Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Stearinerie Dubois Fils A... a demandé au tribunal administratif de Limoges de prononcer, d'une part, la réduction de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2014, 2015 et 2016 dans les rôles de la commune de Ciron, à raison d'un établissement dénommé Scoury 1, d'autre part la décharge de la somme de 14 594 euros due au titre de la taxe sur les propriétés foncières bâties pour l'année 2016, à laquelle elle a été assujettie dans le rôle 2016 de la commune de Ciron, à raison d'un établissement dénommé Scoury 1 et enfin, à titre principal la décharge de la somme de 12 111 euros due au titre de la taxe sur les propriétés foncières bâties pour l'année 2017, à laquelle elle a été assujettie dans le rôle 2017 de la commune de Ciron, à raison d'un établissement dénommé Scoury 1, ou, à titre subsidiaire, la décharge partielle résultant de la diminution de la base imposable s'agissant du prix de revient des biens anti-pollution.
Par un jugement n° 1801440, 1801441, 1900278 du 28 décembre 2020, le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 9 février 2021, un mémoire enregistré le 12 octobre 2020 et des mémoires non communiqués enregistrés les 22 juin 2022 et 21 juillet 2022, la société Stearinerie Dubois Fils A..., représentée par Me Queyroux, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 28 décembre 2020 ;
2°) de prononcer la décharge de la cotisation foncière des entreprises au titre des années 2014, 2015 et 2016 mise à sa charge par les avis d'imposition supplémentaires n° 18 36 003225395, n° 18 36 0032251 97 et n° 18 36 0032252 96 en date du 30 avril 2018 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que dès lors que ne sont pas imposables en vertu de l'article 1382 11° du code général des impôts les biens d'équipement spécialisés, c'est-à-dire les immobilisations qui sont intégrées directement et matériellement dans le processus de fabrication, de transformation ou de manutention et servent spécifiquement à l'exercice de l'activité professionnelle, alors ses installations de sprinklage qui constituent des biens d'équipements spécialisés, qui relèvent de la règlementation des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) et qui sont exigés de son assureur et du code du travail, doivent être exclues de la base imposable à la cotisation foncière des entreprises ; le tribunal administratif de Limoges a commis une erreur de droit en procédant à une lecture erronée des dispositions de l'article 1382-11° telles qu'interprétées dernièrement par le Conseil d'État dans son arrêt n° 422418 du 11 décembre 2020 ; l'installation ne fait d'ailleurs pas corps avec le bâtiment ; la valeur locative cadastrale de l'établissement Scoury 1 ne saurait ainsi excéder le montant de 292 266 euros au titre de la CFE 2014, 304 174 euros au titre de la CFE 2015 et 314 098 euros au titre de la CFE 2016.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 3 août 2021 et 17 juin 2022, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B... C...,
- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société Stearinerie Dubois Fils A... a fait l'objet d'une vérification de comptabilité sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 à l'issue de de laquelle le service a relevé des discordances entre les immobilisations inscrites à l'actif de son bilan (comptes 211000 à 213800) et celles prises en compte pour l'établissement de la cotisation foncière des entreprises établie au titre des années 2014, 2015 et 2016. Par lettre modèle n° 751 du 6 juillet 2017, le service a rehaussé les bases de la valeur locative foncière en retenant un prix de revient total des biens passibles de taxe foncière de 6 361 694,14 euros, dont les biens liés au sprinklage pour un montant de 1 001 848,29 euros. Par une lettre du 27 juillet 2017, la société a contesté partiellement les rehaussements, estimant que le prix de revient de ses installations de sprinklage devait être exclu de la base d'imposition. La société Stearinerie Dubois Fils A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Limoges du 28 décembre 2020 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la réduction de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2014, 2015 et 2016.
2. Aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11°, 12° et 13° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle ". Aux termes de l'article 1600 du même code, dans sa rédaction applicable au litige: " Il est pourvu à une partie des dépenses des chambres de commerce et d'industrie de région ainsi qu'aux contributions allouées par ces dernières, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, aux chambres de commerce et d'industrie territoriales et à l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie au moyen d'une taxe pour frais de chambres constituée de deux contributions : une taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises et une taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. ". Aux termes de l'article 1601 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Une taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises est perçue au profit des chambres régionales de métiers et de l'artisanat ou des chambres de métiers et de l'artisanat de région et de l'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat. ".
3. Aux termes de l'article 1382 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : / (...) / 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés aux 1° et 2° de l'article 1381 ". Il résulte de ces dispositions que les biens mentionnés au 11° de l'article 1382 du code général des impôts sont ceux faisant partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499, qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement et qui ne sont pas au nombre des éléments mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381.
4. Il résulte de l'instruction que la société requérante exerce, dans son établissement Scoury 1, une activité industrielle de fabrication d'esters d'acide gras destinés aux secteurs cosmétique, pharmaceutique et alimentaire. Cette activité implique, notamment, l'utilisation d'alcool chauffé entre 50°C et 250°C ou d'alcool et d'acétate d'éthyle à 60°C, ainsi que le conditionnement de poudre ou pastilles avec utilisation d'isopropanol et stockage d'acides. Le recours, pour cette activité, à des procédés chimiques dont le point d'éclair de certains produits utilisés est parfois inférieur à 100 degrés, présente des risques particuliers en matière d'incendie. A ce titre, les installations de lutte contre l'incendie, dites " sprinklers ", déployés sous les toitures et plafonds des bâtiments et enserrés dans un réseau de canalisations, permettent de circonscrire, de manière automatique, par dispersion d'eau et, au droit de certaines installations par injection de produits mousseux au moyen d'émulseurs, un début d'incendie. Ces éléments, d'ailleurs coûteux, sont, dans leur ensemble, spécifiquement adaptés au processus industriel de la société requérante. Ces installations sont, au demeurant, indispensables à son activité en ce qu'elles sont exigées, au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement, tant par l'arrêté n° 97-E-2738 du 31 octobre 1997 autorisant la société à exploiter son activité, que par l'arrêté du 20 avril 2005 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées (rubrique 4331). L'assureur de la société exige d'ailleurs également l'installation de ces éléments de sécurité. La requérante est donc fondée à soutenir que ses installations de sprinklage sont spécifiquement adaptées à l'activité susceptible d'être exercée dans un établissement industriel et doivent être exclues de la base imposable à la cotisation foncière des entreprises.
5. Il résulte de ce qui précède, que la société Stearinerie Dubois Fils A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société Stearinerie Dubois Fils A... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 28 décembre 2020 est annulé.
Article 2 : La société Stearinerie Dubois Fils A... est déchargée des impositions supplémentaires de cotisation foncière des entreprises mises sa charge au titre des années 2014, 2015 et 2016 pour son établissement dénommé Scoury 1.
Article 3 : L'Etat versera à la société Stearinerie Dubois Fils A... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Stearinerie Dubois Fils A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscale sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 6 septembre 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzalmo, présidente,
M. Nicolas Normand premier conseiller,
M. Mickaël Kauffmann, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 septembre 2022.
Le rapporteur,
Nicolas C...
La présidente,
Evelyne Balzamo
Le greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX00468