Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... et Mme F... E... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler les arrêtés du 2 juin 2020 par lesquels le préfet des Hautes-Pyrénées les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2100541, 2100543 du 30 septembre 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 décembre 2021, M. C... et Mme E... épouse C..., représentés par Me Bedouret, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 30 septembre 2021 ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet des Hautes-Pyrénées du 2 juin 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les arrêtés en litige ne sont pas suffisamment motivés, ce qui révèle un défaut d'examen réel et sérieux de leur situation ;
- leur droit d'être entendu a été méconnu dès lors qu'ils n'ont jamais été informés de l'existence d'un tel droit et invités à formuler des observations ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'ils sont entrés sur le territoire français au mois de mars 2017 afin de fuir les violences dont M. C... était victime, que leurs deux enfants y sont nés, que leur fille aînée y est scolarisée et qu'ils justifient de liens personnels et familiaux anciens et stables ; M. C... a en outre bénéficié de plusieurs promesses d'embauche ; ils auraient ainsi pu bénéficier de titres de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 ou de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cet arrêté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mai 2022, le préfet des Hautes-Pyrénées conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens de M. C... et Mme E... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme D... B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., et Mme E..., son épouse, ressortissants arméniens nés respectivement le 16 février 1990 et le 6 novembre 1996, entrés sur le territoire français au mois de mars 2017, ont demandé la reconnaissance du statut de réfugié. Par des décisions du 3 juin 2019 de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 29 novembre 2019, leurs demandes ont été rejetées. Par deux arrêtés du 2 juin 2020, le préfet des Hautes-Pyrénées les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C... et Mme E... relèvent appel du jugement du 30 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation des arrêtés du 2 juin 2020.
2. En premier lieu, M. C... et Mme E... se bornent à reprendre en appel, sans critique sérieuse et sans apporter d'élément nouveau par rapport à leurs productions de première instance, les moyens tirés du défaut de motivation des arrêtés en litige et de la méconnaissance de leur droit d'être entendu par le préfet des Hautes-Pyrénées, moyens auxquels le tribunal a suffisamment et pertinemment répondu. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date des arrêtés attaqués : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
4. M. C... et Mme E... sont entrés sur le territoire français au mois de mars 2017. Il ressort des pièces du dossier que leurs deux filles sont nées sur le territoire national le 28 juillet 2017 et le 2 mai 2020, et que l'aînée était scolarisée, à la date de l'arrêté litigieux, en classe de petite section de maternelle. Si M. C... se prévaut d'une promesse d'embauche en tant qu'ouvrier paysagiste, ce document est postérieur à l'arrêté en litige, dont la légalité s'apprécie à la date à laquelle il a été édicté. Par ailleurs, si les époux versent au dossier de nombreuses attestations d'habitants d'Arras-en-Lavedan, et notamment du maire de cette commune, où ils se sont installés, témoignant de leur insertion dans la société française, ils ne peuvent être regardés, au regard notamment du caractère récent de leur séjour en France, comme y ayant fixé le centre de leurs intérêts personnels et familiaux, dès lors que les liens qu'ils ont tissés ne sont pas suffisamment anciens et stables. En outre, rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue dans leur pays d'origine, les deux époux faisant l'objet d'une mesure d'éloignement, et à ce que la scolarité de leur fille aînée se poursuive en Arménie. Dans ces conditions, M. C... et Mme E... ne remplissaient pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et les obligations de quitter le territoire français prises à leur encontre ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de leur vie privée et familiale au regard des objectifs poursuivis. Par suite, les moyens, tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet, doivent être écartés.
5. Enfin, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, M. C... ne saurait utilement soutenir que l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre méconnaît l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui fixe les conditions d'obtention d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", un tel moyen étant inopérant à l'égard d'une mesure d'éloignement, et alors au surplus que M. C... n'avait pas présenté de demande de titre de séjour sur ce fondement. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet au regard de ces dispositions doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que M. C... et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leurs demandes. Leur requête doit ainsi être rejetée, y compris leurs conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... et Mme E... épouse C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Mme F... E... épouse C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Pyrénées.
Délibéré après l'audience du 9 juin 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Fabienne Zuccarello, présidente,
Mme Brouard-Lucas, présidente-assesseure,
Mme Charlotte Isoard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022.
La rapporteure,
Charlotte B...La présidente,
Fabienne Zuccarello
La greffière,
Marion Azam Marche
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX04464 2