la réhabilitation d'un logement et la démolition d'un hangar métallique sur un terrain situé 14 rue de l'Eglise.

Par un jugement n° 1801493 du 19 septembre 2019, le tribunal a décidé, en applica

tion de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, après avoir écarté tous les aut...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... I... et la SCI le Château de Balanzac ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 28 avril 2018 par lequel le maire de la commune de Balanzac a délivré à la SCI D... Immo un permis de construire valant autorisation de démolir en vue de la création de deux logements, la réhabilitation d'un logement et la démolition d'un hangar métallique sur un terrain situé 14 rue de l'Eglise.

Par un jugement n° 1801493 du 19 septembre 2019, le tribunal a décidé, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, après avoir écarté tous les autres moyens, de surseoir à statuer sur cette requête et d'accorder à la SCI D... Immo un délai de trois mois pour obtenir un permis modificatif régularisant le vice d'incompétence et la méconnaissance de l'article R. 451-4 du code de l'urbanisme.

Par un jugement n° 1801493 du 19 mars 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande.

Par une ordonnance n° 2101733, en date du 2 août 2021 le président du tribunal administratif de Poitiers a transmis à la cour administrative d'appel de Bordeaux, la demande de la SCI du Château de Balanzac et de M. C... I..., tendant à l'annulation de l'arrêté de permis de construire modificatif n° PC 017 030 18 S001 M03 délivré le 6 mai 2021 par le maire de Balanzac à la SCI D... Immo pour la création d'un logement et d'une dépendance sur un terrain situé château de Balanzac à Balanzac (Charente-Maritime).

Procédure devant la cour :

I/ Par une requête n° 20BX01740, enregistrée le 25 mai 2020, un mémoire en production de pièces enregistré le 16 juin 2020 et des mémoires enregistrés les 14 mars 2021, 18 mai 2021, 29 juin 2021, 27 août 2021, 4 novembre 2021, 14 décembre 2021 et 13 avril 2022, M. C... I... et la SCI le Château de Balanzac, représentés par Me Lelong puis par Me Leriche-Milliet, demandent à la cour :

1°) d'annuler ces jugements du tribunal administratif de Poitiers des 19 septembre 2019 et 19 mars 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté de permis de construire initial délivré le 28 avril 2018 et le permis de construire modificatif délivré le 20 janvier 2020 à la SCI D... Immo par la commune de Balanzac ;

3°) d'annuler l'arrêté de permis modificatif n° PC 017 030 18 S0001 M03 accordé par le maire de Balanzac à la SCI D... Immo le 3 mai 2021, pour la création d'un logement et d'une dépendance, sur le terrain sis Château de Balanzac à Balanzac (17600) ;

4°) d'écarter de la procédure, dans leur ensemble, les écritures et pièces produites pour la commune de Balanzac ;

5°) subsidiairement, de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la démarche initiée par les appelants devant le Procureur de la République, tendant à être autorisés à solliciter la copie intégrale des actes de naissance de Messieurs Dominique et Damien D..., sur le fondement de l'article 30, dernier alinéa, du décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 relatif à l'état civil ;

6°) de mettre à la charge de la commune de Balanzac et de la SCI D... Immo la somme globale de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils justifient d'un intérêt pour agir ;

- le jugement est irrégulier car en méconnaissance du principe du contradictoire, le mémoire qu'ils ont déposé le 1er mars 2020 pour présenter des observations visant à contester la légalité du permis de construire modificatif transmis n'a pas été communiqué aux autres parties ;

- le jugement est irrégulier car en méconnaissance de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, le tribunal a omis de répondre au moyen tenant au non-respect du délai de 3 mois imparti par le jugement du 19 septembre 2019 pour permettre à la commune et au pétitionnaire de régulariser le permis initial en transmettant un permis modificatif ;

- le tribunal ne pouvait pas faire application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme dès lors qu'il avait constaté l'existence de plusieurs vices ;

- la régularisation des vices est intervenue après l'expiration du délai de trois mois imparti à la commune et au pétitionnaire ;

- le permis modificatif du 20 janvier 2020 ne régularise pas le vice d'incompétence du permis initial, dès lors qu'il est signé du maire de la commune et que celui-ci a un intérêt personnel à la délivrance du permis ;

- le permis modificatif du 20 janvier 2020 ne régularise pas la méconnaissance des dispositions de l'article R. 451-4 du code de l'urbanisme dès lors que la description des moyens mis en œuvre dans le cadre de la démolition est insuffisante ;

- le dossier de demande de permis initial ne contenait pas l'ensemble des éléments exigés par les dispositions des articles R. 431-7, R. 431-8, R. 431-9, R. 431-10 d), R. 431-16 du code de l'urbanisme ;

- le projet méconnaît l'article L. 161-4 du code de l'urbanisme et le règlement de la zone N de la carte communale en ce que le projet ne s'inscrit pas dans les exceptions admises ;

- le projet méconnaît l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme dès lors que la construction projetée porte atteinte à l'intérêt des lieux avoisinants notamment du fait de la création de nouvelles ouvertures et l'utilisation de menuiseries gris aluminium ;

- les écritures et pièces produites pour la commune de Balanzac doivent être regardées comme irrecevables en ce que le mémoire en défense produit le 9 novembre 2020 ne comporte aucune indication quant à la personne représentant la commune de Balanzac devant la Cour de céans ; il n'est pas établi que la délibération habilitant le maire à ester en justice a fait l'objet d'une publication et d'une transmission au service du contrôle de légalité ;

- le permis de construire initial ne présente pas un caractère exécutoire en ce qu'il ne mentionne pas la date à laquelle il a été transmis en préfecture ;

- le permis modificatif du 20 janvier 2020 a été délivré sur la base d'un dossier incomplet dès lors que ce dossier ne comportait pas la production du dossier initial ;

- la demande modificative (permis du 20 janvier 2020) était irrecevable en ce que, d'une part, en méconnaissance de l'article L. 431-1 du code de l'urbanisme, elle n'était pas signée d'un architecte et que d'autre part, il existe une discordance entre l'identité du demandeur (M. B... D...) et le signataire de la demande (Madame H... A..., son épouse) ;

- le permis de construire modificatif du 3 mai 2021 a été délivré sur la base d'une demande non signée, en méconnaissance de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme ;

- le permis de construire modificatif du 3 mai 2021 comporte d'importantes imprécisions et contradictions ;

- le permis de construire modificatif du 3 mai 2021 est entaché d'incompétence de son auteur car le maire est intéressé au projet ;

- l'autorité compétente ne pouvait pas délivrer ce permis modificatif puisque les travaux résultant du permis primitif ont été complètement exécutés ;

- le permis de construire modificatif du 3 mai 2021 méconnaît les dispositions de la carte communale ;

Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 novembre 2020, 18 mai 2021, 24 juin 2021 et 4 novembre 2021, la commune de Balanzac, représentée par la SCP KPL Avocats conclut au rejet de la requête et à la mise à charge de M. C... I... et de la SCI le Château de Balanzac d'une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens nouveaux soulevés en appel sont irrecevables et subsidiairement non fondés, et que les autres moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 janvier 2021, 18 mai 2021, 28 juin 2021, 4 novembre 2021, 9 février 2022 et 9 juin 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la SCI D... Immo, représentée par Maîtres Verger et Finkelstein, conclut au rejet de la requête et à la mise à charge de M. C... I... et de la SCI le Château de Balanzac d'une somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens nouveaux soulevés en appel les 14 mars et 18 mai 2021 sont irrecevables et subsidiairement non fondés, et que les autres moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 5 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 9 juin 2022 à 12 heures.

II/ Par une requête n° 21BX03379, enregistrée le 2 août 2021, et des mémoires enregistrés les 25 août 2022 et 29 septembre 2022 M. C... I... et la SCI le Château de Balanzac, représentés par Me Leriche-Milliet, demandent à la cour :

1)° d'annuler le permis de construire modificatif n° PC 017 030 18 S0001 M03 accordé par le maire de Balanzac à la SCI D... Immo le 6 mai 2021, pour la création d'un logement et d'une dépendance, sur le terrain sis Château de Balanzac à Balanzac (17600), parcelles 30 D 553, 30 D 555, 30 D 557 et 30 D 588 ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Balanzac et de la SCI D... Immo la somme globale de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils justifient d'un intérêt à agir ;

- les dispositions de l'article L. 600-5-2 n'ont pas été respectées dès lors que le permis de construire modificatif délivré le 6 mai 2021 ne leur pas été communiqué dans le cadre de l'instance relative au permis initialement délivré le 28 avril 2018 et à son modificatif du 20 janvier 2020 ;

- le dossier de demande de permis de construire contient d'importantes imprécisions et contradictions qui ne permettaient pas à l'autorité compétente d'apprécier la consistance exacte du projet ;

- le permis est entaché d'incompétence de son auteur car le maire de la commune est intéressé au projet ;

- le projet méconnaît la carte communale ;

- les écritures et pièces produites pour la commune de Balanzac doivent être regardées comme irrecevables en ce que le maire est personnellement intéressé par la délivrance du permis :

- ses conclusions ne sont pas entachées d'irrecevabilité car l'arrêté en date du 6 mai 2021 ne peut être regardé comme étant " purement confirmatif " de celui en date du 3 mai 2021 ;

- l'annulation du permis modificatif du 6 mai 2021 doit être prononcée par voie de conséquence de l'annulation du permis de construire initial ;

- la SCI D... Immo ne disposait pas de titre l'habilitant à construire sur la parcelle litigieuse ;

- la délivrance d'un permis modificatif étant subordonnée au non-achèvement des travaux, objets du permis primitif, le pétitionnaire devait déposer une demande d'autorisation d'urbanisme portant sur l'ensemble du bâtiment.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2022, la commune de Balanzac, représentée par la SCP KPL Avocats conclut au rejet de la requête et à la mise à charge de M. C... I... et de la SCI le Château de Balanzac d'une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir :

- que la requête est irrecevable soit en ce qu'elle est dirigée contre un arrêté en date du 6 mai 2021 purement confirmatif d'un premier arrêté du 3 mai 2021, soit en ce qu'elle est dirigée contre l'arrêté du 3 mai 2021 sans avoir fait l'objet d'une contestation directe devant la cour administrative de Bordeaux en application de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme.

- que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2022, la SCI D... Immo, représentée par Maîtres Verger et Finkelstein, conclut au rejet de la requête et à la mise à charge de M. C... I... et de la SCI le Château de Balanzac d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 15 septembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 30 septembre 2022 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... F...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique,

- les observations de Me Kolenc-Le Bloch, représentant la commune de Balanzac,

- et les observations de Me Perotin, représentant la SCI D... Immo.

1. La SCI D... Immo, propriétaire d'une parcelle cadastrée D 555 située 14 rue de l'Eglise à Balanzac, sur laquelle se trouvent des bâtiments agricoles, a demandé le 2 janvier 2018, la délivrance d'un permis de construire valant autorisation de démolir en vue de la création de deux logements, la réhabilitation d'un logement et la démolition d'un hangar métallique. Par un arrêté du 28 avril 2018, le maire de la commune de Balanzac a délivré le permis de construire valant autorisation de démolir en l'assortissant de prescriptions. Par un jugement du 19 septembre 2019, le tribunal a décidé, après avoir écarté tous les autres moyens, de surseoir à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sur la requête de M. I... et de la SCI le Château de Balanzac tendant à l'annulation de cet arrêté et d'accorder à la SCI D... Immo un délai de trois mois pour obtenir un permis modificatif régularisant le vice d'incompétence et la méconnaissance de l'article R. 451-4 du code de l'urbanisme. Le 22 janvier 2020, la SCI D... Immo a produit le permis modificatif délivré le 20 janvier 2020. M. I... et la SCI le Château de Balanzac ont demandé l'annulation de ce permis modificatif. Par un jugement du 19 mars 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande. M. I... et la SCI le Château de Balanzac relèvent appel des jugements du tribunal administratif de Poitiers des 19 septembre 2019 et 19 mars 2020 et demandent l'annulation des arrêtés municipaux du 28 avril 2018 et du 20 janvier 2020. Ils demandent également, sur le fondement de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme, l'annulation des arrêtés de permis de construire modificatifs accordés par le maire de Balanzac à la SCI D... Immo les 3 et 6 mai 2021.

Sur la jonction :

2. Les requêtes nos 20BX01740 et 21BX03379 concernent une même opération immobilière et présentent à juger des questions semblables. Il y a lieu, par suite, de joindre ces deux requêtes afin qu'il y soit statué par un seul arrêt.

Sur la recevabilité des écritures de la commune de Balanzac sous le n° 20BX01740 :

3. Aux termes de l'article L.2131-2 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage [...] ".

4. Il ressort des pièces du dossier que le mémoire en défense produit le 9 novembre 2020 porte la mention de ce que la commune de Balanzac est légalement représentée par son maire en exercice. La commune produit également une délibération de son conseil municipal en date du 8 juin 2020 habilitant son maire à la défendre en justice, comportant l'indication que ce document a fait l'objet d'un affichage en mairie du 11 juin 2020 au 10 juillet 2020 et un tampon de la préfecture de la Charente-Maritime attestant de la transmission de cette délibération au service chargé du contrôle de légalité le 9 juin 2020. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le mémoire en défense et les autres pièces produites par la commune sont irrecevables.

Sur la régularité du jugement n° 1801493 du 19 mars 2020 :

5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-2 à R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. ". Il résulte de ces dispositions, destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction, que la méconnaissance de l'obligation de communiquer tout mémoire contenant des éléments nouveaux est en principe de nature à entacher la procédure d'irrégularité. Il n'en va autrement que dans le cas où il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, cette méconnaissance n'a pu préjudicier aux droits des parties.

6. Il ressort des pièces du dossier que le mémoire de M. I... et de la SCI le Château de Balanzac, enregistré le 1er mars 2020 au greffe du tribunal administratif de Poitiers et qui contenait des moyens nouveaux, n'a pas été communiqué aux parties défenderesses. Toutefois, le défaut de communication de ce mémoire n'affecte pas le respect du caractère contradictoire de la procédure à l'égard de M. I... et de la SCI le Château de Balanzac et ne saurait être utilement invoqué par eux. Par suite, le moyen doit être écarté.

7. En second lieu, aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier. ".

8. Le mémoire des requérants enregistré le 1er mars 2020 au greffe du tribunal administratif de Poitiers, avant la clôture de l'instruction, contenait un moyen, tenant au non-respect du délai de 3 mois imparti par le jugement avant dire-droit du 19 septembre 2019 pour permettre à la commune et au pétitionnaire de régulariser le permis initial en transmettant un permis modificatif auquel le tribunal n'a pas répondu. D'une part, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le tribunal n'a pas méconnu pas les dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme dès lors que par son jugement du 19 mars 2020 il n'a annulé aucun acte d'urbanisme. D'autre part, la circonstance que le permis de régularisation est intervenu après expiration du délai imparti par les premiers juges est sans influence sur sa légalité ainsi que sur la régularité du jugement, et le juge n'était donc pas tenu de répondre à ce moyen inopérant . Il suit de là que le moyen doit être écarté.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté de permis de construire initial délivré le 28 avril 2018 :

9. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-7 du code de l'urbanisme : " Sont joints à la demande de permis de construire : a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; ". Selon l'article R. 431-8 du même code : " Le projet architectural comprend une notice précisant : (...)2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : (...) b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ". L'article R. 431-9 du même code prévoit que : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier côté dans les trois dimensions. ". Enfin, l'article R. 431-10 du même code dispose que : " Le projet architectural comprend également :(...) c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse (...) ". La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des pièces exigées par le code de l'urbanisme ou bien que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou même inexistants, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où ces omissions, inexactitudes ou imprécisions entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la règlementation applicable.

10. D'une part, ainsi que l'a jugé le tribunal dont il y a lieu d'adopter les motifs " Le dossier de demande de permis de construire contenait un plan de situation du projet ainsi qu'un plan de masse côté dans les trois dimensions. La notice architecturale mentionnait, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la proximité du projet avec le château de Balanzac et contenait des documents graphiques permettant d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement. En outre, il ressort des pièces du dossier que l'existence de plusieurs notices architecturales est liée à la correction d'éléments présents dès la notice initiale. Ainsi, il n'apparaît pas que ces notices contiendraient des informations contradictoires. ". Si les requérants soutiennent que le tribunal n'a pas pris en compte les contradictions figurant dans les pièces du dossier de demande de permis de construire révélant l'existence de trois versions différentes de la notice architecturale, il ressort toutefois des visas de l'arrêté attaqué du 28 avril 2018 que la demande initiale de permis de construire a été présentée le 2 janvier 2018 et qu'elle a été suivie de communications complémentaires en date des 13 et 23 mars 2018, ce qui explique que les pièces produites par la commune et notamment la notice architecturale, devant le tribunal, ne soient pas identiques. C'est par suite au vu d'un dossier complet que l'arrêté litigieux a été instruit et que l'architecte des bâtiments de France a émis son avis favorable.

11. D'autre part, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la notice architecturale respecte les dispositions précitées de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme, notamment en ce qui concerne le parti retenu et le traitement prévu des constructions, clôtures, végétations et aménagements pour assurer l'insertion du projet dans son environnement en ce qu'elle précise notamment que les linteaux et les tableaux seront en pierres de taille, que les ouvertures à l'étage sont modifiées pour reprendre le format charentais, que tous les encadrements des ouvertures sont en pierre de taille, que la couverture est composée de tuiles canales, que les zingueries seront restaurées, que chaque logement aura un jardinet privatif façades Est et Ouest, que la zone commune entre les logements, située en façade Est, est d'une surface de 300 m² et sera stabilisée et engazonnée afin de recevoir les véhicules des locataires et que les clôtures des propriétés seront composées d'un grillage de 1,5 mètre de haut, fixées sur des poteaux en acacia.

12. Enfin, si comme le soutiennent les requérants, aucune photographie permettant de situer le terrain dans le paysage lointain n'a été jointe au dossier de demande de permis en méconnaissance de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme, cette insuffisance qui peut être compensée par d'autres pièces figurant au dossier, n'a en l'espèce pas été de nature à fausser l'appréciation portée par l'administration sur la conformité de la demande à la réglementation en vigueur dès lors qu'une photographie intégrée à la notice architecturale fait apparaître la proximité du château de Balanzac et des dépendances objets du permis de construire en litige et que le dossier comportait une vue aérienne de la parcelle, une photographie du château et des photographies faisant apparaître les constructions existantes sur le terrain d'assiette du projet.

13. Le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de demande de permis de construire doit donc être écarté.

14. En deuxième lieu, selon l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : d) Le document attestant de la conformité du projet d'installation d'assainissement non collectif au regard des prescriptions réglementaires, prévu au 1° du III de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales, dans le cas où le projet est accompagné de la réalisation ou de la réhabilitation d'une telle installation ; ".

15. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'arrêté de permis qui renvoie à cet avis dans ses prescriptions, qu'une attestation favorable du syndicat des eaux de la Charente-Maritime du 13 décembre 2017 selon laquelle l'assainissement individuel devait être réalisé conformément à l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales était jointe au dossier de demande de permis de construire de sorte que le moyen tiré de son absence, qui n'est étayé par aucun élément, manque en fait et doit être écarté.

16. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 161-4 du code de l'urbanisme dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté : " La carte communale délimite les secteurs où les constructions sont autorisées et les secteurs où les constructions ne sont pas admises, à l'exception de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes ou des constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à l'exploitation agricole ou forestière et à la mise en valeur des ressources naturelles " et aux termes de l'article R. 161-4 du même dans sa rédaction applicable " Le ou les documents graphiques délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et ceux où les constructions ne peuvent pas être autorisées, à l'exception : 1° De l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes ; 2° Des constructions et installations nécessaires : a) A des équipements collectifs ou à des services publics si elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole ou pastorale ou forestière dans l'unité foncière où elles sont implantées et ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysage ; ) A l'exploitation agricole ou forestière ; c) A la mise en valeur des ressources naturelles. ".

17. Le rapport de présentation de la carte communale de la commune de Balanzac adoptée le 6 avril 2006 prévoit que : " La zone N regroupe les espaces naturels ou assimilables, d'intérêts agricole, forestier, écologique ou paysager, dont la vocation doit être sauvegardée. Elle englobe certains ensembles bâtis existants à caractère rural qui n'ont pas vocation à s'étoffer (..). L'inconstructibilité dans cette zone est le principe général qui ne souffre que certaines exceptions, par nature (directement liées à l'activité agricole) ou par nécessité (localisation impérative et intérêt collectif) ". Ce même rapport indique que " l'aménagement, la surélévation ou l'extension mesurée des constructions existantes incompatibles par destination avec la vocation de la zone, sont tolérées si elles ne dénaturent pas cette destination initiale " et que " un bâtiment désaffecté, agricole ou non, pourra être aménagé en logement à condition que sa valeur patrimoniale ou architecturale soit reconnue et que l'aménagement final soit compatible avec les valeurs patrimoniales et architecturales locales " et précise qu'une résidence peut être étendue de façon modérée qu'il s'agisse d'une résidence principale ou secondaire.

18. D'une part, il ressort de la demande de permis de construire, et notamment des photographies et plans y figurant que le projet litigieux a pour objet de réhabiliter un logement et de créer deux logements dans un bâtiment d'un seul tenant ayant appartenu aux dépendances du château de Balanzac. L'acte de donation partage établi le 26 septembre 1991, produit par les requérants indique néanmoins que la parcelle cadastrée section D n° 555 supporte un immeuble d'un seul tenant comprenant seulement une grande remise, un petit hangar en bois et une petite construction à usage d'atelier, alors cependant que le compromis de vente du 11 septembre 2017, produit par les défendeurs, mentionne l'existence d'un ensemble immobilier comprenant une habitation et attenants, une étable, des greniers, un hangar, un atelier et un autre hangar. Toutefois, à supposer même que le projet litigieux emporte un changement de destination, les dispositions précitées de l'article L. 161-4 du code de l'urbanisme éclairées par les dispositions de l'article R. 161-4 du même code n'interdisent pas, contrairement à ce que soutiennent les requérants, un tel changement si ce n'est pour les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs lesquelles doivent alors rester compatibles avec l'exercice d'une activité agricole et ne pas porter atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. Enfin, il ressort des pièces du dossier que l'aménagement de trois logements à vocation locative à l'intérieur d'un bâtiment existant sans modification de son volume ne modifie pas le rapport de compatibilité jusqu'alors existant avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées. Ce projet ne dénature pas davantage la destination initiale du bâtiment. Ainsi, c'est sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation que le maire de Balanzac a pu délivrer le permis contesté.

19. D'autre part, le rapport de présentation précité de la carte communale autorise également l'extension mesurée des constructions même incompatibles par destination avec la vocation de la zone, si elles ne dénaturent pas la destination initiale, ainsi que l'aménagement d'un bâtiment à usage d'habitation. Si les requérants font valoir que ce rapport de présentation a la valeur d'un règlement de zone car il mentionne " Cependant pour les zones N et U il y a un règlement spécifique ... ", il ne ressort toutefois pas de ce document qu'il contienne un règlement de la zone N alors d'ailleurs qu'aux termes même des dispositions de l'article L. 161-1 du code de l'urbanisme " La carte communale comprend [seulement] un rapport de présentation et un ou plusieurs documents graphiques. ". En tout état de cause, la circonstance que ce document indique qu' " Un bâtiment désaffecté, agricole ou non, pourra être aménagé en logement [...] " ne limite pas la transformation d'un bâtiment à un seul logement.

20. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ".

21. Il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales, l'autorité administrative compétente doit refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel ou urbain de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel ou urbain sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

22. Si le projet est situé à proximité immédiate du château de Balanzac lequel est classé au titre des monuments historiques et présente une perspective monumentale, il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment de la notice architecturale et des photographies jointes au dossier de demande, que le projet n'a pas pour effet de modifier l'implantation du bâtiment existant ou de créer de volume supplémentaire. De même, sur la façade ouest, donnant sur le château de Balanzac, seules deux fenêtres doivent être créées, en plus des cinq déjà existantes, tout en recréant une façade type des fermes charentaises avec des ouvertures en pierres de taille et des volets en bois respectant l'architecture et l'harmonie des lieux contrairement à ce que mentionne le rapport du président de La demeure historique du 4 décembre 2020 produit par les requérants selon lequel le projet emporte un trouble aux perspectives paysagères. Enfin, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la réalisation des nouvelles ouvertures et des menuiseries de couleur " gris aluminium " et la forme des linteaux ne portent pas davantage atteinte à l'intérêt des lieux avoisinants alors, d'ailleurs, que l'architecte des bâtiments de France a émis un avis favorable au projet le 6 avril 2018 assorti d'une prescription relative à l'enduit des façades à la chaux avec du sable coloré. L'argumentation relative aux travaux effectivement réalisés par les pétitionnaires sur le terrain est, pour sa part, inopérante au soutien de conclusions dirigées contre un permis de construire dont la légalité s'apprécie à la date de son édiction. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation entachant l'autorisation délivrée au regard de l'atteinte aux lieux avoisinants et aux paysages doit être écarté.

23. En dernier lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 600- 5 du code de l'urbanisme, " Par dérogation à l'article R 611-7-1 du code de justice administrative et sans préjudice de l'application de l'article R 600-13 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation des sols régie par le présent code ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyen nouveau passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense... ".

24. En application de ces dispositions, et dès lors que la commune de Balanzac a déposé, le 9 novembre 2020 un mémoire en défense dans l'instance enregistrée sous le n° 20BX01740, communiqué aux parties le lendemain, les nouveaux moyens soulevés par les requérants à compter du 10 janvier 2021 sont irrecevables. Il en va ainsi du moyen tiré de ce que le permis initial ne présente pas de caractère exécutoire soulevé dans un mémoire enregistré le 14 mars 2021

Sur les conclusions dirigées contre le permis de construire modificatif du 20 janvier 2020 :

25. En premier lieu, aux termes de l'article L. 422-7 du code de l'urbanisme : " Si le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est intéressé au projet faisant l'objet de la demande de permis ou de la déclaration préalable, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour prendre la décision ".

26. Si le maire est, en vertu de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme, compétent pour délivrer une autorisation d'urbanisme, il n'en va pas de même en application de l'article L. 422-7 du même code lorsqu'il peut être légitimement regardé comme intéressé au projet devant faire l'objet de l'autorisation.

27. Il ressort des pièces du dossier qu'à supposer même que l'attestation produite par les requérants et délivrée par le gérant d'une entreprise agricole soit de nature à démontrer que M. G... D..., maire de la commune et signataire de ce permis modificatif est l'oncle de M. B... D..., co-gérant avec son épouse, Madame A..., élue sur la liste du maire en 2014,de la SCI D... Immo, bénéficiaire du permis, cette circonstance n'est pas de nature à révéler, que le maire de la commune était intéressé au projet devant faire l'objet de l'autorisation. Il en va de même des circonstances que le maire est le gérant de la SCI Le Pré Muret, propriétaire du bâtiment voisin de celui en litige et d'une partie du chemin d'accès aux deux propriétés dès lors que le projet en litige est distinct de celui réalisé par la SCI le Pré Muret. Si les requérants se prévalent de l'attestation du syndicat des eaux de la Charente-Maritime selon laquelle le maire a rencontré son représentant lors de la visite de contrôle et du fait que lors du conseil municipal, auquel ont participé conjointement le maire et Mme A..., une nouvelle numérotation ait été attribuée à la parcelle en litige suite à son démembrement, de telles circonstances ne sont pas davantage de nature à démontrer que le maire était intéressé au projet. Pour les mêmes motifs, la décision attaquée n'est pas entachée d'un détournement de pouvoir. Par suite, c'est à juste titre que le tribunal a considéré que le permis de construire modificatif en date du 20 juin 2020 avait régularisé le vice d'incompétence du permis initial.

28. En deuxième lieu, l'article R. 451-4 du code de l'urbanisme dispose que : " Lorsque l'immeuble est situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques, le dossier joint à la demande comprend en outre la description des moyens mis en œuvre dans la démolition pour éviter toute atteinte au patrimoine protégé ".

29. Il ressort des pièces du dossier que le formulaire de demande de permis construire modificatif contient en annexe la description des moyens qui seront mis en œuvre dans le cadre de la démolition conformément à l'article R. 451-4 du code de l'urbanisme et notamment une notice expliquant qu'il convient " Avant de réaliser les démolitions, [d'] assurer une protection des éléments architecturaux (entourage pierre, moulurations, etc...) Pour la réalisation des remaniements de toiture, assurer la dépose des tuiles existantes avec soin, pour le réemploi des tuiles en chapeaux. Ces tuiles seront nettoyées, brossées et reposées avec une pose assurant une harmonie de teinte dans la toiture remaniée. ", ainsi que des photographies des façades et toitures de celui-ci. En outre, compte tenu de ce que la nature et la localisation du hangar métallique sans mur dont la démolition était projetée ne nécessitent l'intervention d'aucun matériel lourd, le descriptif de la demande n'avait pas à comporter de détails sur les moyens de démolition retenus. Enfin, le dossier de demande de ce permis modificatif du 20 janvier 2020 n'avait pas à comporter le dossier initial dont le service instructeur avait déjà été destinataire. Par suite, c'est à juste titre que le tribunal a considéré que le permis modificatif du 20 janvier 2020 régularisait le vice de procédure entachant le permis de construire initial.

30. En troisième lieu, s'il appartient au juge ayant sursis à statuer pour permettre la régularisation d'un ou plusieurs vices de constater, le cas échéant, que celle-ci n'a pas été effectuée à la date à laquelle il statue de nouveau, postérieurement à l'expiration du délai prescrit par le jugement avant dire droit, et d'annuler en conséquence le permis initial, la seule circonstance que le permis de construire modificatif n'ait pas été délivré dans ce délai n'est pas de nature en elle-même à l'entacher d'irrégularité ou à faire obstacle à la régularisation du vice constaté dans le jugement avant dire droit. Par suite, si par un jugement avant-dire droit du 19 septembre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a décidé de surseoir à statuer sur la demande d'annulation du permis de construire délivré le 28 avril 2018, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme afin de régulariser le vice d'incompétence du signataire et la méconnaissance de l'article R. 451-4 du code de l'urbanisme, la circonstance que le délai de trois mois dans lequel le permis de construire modificatif aurait dû être notifié au tribunal n'a pas été respecté, n'est pas de nature à entacher d'irrégularité le permis modificatif du 20 janvier 2020.

31. En quatrième lieu, aux termes des dispositions de l'article R. 600- 5 du code de l'urbanisme, " Par dérogation à l'article R 611-7-1 du code de justice administrative et sans préjudice de l'application de l'article R 600-13 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation des sols régie par le présent code ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyen nouveau passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense ... ".

32. En application de ces dispositions, et dès lors que la commune de Balanzac a déposé, le 9 novembre 2020, un mémoire en défense dans l'instance enregistrée sous le n° 20BX01740, communiqué aux parties le lendemain, les nouveaux moyens soulevés par les requérants à compter du 10 janvier 2021 sont irrecevables. Il en va ainsi des moyens tirés de ce qu'en méconnaissance de l'article L. 431-1 du code de l'urbanisme la demande de permis de construire modificatif n'a pas été signée par un architecte et de ce qu'il existe une discordance entre l'identité du demandeur (M. B... D...) et le signataire de la demande (Madame H... A..., son épouse) et de ce que la demande de permis modificatif n'a pas été signée en méconnaissance de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme.

Sur les conclusions dirigées contre le jugement avant dire-droit en tant qu'il prononce un sursis à statuer :

33. Lorsqu'un tribunal administratif, après avoir écarté comme non fondés des moyens de la requête, a cependant retenu l'existence de vices entachant la légalité du permis de construire, de démolir ou d'aménager dont l'annulation lui était demandée et a alors décidé de surseoir à statuer en faisant usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour inviter l'administration à régulariser ce vice, l'auteur du recours formé contre ce jugement avant dire droit peut contester le jugement en tant qu'il a écarté comme non-fondés les moyens dirigés contre l'autorisation initiale d'urbanisme et également en tant qu'il a fait application de ces dispositions de l'article L. 600-5-1. Toutefois, à compter de la délivrance du permis modificatif en vue de régulariser le vice relevé, dans le cadre du sursis à statuer prononcé par le jugement avant dire droit, les conclusions dirigées contre ce jugement en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme sont privées d'objet.

34. Il résulte du présent arrêt qu'un permis de construire modificatif a été délivré le 20 janvier 2020 par le maire de la commune de Balanzac. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 23 mai 2019 en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Sur les conclusions dirigées contre les permis de construire modificatifs en date des 3 et 6 mai 2021 :

En ce qui concerne l'arrêté du 6 mai 2021 :

35. D'une part, il résulte des énonciations du point 27 du présent arrêt que les écritures et pièces produites pour la commune de Balanzac sont recevables en ce que son représentant, le maire, n'est pas personnellement intéressé par la délivrance du permis de construire modificatif.

36. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 3 mai 2021, le maire de la commune de Balanzac a délivré à la SCI D... Immo un permis de construire modificatif à la suite de la demande formulée par cette société le 26 novembre 2020. Il ressort également des pièces du dossier que le maire de la commune de Balanzac a délivré à la SCI D... Immo un permis de construire modificatif identique le 6 mai 2021. Dans ces conditions, l'arrêté du 6 mai 2021 qui ne produit aucun effet juridique présente un caractère superfétatoire. Dès lors, la fin de non-recevoir soulevée par la commune de Balanzac tirée de l'irrecevabilité des conclusions des requérants dirigées contre cet arrêté du 6 mai 2021 doit être accueillie.

En ce qui concerne l'arrêté du 3 mai 2021 :

37. En premier lieu, les requérants soutiennent que l'autorité compétente ne pouvait pas délivrer ce permis de construire modificatif car les travaux résultant du permis primitif ont été complètement exécutés. Il ressort des pièces du dossier et notamment des photographies datées que dès le mois de juin 2020, les trois logements créés dans le chai étaient occupés et que les travaux étaient donc achevés. Il en résulte que par l'arrêté du 3 mai 2021 le maire a délivré à la SCI D... non un permis de construire modificatif mais un nouveau permis. Toutefois la circonstance que l'intitulé de cette autorisation soit erroné n'est pas, à elle seule, de nature à démontrer l'illégalité de ce permis de construire.

38. En deuxième lieu, aux termes de de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire précise : a) L'identité du ou des demandeurs, qui comprend son numéro SIRET lorsqu'il s'agit d'une personne morale en bénéficiant et sa date de naissance lorsqu'il s'agit d'une personne physique ; [...] La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R*423-1 pour déposer une demande de permis. " et aux termes de l'article R. 423-1 du même code : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés :a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ;b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs coindivisaires ou leur mandataire ;c) Soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation pour cause d'utilité publique. ".

39. Il ressort du formulaire de demande de permis de construire modificatif qu'il a été signé par l'architecte et respecte donc les conditions de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme contrairement à ce que soutiennent les requérants.

40. En troisième lieu, le moyen tiré de ce que la décision attaquée méconnaît les dispositions du h) de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme selon lesquelles le demandeur doit préciser " Les éléments, fixés par arrêté, nécessaires au calcul des impositions " n'est pas assorti des précisions suffisantes. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que le document intitulé " déclaration des éléments nécessaires au calcul des impositions en cas de modification d'un permis délivré en cours de validité " était annexé à la demande de permis de construire.

41. En quatrième lieu, les appelants soutiennent que le dossier de demande de permis de construire " modificatif " comporte des imprécisions et contradictions qui ont été de nature à fausser l'appréciation de l'administration sur la consistance du projet. Il ressort toutefois des pièces du dossier de demande de permis de construire que le projet vise à créer un quatrième logement dans le grenier existant accessible à partir d'un escalier et à créer une dépendance ouverte dont la localisation et la surface de, respectivement, 11 m2 et 56 m2 figurent dans le dossier de demande que ce soit dans le document graphique ou dans la notice descriptive. En outre, si ne figure pas dans le formulaire le numéro de la parcelle cadastrée section D n° 555 dans le cadre " 4 - Le terrain ", cette omission est compensée et corrigée par la mention sur le plan n° PC07 de la nouvelle numérotation cadastrale concernant le terrain d'assiette du projet en question et qui a procédé au regroupement des différentes parcelles précitées avec les parcelles désormais cadastrées section D n° 631 à 639. Enfin, une étude d'assainissement individuel a bien été annexée à la demande de permis de construire et le cadre 9-2 du formulaire de demande qui n'avait pas été rempli lors du projet de demande, a bien été rempli lors du dépôt du formulaire auprès de l'administration. Le moyen sera donc écarté.

42. En cinquième lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 26 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que le permis de construire du 3 mai 2021 est entaché d'incompétence de son auteur et de détournement de pouvoir doit être écarté.

43. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés aux points 18 et 19 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que le permis de construire du 3 mai 2021 méconnaît les dispositions de la carte communale doit être écarté.

44. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il besoin d'examiner les autres fins de non-recevoir, ni de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la démarche initiée par les appelants devant le procureur de la République, tendant à être autorisés à solliciter la copie intégrale des actes de naissance de Messieurs Dominique et Damien D..., sur le fondement de l'article 30, dernier alinéa, du décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 relatif à l'état civil, que M. I... et la SCI le Château de Balanzac ne sont fondés à soutenir ni que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leurs demandes ni à demander l'annulation des arrêtés du 3 et du 6 mai 2021.

Sur les frais liés au litige :

45. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Balanzac et de la SCI D... Immo, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme dont M. I... et la SCI le Château de Balanzac demandent le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. I... et de la SCI le Château de Balanzac le versement à la commune de Balanzac et à la SCI D... Immo d'une somme de 1 500 euros chacune au titre des frais d'instance en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. C... I... et de la SCI le Château de Balanzac dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 19 septembre 2019 en tant qu'il met en œuvre l'article L 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. C... I... et de la SCI le Château de Balanzac est rejeté.

Article 3 : M. C... I... et la SCI le Château de Balanzac verseront à la commune de Balanzac et à la SCI D... Immo une somme de 1 500 euros chacune au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... I..., à la SCI le Château de Balanzac, à la commune de Balanzac et à la SCI D... Immo.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

M. Nicolas Normand, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2022.

Le rapporteur,

Nicolas F...

La présidente,

Evelyne Balzamo

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX01740, 21BX03379


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX01740
Date de la décision : 09/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Nicolas NORMAND
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SCP PIELBERG KOLENC

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-11-09;20bx01740 ?
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