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27/09/2022 | FRANCE | N°19BX04890

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 27 septembre 2022, 19BX04890


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Groupe Victoria a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2016 par lequel le maire de Gavarnie-Gèdre a constaté la péremption du permis de construire qui lui a été délivré le 16 septembre 2008 pour la création d'une résidence de tourisme.

Par un jugement n° 1700296 du 15 octobre 2019, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 dé

cembre 2019, la SARL Groupe Victoria, représentée par Me Achou-Lepage, demande à la cour :

1°) d'annul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée Groupe Victoria a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2016 par lequel le maire de Gavarnie-Gèdre a constaté la péremption du permis de construire qui lui a été délivré le 16 septembre 2008 pour la création d'une résidence de tourisme.

Par un jugement n° 1700296 du 15 octobre 2019, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2019, la SARL Groupe Victoria, représentée par Me Achou-Lepage, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 15 octobre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2016 par lequel le maire de la commune de Gavarnie-Gèdre a constaté la péremption du permis de construire du 16 septembre 2008 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Gavarnie-Gèdre la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont irrégulièrement procédé d'office à une substitution de motifs qui n'est pas d'ordre public en combinant les dispositions des articles R. 424-21, L. 145-3 et L. 145-10 du code de l'urbanisme alors que l'arrêté de refus de prorogation du permis de construire n'est pas fondé sur la combinaison de ces dispositions ;

- ils ont entaché leur jugement d'une erreur d'appréciation en considérant que l'arrêté de péremption du 20 septembre 2016 pouvait sans erreur de droit viser l'arrêté de refus de prorogation du 13 mars 2015 alors qu'un tel arrêté ne peut servir de base légale à l'arrêté de caducité de permis de construire; contrairement à ce qu'ils ont jugé c'est l'arrêté de refus de prorogation qui se fonde sur le fait que les travaux n'auraient pas été entrepris dans le délai imparti ;

- l'arrêté du 20 septembre 2016 est illégal compte tenu de l'illégalité de l'arrêté du 13 mars 2015 portant refus de prorogation de la validité du permis de construire au visa duquel il a été pris et avec lequel il constitue une opération complexe ; l'exception d'illégalité pouvait donc être invoquée à tout moment ;

- l'arrêté du 13 mars 2015 est illégal car il n'a pas été transmis au préfet au titre du contrôle de légalité de la préfecture des Hautes-Pyrénées en méconnaissance des dispositions de l'article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales ;

- il est entaché d'une erreur de droit et méconnaît les dispositions de l'article R. 424-21 et de l'article R. 424-22 du code de l'urbanisme dès lors que la commune ne pouvait valablement opposer la caducité de l'autorisation de l'unité touristique nouvelle qui ne constitue pas une évolution défavorable d'une prescription d'urbanisme ; l'arrêté autorisant l'implantation d'une UTN et l'arrêté autorisant la construction des hébergements touristiques constituent deux décisions distinctes et la validité de l'une n'est pas conditionnée par la validité de l'autre ; la commune ne pouvait donc opposer la caducité de l'UTN pour refuser de faire droit à la demande de prorogation de la validité du permis ;

- en édictant l'arrêté du 20 septembre 2016 constatant la péremption du permis de 2008 le maire tente de régulariser l'erreur de droit entachant l'arrêté du 13 mars 2015 en invoquant un motif tiré du fait que les travaux n'ont pas été entrepris dans le délai mais ce motif est pris en violation de l'article R. 424-1 du code de l'urbanisme qui limite le motif de refus de prorogation au seul cas d'évolution défavorable des prescriptions d'urbanisme et des servitudes administratives.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2020, la commune de Gavarnie-Gèdre, représentée par Me Izembard, conclut au rejet de la requête et à ce que la société Groupe Victoria soit condamnée à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 19 octobre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 décembre 2020 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... A...,

- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique,

- et les observations de Me Achou-Lepage, représentant la SARL groupe Victoria.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 14 mai 2007, le préfet des Hautes-Pyrénées a autorisé l'implantation d'une unité touristique nouvelle (UTN) pour la réalisation d'une résidence de tourisme au lieu-dit Barètge sur le territoire de la commune de Gavarnie. Par un arrêté du 16 septembre 2008, le maire de Gavarnie a délivré à la société Groupe Victoria un permis de construire pour la réalisation de cette résidence de tourisme. L'association Union Midi-Pyrénées nature environnement a formé des recours contre ces décisions qui ont été rejetés par le tribunal administratif de Pau et la cour administrative d'appel de Bordeaux et en dernier lieu, s'agissant du permis de construire, par une ordonnance de non-admission du pourvoi en cassation du 13 juin 2012 du conseil d'État. La société Groupe Victoria a déposé le 18 décembre 2014 une demande de prorogation du délai de validité de ce permis de construire que le maire de Gavarnie a rejetée par un arrêté du 13 mars 2015, au motif de la caducité le 9 décembre 2013 de l'autorisation d'implantation d'une unité touristique nouvelle. Par un arrêté du 20 septembre 2016, le maire de Gavarnie-Gèdre a constaté la péremption du même permis de construire. Par la présente requête, la société Groupe Victoria relève appel du jugement du 15 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté municipal du 20 septembre 2016.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort de ses termes mêmes que l'arrêté du 13 mars 2015 du maire de Gavarnie refusant la prorogation du permis de construire de la société Groupe Victoria est motivé, au visa de l'article R. 424-21 du code de l'urbanisme, par l'évolution défavorable des prescriptions d'urbanisme en raison de la caducité de l'autorisation d'implantation d'une unité touristique nouvelle intervenue le 9 décembre 2013. En réponse au moyen tiré de ce que la caducité de cette UTN ne constituait pas une évolution défavorable des dispositions d'urbanisme à l'égard du permis de construire, le tribunal, après avoir rappelé les dispositions des articles R. 424-21, L. 145-3 et L. 145-10 du code de l'urbanisme applicables aux zones de montagne, a énoncé que la caducité de l'autorisation d'implantation d'une UTN mettant fin à la possibilité de déroger à la règle de l'urbanisation en continuité des zones déjà construites prévue par l'article L. 145-3, constituait donc une évolution défavorable des prescriptions d'urbanisme au sens de l'article R. 424-21 du code de l'urbanisme. Ce faisant, les premiers juges n'ont fait que répondre au moyen soulevé par la société Groupe Victoria et n'ont pas procédé d'office à une substitution des motifs de la décision. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, l'arrêté du 20 septembre 2016 constatant la caducité du permis de construire du 16 septembre 2008 vise l'arrêté du 13 mars 2015 de refus de prorogation du permis de construire de 2008 ainsi que l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme relatif à la péremption du permis de construire. Contrairement à ce que soutient la requérante, la mention erronée figurant dans ses visas selon laquelle l'arrêté du 13 mars 2015 de refus de prorogation du permis de construire est fondé sur la circonstance que les travaux n'ont pas été entrepris dans le délai imparti, est sans influence sur la légalité de l'arrêté en litige qui n'a d'ailleurs pas été pris pour l'application de cet arrêté de 2015. La société ne peut par ailleurs utilement invoquer le moyen, qui ne ressort d'aucune pièce du dossier ni des mentions de l'arrêté en litige, tiré de ce que le maire aurait ainsi entendu rectifier le motif fondant l'arrêté de refus de prorogation du 13 mars 2015. Par suite, le moyen doit être écarté.

4. En deuxième lieu, la société Groupe Victoria invoque l'illégalité par voie d'exception de l'arrêté du 13 mars 2015 de refus de prorogation du permis de construire du 16 septembre 2008.

5. Toutefois, d'une part, l'arrêté en litige constatant la péremption du permis de construire de 2008 n'a pas été pris pour l'application de l'arrêté du 13 mars 2015, lequel n'a jamais été contesté et est devenu définitif, et ne constitue pas une opération complexe avec cet arrêté contrairement à ce qui est soutenu. La société Groupe Victoria ne peut donc utilement invoquer son illégalité.

6. D'autre part, et en tout état de cause, aux termes de l'article R. 424-21 du code de l'urbanisme applicable au présent litige : " Le permis de construire, d'aménager ou de démolir ou la décision de non-opposition à une déclaration préalable peut être prorogé pour une année, sur demande de son bénéficiaire si les prescriptions d'urbanisme et les servitudes administratives de tous ordres auxquelles est soumis le projet n'ont pas évolué de façon défavorable à son égard (...) ". Aux termes de l'article L. 145-3 du même code applicable au présent litige : " III- Sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées, l'urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants ". Aux termes de l'article L. 145-10 du même code applicable au présent litige : " A l'exception du III de l'article L. 145-3, les dispositions de la section première du présent chapitre et les dispositions du chapitre II du titre IV du livre III du code du tourisme sont applicables aux unités touristiques nouvelles ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la caducité en 2013, postérieurement à la délivrance le 16 septembre 2008 du permis de construire une résidence de tourisme, de l'autorisation d'implantation d'une unité touristique nouvelle à Gavarnie en vue de la réalisation de ce projet, a eu pour effet de mettre fin à l'inapplicabilité, au secteur concerné, des dispositions de l'article L. 145-3 précité relatives au principe de continuité de l'urbanisation et a ainsi constitué une évolution défavorable des prescriptions d'urbanisme applicables au projet au sens de l'article R. 424-21 précité, contrairement à ce qui est soutenu par la requérante.

7. Enfin, la société ne peut utilement invoquer le défaut de transmission de l'arrêté du 13 mars 2015 au préfet de département, qui à le supposer établi, n'affecte que le caractère exécutoire de cet arrêté et non sa légalité, et demeure sans incidence sur l'arrêté en litige.

8. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'arrêté du 13 mars 2015 doit être écarté en toutes ses branches.

9. Il résulte de tout ce qui précède, que la SARL Groupe Victoria n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 15 octobre 2019, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Gavarnie-Gèdre, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont la SARL Groupe Victoria demande le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Gavarnie-Gèdre et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Groupe Victoria est rejetée.

Article 2 : La SARL Groupe Victoria versera à la commune de Gavarnie-Gèdre une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Groupe Victoria et à la commune de Gavarnie-Gèdre.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Nicolas Normand, premier conseiller,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 septembre 2022.

L'assesseur le plus ancien,

Nicolas NormandLa présidente-rapporteure,

Evelyne A... Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au préfet des Hautes-Pyrénées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX04890 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04890
Date de la décision : 27/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Evelyne BALZAMO
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-09-27;19bx04890 ?
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