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05/07/2022 | FRANCE | N°21BX02642

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 05 juillet 2022, 21BX02642


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A..., M. D... A... et la société La Savane ont demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d'annuler la délibération du 30 octobre 2014 par laquelle le conseil territorial de la collectivité de Saint-Barthélemy a délivré à la société Jusama Holding et à la société Sobadis un permis de construire une surface commerciale.

Par un jugement n° 1500001, 1500005 du 21 juillet 2016, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a notamment rejeté leur demande.

Par un prem

ier arrêt n° 16BX03434 du 27 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, en ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A..., M. D... A... et la société La Savane ont demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d'annuler la délibération du 30 octobre 2014 par laquelle le conseil territorial de la collectivité de Saint-Barthélemy a délivré à la société Jusama Holding et à la société Sobadis un permis de construire une surface commerciale.

Par un jugement n° 1500001, 1500005 du 21 juillet 2016, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a notamment rejeté leur demande.

Par un premier arrêt n° 16BX03434 du 27 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, sursis à statuer sur la légalité du permis de construire du 30 octobre 2014 pour permettre aux sociétés Jusama Holding et Sobadis de notifier à la cour un permis de construire modificatif régularisant les vices tirés de la largeur insuffisante de la voie d'accès au projet et du défaut d'exutoire des eaux pluviales.

Par un second arrêt n° 16BX03434 du 21 novembre 2019, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté la requête de MM. A... et de la société La Savane.

Par une décision n° 427890 du 24 décembre 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt avant-dire droit de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 27 décembre 2018.

Par une décision n° 437823 du 25 juin 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 21 novembre 2019 en raison de l'annulation de l'arrêt du 24 décembre 2020 et a renvoyé l'affaire devant la cour.

Procédure devant la cour :

Par un mémoire récapitulatif et un mémoire, enregistrés le 13 septembre 2021 et le 28 novembre 2021, M. E... A..., M. D... A... et la société La Savane, représentés par Me Pardines, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Saint Barthélémy du 21 juillet 2016 ;

2°) d'annuler la délibération du 30 octobre 2014 par laquelle le conseil territorial de la collectivité de Saint-Barthélemy a délivré à la société Jusama Holding et à la société Sobadis un permis de construire une surface commerciale ;

3°) d'annuler la délibération du 28 mars 2019 par laquelle le conseil territorial de la collectivité de Saint-Barthélemy a délivré à la société Jusama Holding et à la société Sobadis un permis de construire modificatif ;

4°) de mettre à la charge de la collectivité de Saint-Barthémély une somme de 6 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative

Ils soutiennent que :

- le permis initial a été délivré à la suite d'une procédure irrégulière en raison de la prise en compte de pièces adressées postérieurement aux avis techniques, sans que ces pièces aient été soumises aux services compétents pour un nouvel avis alors qu'elles avaient trait aux réserves émises par ces services ;

- la largeur de six mètres de la voie de desserte, déduction faite de la largeur des trottoirs, reste insuffisante de sorte que le vice tenant à l'erreur manifeste d'appréciation commise au regard de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme n'est pas purgé ;

- la réalisation d'un cheminement piétonnier accessible aux personnes handicapées est obligatoire au regard des dispositions figurant dans la notice d'accessibilité et des dispositions de l'article 1er du décret n° 2006-1657 du 21 décembre 2006, du décret n° 2006-1658 du 21 décembre 2006 et de l'arrêté du 15 janvier 2007 portant application du décret n° 2006-1658 du 21 décembre 2006;

- l'absence de trottoir constitue une méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- l'accès à la voie publique est insuffisant en méconnaissance des articles R. 111-2 et R. 111-5 du code de l'urbanisme et présente un risque pour la sécurité en raison de l'importance du trafic sur la D209 qui constitue un axe majeur de circulation et ce vice n'est pas régularisable ;

- le dispositif complémentaire d'évacuation des eaux pluviales prévu par le permis de construire modificatif n'est pas suffisant pour purger le vice tenant à l'erreur manifeste d'appréciation commise au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, dès lors qu'il n'est prévu aucun raccordement des exutoires à un réseau public ou privé et qu'il n'est pas démontré que la capacité d'absorption des sols serait proportionnée à la capacité d'eau reçue par le canal diffuseur ;

- en outre le projet de construction est situé sur une zone classée aléa fort crue torrentielle dans le cadre du projet de plan de prévention des risques naturels en cours d'élaboration, qui pouvait être pris en compte dans le cadre de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et qui impliquait un raccordement à un réseau existant.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 octobre 2021, les sociétés Sobadis et Jusama Holding, représentées par Me Kirscher, concluent au rejet de la requête et demandent qu'une somme de 10 000 euros soit mise à la charge solidaire des requérants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 octobre 2021, la collectivité de Saint-Barthélémy, représentée par Me Destarac, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire des requérants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés ne sont pas fondés;

- à titre subsidiaire ils peuvent faire l'objet d'une régularisation dans le cadre des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n°2006-1657 du 21 décembre 2006 ;

- le décret n°2006-1658 du 21 décembre 2006 ;

- l'arrêté du 15 janvier 2007 portant application du décret n°2006-1658 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... C...,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me Pradines, représentant M. E... A..., M. D... A... et la société La Savane, de Me Gonnet, représentant la collectivité de Saint-Barthélémy, et de Me Cazcarra, se substituant à Me Kirscher, représentant les sociétés Sobadis et Jusama Holding.

Une note en délibéré présentée pour M. E... A..., M. D... A... et la société La Savane, par Me Pradines, a été enregistrée le 22 juin 2022.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 30 octobre 2014, le conseil territorial de la collectivité de Saint-Barthélemy a délivré à la société Jusama Holding et la société Sobadis un permis de construire une surface commerciale présentant 995 m² de surface de vente. Par un jugement du 21 juillet 2016, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté la demande de MM. A... et de la société La Savane tendant à l'annulation de ce permis de construire. Saisie de l'appel formé par MM. A... et la société La Savane contre ce jugement, la cour administrative d'appel de Bordeaux a sursis à statuer sur la légalité de ce permis de construire par un arrêt avant-dire droit du 27 décembre 2018, pour permettre aux sociétés Jusama Holding et Sobadis d'obtenir un permis de construire modificatif régularisant deux vices tirés, d'une part, du caractère insuffisant de la voie d'accès au projet et, d'autre part, du défaut d'évacuation des eaux pluviales. La collectivité de Saint-Barthélemy a communiqué à la cour administrative d'appel de Bordeaux une délibération de son conseil territorial du 28 mars 2019 accordant un permis de construire modificatif aux sociétés Jusama Holding et Sobadis. Par un arrêt du 21 novembre 2019 mettant fin à l'instance, la cour a rejeté la requête de MM. A... et de la société La Savane. Par deux décisions n° 427890 du 24 décembre 2020 et n° 437823 du 25 juin 2021, le Conseil d'Etat a annulé ces deux arrêts et a renvoyé l'affaire devant la cour.

Sur la légalité externe :

2. Aucune disposition législative ou réglementaire n'empêche le pétitionnaire de produire des pièces en complément du dossier de demande, et la circonstance que la collectivité de Saint-Barthélemy ait pris en compte l'étude hydraulique produite par les pétitionnaires ne contredit pas l'avis du service technique du 26 juin 2014 visé dans la décision attaquée qui mentionne la nécessité de réaliser une étude relative à l'évacuation des eaux pluviales compte tenu du risque d'inondations. Par suite, le moyen tiré de ce que le permis aurait été délivré à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que le service instructeur a pris en compte une étude réalisée en juin 2014, alors que la demande de permis ne comportait pas cette étude, qu'aucune demande de pièce complémentaire n'avait été faite et que les services techniques se sont prononcés sur le projet sans que cette étude ne leur ait été communiquée, doit être écarté. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier que la délivrance du permis de construire modificatif a été précédée d'un avis des services techniques qui se prononce notamment sur les réseaux d'évacuation des eaux pluviales en prenant en compte l'étude hydraulique réalisée en juin 2014 et annexée au permis initial.

Sur la légalité interne :

3. D'une part aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, alors applicable à Saint-Barthélemy : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". Aux termes de l'article R. 111-5 de ce code : " Le projet peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à son importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. / Il peut également être refusé ou n'être accepté que sous réserve de prescriptions spéciales si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic ".

4. D'autre part, aux termes de l'article 1er de l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy applicable jusqu'au 30 mars 2019 : " Sans préjudice d'autres dispositions du présent code, les règles générales d'urbanisme applicables en matière d'utilisation du sol sur le territoire de la collectivité de Saint-Barthélemy sont fixées par l'article 2. Elles s'appliquent en l'absence de la carte d'urbanisme prévue à l'article 13, sous réserve de celles qui sont d'ordre public (...) ". Et aux termes de l'article 2 du même code : " Les règles générales d'urbanisme sont les suivantes :(...) 2° Sur l'ensemble du territoire de la collectivité, les règles nationales d'urbanisme prévues aux articles R.111-2, (...), R.111-5, (...) du Code National de l'Urbanisme, dont le texte est reproduit en annexe au présent code, sont applicables. Les dispositions des articles R.111-2, R.111-15 et R.111-21 demeurent applicables après adoption de la carte d'urbanisme opposable aux tiers ".

En ce qui concerne la voie de desserte :

5. Il résulte des dispositions des articles 1er et 2-2° du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy que les dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme, relatif aux conditions de desserte et d'accès des constructions et aménagements, ne s'appliquent plus sur le territoire de Saint-Barthélemy depuis le 18 mars 2017, date d'entrée en vigueur de la délibération n° 2017-011 CT portant approbation de la carte d'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-5 du code national de l'urbanisme ne peut être utilement invoqué pour critiquer l'insuffisance de la largeur et des aménagements de la voie de desserte du projet au regard de la fréquentation attendue telle qu'issue du permis modificatif.

6. D'une part, il ressort des pièces du dossier qu'antérieurement à la délivrance du permis de construire modificatif, la collectivité de Saint-Barthélemy a, par délibération du 19 décembre 2016, accordé aux sociétés Jusama Holding et Sobadis une nouvelle servitude de passage d'une largeur non plus de quatre mètres mais de six mètres sur une parcelle cadastrée section AK n° 558 lui appartenant, de sorte que la voie d'accès au projet, à partir de la route départementale, sera d'une largeur de six mètres sur une longueur de 29 mètres, puis de dix mètres sur une longueur de 129 mètres. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, cette largeur est suffisante au regard du trafic automobile généré par le projet, estimé à 1 500 véhicules par jour et à 2 700 véhicules certains jours d'affluence. D'autre part, il ressort des pièces du dossier qu'en raison de l'implantation du projet de supermarché en litige au sein d'une zone commerciale et industrielle, à plus de 500 mètres des premières zones résidentielles, la fréquentation par les piétons sera très limitée, d'autant que les usagers de l'aéroport disposent de commerces à proximité immédiate de celui-ci. En outre, un cheminement piéton sécurisé est possible sur les 29 premiers mètres, le long du parking géré par la collectivité de Saint-Barthélemy puisqu'un trottoir sera aménagé jusqu'à l'accès au terrain d'assiette. Ainsi les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'en raison de l'absence de trottoirs aménagés sur l'emprise de la voie de desserte, les conditions d'accès au projet seraient de nature à faire peser un risque grave sur la sécurité des piétons usagers du supermarché. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit être écarté.

En ce qui concerne les conditions d'accès à la voie publique :

7. Les conditions d'accès et de raccordement de la voie de desserte à la voie publique n'étant pas affectées par le permis modificatif, il y a lieu d'apprécier leur conformité au regard des dispositions de l'article R 111-2 et de celles de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme applicables au permis initial. Il ressort des pièces du dossier que le projet ne constitue pas la création d'une nouvelle surface commerciale mais le déplacement dans le même secteur d'un commerce existant d'une taille comparable. Ainsi, l'augmentation de trafic n'est pas établie par les pièces du dossier, l'incidence future des modalités de réutilisation des locaux laissés vacants ne pouvant être prise en compte à la date de délivrance du permis litigieux. En outre, s'il n'est pas contesté que la D 209 qui relie Gustavia à Saint-Jean et Lorient et qui dessert l'aéroport de l'île est très fréquentée, il ressort des pièces du dossier que l'accès de la voie de desserte sur cette voie publique bénéficie d'une très bonne visibilité dans les deux sens de circulation et que dans ce secteur la vitesse est limitée à 30 km/h. Aussi, la seule circonstance que le trafic soit très dense dans ce secteur n'est pas de nature à créer un risque au sens de ces dispositions. A cet égard, l'étude relative au plan de mobilité réalisée en 2017, qui évoque la nécessité de fluidifier et de sécuriser les conditions de circulation dans le secteur de la plaine Saint-Jean par la création de plusieurs ronds-points dont un desservant le site du projet, ne permet pas d'établir la dangerosité de l'accès existant dès lors que cette étude repose sur un projet d'aménagement global qui prend également en compte le report d'une partie de la circulation et du stationnement de Gustavia vers la plaine Saint-Jean ainsi que le développement urbain de ce secteur. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-5 du code de l'urbanisme, en raison du risque pour la sécurité que constituerait le débouché de cet accès sur la voie publique, doit être écarté.

En ce qui concerne l'évacuation des eaux pluviales :

8. Il ressort des pièces du dossier qu'en plus de la réalisation d'un canal pour partie à ciel ouvert en tête de talus du bâtiment projeté venant en supplément des citernes de rétention d'une capacité de plus de 500 m3, déjà prévu au projet initial selon une étude hydraulique réalisée en juin 2014, le projet autorisé par le permis de construire modificatif du 28 mars 2019 prévoit, outre le dédoublement du canal situé en amont, la réalisation d'un nouveau canal, implanté en contrebas du projet de manière perpendiculaire par rapport au canal d'interception des eaux pluviales en provenance du bassin versant, ce nouveau canal étant d'une profondeur d'un mètre cinquante et d'une largeur d'un mètre soixante sur une longueur de 74 mètres, le long de la parcelle cadastrée section AK n° 925, anciennement cadastrée section AK n° 852, et comportant un dispositif interne spécifique destiné à ralentir l'écoulement des eaux ainsi qu'un fond en gravier permettant leur infiltration. Ces aménagements, qui incluent également le déplacement de l'exutoire initialement prévu et la création d'un second exutoire des eaux pluviales, conformément à l'étude hydraulique complémentaire réalisée le 27 février 2019 et annexée au permis de construire modificatif, permettent d'intercepter les eaux pluviales sans rejet significatif sur la voie publique située en contrebas en cas de phénomènes pluvieux d'intensité normale et de rendre la concentration des écoulements non-significative à l'aval du projet en cas d'évènement climatique d'occurrence centennale. Si les appelants contestent la validité des données de pluviométrie prises en compte, la seule production des fiches de deux évènements pluviométriques intenses n'est pas de nature à établir que les données prises en compte par le projet ne seraient pas appropriées. De même, les éléments produits par les appelants, notamment l'étude de perméabilité des sols de parcelles leur appartenant, ne permettent pas de contester sérieusement la pertinence de ces aménagements. Enfin, la production de cartes d'aléas du plan de prévention des risques naturels en cours d'élaboration établies en 2008 et 2013 sur lesquelles le coin sud-ouest du terrain d'assiette du projet figure en zone d'aléa fort pour les crues torrentielles n'est pas de nature à établir que les aménagements prévus ne seraient pas suffisants. Dans ces conditions, et alors même que ces aménagements d'évacuation des eaux pluviales ne sont pas raccordés à un réseau privé ou public, au demeurant inexistant sur cette partie du territoire à proximité des parcelles d'assiette du projet, l'autorité administrative n'a pas, en délivrant le permis de construire modificatif en cause, entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des risques d'atteinte à la sécurité publique au sens de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

En ce qui concerne les aménagements pour les personnes handicapées :

9. En premier lieu, aucune disposition du code de l'urbanisme ne rend applicable à la délivrance d'un permis de construire les dispositions de l'article 1er du décret du 21 décembre 2006 relatif à l'accessibilité de la voirie et des espaces publics. Par suite les requérants ne peuvent utilement soutenir que la voie de desserte du projet en litige ne respecterait pas les obligations concernant l'accessibilité pour les personnes handicapées prévue tant par ce décret, que par le décret du 21 décembre 2006 relatif aux prescriptions techniques pour l'accessibilité de la voirie et des espaces publics et par l'arrêté du 15 janvier 2007 portant application de ce dernier décret. Au demeurant, les obligations prévues par ces dispositions n'ont vocation à s'appliquer aux espaces publics et à l'ensemble de la voirie ouverte à la circulation publique qu'en agglomération et hors agglomération uniquement pour les zones de stationnement, les emplacements d'arrêt des véhicules de transport en commun et les postes d'appel d'urgence. Or il ne ressort pas des pièces du dossier que les parcelles en litige, qui sont éloignées de la partie densément peuplée de Saint-Jean dont elles sont séparées par le cimetière, l'aéroport et une zone commerciale, puissent être regardées comme situées en agglomération au sens de ces dispositions.

10. En second lieu, aux termes de l'article R. 111-19-1 du code de la construction et de l'habitation rendu applicable à la délivrance d'un permis de construire par l'article L. 425-3 du code de l'urbanisme : " Les établissements recevant du public (...) doivent être accessibles aux personnes handicapées, quel que soit leur handicap. L'obligation d'accessibilité porte sur les parties extérieures et intérieures des établissements et installations et concerne les circulations, une partie des places de stationnement automobile, les ascenseurs, les locaux et leurs équipements ". L'article 2.1 de l'arrêté du 20 avril 2017 relatif à l'accessibilité aux personnes handicapées des établissements recevant du public pris pour l'application de ces dispositions prévoit que : " I. - Un cheminement accessible permet d'accéder à l'entrée principale, ou à une des entrées principales, des bâtiments depuis l'accès au terrain. Le choix et l'aménagement de ce cheminement sont tels qu'ils facilitent la continuité de la chaîne du déplacement avec l'extérieur du terrain (...).

11. Il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que, conformément à la notice d'accessibilité, le projet en litige comporte des cheminements accessibles aux personnes handicapées depuis l'accès au terrain d'assiette du projet. Ainsi, alors que ces dispositions concernent le seul terrain d'assiette du projet, le moyen tiré de ce que le projet méconnaitrait les dispositions de l'article 2.1 de l'arrêté du 20 avril 2017 en raison de l'absence de trottoirs accessibles sur les 29 premiers mètres de la voie de desserte aménagée sur les parcelles appartenant à la collectivité de Saint-Barthélemy doit être écarté.

12. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir, que MM. A... et la société La Savane ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a rejeté leur demande.

Sur les frais de l'instance :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la collectivité de Saint-Barthélemy, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par les requérants au titre des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés. En revanche il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire des requérants une somme de 1 500 euros à verser d'une part à la collectivité de Saint-Barthélemy, d'autre part aux sociétés Jusama Holding et Sobadis.

DECIDE :

Article 1er : La requête de MM. A... et de la société La Savane est rejetée.

Article 2 : MM. A... et la société La Savane verseront solidairement des sommes de 1 500 euros d'une part à la collectivité de Saint-Barthélemy et d'autre part aux sociétés Jusama Holding et Sobadis en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A..., à M. D... A..., à la société La Savane, à la collectivité de Saint-Barthélemy, à la SAS Sobadis et à la SAS Jusama Holding.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Fabienne Zucarello, présidente,

Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 juillet 2022.

La rapporteure,

Christelle C...La présidente,

Fabienne Zuccarello

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au représentant de l'Etat à Saint-Barthélémy en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX02642 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02642
Date de la décision : 05/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme ZUCCARELLO
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : SELARL CLOIX et MENDES-GIL

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-07-05;21bx02642 ?
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