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27/09/2022 | FRANCE | N°22BX00801

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 27 septembre 2022, 22BX00801


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant un an.

Par un jugement n°2102230 du 1er février 2022, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.

Proc

édure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 mars 2022, Mme C..., représentée...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant un an.

Par un jugement n°2102230 du 1er février 2022, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 mars 2022, Mme C..., représentée par Me Bonneau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 1er février 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant un an ;

3°) d'enjoindre au préfet des Deux-Sèvres, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat et au bénéfice de son conseil la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le refus de séjour est insuffisamment motivé et n'a pas été précédé d'un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;

- ce refus a été pris en méconnaissance des articles L. 435-1 et L. 423-23 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision, ainsi que celles portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour, ont méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'arrêté est intervenu en méconnaissance des articles L. 432-13 et L. 432-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatifs à la saisine de la commission du titre de séjour ;

- la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire n'est pas motivée par référence aux critères justifiant l'édiction d'une telle décision et n'a pas été précédée d'un examen réel de sa situation personnelle ;

- cette décision est intervenue en méconnaissance des articles R. 613-3 et R. 613-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les informations prévues par ces dispositions ne lui ayant pas été délivrées ;

- cette décision a été édictée en méconnaissance du droit d'être entendue ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante arménienne née le 5 novembre 1987, déclare être entrée en France le 9 septembre 2017 avec son compagnon et leur fils mineur. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 21 février 2018, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 22 novembre 2018. Le 15 juin 2020, l'intéressée a sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Par un arrêté du 23 juillet 2021, le préfet des Deux-Sèvres a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays le et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Mme C... relève appel du jugement du 1er février 2022 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, à l'appui des moyens tirés de ce que la décision lui refusant le séjour et celle lui faisant interdiction de revenir sur le territoire national seraient insuffisamment motivées, que cette dernière décision serait intervenue en méconnaissance des articles R. 613-3 et R. 613-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que du droit d'être entendu et que l'arrêté litigieux n'aurait pas été précédé d'un examen de sa situation personnelle, l'appelante ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... réside en France avec son compagnon et leur fils, né en 2009, depuis septembre 2017 et qu'ils ont eu, ensemble, une fille née à Niort le 30 août 2019. Elle établit également qu'elle a suivi des cours de français, qu'elle a exercé une activité bénévole au sein d'une association humanitaire, qu'elle a noué des relations amicales et d'entraide et que la scolarité et l'intégration de son fils sont satisfaisantes. Par ailleurs, elle produit une promesse d'embauche datée du mois de septembre 2021 concernant son conjoint ainsi que plusieurs documents relatifs à des circonstances postérieures à l'arrêté litigieux. Toutefois, ces seuls éléments ne permettent pas d'établir qu'elle serait particulièrement bien intégrée dans la société française ou qu'elle y aurait tissé des liens privés, familiaux ou professionnels d'une particulière intensité alors qu'elle n'a été admise à y séjourner que le temps de l'examen de sa demande d'asile et s'est soustraite, tout comme son conjoint, à une précédente mesure d'éloignement. En outre, elle n'établit pas davantage ni même ne soutient être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente ans. Enfin, elle ne fait état d'aucun élément qui ferait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Arménie et à ce que ses enfants puissent y poursuivre leur scolarité. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse lui refusant le séjour aurait porté une atteinte excessive à son droit au respect de la vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que par les dispositions de l'article L. 423-23 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que cette décision aurait méconnu l'intérêt supérieur de ses enfants au sens des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. "

7. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 du présent arrêt que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que la décision lui refusant le séjour aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En cinquième lieu, il résulte de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la commission du titre de séjour instituée dans chaque département est saisie par l'autorité administrative, notamment, lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 423-2. Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à ces articles auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Par ailleurs, en vertu de l'article L. 435-1 du même code, l'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission du titre de séjour la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans. En l'espèce, compte tenu de ce qui a été dit au point 4, Mme C... n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code. Il est en outre constant qu'elle ne réside pas habituellement en France depuis plus de dix ans. Ainsi, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que le préfet des Deux-Sèvres était tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de se prononcer sur son droit au séjour.

9. Il résulte également de ce qui a été dit au point 4 que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire et interdiction d'y revenir pendant une durée d'un an auraient méconnu les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas davantage fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation l'arrêté du 23 juillet 2021. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Deux-Sèvres.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Mme Agnès Bourjol, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 septembre 2022.

Le rapporteur,

Manuel B...

La présidente,

Marie-Pierre Beuve DupuyLa greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et de Outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°22BX00801 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX00801
Date de la décision : 27/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BEUVE-DUPUY
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : BONNEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-09-27;22bx00801 ?
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