Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision notifiée le 1er décembre 2016 par laquelle le directeur de l'Agence de services et de paiement a classé le poste qu'il occupe dans le groupe de fonctions 3 du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel au sein de l'établissement, ensemble le rejet, le 17 mars 2017, de son recours gracieux.
Par un jugement n° 1700704 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Limoges a fait droit à cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 janvier 2020, l'Agence de services et de paiement (ASP), représentée par Me Gillet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 5 décembre 2019 ;
2°) à titre subsidiaire, de rejeter les demandes présentées par M. A... en première instance et en appel.
Il soutient que :
- il justifie de la date de publication de la décision n° 2016/201/PDG du 19 octobre 2016 sur le fondement de laquelle a été prise la décision du 1er décembre 2016 ;
- le recours contentieux de M. A... était tardif ;
- il a reclassé à bon droit M. A... dans le groupe de fonction n°3.
Par un mémoire enregistré le 25 août 2020, M. A... représenté par Me Toulouse, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à l'ASP de prendre de nouvelles décisions relatives à la mise en place du régime indemnitaire tenant compte de ses fonctions, sujétions, de son expertise et de son engagement professionnel pour la période du 1er janvier 2016 au 31 août 2019, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 200 euros par jour de retard, enfin à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de l'ASP au titre des frais exposés pour l'instance.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés et que l'ASP n'a pas donné suite à l'injonction de réexamen que lui a fait le tribunal administratif.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n°87-602 du 30 juillet 1987 ;
- le code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique,
- et les observations de Me Gillet, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1 M. A..., attaché principal d'administration du ministère en charge de l'agriculture, exerce depuis le 1er juin 2014 des fonctions de chargé de mission auprès du chef de service des contrôles de l'agence comptable de l'Agence de services et de paiement (ASP). Par une décision notifiée le 1er décembre 2016, avec effet rétroactif au 1er janvier de la même année, le directeur de l'ASP a notifié à M. A... son classement dans le groupe de fonctions n° 3 du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP). Le recours gracieux formé par l'intéressé a été rejeté par une décision du 17 mars 2017. L'ASP relève appel du jugement du 5 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé les décisions des 1er décembre 2016 et 17 mars 2017.
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. ". L'article R. 421-5 du même code précise que : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ". Enfin, en application des dispositions de l'article R. 421-2 de ce code : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. Toutefois, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient avant l'expiration de cette période, elle fait à nouveau courir le délai de recours. ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a formé un recours gracieux contre la décision qui lui avait été notifiée le 1er décembre 2016 et que l'ASP en a accusé réception le 26 décembre 2016. L'Agence soutient qu'en application des dispositions précitées de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, M. A... disposait d'un délai de deux mois pour saisir le tribunal administratif à compter du rejet implicite de ce recours, intervenu le 26 février 2017. Toutefois, l'ASP a explicitement rejeté ce recours gracieux le 17 mars 2017, en mentionnant, pour la première fois, les voies et délais de recours. Ainsi et contrairement aux allégations de l'ASP, l'intervention de cette décision explicite de rejet avant l'expiration du délai de recours ouvert contre la décision implicite qu'elle confirmait a fait courir un nouveau délai de recours de deux mois qui n'était pas expiré le 17 mai suivant, date à laquelle a été enregistrée la requête présentée par M. A... devant le tribunal administratif.
4. En second lieu, aucun principe général non plus qu'aucune règle ne s'oppose à ce que la publication d'une décision réglementaire régissant la situation des personnels d'un établissement public prenne la forme d'une mise en ligne de cette décision sur l'intranet de l'établissement. Toutefois, ce mode de publicité n'est susceptible d'être opposable aux intéressés qu'à la condition que l'information ainsi diffusée puisse être regardée, compte tenu notamment de sa durée et de sa fiabilité, comme suffisante.
5. En l'occurrence, pour justifier que la décision n° 2016/201/PDG du 19 octobre 2016 sur le fondement de laquelle a été prise la décision du 1er décembre 2016 avait été publiée à cette date sur l'intranet de l'ASP et était par suite opposable à M. A..., l'ASP a produit, d'une part, un document présenté comme une copie d'écran et mentionnant une publication de cette décision sur l'intranet le 15 novembre 2016. Elle produit, d'autre part, un constat d'huissier réalisé le 29 janvier 2020, dont il ressort qu'à cette date, l'intranet de l'ASP indiquait que cette même décision aurait été mise en ligne dès le 18 ou le 19 octobre 2016 alors, pourtant, qu'elle comporte un visa manuscrit du contrôleur budgétaire de l'ASP daté du 27 octobre suivant. Ainsi, les documents dont entend se prévaloir l'ASP mentionnent des dates contradictoires et, s'agissant du second d'entre eux, nécessairement erronées. Elles ne peuvent, dès lors, être regardées comme présentant une valeur suffisamment probante pour justifier de la date de mise en ligne de la décision concernée, laquelle mise en ligne ne présente manifestement pas de garanties de fiabilité suffisantes pour valoir publication.
6. Il résulte de tout ce qui précède que l'ASP n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont considéré qu'elle n'établissait pas que la décision n° 2016/201/PDG du 19 octobre 2016 avait été régulièrement publiée avant le 1er décembre 2016, date à laquelle elle a notifiée à M. A... son classement dans le groupe de fonctions n° 3 du (RIFSEEP) et en ont déduit que ce classement était dépourvu de base légale. Par suite, la requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
7. En revanche, l'exécution de ce jugement attaqué comportait l'obligation de réexaminer la situation de M. A... au titre de l'année 2016 et dans un délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement. Il résulte de l'instruction qu'à la date du présent arrêt, l'ASP n'a pas procédé à ce réexamen. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prononcer contre l'ASP, à défaut pour elle de justifier de cette exécution dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, une astreinte de 100 euros par jour jusqu'à la date à laquelle le jugement aura reçu exécution.
8. En outre, il y a également lieu, dans les circonstances de l'espèce et en application des dispositions de l'article L. 761-1 du même code de mettre à la charge de l'ASP une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés pour l'instance par M. A....
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'ASP est rejetée.
Article 2 : Il est enjoint à l'ASP de prendre une nouvelle décision concernant le régime indemnitaire de M. A... au titre de l'année 2016 dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Article 3 : L'ASP versera à M. A... une somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'Agence de services et de paiement.
Délibéré après l'audience du 4 octobre à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 octobre 2022.
Le rapporteur,
Manuel C...
Le président,
Didier ArtusLa greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation ainsi qu'au ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion en ce qui les concernent et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°20BX00371 2