Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté du 26 avril 2021 par lequel le préfet de la Haute-Vienne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'un an à son encontre.
Par un jugement n° 2100786 du 24 juin 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 août 2021, M. A..., représenté par Me Variengien, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 24 juin 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 26 avril 2021 ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- cette décision méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il a tissé des liens stables et anciens en France et qu'il fait preuve d'efforts d'intégration particulièrement importants ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- cette décision méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que, membre de l'ethnie Peul, il serait exposé à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine, et qu'il souffre d'un stress post-traumatique ;
En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
- le préfet s'est cru à tort lié pour prendre cette décision ;
- cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 avril 2022, la préfète de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que les moyens de M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 juillet 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme C... B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant guinéen né le 8 avril 1999, entré sur le territoire français au mois de septembre 2018 selon ses allégations, a sollicité la qualité de réfugié, qui lui a été refusée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 28 mars 2019 puis par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 31 mars 2021. Par un arrêté du 26 avril 2021, le préfet de la Haute-Vienne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi, et a prononcé une interdiction de séjour sur le territoire français d'un an à son encontre. M. A... relève appel du jugement du 24 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 avril 2021.
Sur la décision portant obligation de quitter français :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits de libertés d'autrui ".
3. M. A... fait valoir qu'il est entré sur le territoire français au mois de septembre 2018, et verse au dossier des attestations faisant état de son fort engagement associatif, notamment pendant la crise sanitaire, et d'une bonne maitrise de la langue française. Toutefois, il est constant qu'il est célibataire et sans charge de famille en France. S'il verse au dossier, pour la première fois en appel, une " carte d'identité italienne ", ce document ne permet pas d'attester d'une quelconque intégration en France. Ainsi, au regard notamment de la durée de son séjour et de l'absence de liens suffisamment anciens et stables en France, il ne peut être regardé comme ayant fixé le centre de ses intérêts personnels et familiaux sur le territoire national. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... serait dépourvu de toute attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de dix-neuf ans, ou dans tout pays dans lequel il serait légalement admissible. Dans ces conditions, la mesure d'éloignement prise à son encontre ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts qu'elle poursuit. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
4. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
5. Si M. A... soutient qu'il fait partie de l'ethnie Peul, persécutée en Guinée et que ses parents et sa sœur ont été tués par le pouvoir en place en 2013 et 2015, il ne verse au dossier qu'un article de presse d'ordre général, qui ne permet pas de tenir pour établi qu'il encourrait des risques réels, personnels et actuels d'être exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine, alors que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 23 avril 2019 et par la Cour nationale du droit d'asile le 31 mars 2021. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de stress post-traumatique dont il souffre, ainsi qu'en atteste un certificat du 1er mars 2021, ne pourrait pas être pris en charge en Guinée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
6. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Vienne se serait estimé en situation de compétence liée pour prononcer une interdiction de retour sur le territoire français à l'encontre de M. A.... Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
7. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3, cette décision ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A.... Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande. Sa requête doit ainsi être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète de la Haute-Vienne.
Délibéré après l'audience du 9 juin 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Fabienne Zuccarello, présidente,
Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère,
Mme Charlotte Isoard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022.
La rapporteure,
Charlotte B...La présidente,
Fabienne Zuccarello
La greffière,
Marion Azam Marche
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX03562 2